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Les pélerinages à l'époque carolingienne

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L'idée de pélerinage. Les lieux de pélerinage

Jérusalem, Rome et St-Jacques de Compostelle, ainsi que d'autres sanctuaires plus locaux, étaient les principaux lieux de pélerinage à l'époque carolingienne. Il semble qu'alors, les pélerinages étaient devenus une obligation. L'idée de pélerinage est née lorsque des voyages à Jérusalem eurent lieu aux débuts de la Chrétienté. La conversion de l'empereur Constantin et le voyage de l'impératrice Hélène contribuèrent largement à accroître le mouvement. La reconnaissance officielle du christianisme par l'empereur Constantin contribua fortement à la prospérité de la Terre Sainte, qui se couvre de riches églises et attire de nombreux pélerinages. Jérusalem, à la fin du IVème siècle, était ainsi devenue un lieu de pélerinage, où l'on venait depuis la Gaule, la Bretagne, la Perse ou l'Arménie. Les autres endroits liés aux disciples du Christ, par ailleurs, devinrent rapidement aussi des lieux de pélerinage: on pensait que les pécheurs pouvaient y gagner leur ré-admission dans l'Eglise. Rome, avec les tombeaux de Pierre et de Paul, devint aussi, dès la deuxième moitié du IIIème siècle, un lieu de pélerinage. Les pélerins n'hésitaient pas à se rendre sur les tombes des apôtres au risque d'y être arrêtés, jugés et exécutés. Le mot "Rome" finit même -ainsi en anglais le verbe "to roam"- par signifier l'idée de déplacement. Ce n'est qu'au IXème siècle, sous le règne du roi Alphonse II (791-842) que la tombe de St Jacques fut découverte, une route de pélerinage commençant de s'établir, menant à Saint-Jacques de Compostelle, en Espagne du nord-ouest. Dans l'empire carolingien, enfin, les sanctuaires des saints locaux faisaient aussi l'objet de pélerinages. Ainsi le très prisé sanctuaire de St Martin à Tours. En Europe, en Irlande et en Angleterre, d'autres sanctuaires étaient fréquentés, mais essentiellement par les populations locales. En liaison avec les pélerinages, apparut le concept de reliques, cet intérêt pour les objets liés à des saints, à leurs corps, ou au Christ. La pratique devint générale au VIème siècle, les églises donnant à d'autres parties de leurs reliques ou les pélerins de Rome se voyant demander d'en ramener des ossements, anonymes des Catacombes, puis, au IXème siècle, les ossements de grands martyrs ou de grands saints. Un grand "remuement" de reliques a lieu à Rome sous le pontificat de Paul Ier (757-767); il correspond au caractère dangereux qu'à l'époque prennent les pélerinages aux catacombes de la campagne romaine et qui est accentué par les attaques lombardes. Apràs un ralentissement sous les pontificats d'Adrien Ier et Léon III, de 772 à 816, qui tentent de rétablir les dévotions aux catacombes, le mouvement reprit avec intensité sous Pascal Ier (817-824): le 20 janvier 817, ce seront 2300 corps transférés d'un coup aux églises de Rome. Ce grand mouvement de reliques fit naître des convoitises et les translations firent aussi évader -de façon autorisée ou pas- des reliques dans tout le continent européen; des courtiers et des intermédiaires se faisaient les pourvoyeurs du trafic. Alors que jusque là, on s'était contenté de rapporter des objets qui avaient été en contact des martyrs, chaque église d'Europe voulut désormais ses reliques ce qui, par ailleurs, aboutit à ce qu'on autorisa la fragmentation des corps auparavant condamnée. Le canon 7 du concile de Nicée II, par ailleurs, rendait obligatoire la présence de reliques dans chaque église. Les grandes reliques, celles tenant au Christ, se trouvent à Byzance; ainsi, les reliques de la Passion furent rapatriées de Jérusalem à Constantinople par les empereurs byzantins entre les VIIème et Xème siècles et conservées, à Constantinople, dans une chapelle du palais impérial dédiée à la Vierge. Rome est plutôt le pays des reliques des saints, ceux qui ont été martyrisés pendant les persécutions romaines. Charlemagne lui-même s'était soucié de réunir de nombreuses reliques liées à l'enfance de Jésus, à la Vierge ou à St Jean-Baptiste

