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Le Hodéporicon de St Willibald

Prologue au Hodéporicon de St Willibald

(on a là un texte séparé de Hunebergue, par lequel elle se justifie d'avoir écrit ce récit)

A tous ceux, clercs très révérends et très aimés en Christ que l'on connaît sous le titre honorable de prêtres, et diacres d'excellente nature, et abbés ainsi que tous les princes de l'ordre séculier. Notre pieux évêque [Willibald], par vertu de son soin pastoral vous a nommés, certains comme prêtres dans le saint ordre, d'autres comme diacres choisis pour leur sobriété et leur chasteté, d'autres comme moines de l'armée cénobitique, d'autres encore -choisis pour leur étude douée des textes- dans la foul des érudits aux fins d'étudier, enseigner et ainsi inculquer un meilleur niveau de gouvernement dans le royaume. Partout dans son diocèse, l'évêque avait l'habitude de vous nourrir avec diligence, non seulement comme des beaux-fils mais comme ses propres enfants. Pour tous ceux qui vivent dans cette région sous le guide de la loi sacrée, bien que je sois une femme saxonne indigne et rien d'autre qu'une novice -non seulement en années mais encore en expérience- faisant partie des gens de ce peuple venus en cet endroit, qu'une faible femme en comparaison à mes compatriotes hommes, je n'en ai pas moins décidé de parler brièvement des débuts de la vie de ce vénérable homme, Willibald, pour le bien de vous, hommes religieux et orthodoxes et vous, prêcheurs des livres célestes, et j'ai ramassé le récit en quelques mots de sortent qu'il puisse être facilement mémorisé. Je ne suis qu'une femme, tachée de la fragilité et de la faiblesse de mon sexe et soutenue ni par une aspiration à la sagesse ni par une aspiration exaltée à du pouvoir important, je n'ai été mue que par ma propre impétuosité, en toute liberté de ma volonté, tel un enfant ignorant qui, selon son coeur, cueille quelques petites choses d'arbres riches en feuillage et en fruit. Cependant, je serais heureuse de cueillir, rassembler et présenter, quoique petit fût mon art, quelques éléments cueillis sur les branches les plus basses que vous pourrez conserver en mémoire. Mais, pour l'instant, je vais reprendre mon récit et dire de nouveau que je n'ose pas entreprendre une telle tâche soit sur la base de ma présomption ni sur une poussé d'insolence soudaine

Inspirée d'abord par la grâce de Dieu, puis par la largesse de l'expérience de ce vénérable homme Willibald, puis par votre excellente autorité et pas moins non plus par votre aide acceptée et votre fort soutien, je me suis crue capable de décrire les lieux où ont eu lieu ces merveilles célestes, ces miracles et signes de vertu que le Seigneur -quand Il s'humilia lui-même pour sauver l'humanité et est descendu pour prendre forme humaine- a daigné exécuter et accomplir dans ce monde, alors qu'il était renforcé par la puissance divine. Ce sont ces choses que nous allons entreprendre de raconter, celles que le révérend homme Willibald a vu de ses propres yeux et sur lesquelles il a posé ses propres pieds. Et non seulement il a vu ces merveilles qui nous ont été montrées vraies par la grâce des quatre Evangiles mais aussi ces lieux mêmes où Notre Seigneur est né, où Il a souffert et où, s'étant relevé des morts, Il nous est apparu. Et Willibald a également vu les traces d'autres prodiges que le Seigneur a daigné accomplir et les vertus qu'il a daigné divulguer dans ces terres. Fortifié par la foi, heureux dans sa destinée, un voyageur courageux, ce maître parfait [Willibald] nous a transmis tout ce qu'il a vu et appris alors qu'il visitait ces lieux

Maintenant -si je puis dire- il me semble sans aucun doute honteux si une voix humaine serait tenue, dans une ténacité muette et lèvres fermées, de rester silencieuse au sujet de ces choses que Notre Seigneur a estimé dignes d'être révélées, de sorte de les faire connaître de notre temps, à son serviteur Willibald par le biais du mouvement de son corps et la vision de ses yeux. Nous connaissons ces choses parce que elles sont liées à nous, non par le biais de récits méandreux d'histoires apocryphes mais parce que, ayant rencontre Willibald même, nous avons résolu de les entendre telles que dictées à nous par sa propre bouche et ainsi les écrire, deux diacres étant les témoins et les ayant entendues avec nous, le mardi, 23 juin [778], le jour précédent le solstice d'été. Etant peu instruite, je n'entreprends pas d'examiner ces matières sous une forme littéraire car je sous-estimerais les talents de votre sagesse ou je ne saurais pas que le Seigneur a daigné établir beaucoup de vous au-dessus de moi comme évêques, et qu'ils sont remarquables non seulement parce qu'ils sont du sexe mâle mais aussi qu'ils possèdent la dignité de prêtre, qui leur a été conférée divinement, et qui seraient capable de présenter et expliquer ces matières beaucoup mieux que moi du fait de leur connaissance de la loi divine, sans compter leur intelligence à faire des recherches. Mais que je ne sois qu'une femme indigne, je sais que je suis née de la même racine généalogique que ces hommes [dont il va être question], bien que provenant des surgeons les plus bas de ses branches et, aussi, je me suis sentie en état de placer dans les mains des lecteurs quelque chose digne de souvenir, concernant ces grands et vénérables hommes et concernant les façons dont leurs vies ont été bénies, non seulement dans les faits qu'ils ont accomplis mais aussi dans les divers voyages qu'ils ont entrepris et les grands miracles qu'ils ont réalisés

Le premier de ces hommes était un évêque élevé au plus haut degré du rang de la prêtrise et de la tâche pastorale, un amoureux renommé de la Croix et maître de nombreux hommes, Willibald. Et l'autre était un homme qui a suivi honnêtement le chemin de la vertu, rendant droits les chemins tortueux, les lieux inégaux et sauvages une plaine et les régions sauvages des lieux domestiqués. Par un effort constant, il s'est éloigné de tous les vices -si nombreusement semés- du monde et des péchés sans vergogne des idolâtres; il a agi non avec la langueur immobile d'un esprit peu fixé mais avec joie et avec courage, avec une audace nette, fortifié d'en haut par une sagesse zélée. Considéré comme un prélat du fait de ses honneurs de prêtre et de ses charges pastorales, cet homme était un abbé, un amoureux renommé de la Croix, Winnibald [en anglais: Wynnebald]

Tout cet écrit, qui n'est rien d'autre que des traces noires tracées par une plume dans un chemin coupé de rides sur les plaines blanches de ces champs [du parchemin], est présenté à votre soin érudit et aimant. Nous le recommandons à la protection de la grâce de Dieu et à votre bouclier, qui le protègera des calomnies des envieux. Nous le recommandons également à votre acceptation avec plaisir, de sorte qu'en tout nous puissions, avec joie, louer notre libéral Seigneur, le fournisseur de toute chose

Le Hodéporicon de St Willibald

Préface

Aux vénérables prêtres, diacres, abbés et frères aimés en Christ, que notre saint évêque, bon chef et bon père gardien a nommé dans tout son diocèse pour être des prêtres, de chastes lévites, moines et novices, à tous ceux qui vivent sous l'observance religieuse, moi, nonne indigne, d'origine saxonne, dernière et la moindre en vie et en façons d'être, je m'aventure à écrire, au nom de la postérité et je vous présente, qui êtes religieux et prêcheurs de l'Evangile, un bref compte-rendu des débuts de la vie du vénérable Willibald. Bien que je manque de l'expérience et de la connaissance nécessaires puisque je ne suis qu'une femme faible, je voudrais cependant, autant que je peux me le permettre, rassembler une sorte de bouquet de ses vertus et vous donner quelque chose par quoi vous puissiez vous les remémorer. Et je répète ici que je ne suis pas mue par la présomption pour m'atteler à une tâche pour laquelle je suis si mal faite. Mais c'est votre autorité et votre gentillesse, ainsi que la grâce de Dieu qui m'ont décidée à décrire les scènes où les merveilles du Verbe Incarné ont été accomplies, car Willibald a visité et a vue ces endroits de ses propres yeux et il marché de ses propres pieds dans les pas de Celui qui est né dans ce monde, a souffert et s'est relevé des morts pour notre salut. Willibald nous a donné une description fidèle de tous ces lieux. Pour cette raison, il ne nous semblerait donc pas juste de laisser ces choses tomber dans l'oubli, ni de garder le silence au sujet de ce que Dieu a montré à son serviteur en ces jours. Nous les avons entendues de ses propres lèvres en présence de deux diacres, qui garantiront leur véracité; cela eut lieu le 20 juin, le jour avant le solstice d'été. Je sais qu'il peut sembler très courageux de ma part d'écrire ce livre alors qu'il existe tant de saints prêtres capables de faire mieux mais, en tant qu'humble parente [de Willibald et Winnibald], je voulais conserver quelque chose de leurs actions et de leurs voyages pour les âges futurs. Aussi, dans l'espoir, que vous m'excuserez et m'accorderez avec bienveillance votre indulgence, me reposant aussi sur la grâce de Dieu, je vous présente ce récit, tracé en lettres d'encre et dédicacé à la gloire de Dieu, le Dispensateur de tout bien

