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Le gouvernement royal sous Charlemagne et Louis le Pieux dans le De Ordine Palatii d'Hincmar de Reims

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Les officiers du palais sont choisis pour représenter toutes les régions des territoires francs. L'entourage direct, d'où partent les ordres, de Charles consiste en un petit nombre de fidèles et familiers. Seul Alcuin s'efforcera à un rôle de Premier Ministre. Les penseurs politiques d'après le retour à l'Empire définissent le "ministerium regis" -la "fonction du roi"; le roi franc n'est plus un simple chef de guerre mais sa fonction va au-delà la guerre et la protection. Le De Ordine Palatii est un opuscule politique par lequel Hincmar, archevêque de Reims, propose une structure pour le gouvernement de la Francie occidentale vers 882. Hincmar est le concepteur du traité de Verdun, en 843, qui partagea l'Empire puis il devint le favori de Charles le Chauve, souverain pour la Francie occidentale dont il est le quasi-Premier Ministre jusqu'en 877. On considère Hincmar, sur le plan religieux, comme une sorte de fondateur du gallicanisme. La date du traité correspond à une époque où il revient aux affaires au milieu de troubles divers, le roi étant alors Carloman II, qui ne va régner que deux ans alors que les Normands assaillent le royaume et que les Grands se sont éloignés de la monarchie. Pour ce programme politique, Hincmar s'appuie sur la légitimité qu'il tire du fait qu'il a connu, via l'époque de Louis le Pieux, vers 822, l'expérience du gouvernement de Charlemagne. Le De Ordine Palatii est donc, d'abord, un bon exposé des règles du gouvernement telles qu'elles existaient sous l'empereur et sous Louis le Pieux et il est, d'autre part, un programme de restauration politique pour la Francie occidentale de 880. Ce programme, malheureusement, ne sera qu'à peine appliqué et sera insuffisant face aux désordres des temps. Hincmar meurt en 882. Il avoue lui-même qu'il a basé son ouvrage sur un traité d'Adalhard, abbé de Corbie et parent de Charlemagne mais l'essentiel de l'oeuvre est cependant d'Hincmar. Ce dernier ne fait pas une oeuvre de grande envergure et semble surtout représenter une tendance qu'on appellerait "gallicane" du clergé de Francie occidentale. Le De Ordine Palatii est cependant utile par les références qu'il donne sur le fonctionnement du gouvernement central et local au temps de Charlemagne et Louis le Pieux. En quoi se résume ce traité tant dans ses concepts que la description d'un bon gouvernement (avec l'ajout de sources modernes sur ce dernier point)? Le but de Hincmar est de montrer, par sa vue ordonnée, que la cour de Charlemagne se situait dans la tradition de celle de Constantin. Il n'empêche que la cour, sur la base d'un recoupement de sources, est cependant bien organisée, répartie entre les bâtiments du palais d'Aix, la chapelle et les clercs jouant un rôle fondamental. Charlemagne, d'une façon générale, écoute mais décide et il a soin que ces conseillers soient, finalement, ses obligés car de la petite aristocratie. Avec sa famille, ses serviteurs, ses hôtes et ses gardes, ces grands fonctionnaires constituent la cour, soit 200 personnes. La place prépondérante de l'oral ne nécessite pas, par ailleurs, une administration trop développée

Les points du vue d'Hincmar sur la conception générale du souverain sont assez sommaires, ce qui est sans doute à relier aux options gallicanes d'Hincmar et à des relations encore peu normalisées avec la papauté et donc des vues plus générales sur les princes: le roi doit servir Dieu et il rendra compte à Dieu du gouvernement qu'il a exercé; deux pouvoirs principaux sont institués sur Terre: les papes et évêques qui sont des "episcopos", des "surveillants"; les rois qui sont des "directeurs". Le roi doit maintenir et défendre la religion chrétienne et ceux qui la représentent, en particulier respecter les élections épiscopales. Le roi, en-dessous de lui, établit des comtes puis encore en-dessous des juges. Tous, le roi y compris, doivent avoir la vertu et la fermeté nécessaires au commandement de façon à être aimés et craints. On rappelera aussi qu'Hincmar n'était pas un véritable partisan de l'Empire chrétien et que, concepteur du traité de Verdun, il donnait sa préférence à une "République de la Chrétienté", composée d'états amis et fraternels