Pour ce qui est de Jérusalem, des guides ou des récits de voyage apparurent rapidement. Ainsi le célèbre "Pélerinage de Bordeaux" écrit dès 333 ou le "Peregrinatio Sanctae Silvae', vers la fin du IVème siècle. Les routes de pélerinage mêmes tendirent rapidement à se fixer, les clercs étudiant les itinéraires, des corps de troupes s'assemblant pour la protection des pélerins ou des hospices étant établis au long des routes, avec les aumônes des fidèles, pour accueillir les pélerins. De Paris, il fallait habituellement 4 mois pour arriver à Rome ou à Compostelle et retour, et une année pour Jérusalem. Les autorités d'Eglise se préoccupèrent rapidement de ce que les pélerinages ne tournent pas en abus ou scandales, insistant sur le fait que les pélerinages -particulièrement celui de Jérusalem- n'étaient pas des obligations de foi. L'idée de base était que le pélerinage ne devait pas être considéré comme un voyage vers des lieux exotiques mais comme, au contraire, un acte de pénitence. Les pélerins, en effet, devaient porter un habit pénitentiel et ils vivaient de mendicité. Les pélerinages, de plus, devinrent le punissement de certains crimes. Le voyage, d'une façon générale, était dur et dangereux. Les textes de l'époque carolingienne qui retracent des pélerinages sont deux textes du voyage de St Willibald, le neveu de St Boniface -dont les trois ans qu'il passa à Jérusalem- et le récit de son propre voyage par le moine français Bertrand qui, en 868-869, avec deux de ses frères, visita l'Egypte et la Palestine. La route de Rome était la "via Francigena", puis, pour Jérusalem, le pélerin continuait jusqu'au Sud de l'Italie où il s'embarquait à destination de la Terre Sainte. On ne sait pas si les trois routes de Compostelle existaient déjà à l'époque. En 876, Charles le Chauve fit dont à la cathédrale de Chartres du voile de la Vierge, inaugurant un important mouvement de pélerinages vers la ville

->La "Via Francigena"
La "Via Francigena" est une route du haut Moyen Age reliant Canterbury à Rome. Elle était la route des pélerins de Rome. Une partie de la Via Francigena correspondait à la voie lombarde qui permettait, depuis vers 650, de rejoindre Pavie aux duchés lombards du Sud via Lucques, Sienne et l'ancienne Via Cassia jusqu'à Rome. Cette portion portait le nom de Via di Monte Bardone, du nom d'un col emprunté au début de son tracé. C'est d'ailleurs de cette époque que date le mot "route", "rotta" ("direction à suivre"), de "rupte" ("ruine" -des anciennes voies romaines qui laissent la place à des sentiers ou des pistes qui quadrillent un territoire (ils convergent et sont pavés à proximité des agglomérations, abbayes, les cols et les gués)). Lorsque le royaume des Lombards passa aux Francs, la Via di Monte Bardone prit son nom de Via Francigena, la "route qui provient de France" -nom qu'on trouve officiellement dans l'"Actum Clusio", document de 876 de l'abbaye San Salvatore du mont Amiata en Toscane et, outre sa fonction de route de pélerinage jusqu'à Rome -et au-delà, la Terre Sainte via les ports italiens, elle devint l'axe de communication principal entre le nord et le sud de l'Europe, emprunté aussi par les marchands et les soldats. Elle avait d'abord été appelée l'"Iter Francorum" (la "route des Francs") par Willibald, évêque d'Eichstätt, en 725, dans son Itinerarium sancti Willibaldi et elle portait encore d'autres noms: la Via Francigena-Francisca en Italie et en Bourgogne, "Chemin des Anglois" dans le royaume franc (à partir de l'évangélisation de l'Angleterre vers 607) ou "Chemin Romieux". L'ancien parcours de la Via Francigena a pu être reconstitué grâce aux notes d'un illustre pèlerin: Sigerico, archevêque de Canterbury, en 990, qui rentrant en Angleterre depuis Rome, nota les 80 lieux -séparés d'étapes de 20km- où il s'était arrêté. Une partie de la Via Francigena, au Moyen Age classique, fut incorporée dans les routes du commerce qui reliaient l'Italie aux foires de Champagne puis elle disparut au profit de l'axe Bologne-Florence. La Via Francigena, de nos jours, retrouva son intérêt suite à celui qu'avait retouvé le Chemin de St-Jacques de Compostelle en Espagne