D'abord, je vais relater les débuts de la vie du vénérable grand prêtre de Dieu, Willibald: comment il se soumit à la discipline de la vie monastique, comment il suivit les exemples des saints et comment il imita et observa leur façon d'être. Puis je parlerai des débuts de sa vie d'adulte, de l'époque de sa maturité et de son grand âge jusques et y compris lorsqu'il devint décrépi et je combinerai et ordonnerai le peu de fait qui existent et je les tisserai dans un récit continu. Lorsqu'il était petit enfant dans le berceau, une adorable petite créature, il fut vraiment chéri par ceux qui en prirent soin, spécialement ses parents, qui déversèrent leur affection sur lui et l'élevèrent avec une grande sollicitude jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de trois ans. A cet âge, alors que ses membres étaient encore faibles et délicats, il fut subitement victime d'une attaque d'une maladie grave: la contraction de ses membres lui rendit impossible de respirer et menaça de le tuer. Lorsque son père et sa mère virent qu'il était aux portes de la mort, ils furent emplis de peur et de chagrin et leur angoisse crut alors qu'ils le voyaient, frappé par la maladie, errer entre la vie et la mort. Il semblait que l'enfant dont ils espéraient qu'il leur survivrait et serait leur héritier, serait bientôt, en-dehors du temps prévu, emporté jusqu'à sa tombe. Mais le Dieu Tout-Puissant, Créateur du ciel et de la terre, n'envisageait pas que Son serviteur soit délivré de la prison de son corps et meure inconnu du reste du monde; en effet, il était destiné à prêcher l'Evangile jusqu'aux extrêmités de la Terre et à apporter la foi du Christ à une multitude de néophytes. Mais revenons à la petite enfance du saint homme. Lorsque ses parents, dans une grande anxiété, restaient incertain du sort de leur enfant, ils le prirent et l'offrirent devant la sainte Croix de Notre Seigneur et Sauveur. Et cela, ils ne le firent pas dans l'église mais au pied de la Croix, car sur les domaines des nobles et des hommes de bonne race de la race saxonne, c'est une coutume de posséder une croix, qui est consacrée au Seigneur et est tenue en grande révérence; elle est élevée sur quelque endroit prééminent de façon qu'elle puisse être utilisée par ceux qui veulent prier chaque jour devant elle. Aussi, déposèrent-ils l'enfant devant la croix. Et ils commencèrent honnêtement d'implorer Dieu, le Créateur de toute chose, afin qu'il leur apporte consolation et qu'il sauve la vie de leur fils. Et, dans leurs prières, ils firent la prière solennelle, qu'en échange de la santé de l'enfant, il le feraient tonsurer immédiatement, première étape aux ordres sacrés et qu'ils le consacreraient au service du Christ, dans la discipline de la vie monastique.

Pas plus tôt eurent-ils fait ces voeux qu'ils mirent en acte leurs paroles. Ils enrôlèrent l'enfant au service du Roi des cieux; Celui-ci leur accorda leur demande et la santé de l'enfant fut restaurée

Lorsque cet enfant remarquable eut atteint l'âge de cinq ans, il commença de montrer les premiers signes qu'il était doué sur le plan spirituel. Ses parents se hâtèrent de remplir les promesses qu'ils avaient faites et aussitôt qu'ils eurent pris conseil de leurs nobles amis et parents ils ne perdirent pas de temps pour l'instruire des obligations sacrées de la vie monastique. Sans délai, ils le confièrent aux soins de Theodred, un homme à la fois vénérable et digne de confiance et ils le prièrent d'être responsable de l'entrée de l'enfant au monastère, où l'on prendrait les arrangements et dispositions appropriés pour lui. Aussi ils partirent et amenèrent l'enfant au monastère, qu'on appelle Waldheim. Là, ils le remirent au vénérable abbé Egwald, l'offrant comme novice, du fait de son âge, et qu'il soit obéissant en toutes choses. En accord avec les règles de la vie monastique, l'abbé porta immédiatement le cas devant la communauté et demanda s'ils étaient d'accord et voulaient permettre ceci. La réponse des moines fut immédiate et, de leur consentement unanime, l'enfant fut accepté et reçu par eux dans la communauté et y partager leur vie. Après cela, l'enfant, de manières modestes, fut initié et parfaitement éduqué dans les études saintes. Il donna une attention soigneuse et assidue à l'étude des psaumes et appliqua son esprit à l'examen des autres livres de l'Ecriture Sainte. Même s'il était jeune en âge, il était avancé en sagesse, de sorte qu'en lui, par la miséricorde divine, les paroles du prophète furent accomplies: "De la bouche des enfants et des nourrissons, Tu as perfectionné la louange". Puis, comme son âge avançait et que ses capacités intellectuelles se développaient, d'autant que la croissance de la grâce divine s'effectuait en accord de l'accroissement de sa force et de sa stature, il consacra ses énergies à la recherche de l'amour divin. De longues et profondes méditations remplissaient ses jours. Jour et nuit, il réfléchissait anxieusement sur les moyens de la perfection monastique et l'importance de la vie communautaire, se demandant comment il pourrait devenir membre de cette chaste fraternité et partager, dans la joie, leur discipline commune

Puis il commença de demander comment il pourrait mettre ces idées en pratique de sorte qu'il puisse mépriser et renoncer aux plaisirs futiles de ce monde et abandonner non seulement les richesses temporelles de son héritage terrestre mais aussi son pays, ses parents et sa parenté. Il commença aussi de concevoir des moyens de partir en pélerinage et de voyager jusqu'à des pays lointains, qui lui étaient inconnus. Après qu'un peu de temps se fut écoulé, lorsqu'il eut dépassé les lubies fantasques de l'enfance, l'instabilité de la jeunesse et la période dérangeante de l'adolescence, il arriva, par l'aide ineffable de la grâce divine, à l'âge d'homme. Alors, il était grandement aimé de la communauté du fait de son obéissance et de sa douceur. Tous l'avaient dans la plus grande des affections et le plus grand des respects. En s'appliquant assidûment à toutes ses tâches quotidiennes et donnant une attention continue à ses études, il disciplina son esprit avec une telle vigueur et fermeté qu'il fit des progrès sans obstacles en termes de la perfection monastique

Ce jeune serviteur du Christ, comme nous l'avons déjà dit, avait soif de partir en pélerinage et de voyager jusqu'à des terres lointaines et d'y apprendre tout d'eux. Lorqu'il fut décidé à affronter les dangers des routes sans chemin de la mer, il se rendit immédiatement auprès de son père et lui ouvrit son coeur, lui révélant les secrets qu'il avait cachés aux autres. Il le pria sincèrement de le conseiller sur son projet et de lui donner son autorisation. De plus, non content, il lui demanda de venir avec lui. Il l'invita à partager cette entreprise dangereuse et a suivre, lui aussi, ce mode de vie difficile, avide de le détacher des plaisirs de ce monde, des délices de la Terre et la fausse prospérité de la richesse. Il lui demanda, qu'avec l'aide de Dieu, il entrât au service divin et de s'engager dans l'armée divine, d'abandonner son pays natal et l'accompagner en tant que pélerin vers ces pays étrangers. Utilisant tous ses pouvoirs de persuasion, il lui demanda de rejoindre ses fils dans leur visite du tombeau de Pierre, le Prince des Apôtres. Son père, d'abord, refusa l'offre, s'excusant sur la base de ce qu'il ne pouvait laisser son épouse et de petits enfants. Il serait cruel et non-chrétien, dit-il, de les priver de sa protection et de les laisser à la merci des autres. Puis le soldat du Christ répéta ses exhortations solennelles, et ses longues et urgentes demandes, l'assiégeant, une fois, des menaces effrayantes de la damnation, une autre, des promesses de la vie éternelle, et adoucissant son coeur en décrivant la beauté du paradis et la douceur de l'amour du Christ. Ainsi, employant tous les moyens de persuasion et lui parlant de coeur à coeur, il s'efforça de lui arracher son consentement. Enfin, avec l'aide du Dieu Tout-Puissant, son insistance prévalut. Son père, ainsi que son frère Winnibald donnèrent leur promesse qu'ils s'embarqueraient dans cette entreprise qu'il avait envisagée et dans laquelle il les avaient convaincus de le rejoindre

