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L'Afrique du Nord romaine

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Cette page donne des éclaircissements rapides quant à la présence de Rome en Afrique du Nord. Elle permet de mieux situer culturellement cette partie de la Méditerranée qui, à l'époque carolingienne, était, pour son nord-est, sous l'autorité du "roi des Africains"

Des Berbères à Rome

L'Afrique du Nord est le pays des Berbères. Les Berbères sont les descendants des hommes préhistoriques de cette partie de l'Afrique. Vers il y a 20000 ans, une partie d'un groupe humain situé entre Erythrée et Ethiopie, s'est installé dans l'Afrique du Nord et, vers 6500 avt. J.-C., ils ont connu un apport de population, par la branche maternelle, venant de la péninsule ibérique (ce qui peut rappeler la lègende des Mèdes, Perses et Arméniens de l'ancienne armée d'Hercule, mort en Espagne s'installant de l'autre côté du détroit de Gibraltar). Ils ont connu également des apports négroïdes. Ce mouvement d'Est en Ouest fut également repris en les termes que les Berbères seraient les descendants de Cham et Canaan. Cela fait qu'à l'époque néolithique, on finit par repérer précisèment le groupe des Capsiens, ancêtres des Numides en particulier mais plus certainement, fondateurs de la culture berbère en général. Entre vers 5500 et 2000 avt. J.-C., ils furent un peuple des oueds et des cols de montagne, consommateurs d'escargots. Vers 3000 avt. J.-C., ils colonisèrent le Sahara jusqu'au Hoggar alors que le désert, encore accueillant, entrait dans une phase d'assèchement rapide. Les Capsiens sont ainsi à l'origine des peintures rupestres du Tassili n'Ajjer. A l'étape suivante, vers 2500 avant notre ère, les Capsiens ont donné naissance à divers peuples berbères: les Gétules, leurs descendants directs -et les plus nombreux- installés à la lisère sud du Tell algérien. Pasteurs et nomades à cheval ou à chameau, remontant par épisode vers le Nord, partagés entre une branche occidentale (Maroc) et orientale (région de Tébessa-Souk Ahras en Algérie, surtout de la tribu des Zénètes). Une coalition de Gétules, vers l'an 1000 avt. J.-C. conquérera l'Egypte et fondera la XXIIème dynastie. Les Maures, Berbères de l'Ouest de l'Afrique du Nord. Les Garamantes, dans doute issus d'une fraction du peuple originel installé à l'Ouest du Nil, en Egypte, ils finirent par nomadiser entre la Libye et l'Atlas marocain et ont peut-être atteint le Niger et Gao. Ils sont les plus civilisés des anciens Berbères et possèdent un état et de grandes villes fortifiées au long des oasis du Sahara où ils font, avec le Soudan et le Niger, le commerce de l'ivoire, de l'or et des esclaves. Les Touaregs, enfin, sont la branche des Berbères qui se sont installés dans le Sahara central et font la transition avec les peuples noirs. Les ancêtres des Touaregs viennent du métissage entre la civilisation "ibéromaurusienne", une civilisation d'Homo sapiens du Sud d'Oran, en Algérie, et les Capsiens, qui eut lieu vers le IXème millénaire avt. J.-C. D'autres tribus, indépendantes, existent aussi mais sont mal déterminées, ainsi les Baquates, Bavares ou Musulames ou le sont mieux, ainsi les Numides, sur le Tell, cette frange prospère de l'Afrique du Nord, entre Méditerranée et steppes, composés des Massaesyles à l'Ouest et des Massyles à l'Est. Peuple de tribus, avec des chefs ou des rois, formant à l'occasion de puissantes confédérations, les Berbères, pendant l'Antiquité, furent connus, avant la conquête romaine, sous les divers noms de Libyens, Maures, Gétules, Garamantes ou encore Numides. Divers peuples, alors, arrivèrent successivement à leur contact: les marchands phéniciens, fondateurs de comptoirs; les Carthaginois, mélange de Phéniciens et de Berbères, les Romains et, plus tard, les conquérants arabes. Les Grecs distinguaient les Berbères sous les noms de Libyques, Numides et Maures. La persistance de ces populations jusqu'à l'époque actuelle, malgré les occupations successives, fait que l'Afrique du Nord, d'une façon générale, continue d'être le pays des Berbères. Les Berbères se nomment eux-mêmes "Imazighen", pluriel d'Amazigh, dont l'étymologie varie entre "hommes libres" et "rebelles organisés". Amazigh pourrait aussi être l'ancêtre des tribus berbères. La langue berbère, ou Tamazight ("langues des Imazighen") est une branche de la famille des langues afro-asiatiques ainsi qu'une langue chamito-sémitique (comme l'hébreu, le copte ou les langues tchadiques). La langue berbère, comme les tribus, s'est perpétuée au cours de l'histoire et, aujourd'hui, les parlers arabes maghrébins en demeurent fortement influencés. L'Afrique du Nord, cependant, est un espace compartimenté, peu propice à l'unité. Aussi, les Berbères, malgré des échanges commerciaux entre eux, se sont-ils jamais parvenus, sauf les trois royaumes maures et numides, à l'unité et ont laissé leur pays, quoique gardant une propension à la révolte, à l'occupation étrangère. Pour avoir une image simple du legs culturel berbère à l'Afrique du Nord, on pourrait dire que les Numides (Est de l'Algérie contemporaine) étaient des cavaliers, les Maures (Maroc, Ouest et centre de l'Algérie), dits descendants de l'armée de Perses et d'Arméniens d'Hercule, étaient des nomades et des commerçants; les Gétules (début du Sahara, au Sud de l'Aurès) étaient les gens du désert à cheval -qui ont, un moment, conquis l'Egypte. Les Garamantes (partie ouest de la Libye), qui contrôlaient les routes des oasis, avaient, quoiqu'anthropophages, une civilisation urbaine avancée