Rome et Jérusalem

Une fois le catholicisme reconnu dans l'Empire romain, l'empereur Constantin fit construire les grands monuments chrétiens de Rome et en donna de nombreux au pape, dont le palais du Latran. St Pierre avait été enterré le long du cirque Vatican, où il avait été martyrisé, et un petit monument avait été construit là. Constantin, en 324, fit construire, pour l'apôtre, une gigantesque basilique (80 mètres de long, 38 mètres de haut), orientée à l'Ouest, avec 5 nefs et en forme de tau. Ce fut la basilique St-Pierre. Un siècle plus tard, un jardin de 21 mètres fut placé devant l'église, orné d'une fontaine en son centre. Il s'appelait "le Paradis" et était essentiellement décoré de symboles évoquant l'immortalité. Cette ancienne basilique perdura jusqu'au XVIème siècle, époque à laquelle elle fut remplacée par l'actuelle basilique. Dans celle-ci a été conservée la dalle de porphyre sur laquelle eut lieu le couronnement de l'an 800. Le pélerinage à Rome était le plus prisé car la ville était celle de St Pierre, St Paul et de nombreux martyrs. Tous les grands évangélisateurs de ces temps firent le pélerinage de Rome et, à côté des simples clercs et des gens de condition modeste, on y voyait aussi les prélats, les aristocrates, les princes et les rois. Le pélerinage de Rome montrait aussi le pouvoir de la papauté. Comme les monastères avaient fini par ne plus suffire à accueillir les pélerins, le pape fit construire un hospice au VIème siècle puis on finit par construire des "scholae", des institutions qui accueillaient les pélerins par origine "nationale". Des guides existaient, ainsi, vers 630, la "Noticia ecclesiarum urbis Romae". L'empereur Constantin fit également construire une basilique -plus petite- pour l'autre apôtre de Rome, St Paul, près de la Via Ostiensis, la voie qui menait à Ostie, le port de Rome. Ce fut la basilique St-Paul-hors-les-Murs. Elle fut agrandie entre 384 et 410 et elle devint semblable à celle de St Pierre, avec 5 nefs et un jardin en tête. Un tremblement de terre affecta la basilique; on la restaura sous le pontificat de Léon le Grand (440-461) en lui ajoutant des décorations. Le pape Symmaque (590-640) ajouta un bâtiment pour recevoir les pélerins et Charlemagne y ajouta un monastère pour abriter la communauté de moines qui étaient attachés à l'église. La basilique de St Paul fut pillée par les Lombards en 739 et les Sarrasins en 847. Le pape Jean VIII (872-882) fit construire autour de la basilique un mur fortifié, semblable à la muraille Léonine que le pape Léon IV avait fait construire autour du Vatican. Aux VIIème et VIIIème siècles, la population de Rome n'était plus que de 60000 personnes, comparé au 1,5 million qui la peuplait à l'époque de l'Empire romain. Vers le Xème siècle, les forums impériaux sont, sauf les grandes structures architecturales en ruine, retournés aux champs et des fermes et diverses habitations y ont été construites; le Forum romain, lui, a été progressivement laissé à l'abandon à partir du VIIème siècle et la plupart des monuments ne furent plus identifiables dès le VIIIème siècle puis finiront par être ensevelis sous terre au Moyen Age (les seuls édifices préservés seront ceux qui auront été transformés en église). Les Romains, depuis les débuts de la Ville, ont établi des carrières souterraines sous Rome pour y chercher du tuf, une roche volcanique ou des cendres volcaniques qui servaient de mortier. Le résultat en a été, surtout dans la partie sud-est de la ville, un labyrinthe de tunnels. Au cours des années, une fois l'activité extractive épuisée, les Romains ré-utilisèrent ces tunnels comme catacombes, pour la culture de champignons ou comme système d'égoûts improvisé. Ainsi se présentait Rome à l'époque carolingienne

Jérusalem entre IVème et Vème siècles d'après la mosaïque de Madaba
Jérusalem entre IVème et VIème siècles d'après la mosaïque de Madaba