Après cette discussion, il s'écoula un certain temps. Au changement des saisons, vers la fin de l'été, son père et son frère -qui n'était pas marié- partirent pour ce voyage auquel ils avaient donné leur accord. Au temps approprié, pendant l'été, ils s'étaient tenus prêts et s'étaient préparés. Prenant avec eux l'argent nécessaire au voyage et accompagnés d'une bande d'amis, ils vinrent en un endroit, qui était connu par son ancien nom de Hamblemouth, près du port de Hamvih. Peu après, ils s'embarquèrent sur un navire. Une fois que le capitaine de ce navire à voiles rapide eut pris le prix de leur passage, ils firent voile, le vent d'Ouest soufflant et une forte mer étant présente, au milieu des cris des marins et du craquettement des rames. Quand ils eurent bravé les dangers de la mer et les périls des vagues montagneuses, une traversée rapide et les mena, toutes voiles dehors et au vent, en sûreté, sur la côte. Immédiatement, ils remercièrent l'équipage et débarquèrent et, plantant leurs tentes sur les rivages de la Seine, ils campèrent près de la ville qu'on appelle Rouen, dans laquelle il y a un marché

Pendant quelques jours ils s'y reposèrent puis ils continuèrent leur voyage, visitant les sanctuaires des saints qui se trouvaient sur leur route et y priant. Et ainsi, par degrés, de lieux en lieux ils parvinrent à Gorthonicum [possibleemnt une ville dans le voisinage de la principale ville de Ligurie, Chortina]. Poursuivant leur route, ils parvinrent à Lucques [dans le texte: Lucca]. Jusque là, le père de Willibald et Winnibald étaient avec eux mais, à Lucques, il fut frappé presque soudainement par une maladie corporelle grave et, après quelques jours, il sembla que sa fin était proche. Comme la maladie empirait, ses membres usés devinrent froids et raides et c'est ainsi qu'il rendit son dernier souffle. Aussitôt que les deux frères virent que leur père était mort, ils placèrent son corps dans un fin linceul et, avec une piété filiale, il l'enterrèrent dans l'église de St-Frigidien à Lucques, où il se trouve encore. Immédiatement après, il repartirent, marchant avec régularité à pied à travers la vaste terre d'Italie, traversant les vallées profondes, passant les montagnes anguleuses traversant les plaines ou gravissant les pics des Apennins. Et, après qu'ils eurent vu les pics couverts de neige et enveloppés de bancs de nuages, avec l'aide de Dieu et le soutien de ses saints, ils traversèrent sans encombres les embuscades d'une soldatesque fière et arrogante. Avec tous leurs parents et compagnie, ils arrivèrent au tombeau de St Pierre, le Prince des Apôtres. Là, ils demandèrent sa protection et adressèrent de nombreux remerciements à Dieu du fait qu'ils étaient sortis sains et saufs des dangereux périls de la mer et des difficultés à plusieurs face d'un voyage à travers une terre étrangère puis estimés dignes de monter la Scala Santa et d'atteindre la célèbre basilique St-Pierre. Les deux frères restèrent à Rome de la fête de St Martin jusqu'à Pâques de l'année suivante. Pendant ce temps, alors que l'hiver, froid et nu, passait et que le printemps, avec ses fleurs, commençait d'apparaître et que le temps de Pâques déversait sa radiance ensoleillée sur toute la Terre, les deux frères avaient mené une vie de discipline monastique, suivant les prescriptions de la Sainte Règle. Puis, les jours passant, et la chaleur de l'été augmentant -ce qui annonce habituellement les fièvres- ils tombèrent malades. Ils eurent du mal à respirer, la fièvre s'installa et, d'un moment à l'autre, ils passaient de grelotter de froid puis brûlaient de chaleur. Ils avaient attrapé la peste noire. Si grande fut l'emprise de la maladie que, à peine capables de bouger, déchirés de fièvre et presqu'au point de la mort, le souffle de la vie avait pratiquement quitté leur corps. Mais Dieu, dans Sa providence qui ne manque jamais, et son amour paternel, daigna écouter leurs prières et venir en leur aide. De sorte que chacun d'eux se reposa à tour de rôle pendant une semaine, pendant que l'autre se préoccupait de ses besoins. Malgré cela, ils ne manquèrent jamais d'observer la Règle monastique usuelle dans la mesure de leur faiblesse corporelle; ils persévérèrent, avec le plus de zèle possible, dans leurs études et les lectures saintes, suivant les paroles de Vérité, qui disent: "Celui qui persévère jusqu'à la fin sera sauvé".

Après que ce porteur renommé de la Croix du Christ ait continué à rechercher la vie de perfection avec une grande stabilité d'esprit et une contemplation intérieure, il devint encore plus avide de suivre un mode de vie plus strict. Une obervance plus austère et plus rigoureuse de la Règle monastique, et non une plus facile, était ce qu'il désirait le plus. Il aspirait à se rendre en pélerinage en un lieu encore plus lointain et moins connu que celui dans lequel il se trouvait. Aussi, énergique comme toujours, il prit l'avis de ses amis et demanda à ses parents la permission de partir. Il leur demande de le suivre de leurs prières dans ses pérégrinations de sorte que, tout au long de son voyage, celles-ci le garderaient du mal et lui permettrait d'atteindre la ville de Jérusalem et de contempler ses murs plaisants et sanctifiés

Aussi, après que les solennités du dimanche de Pâques eurent été terminées, ce combattant infatigable partir avec deux compagnons. Sur leur chemin, ils atteignirent une ville à l'Est de Terracina [Fondi] et ils y restèrent deux jours. Puis, la laissant, ils atteignirent Gaète [dans le texte Gaeta], qui se trouve au bord de la mer. A ce point, il montèrent à bord d'un navire et firent la traversée jusqu'à Naples, où ils quittèrent ce navire avec lequel ils avaient fait voile et ils y restèrent deux semaines. Ces villes appartiennent aux Romains: elles se trouvent sur le territoire du Bénévent mais elles doivent allégeance aux Romains. Et immédiatement, comme cela est habituel lorsque la miséricorde de Dieu est à l'oeuvre, leurs espoirs les plus inespérés furent exaucés, car, par chance, ils trouvèrent un navire qui était venu d'Egypte. Aussi embarquèrent-ils et ils firent voile pour une ville appelée Reggio, qui se trouve en Calabre. A cet endroit, ils restèrent deux jours. Puis ils partirent et se rendirent dans l'île de Sicile, soit, à Catane, où repose le corps de Ste Agathe, la vierge. Le Mont Etna s'y trouve. Chaque fois que le feu volcanique y entre en éruption et commence de se répandre et menacer toute la région, les habitants de la ville prennent le corps de Ste Agathe et le placent devant les flammes, lesquelles s'arrêtent immédiatement. Ils restèrent là trois semaines. Puis ils prirent un bateau pour Syracuse, une ville située dans le même pays. Partant de Syracuse, ensuite, ils traversèrent l'Adriatique [ce nom semble utilisé pour désigner la Méditerranée à l'Est de la Sicile et jusqu'à la Terre Sainte; on le retrouvera plus bas] et atteignirent la ville de Monembasia [ville du Sud de la Morée, alors occupée par les Bulgares qui régnaient à Constantinople], dans la terre de Slavinie et, de là, il prirent un navire jusqu'à Chios, laissant Corinthe sur leur babord. Continuant de voyager par mer, ils passèrent Samos et prirent la direction de l'Asie, de la cité d'Ephèse, qui se trouve aux environs d'un mile de la mer. Puis ils se rendirent à pied sur le lieu où les Sept Dormants reposent. De là, ils marchèrent jusqu'à la tombe de St Jean, l'Evangéliste, laquelle se trouve dans un endroit magnifique près d'Ephèse et, de là, à deux miles plus loin le long de la côte, ils atteignirent une grande ville, dite Phygela, où ils restèrent une journée. Là, ils mendièrent un peu de pain et se rendirent à une fontaine, au milieu de la ville, et, s'asseyant sur le bord de celle-ci, ils trempèrent le pain dans l'eau et ils mangèrent. Ils continuèrent leur voyage à pied, le long de la côte, jusqu'à la ville de Hierapolis, qui se trouve sur une montagne élevée; et de là, ils allèrent à un endroit appelé Patara, où ils restèrent jusqu'à ce que l'hiver amer et froid ait passé. Ensuite, ils firent voile depuis là et atteignirent une ville appelée Milet [dans le texte: Miletus; s'il s'agit vraiment de Milet, le récit peut se tromper et cette ville aurait été abordée avant Patara] qui fut, dans le passé, menacée de destruction par les eaux. A cet endroit, se trouvaient deux solitaires vivant sur des "stylites", c'est-à-dire des colonnes dressées et renforcées d'un grand mur de pierre d'une immense hauteur, qui sert à les protéger de l'eau. De là, il reprirent la mer et firent la traversée jusqu'au mont Chélidoine et ils le traversèrent en entier. A ce point de leur voyage, ils souffrirent énormément de la faim car ce pays était sauvage et désolé et ils devinrent, par manque de nourriture, si faibles qu'ils craignirent que leur dernier jour fût arrivé. Mais le Berger Tout-Puissant de Son peuple daigné procurer de la nourriture à Ses pauvres serviteurs