Sur un plan pratique, un bon gouvernement du royaume suppose d'une part un Palais du roi (palais est entendu au sens de demeure royale) en ordre, d'autre part une administration du royaume en ordre. Le lieu du pouvoir est itinérant même si la résidence royale des Lombards, à Pavie, a été maintenue et si Charles fera construire le palais d'Aix-la-Chapelle, véritable capitale. Le Palais du roi consistent en les "officiers palatins" qui remplissent des fonctions essentiellement domestiques, cléricales et judiciaires auprès du souverain. Au-dessus se trouvent le roi, la reine et leur famille. Puis viennent les officiers, lesquels ne participent pas à l'administration du royaume, ce qui vaut y compris pour les grands fonctionnaires; pour ce qui est du choix des grands officiers ou "officiers palatins", on choisissait pour la vertu et des diverses régions de l'Empire. Chaque officier est indépendant et ne dépend que du roi (ou de la reine ou de la famille royale). Les deux officiers de premier ordre qui suivent, l'apocrisiaire et le chancelier, la plupart du temps ceux par lesquels les autres officiers doivent passer pour présenter au roi pour tout ce qui semble dépasser leurs comptétence : l'apocrisiaire (ou archichapelain ou gardien du palais) est chargé des affaires ecclésiastiques régulières et séculières et chef de tout le clergé du Palais; il est surtout un prêtre à l'origine. Ce service sert aussi de référence spirituelle, éthique au Palais depuis Pépin le Bref et Charlemagne. Il représente le pape auprès de l'empereur et dirige l'Ecole palatine. Le fait que Hincmar lui ait donnée le nom d'"apocrisiaire", le titre du légat du pape auprès de l'empereur d'Orient, est significatif. Le chancelier, quoique sous les ordres de l'apocrisiaire, est indépendant et, du fait d'une activité législative accrue, il acquiert de l'importance. Il a en charge tout ce qui législatif, il garde le sceau et les archives du roi. Il est aidé de notaries et de scribes, qui sont des clercs. Le comte du Palais a en charge tous les cas judiciaires en dernier recours ou pour lesquels on appelle; il juge en équité et concilie droit laïc et justice de Dieu. Ses pouvoirs se sont accrus du fait de la disparition du Maire du Palais. Sa juridiction propre juge tous les procès séculiers, sauf ceux impliquant les Grands. Il est le chef des comtes et est ainsi le chef de l'administration du royaume. Viennent ensuite d'autres officiers. Ils sont moins importants avec distinction entre officiers du palais (chancelier, huissiers, bouteiller) et officiers de la maison impériale (le connétable, chef de la cavalerie, le sénéchal). Tous sont des laïques. Ces officiers de moindre rang doivent toujours en nombre suffisant se trouver au Palais pour fournir un conseil suffisant au roi, pour recevoir les ambassades, pour protéger les faibles. Ces officiers sont remplacés quand ils meurent. En font partie le chancelier qui, avec ses officiers, est chargé de la chancellerie c'est-à-dire de la rédaction des actes royaux. Puis le chambrier (voir ci-dessous), le sénéchal, le bouteiller, le connétable. Les deux premiers, qui se sont partagés les fonctions des anciens maires du palais, s'occupent de l'avitaillement (nourriture, boison) de la cour dans ses différentes résidences, le sénéchal surtout, alors que le connétable avait en charge les écuries et les déplacements des officiels -dont les missi. Le maître des logis gèrent les domaines de résidence sur le plan du logis. Quatre veneurs et un fauconnier gèrent les activités de la chasse entre celle pratiquée à la demeure royale principale et celle à venir dans les autres résidences. Viennent enfin des officiers de moindre rang, qui sont sous les ordres des précédents: l’huissier, le trésorier, le dépensier, le gardien de la vaisselle avec des subalternes (des "juniores" ou "decani") ainsi que les officiers des chiens, les chasseurs de castors et d’autres encore (chambellans, échansons, portiers, cuisiniers, etc.) L'économie interne du Palais (sauf la boisson, nourriture et chevaux) et surtout la pompe royale et les dons annuels des vassaux sont du ressort de la reine et, sous ses ordres, du chambrier. Le chambrier est également responsable des dons des ambassades (sauf quand le roi lui ordonnait d'en conférer avec la reine). Reine et chambrier doivent alléger l'esprit du roi de tout ce qui est purement organisation matérielle. Le Chambrier ayant, étymologiquement, en charge la chambre du roi, c'est pourquoi il avait en charge le Trésor public puisque ce dernier s'y trouvait. Le Trésor royal sert essentiellement à récompenser. Du fait du peu de finances publiques, on a obligé les participants à l'assemblée à faire un don au souverain, fixé coutumièrement mais l'essentiel des revenus, malgré les tonlieux, amendes, droit de sceau, consiste en les produits des villas royales (le roi possède en propre aux alentours de 60 domaines); cette faiblesse du Trésor public est compensée par celle des dépenses qui, pour la plupart, sont couvertes par les corvées et redevances. Le fonctionnement du plus proche du roi supposait aussi tout un ensemble de personnes. Cet ensemble était divisé en trois classes: ceux de la première classe étaient les "serviteurs royaux", logés et nourris, de façon informelle, par les grands officiers; ceux de la deuxième classe était les "jeunes gens" appartenant aux différents services du Palais et rattaché à un haut fonctionnaire qui leur servait de maître; ceux de la troisième classe étaient les "serviteurs", grands et petits, personnages assez importants, cependant, pour avoir eux-mêmes des personnes qu'ils entretenaient. On devait aussi prendre en compte les personnes qui venaient au Palais puis en partaient