Les Romains, en Palestine, après qu'ils eurent écrasé la dernière révolte juive vers 135 de notre ère, s'attachèrent à détruire et à désacraliser tous les lieux attachés au judaïsme et même au catholicisme. L'ancienne Jérusalem fut rasée et on construisit sur son emplacement une ville romaine entièrement nouvelle, "Aelia Capitolina". La ville nouvelle, de façon intéressante, était centrée sur le Golgotha, le lieu du supplice du Christ. Les Romains construisirent un temple de Jupiter au-dessus du tombeau du Christ et un temple de Vénus au-dessus du Golgotha. Lorsque le christianisme acquit un statut plus tolérant dans l'Empire romain, l'empereur Constantin fit détruire les temples et, vers 336, fit construire, à leur place, une grande basilique. La basilique enserrait le lieu du Calvaire et le tombeau du Christ. L'empereur Constantin fit démolir le temple romain que l'empereur Hadrien avait fait élever 200 ans plus tôt. Les travaux de construction creusèrent jusqu'à la niche funéraire, ou "loculus", où avait été placé le corps du Christ, découpèrent entièrement la zone rocheuse et l'inclurent dans la rotonde de la basilique. Pour ce qui est des autres lieux liés au Christ en Palestine, ils étaient rapidement devenus des lieux de culte au cours de la période pré-byzantine puis, au cours de l'époque byzantine (323-638), un grand nombre de sanctuaires, églises, monastères et hospices de pélerins se développèrent dans tout le pays, particulièrement à Jérusalem. Jérusalem, vers l'an 500, abritait une population de 30 à 40000 personnes et les Byzantins en avait fait leur centre religieux fondamental, investissant énormément dans la ville. Y venaient des milliers de pélerins chaque année. Jérusalem connut alors la période commercialement la plus faste de son histoire chrétienne. Le "cardo" -l'axe Nord-Sud de la ville- abritait de nombreuses échopes et était bordé de colonnes, comme l'était une autre rue. Le plan de Jérusalem à cette époque est représenté sur une mosaïque célèbre du VIème siècle, la mosaïque de Madaba, qui fut découverte en 1894 dans une église byzantine de Jordanie. Elle permet de comprendre l'agencement de la ville entre le IVème et le VIème siècle, les principales rues et les sites chrétiens étant représentés. La basilique de Constantin fut détruite par les Perses en 614 mais elle fut rapidement reconstruite, aux alentours de 15 ans plus tard. En 638, les Arabes conquirent toute cette partie de l'Empire byzantin mais le patriarche de Jérusalem obtint d'un général arabe que les bâtiments ne soient pas détruits. Ce général, de plus, prit un décret par lequel il interdisait que les Musulmans n'utilisent la basilique pour leurs prières. Une partie de la basilique fut affectée par un fort tremblement de terre au début du IXème siècle, l'ensemble étant réparé dès 810. On envisagea, en 935, de construire une mosquée au long de l'édifice puis la basilique brûla deux fois, en 938 et 966, étant à chaque fois restaurée. L'ancienne basilique fut finalement détruite en 1009 par le calife fatimide Al Hakim. Une trêve avec Byzance permit que l'on reconstruisît un nouveau bâtiment en 1045, lequel fut à son tour remplacé par l'église construite par les Croisés. En ce qui concerne la Palestine, d'une façon générale, elle avait été, au temps de la conquête arabe, divisée en deux districts militaires -ou "Jund", le principal comprenant Jérusalem. Il semble que le calife abasside de Bagdad, dont les territoires comprenaient théoriquement la Terre Sainte, n'ait jamais eu un vrai contrôle sur certaines de ses parties. La prise du pouvoir par les Fatimides, en Egypte, vers 970, fit que la Palestine passa sous leur contrôle. Les sources carolingiennes font état de ce que Haroun Al Raschid, le calife contemporain de Charlemagne, permit, d'une part, que des ambassadeurs de l'empereur visitassent le Saint Sépulcre et, d'autre part, il finit par donner à l'empereur carolingien la possession de la Terre Sainte, n'en conservant que la garde et la gestion. Vers 850, à l'époque des petits-fils de Charlemagne, toute terre de l'Empire, pour tant de surface, devait encore payer un sou consacré au rachat des captifs chrétiens de Terre Sainte... Charlemagne, en 808, fit faire un recensement des propriétés chrétiennes de Palestine, le "Commemoratorium de casis Dei"

Website Manager: G. Guichard, site Learning and Knowledge In the Carolingian Times / Erudition et savoir à l'époque carolingienne, http://schoolsempire.6te.net. Page Editor: G. Guichard. last edited: 12/26/2018. contact us at ggwebsites@outlook.com
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