Faisant voile de là, ils atteignirent l'île de Chypre, qui se trouve entre les Grecs et les Sarrasins et ils se rendirent dans la ville de Pamphos, où ils demeurèrent trois semaines. On était au temps de Pâques et cela faisait un an qu'ils avaient commencé leur périple. De là, il allèrent à Constantia [Costenza, près de Famagouste] où repose le corps de St Epiphane et ils y restèrent jusqu'après la fête de St Jean-Baptiste

Une fois de plus, ils prirent la mer et ils atteignirent la ville d'Antarados [au Moyen Age, Tortosa; aujourd'hui, Tartus], qui se trouve près de la mer et sur le territoire des Sarrasins. Puis ils allèrent à pied, sur 9 ou 12 miles jusqu'à un fort appelé Arche [Akkar? Husn el-Akrad?]. Les gens de là avaient un évêque grec et ils y chantèrent une litanie selon le rite grec. Quittant ce lieu, ils se rendirent à pied jusqu'à la ville nommée Emèse [Homs], distante de 12 miles, où se trouve une grande église qui fut construite par Ste Hélène en l'honneur de St Jean-Baptiste et où l'on conserva sa tête pendant longtemps. Cet endroit se trouve aujourd'hui dans la Syrie

Il y avait alors sept compagnons avec Willibald et lui était le huitième. Presqu'immédiatement ils furent arrêtés par les Sarrasins païens et, parce qu'ils étaient étrangers et qu'ils étaient venus sans passeports, ils furent faits prisonniers et retenus captifs. Les Sarrasins ne savaient de quelle nation ils étaient et, pensant qu'il s'agissait d'espions, ils les amenèrent attachés jusque chez un riche homme âgé pour savoir d'où ils venaient. Cet homme les interrogea, leur demanda d'où ils étaient et à quelles occupations ils étaient employés. Ils lui dirent donc tout depuis le début et le renseignèrent sur la raison de leur voyage. Et le vieil homme dit: "J'ai souvent vu des hommes venant de ces parties du monde, des compatriotes de ceux-ci; ils ne causent pas de dommages et sont seulement soucieux de remplir les obligations de leur loi". Puis, de là, ils partirent et se rendirent au tribunal pour y demander la permission de traverser jusqu'à Jérusalem. Mais lorsqu'ils y arrivèrent, le gouverneur déclara sur le champ qu'ils étaient des espions et ordonna qu'on les jetât en prison jusqu'au moment où il saurait du roi ce qu'il fallait en faire. Dans la prison, ils firent, de manière inattendue, l'expérience de la générosité merveilleuse du Dieu Tout-Puissant, lequel, avec miséricorde, daigne protéger partout ses serviteurs, que ce soit au milieu des armes de la guerre, des tortures, des Barbares, des soldats, des prisons et des bandes d'agresseurs, les préservant et les protégeant de tout mal. Un homme se trouvait là, un marchand, qui désirait les racheter et les libérer de leur captivité de façon qu'ils soient libres de continuer leur voyage comme ils l'entendaient. Il fit cela par le biais d'aumônes et pour le bien de sa propre âme. Mais il ne put parvenir à les faire libérer. Aussi, chaque jour, il leur envoya le dîner et le souper, et le mercredi et le samedi, il envoyait son fils à la prison pour qu'il les emmène prendre un bain puis les ramène. Chaque dimanche, il les emmenait à l'église, en passant par la place du marché, de sorte que, s'ils voyaient quoi que ce soit à vendre dont ils aient eu envie, il l'achetait et leur faisait ainsi ce plaisir. Les habitants de la ville, qui avait une nature inquisitive, venaient régulièrement les voir, car ils étaient jeunes et beaux et habillés de vêtements magnifiques. Puis, alors qu'ils continuaient de se languir en prison, un homme d'Espagne vint et leur parla dans la prison même et il s'enquit avec soin de leur nationalité et de leur pays d'origine. Et ils lui dirent tout, du début à la fin, ce qui concernait leur voyage. Cet Espagnol avait un frère à la cour du roi; il était le chambellan du roi des Sarrasins. Et, lorsque le gouverneur qui les avait envoyés en prison vint à la cour, à la fois l'Espagnol qui leur avait parlé dans la prison et le capitaine du navire sur lequel ils étaient venus de Chypre vinrent ensemble en présence du roi des Sarrasins, dont le nom était Emir-al-Mummenin. Et quand la conservation passa à leur cas, l'Espagnol dit à son frère tout ce qu'il avait appris sur eux lorsqu'il leur avait parlé dans la prison et il lui demanda de transmettre cette information au roi et de les aider. Aussi, lorsque, après cela, ces trois personnes -l'Espagnol, son frère, le capitaine du navire- se présentèrent devant le roi et exposèrent leur cas, lui donnant, du début à la fin, tous les détails, le roi demanda d'où venaient ces hommes. Ils répondirent: "Ces hommes viennent de l'Occident, là où le Soleil se couche; nous ne connaissons rien de leur pays si ce n'est qu'au-delà d'où il se trouve, on ne trouve plus rien sinon de l'eau". Alors le roi demanda: "Pourquoi devrais-je les punir? Ils ne nous ont pas fait de mal. Permettez-leur de partir et de poursuivre leur chemin". Les prisonniers, habituellement, devaient payer une amende consistant en trois mesures de grain mais on les laissa partir sans aucune taxe

Ainsi autorisés, ils se mirent immédiatement en route et traversèrent les cent miles qui les séparaient de Damas, en Syrie, là où se trouve le corps de St Ananias. Ils y restèrent une semaine. A près de deux miles de distance, se trouve une église, qui a été bâtie sur le lieu où St Paul fut convertir et où Notre Seigneur lui dit: "Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu?", etc. Après avoir prié dans l'église, ils partirent à pied pour la Galilée, pour l'endroit où l'ange Gabriel visita Marie et lui dit "Je vous salue, Marie". Il s'y trouve maintenant une église et le village où se trouve l'église s'appelle Nazareth. Les Chrétiens ont souvent dû négocier avec les Sarrasins païens à propos de cette église car ces derniers voulaient la détruire. Après s'être recommandé au Seigneur là, ils partirent à pied et arrivèrent à la ville de Cana, là où Notre Seigneur changea l'eau en vin. Une vaste église s'y trouve, et, dans l'église, l'un des autels porte l'une des six jarres d'eau que le Seigneur ordonna de remplir d'eau puis les changea en vin. Ils burent un peu de vin de cette jarre. Ils restèrent là un jour.