Tout ce qui appartient à l'"administration du royaume", c'est-à-dire à la décision politique, relève de ce qu'Hincmar appelle deux assemblées annuelles. La première (celle que les historiens contemporains appellent communément l'Assemblée générale) servait à régler l'ordre du royaume pour l'année à venir et réunissait les Grands, clercs et laïques. Les plus considérables de ceux-ci délibéraient et prenaient les décisions; les autres y adhéraient voire, quelquefois en délibéraient aussi. Les uns et les autres voyaient aussi servir l'assemblée annuelle à remettre le don annuel. L'assemblée se voit communiquer pour en conférer et les examiner les "chapitres" des principales dispositions législatives ou administratives que le roi lui-même avait décidé. Ils peuvent demander des précisions. Le roi soit reste avec la foule des personnes présentes ou siège avec ceux qui délibèrent. L'assemblée a lieu en plein air ou, si le temps l'exige à l'intérieur, dans plusieurs salles (certaines réservées aux clercs, d'autres aux laïcs; lesquels cependant pouvaient se rassembler fonction de la nature des causes traitées). Ceux qui délibéraient pouvaient faire venir des conseillers. L'Assemblée générale permettait aussi au roi de s'informer des évènements dans les provinces. On pouvait alors prendre en considération ceux-ci pour en délibérer. Les décisions de l'Assemblée ne liaient pas le roi mais celui-ci les respectaient néanmoins habituellement car ces décisions étaient contre-balancées par l'engagement des Grands de les respecter eux-mˆmes. Le consentement de l'Assemblée à des capitulaires plus spécifiquement juridiques n'était pas vu comme un vote mais simplement comme la reconnaissance du fait que le capitulaire était conforme au droit. Le caractère conflictuel des décisions de l'Assemblée se développera au fur et à mesure de l'affaiblissement du pouvoir carolingien, dès; 830, et on passera même de décisions négociées à des décisions imposées au souverain. Les débats ne concernant que l'intérêt général n'attirent plus les Grands mais seulement les évêques. Une autre assemblée -qu'Hincmar qualifie de telle mais que les historiens appelleraient plutôt le "conseil"- ne réunissait que les "grands et principaux conseillers" ou "premiers conseillers" et traitait les affaires de l'an suivant qui nécessitaient une décision anticipée ou tout évènement inattendu. Ce Conseil traite des affaires générales qui intéressent l'Etat et le salut du roi et du royaume. Les décisions en sont tenues secrètes, par sécurité, et étaient ignorées des autres jusqu'à l'assemblée annuelle suivante, laquelle pouvait alors revenir sur certains sujets. Les conseillers, clercs et laïques, de cette assemblée restreinte étaient choisis pour leur éthique et leur fidélité au roi. Le Conseil traitait aussi des cas que le roi décidait d'enlever à la compétence ordinaire du comte du Palais ou autres officiers ainsi que des questions relatives aux personnes attachées au Palais. Le chambrier et l'apocrisiaire faisaient partie de cette assemblée restreinte. D'autres officiers du Palais pouvaient être appelés. Les délibérations se faisaient comme pour l'Assemblée générale sur la base de chapitres décidés par le roi et l'on pouvait demander des précisions

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