Partant de Cana, ils atteignirent le mont Thabor, où Notre Seigneur fut transfiguré. Aujourd'hui s'y trouve un monastère de moines et l'église y est dédiée au Seigneur Moïse et à Elie et l'endroit, par ceux qui y vivent, est appelé le Saint Mont. Là, ils prièrent

Puis ils se rendirent à Tibériade. La ville se trouve sur la rive de la mer sur laquelle Notre Seigneur marcha et où Pierre s'enfonça dans les eaux alors qu'il essayait, aussi sur les eaux, de marcher vers Lui. De nombreuses églises et de nombreuses synagogues des Juifs sont construites à cet endroit et on rend un grand hommage à Notre Seigneur. Ils restèrent là plusieurs jours. A cet endroit, le fleuve Jourdain coule dans le lac de Tibériade. Puis ils firent le tour du lac et se rendirent dans le village de Madeleine puis ils se rendirent dans le village de Capharnaüm, où Notre Seigneur ressuscita la fille du maître de l'endroit. Là se trouvait une maison et un grand mur, et les gens disaient que Zébédée vivait là avec ses fils Jean et Jacques. Puis ils se rendirent à Bethsaïda, le lieu où naquirent Pierre et André. Une église occupe maintenant le site où se trouvait leur maison. Ils passèrent la nuit là et, le matin suivant, il partir pour Corazaïn, au pays des Géraséniens, de l'autre côté de la mer, là où Notre Seigneur guérit l'homme qui était possédé du démon et fit passer les esprits impurs dans un troupeau de porcs. Une église se trouve aujourd'hui à l'endroit

Après qu'ils y eurent prié, ils partirent et arrivèrent à l'endroit où deux sourcs, Jor et Dan, sortent de la Terre et puis coulent le long de la montagne pour former le Jourdain. Là, entre les deux sources, ils passèrent la nuit et les bergers nous [l'auteur utilise là le "nous" peut-être pour signifier que ce sont les propres paroles de Willibald] donnèrent du lait aigre à boire. Dans cet endroit, se trouvent de très beaux troupeaux de bétail, longs du dos et courts de pattes, portant d'énormes cornes. Ils sont tous de la même couleur, rouge foncé. On y trouve aussi de grands marais et, en été, quand la grande chaleur du Soleil écorche la Terre, les troupeaux se rendent dans ces marais et s'y plongent jusqu'au cou dans l'eau, ne laissant dépasser que leur tête

Partant de là, ils arrivèrent à Césarée où se trouve une église et un grand nombre de Chrétiens. Ils y reposèrent pendant peu de temps et partir pour le monastère de St-Jean-Baptiste, où vivent aux alentours de 20 moines. Ils y restèrent la nuit et puis, à un mile de là, ils gagnèrent le Jourdain, là où Notre Seigneur fut baptisé. A cet endroit, on trouve maintenant une église qui a été construite en hauteur sur des colonnes de pierre mais, en-dessous l'église, cependant, le sol est sec. Au lieu même où le Christ a été baptisé et où on continue, de nos jours, de baptiser, se trouve une petite croix de bois. Le Jourdain consiste en un petit courant d'eau à ses débuts et une corde a été tendue au-dessus du fleuve et attachée à chaque bout. Et, pour la fête de l'Epiphanie, les malades et les infirmes viennent et, se tenant à la coarde, ils se plongent dans l'eau. Des femmes stériles viennent aussi là. Notre évêque Willibald s'est lui-même baigné, à cet endroit, dans le Jourdain. Ils passèrent le jour là puis ils partirent

De là, ils arrivèrent à Galgala, qui se trouve à environ cinq miles. Dans l'église qui s'y trouve -elle est petite et construite en bois- se trouvent douze pierres. Ce sont les douze pierres que les enfants d'Israël prirent dans le Jourdain et portèrent à Galgala sur plus de cinq miles et y installèrent comme témoignage de leur passage. Après avoir dit des prières à cet endroit, ils continuèrent leur chemin jusqu'à Jéricho, qui se trouve à plus de 7 miles du Jourdain. La source qui bouillonne à cet endroit, sur le haut de la colline, ne produisait rien et était quasi inutile à l'homme jusqu'à ce que le prophète Elisée vienne et la bénisse, la faisant couler. Ensuite, les gens de la ville la canalisèrent pour leurs champs, leurs jardins et autres endroits qui en avaient besoin. Et maintenant, partout où coule cette source, les récoltes sont faciles et apportent la santé, tout cela à cause de la bénédiction d'Elisée le prophète. A partir de là, ils allèrent au monastère de St Eustoche, qui se trouve au milieu de la plaine entre Jéricho et Jérusalem

Puis ils arrivèrent à Jérusalem, au lieu même où la sainte croix de Notre Seigneur a été trouvée. Sur le site de l'endroit qu'on appelle le Calvaire se trouve maintenant une église. Auparavant, elle se trouvait hors les murs de la ville mais, quand Hélène découvrit la croix, elle fit construire l'église dans les murs. De nos jours, on trouve trois croix, en-dehors de l'église, près du mur de l'extrêmité orientale, qui font mémoire de la croix de Notre Seigneur et de ceux qui furent crucifiés avec Lui. Elles ne se trouvent pas dans l'église mais au-dehors, en-dessous d'un toit de bergerie. A côté se trouve le jardin où la tombe de notre Sauveur fut placée. La tombe fut creusée dans le rocher et ce rocher se trouve au-dessus du sol; il est carré à sa base et diminue vers le haut

A son plus haut point se trouve une croix et un bâtiment merveilleux a été construit sur lui. A l'extrêmité orientale une porte a été creusée dans le rocher du sépulcre, par laquelle les gens peuvent entrer prier dans la tombe. A l'intérieur du sépulcre se trouve une pierre sur laquelle reposa le corps de Notre Seigneur, et, sur la pierre, quinze lampes d'or brûlent jour et nuit. La pierre se trouve au Nord de l'intérieur de la tombe et se trouve à droite lorsqu'on entre dans la tombe pour y prier. Devant la porte du tombeau se trouve une grande pierre carrée, une réplique de la pierre que l'ange roule de l'entrée du sépulcre le matin de la Résurrection

Notre évêque arriva là pour la fête de St Martin et aussitôt qu'il eut atteint ce point, il commença de se sentir malade et dut rester au lit jusqu'à une semaine avant Noël. Puis, quand il se rétablit qu'il commença de se sentir un peu mieux, il se leva et se rendit à l'église appelée la Sainte Sion, qui se trouve au centre de Jérusalem. Il y pria puis il se rendit au Porche de Salomon [la piscine de Bethesda], là où se trouvait la piscine où les malades s'allongeaient et attendaient que l'ange vienne troubler l'eau, à la suite de quoi, le premier qui entrait dans la piscine était guéri. C'est là que Notre Seigneur dit au paralytique: "Lève-toi, prends ton grabat et marche". Willibald lui-même dit, que devant la porte de la ville, se trouvait un grand pilier, au-dessus duquel se trouvait une croix, comme signe et mémorial de l'endroit où les Juifs essayèrent de voler le corps de Notre-Dame. Car, alors que les onze Apôtres emportaient le corps de la Vierge Marie de Jérusalem, les Juifs essayèrent de le voler dès qu'ils atteignirent la porte de la ville. Mais dès qu'ils tendirent leurs mains vers le cercueil et s'efforçaient de prendre le corps, leurs bras s'immobilisèrent, comme collés au cercueil et ils ne purent plus bouger jusqu'à ce que, par la grâce de Dieu et les prières des Apôtres, ils furent délivrés et, ensuite, on les laissa partir. La Vierge Marie quitta ce monde à l'endroit même, au centre de Jérusalem, qu'on appelle la Sainte Sion. Et ensuite, les onze Apôtres la portèrent, comme je l'ai déjà dit, et, finalement, les anges vinrent, la prirent des mains des Apôtres et l'emmenèrent au Paradis

L'évêque Willibald descendit du mont et alla dans la vallée de Josaphat. Elle se trouve à l'Est de la ville de Jérusalem. Dans cette vallée, se trouve une église de Notre-Dame et cette église est son tombeau (ce n'est pas que son corps s'y trouve mais elle sert à faire mémoire d'elle). Après y avoir prié, il monta le Mont Olivet, qui se trouve près de la vallée, à la fin orientale de celle-ci -la vallée se trouve entre Jérusalem et le Mont Olivet. Sur le Mont Olivet se trouve maintenant une église sur le lieu où Notre Seigneur pria avant Sa passion et dit à ses disciples: "Veillez et priez afin que vous n'entriez pas en tentation". Puis Willibald alla sur la colline même d'où Notre Seigneur monta au ciel. Au centre de l'église se trouve un magnifique chandelier sculpté en bronze; il est carré et se trouve au milieu de l'église où Notre Seigneur monta aux cieux. Au milieu du chandelier de bronze se trouve un vase carré en verre, et, dans le verre, une petite lampe et, autour de la lampe, fermé de tous les côtés, se trouve le verre. La raison pour laquelle le verre est fermé de tous les côtés est que la lampe puisse brûler aussi bien quand il fait beau que quand il fait mauvais. L'église n'a pas de toit et s'ouvre sur le ciel et deux piliers se trouvent à l'intérieur, l'un contre le mur nord, l'autre contre le mur sud. Ils se trouvent là en mémoire des deux hommes qui dirent: "Homme de Galilée, pourquoi te tiens-tu là à regarder les cieux?" Tout homme qui peut passer son corps entre les piliers et le mur est libéré de ses péchés.

Puis Willibald vint à l'endroit où l'ange apparut aux bergers et dit: "Voici que je vous annonce une grande joie". De là, il alla à Bethléem, où naquit Notre Seigneur, qui se trouve aux environs de six miles de Jérusalem. L'endroit où naquit Notre Seigneur était, au début, une grotte située en-dessous le sol; il est maintenant une chambre carrée taillée dans le rocher; la terre a été creusée et déblayée de tous les côtés et, de nos jours, l'église a été construite au-dessus. C'est là que Notre Seigneur est né. On a aussi élevé un auteul mais un autre petit autel a également été réalisé de sorte que, quand on veut célébrer la messe dans la grotte, il peuvent transporter le petit autel et, quand la messe est célébrée par la suite, ils l'enlèvent. L'église qui a été construite au-dessus du lieu où Notre Seigneur est né a été construite en forme de croix, un bâtiment d'une grande beauté

Après avoir prié là, ils partirent et se rendirent dans une grande ville appelée Thecua. C'est l'endroit où les Saints Innocents furent massacrés par Hérode. Une église s'y trouve de nos jours. S'y trouve le corps de l'un des prophètes. Puis ils atteignirent, dans la vallée, la laure [nom orthodoxe pour un monastère]. C'est un grand monastère et y réside l'abbé ainsi que le portier qui garde les clés de l'église. Nombreux sont les moines qui appartiennent à ce monastère et ils habitent dispersés dans la vallée, sur les sommets des collines où ils crsuent des petites cellules dans la pierre de celles-ci. La montagne entoure la vallée dans laquelle le monastère a été construit. Là se trouve le corps de St Saba [fondateur, en 483, du monastère et archimandrite de tous les monastères de Palestine]

De là, ils arrivèrent à l'endroit où l'Apôtre Philippe baptisa l'eunuque. Une petite église s'y trouve, dans la vallée sauvage entre Bethléem et Gaza. De là, ils firent route sur Gaza, où se trouve un lieu saint, et, après y avoir prié, ils se rendirent à St-Mathias, où se trouve un grand temple consacré au Seigneur. Et, pendant qu'une solennelle grande messe y était célébrée, notre évêque Willibald, debout et écoutant, perdit la vue et resta aveugle pendant deux mois. De là, il se rendirent à St-Zacharie, le prophète, pas le père de St Jean-Baptiste, mais l'autre prophète. Puis ils allèrent dans la ville d'Hébron, où se trouvent les corps des trois patriarches Abraham, Isaac et Jacob ainsi que ceux de leurs épouses

Puis Willibald revint à Jérusalem et, allant dans l'église ou la sainte Croix du Christ avait été découverté, ses yeux s'ouvrirent et il recouvrit la vue. Il resta un peu à Jérusalem puis il s'en alla pour un lieu appelé Lydda, à l'église de St-Georges, qui se trouve à environ dix miles de Jérusalem. De là, il se rendit dans un autre village, Joppa, où se trouve une église consacrée à St Pierre, l'Apôtre: ce fut là que St Pierre ressuscita la veuve Dorcas. Il y pria et il repartit, arrivant sur la mer Adriatique [sic], à une grande distance de Jérusalem, dans les villes de Tyr et de Sidon. Ces deux villes se trouvent à six miles l'une de l'autre et se trouvent sur la côte. De là, il alla à Tripoli, sur la côte et il traversa le mont Liban pour rejoindre Damas. De là, il alla à Tripoli et, de nouveau, pour la troisième fois, il revint à Jérusalem où il passa tout l'hiver

Ensuite, il parcourut plus de trois cent miles jusqu'à la ville d'Emèse, en Syrie et, de là, il vint à Salamias [Salfimebeh?], qui se trouve sur les frontières les plus lointaines de la Syrie. Il y passa toute la saison du Carême car il était malade et incapable de voyager. Ses compagnons, qui faisait partie de son parti, allèrent jusqu'au roi des Sarrasins, nommé Murmunni, pour lui demander de leur donner une lettre de sauf-conduit. Mais ils ne purent le rencontrer car ce roi s'était retiré de cette région du fait que la maladie et une pestilence infestaient le pays. Et, comme ils ne purent trouver le roi, ils revinrent et restèrent ensemble à Salamias jusqu'à une semaine avant Pâques. Puis ils allèrent à Emèse et demandèrent au gouverneur de leur donner une lettre de sauf-conduit et il leur donna une lettre pour chaque deux d'entre eux. Aussi, ils ne purent voyager ensemble dans cet endroit mais par deux seulement, car, de cette manière, il leur était plus facile de se procurer de la nourriture. Puis ils allèrent à Damas

De Damas, pour la quatrième fois, ils revinrent à Jérusalem et après y avoir passé un peu de temps, ils se rendirent à Sébaste, qu'on appelait auparavant Samarie; une fois qu'elle eut été détruite, on construisit une ville nouvelle qu'on appela Sébaste. De nos jours y reposent les corps de St Jean-Baptistes, Abdias et Elisée le prophète. Près de la ville se trouve le puits où Notre Seigneur demanda à la femme samaritaine de Lui donner à boire. Sur ce puits se trouve maintenant une église. On voit également la montagne sur laquelle les Samaritains rendaient leur culte et dont la femme dit à Notre Seigneur: "Nos ancêtres adoraient sur cette montagne, mais vous vous dites que c'est à Jérusalem que les hommes devraient prier". Puis, après y avoir prié, ils traversèrent le pays des Samaritains et arrivèrent à une grande ville sur les lointaines frontières de leurs terres et ils y passèrent une nuit

Puis, ils traversèrent une vaste plaine couverte d'oliviers et avec eux voyageait un Ethiopien et ses deux chameaux, qui menait une femme sur une mule et ils passèrent à travers des bois. Et comme ils allaient leur chemin, un lion aux mâchoires béantes fonça sur eux en grondant et en rugissant, prêt à les saisir et les dévorer; il les terrifia grandement. Mais l'Ethiopien dit: "N'ayez pas peur. Avançons". Aussi, sans hésitation, ils continuèrent leur chemin et, en approchant du lion, celui-ci s'écarta et, grâce à l'aide du Dieu Tout-Puissant, il les laissa passer. Et ils dirent que, peu de temps après qu'ils aient quitét l'endroit, ils entendirent de nouveau le rugissement du lion comme, si, dans sa furie, il avait entrepris de dévorer nombre de ceux qui étaient venus cueillir les olives. Quand ils arrivèrent à la ville appelée Ptolomaeis, qui se trouve sur la côte, ils continuèrent leur route et atteignirent le sommet du mont Liban, là où cette montagne avance dans la mer et forme un promontoire. Là se trouve la tour du Liban: quiconque débarque ici sans avoir de sauf-conduit ne peut pas traverser le lieu car il est gardé et fermé; et si quelqu'un débarque sans passeport, les citoyens l'arrêtent immédiatement et le renvoient à Tyr. Le mont Liban se trouve entre Tyr et Ptolomaeis. Puis l'évêque arriva à Tyr pour la deuxième fois

Quand l'évêque Willibald se trouvait à Jérusalem lors de son plus récent séjour, il avait acheté un baume et en avait rempli une calebasse. Puis il prit un roseau creux qui était pourvu d'un fond et il le remplit de pétrole et le plaça dans la calebasse. Ensuite, il coupa le roseau d'une longueur égale à celle de la calebasse de sorte que les deux surfaces supérieures des contenants étaient au même niveau; puis il ferma la calebasse. Lorsqu'ils arrivèrent à Tyr, les gens des là les arrêtèrent, leur mirent des chaînes et ils examinèrent tous leurs bagages pour voir s'il n'y avaient pas caché des objets de contrebande. S'ils en avaient trouvé, ils les auraient certainement punis et mis à mort. Mais une fois qu'ils eurent tout examiné en détail et qu'ils n'eurent rien trouvé, sinon la calebasse que portait Willibald, ils l'ouvrirent et sentirent pour savoir ce qu'il y avait dedans. Quand ils sentirent le pétrole, qui se trouvait près du dessus, dans le roseau, ils ne purent sentir le beaume qui se trouvait dans la calebasse, en-dessous du pétrole. Aussi, les laissèrent-ils partir

Ils restèrent longtemps dans cette ville, attendant un bateau qui put les remmnener. Après cela, ils embarquèrent et voyagèrent pendant tout l'hiver, de la fête de St André [30 novembre] jusqu'à une semaine avant Pâques. Puis ils débarquèrent dans la ville de Constantinople où se trouvent, sous un autel, les corps de trois saints, André, Timothée et Luc l'Evangéliste alors que que le corps de St Jean Chrysostome se trouve devant un autre; son tombeau se trouve là où, en tant que prêtre, il se tenait pour célébrer la messe. Notre évêque resta pendant deux ans et il avait une loge dans l'église où il pouvait prendre place chaque jour et contempler l'endroit où les saints reposaient. De là, il se rendit à Nicée, où, anciennement, l'empereur Constantin tint un concile auquel participèrent trois cent dix-huit évêques, tous y prenant une part active. L'église y ressemble à celle du Mont Olivet, là où Notre Seigneur monta aux cieux. Et, dans l'église, se trouve tous les portraits des évêques qui prirent part au concile. Willibald vint là, depuis Constantinople, pour voir comment l'église était construite puis il repartir, par voie de mer, pour Constantinople

Au bout de deux ans, ils firent voile de Constantinople avec les envoyés du Pape et de l'empereur et ils atteignirent Syracuse, dans l'île de Sicile. De là, ils rejoignirent Catane puis Reggio, une ville de Calabre. Ils s'embarquèrent de nouveau pour atteindre Volcano, île où se trouve l'Enfer de Théodoric [plus que l'île Stromboli, il semble que ce soit la plus au Sud des îles Lipari, ou "Volcani Insula" dont le volcan était là où Théodoric était supposé avoir été jeté en enfer pour avoir emprisonné et causé la mort du pape Jean V]. Une fois arrivés, ils débarquèrent pour voir à quoi ressemblait cet enfer. Willibard, qui voulait apprendre et qui souhaitait de voir à quoi ressemblait, à l'intérieur, cet enfer, voulut gravir au sommet de la montagne sous laquelle se trouvait le cratère. Mais il ne le put car les cendres de ce Tartare noir, qui s'étaient élevées jusqu'au bord du cratère, s'y étaient amoncelées en tas. Et, pareilles à la neige qui, lorsqu'elle tombe des cieux de toutes ses masses de flocons, les entasse en promontoires, les cendres se trouvaient entassées au sommet de la montagne et empêchaient Willibald d'aller plus loin. Cependant, il put voir la flamme sombre, terrible et effrayante, vomir du cratère avec un bruit semblable au grondement du tonnerre; il regarda avec crainte ces flammes énormes et les nuages de fumée, semblables à des montagnes, s'élever du dessous dans le ciel. Aussi, il vit aussi ces pierres ponces dont les écrivains parlent et qui sortaient du cratère, jetées par les flammes et emportées jusqu'à la mer puis rapportées sur la plage par la marée (les hommes les ramassent et les emportent). Une fois qu'ils eurent satisfait leur curiosité avec cette vue de cet effrayant et terrible feu brûlant, ses fumées, son ondeur puante et ses flammes jaillissantes, ils levèrent l'ancre et firent voile jusqu'à l'église de St Barthélémy l'Apôtre [sur l'île de Lipari], qui se trouve sur la côte, et ils atteignirent les montagnes qu'on appelle Didyme et après y avoir prié, il y passèrent une nuit. S'embarquant une fois de plus, ils atteignirent une ville appelée Naples et ils y restèrent plusieurs jours. Cette ville est le siège d'un archevêque dont la dignité y est grande. Pas très loin se trouve la petite ville de Lucullanum, où est préservé le corps de St Séverin. Puis Willibald se rendit dans la ville de Capoue et l'archevêque de cette ville le recommanda à l'évêque d'une autre ville, lequel le recommanda à l'évêque de Téano, lequel, à son tour, le recommanda au monastère de St-Benoît [le mont Cassin]. C'était l'automne lorsqu'il atteignit le mont Cassin et cela faisait sept ans qu'il avait quitté Rome et dix ans en tout qu'il avait commencé ce voyage et quitter son pays natal

Et lorsque le vénérable homme Willibald et Tidbercht, qui l'avait accompagné partout dans son voyage, arrivèrent au monastère de St Benoît, ils n'y trouvèrent que quelques moines qui y vivait sous la direction de l'abbé Pétronax. Ils se joignirent sans délai à la communauté, ce à quoi il était si bien conformé à la fois par sa grande auto-discipline et son aptitude naturelle à l'obéissance. Il y appris beaucoup de leur enseignement soigneux et, en retour, il leur enseigna encore plus par sa façon d'être: il leur montra pas tant par des mots que par la beauté de son caractère ce qu'était l'esprit véritable de leur maison; et en s'avérant un modèle de vertu monastique, il força l'admiration, l'amour et le respect de tous.

Pendant la première année qu'il passa là, il fut sacristain de l'église; dans la seconde, il devint doyen du monastère et, pendant huit ans à la suite de cela, il devint le portier dans deux monastères: quatre ans portier du monastère qui est perché sur une très haute colline et quatre autres années comme celui d'un autre monastère, celui qui se trouve plus bas, près de la rivière Rapido, à une distance d'aux environs de deux miles. Ainsi, pendant dix ans, le vénérable homme Willibald essaya d'observer, aussi loin qu'il le put, tous les détails de l'observance monastique telle qu'elle est établie par la Règle de St Benoît. Et non seulement il l'observa lui-même mais aussi il amena les autres, qu'il avait amenés, à pied et par mer, sur de longues distances, à la suivre dans le chemin traditionnel de la vie régulière

Après cela, un prêtre qui venait d'Espagne au monastère du mont Cassin et qui y resta demanda la permission de l'abbé Pétronax d'aller à Rome. Lorsque cette permission fut demandée, Petronax, sans hésitation pria Willibald d'accompagner le demandeur et de l'emmener à la basilique St-Pierre. Willibald donna immédiatement son consentement et promit de remplir cette mission. Aussi, partirent-ils et lorsqu'ils arrivèrent à Rome et entrèrent dans la basilique de St-Pierre, ils demandèrent la protection du céleste gardien des clés et se recommandèrent à son bienveillant patronage. Puis, le saint Pontife du Siège Apostolique, Grégoire III, apprenant que le vénérable homme Willibald était à Rome, le fit prier de venir en sa présence. Et quand il vint devant le Suprême Pontife, il tomba d'un coup immédiatement face contre terre et il le salua. Et immédiatement ce pieux Berger du Peuple commença à le questionner sur les détails de son voyage et lui demanda sincèrement comment il avait passé 7 ans à voyager aux confins de la Terre et comment il avait réussi à échapper aussi longtemps à la méchanceté des païens

Alors l'actif serviteur du Christ raconta humblement au glorieux Souverain du Peuple tous les détails de ses voyages tels qu'ils s'étaient passés. Il lui raconta comment il était allé de lieu en lieu, comment il avait visité Bethléem et prié sur le lieu de naissance de son céleste Créateur, comment il avait vu où le Christ avait été baptisé dans la rivière du Jourdain et s'y était lui-même baigné. Il décrivit ses quatres visites à Jérusalem et à la Sainte Sion, là où notre Saint Sauveur fut pendu sur la croix, fut tué et enseveli et puis monta aux cieux depuis le Mont Olivet. Il lui raconta et lui décrivit toutes ces choses

Après qu'ils eurent parlé de ces sujets pendant une conversation plaisante et intime, le sacré et saint Pontife intima à Willibald, sur un ton sérieux et sur lequel on ne pouvait se tromper, que St Boniface avait demandé au pape de fait que Willibald quittât le monastère de St Benoît et qu'il vint avec lui sans délais au pays des Francs. Et après que le Seigneur Apostolique, le Pape Grégoire III, lui eut fait connaître les désirs de St Boniface, il essaya de le persuader, une fois par des paroles pacifiques d'exhortation, une fois plaidant, une fois ordonnant, de rejoindre St Boniface. Puis l'illustre athlète de Dieu, Willibald, promit qu'il mettrait en oeuvre immédiatement la requête et l'ordre du Pontife à condition qu'il puisse demander permission, selon les prescriptions de la Règle, à son abbé. Le Suprême Pontife, qui est investi de la plus haute autorité, répondit immédiatement que son ordre valait permission suffisante et il lui ordonna de se mettre en route immédiatement, avec obéissance, sans scrupules de conscience, disant: "Si j'ai le pouvoir, à volonté, de transférer l'abbé Pétronax lui-même à un autre lieu, ainsi, certainement, il ne peut opposer à mes volontés aucune permission ou pouvoir". Et, ainsi, Willibald répondit sur le champ qu'il allait accomplir librement ces voeux et ordres, non seulement là, à Rome, mais partout dans le monde, où que le pape ait en vue de l'envoyer. Il s'engagea ensuite à partir, selon ces voeux, sans aucun autre délai. Après cela, la discussion étant terminée, Willibald partit au temps de Pâques, atteignant le but de son voyage à la St André. Tidbercht, cependant, resta à St Benoît

Willibald se rendit à Lucques, où son père était enterré et, de là, dans la ville de Pavie. De là, à Brescia puis en un lieu qu'on appelle Garda [le lac de Garde?]. Puis il se rendit auprès du duc Odilon et il resta une semaine auprès de lui. Il alla ensuite auprès de Suitgar, auprès de qui il resta aussi une semaine. Suitgar et Willibald partirent alors pour Linthard, où était St Boniface et St Boniface les envoya à Eichstatt pour voir s'ils aimaient ce lieu. Suitgar, alors, rendit, pour le salut de son âme, ce territoire qui était de sa compétence à St Boniface et celui-ci le donna à notre évêque Willibald. Ce lieu, à l'époque, n'était qu'abandon -il n'y avait pas une seule maison et le seul bâtiment était l'église de Ste-Marie, qui existe encore et qui était plus petite que l'autre église que Willibald construisit par la suite sur ce site

Quand Willibald et Suitgar eurent resté ensemble à Eichstatt pendant peu de temps, ils explorèrent et firent une recension des terres et choisirent, à la fin, un site convenable pour y établir une maison. Ils se rendirent alors à Freising, près de St Boniface et ils restèrent auprès de lui jusqu'à ce que tous retournent à Eichstatt. Là, St Boniface ordonna Willibald à la dignité de prêtre. Le jour de l'ordination de Willibald fut le 22 juillet, pour la fête de St Apollinaire et de Ste Marie-Madeleine

Après qu'une année entière se fut passée, St Boniface lui ordonna de venir immédiatement en Thuringe. Et le vénérable homme de Dieu, Willibald, partir immédiatement pour la Thuringe et habita en tant qu'hôte dans la maison de son frère, St Winnibald, qu'il n'avait pas vu au cours des dernières huit années et demi depuis qu'ils s'étaient séparés à Rome. Et ils furent heureux de se revoir et ils se félicitèrent chacun de cette rencontre. On était en automne lorsque Willibald vint en Thuringe

Peu après vint qu'il fut venu là, l'archevêque St Boniface, Burchard et Wizo consacrèrent Willibald et lui conférèrent l'autorité sacrée de l'épiscopat. Il resta une semaine après son ordination en tant qu'évêque puis il retourna de nouveau à l'endroit qui lui avait été attribué. Au moment de sa consécration, Willibald avait 41 ans; il fut consacré à Salzburg, à l'automne, à peu près trois semaines avant la fête de St Martin

Ce long cours des voyages de Willibald et des choses qu'il vit, qui durèrent sept longues années, était désormais terminé et passé. Nous avons essayé d'écrire et de faire connaître tous les faits qui ont été assurés et sur lesquels il a été enquêté de façon approfondie. On n'a pas appris ces faits que qui que ce soit d'autre mais on les a entendus de Willibald lui-même et, les ayant reçus de ses propres lèvers, nous les avons recopiés et écrits au monastère d'Heidenheim, comme peuvent en témoigner ses diacres et autres subordonnés. Je dit cela de sorte que personne ne puisse, après cela, dire qu'il s'agissait là d'un conte paresseux

Au moment où il vint en cette province depuis Rome, avec trois de ses compatriotes, il avait 41 ans, déjà mûr et dans son âge moyen. Puis il fut consacré évêque. Ensuite, il commença à construire un monastère dans le lieu appelé Eichstatt et, peu après, il y pratiqua la vie monastique selon l'observance qu'il avait vue au monastère de St Benoît, en Italie. Et cela, il le fit non seulement là mais aussi dans de nombreuses autres maisons monastiques, qu'il avait examinées de son oeil expérimenté alors qu'il parcourait différents pays; cette observance qu'il enseigna aux autres par l'exemple de sa propre vie. Avec quelques co-laboureurs, il bêcha les champs vastes et grands pour y semer la graine divine et pour les cultiver jusqu'à la moisson. Et, tel l'abeille occupée qui vole légèrement à travers les prés, de couleur pourpre, avec des violets, embaumant les herbes parfumées et jaunes, jusqu'aux branches des arbres, de la floraison, buvant le doux nectar mais évitant le poison amer, et qui retourne à la ruche portant le miel sur ses pattes et son corps, ainsi l'homme béni retint le meilleur de ce qu'il avait vu à l'étranger de ses propres yeux, l'adopta et, l'ayant adopté, le soumit pour acceptation à ses disciples, leur montrant le bon exemple par les paroles et les faits, dans le zéle pour l'observance, l'évitement du mal, la piété, la forbearance [mot non traduit] et la tempérance

Peu après que l'énergique champion de notre bon Dieu ait commencé à habiter dans le monastère, des hommes nombreux vinrent se joindre à lui de tous les côtés, non seulement des provinces voisines mais même de pays lointains, afin d'entendre son enseignement et sa sagesse salutaires. Willibald et notre Mère l'Eglise, comme la poule qui chérit ses poussins sous ses ailes, a gagné de nombreux fils adoptifs au Seigneur, les protégeant continuellement du bouclier de sa bonté. Il les éduqua avec gentillesse et sympathie, les détachant de leurs imperfections jusqu'à ce qu'ils atteignent une parfaite maturité. Ceux-ci, ayant suivi les pas de leur maître et absorbé son enseignement, sont maintenant devenus célèbre pour l'enseignement qu'ils donnent aux autres

Cela, ainsi, fut Willibald, qui, d'abord, commença de pratiquer une vie sainte avec le soutien de quelques aides seulement mais qui, enfin, après avoir lutté en de nombreuses manières contre l'opposition de nombreux chefs de clans et courtisans, prit possesssion d'un peuple digne du Seigneur. De long en large, à travers la vaste province de Bavière, il passa sa charrue, semant et récoltant la récolte avec l'aide de nombreux compagnons laboureurs. Et partout sur la terre de Bavière, maintenant parsemée d'églises, de presbytères et des reliques des saints, il a amassé des trésors digne de Notre Seigneur. De ces endroits résonnent maintenant les antiphons [une des formes du chant grégorien], on chante les leçons sacrées, une multitude noble de croyants crient fort les miracles du Christ et des louanges triomphantes à leur Créateur se font écho, les coeurs joyeux, de bouche en bouche

Que dirai-je maintenant de Willibald, mon maître, et votre frère dévoué? Qui fut plus remarquable que lui dans la piété, plus parfait en humilité? Qui plus distingué en patience, plus strict en tempérance, plus grand en douceur. Quand fut-il jamais en retard pour consoler les abattus. Qui fut plus soucieux d'assister les pauvres ou plus anxieux de vêtir ceux qui étaient nus? Ces choses sont dites non par vantardise mais pour rappeler ce que j'ai vu et entendu, choses faites non par le pouvoir de l'homme mais par le prêt de Dieu de sorte que, selon les mots de l'Apôtre: "Celui qui se glorifie puisse se glorifier en Dieu". Amen

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