A partir de vers 250 avt. J.-C., la puissance montante du monde antique est Rome. Après l'Italie, la Méditerranée occidentale semble une aire naturelle d'expansion et cela va entraîner la longue confrontation des guerres puniques, les guerres avec Carthage, pendant 120 ans. Les populations berbères y sont naturellement mêlées. Au début des guerres puniques, l'Afrique du Nord, outre Carthage, comptait trois royaumes berbères: la Maurétanie, royaume des Maures, à l'Ouest et deux royaumes numides; au centre de l'actuel Maghreb, le royaume des Masaesyles et, à l'Est le royaume des Massyles. Les Gétules et les Garamantes sont devenus essentiellement des mercenaires de Carthage et de ces royaumes. Massinissa, chef des Massyles, contribua de façon décisive à la victoire de Rome sur Carthage et les Massaesyles mais finit par représenter une puissance que Rome ne pouvait admettre, étendant son royaume jusqu'en Cyrénaïque. Le royaume, passé à Jugurtha, son petit-fils, allié à la Maurétanie, trahi par elle, est conquis par Rome en 105 avt. J.-C. La Maurétanie, gratifiée par Rome du royaume numide des Masaeysiles, sans doute impliquée dans les derniers combats des Ptolémées d'Egypte et de l'hellénisme contre Rome, fut petit à petit conquise par Rome jusque vers 40 de notre ère. Les Gétules se sont portés mercenaires pour Rome et ont été récompensés par des terres à la frontière avec la Mauritanie mais leur sédentarisation finira par les faire rapidement disparaître en tant que peuple. Les cavaliers maures servent Rome en Europe. Les Garamantes, montés sur leurs chariots à quatre chevaux, résistent jusqu'en 70 de notre ère et réussissent à déclencher une révolte générale des Berbères, de la Maurétanie à la Cyrénaïque. Elle sera réprimée par Rome et ses alliés Gétules. Comment Rome organise-t'elle l'Afrique du Nord? D'abord un temps encore dynamique, qui mène à l'annexion complète de toute l'Afrique du Nord. Une première province romaine est créée, l'Africa. De taille modeste, elle occupe le nord-ouest de l'actuelle Tunisie, l'ancien territoire de Carthage et un fossé, la "fossa regia", la protège. Quand Jugurtha perd la Numidie, la partie ouest de celle-ci est donnée à la Maurétanie alors que l'Est reste un protectorat romain. Elle devient province romaine sous Auguste qui, finalement regroupe l'"Africa vetus" et cette "Africa nova" en une seule province (sénatoriale) celle de l'Afrique proconsulaire. Après que le royaume numide ait été rendu pendant peu de temps à un roi lequel devient ensuite roi d'une Maurétanie, en 25 avt. J.-C., devenue protectorat romain, le royaume numide est alors partagé définitivement entre Maurétanie et Afrique proconsulaire. La partie intégrée à l'Afrique proconsulaire, la "Numidie", est cependant sous les ordres d'un légat impérial, statut unique dans l'Empire, lequel, de plus, sera, pendant longtemps, le chef de la IIIème légion Augusta, la légion chargée de la fin de la conquête et de l'ordre en Afrique. Cela jouera sans doute un rôle dans l'importance de cette Numidie. En 42, lorsque la Maurétanie est définitivement annexée, elle est partagée entre deux provinces (procuratoriennes), la Maurétanie Tingitane -la plus à l'ouest- et la Maurétanie Césarienne, héritière des Numides massaesyles. L'Afrique du Nord commence de devenir le pourvoyeur de Rome en blé et en bêtes des jeux du cirque. La période suivante, sous les Flaviens, jusque vers l'an 100, est une période de stabilisation et l'Afrique est romanisée. Le IIème siècle est, sous les Antonins, le siècle de la "Pax Romana". Les provinces d'Afrique connaissent aussi leur apogée. Elles reçoivent pour la première fois la visite d'un empereur, Hadrien, en 128. Le "parti africain", à Rome, joue sur son rôle, devenu primordial, sur l'approvisionnement de la capitale. Enfin, Septime Sévère, le premier des Sévères, au tournant du IIIème siècle, Africain, devient empereur. La Maurétanie restera une terre plus lointaine, sujette aux rébellions récurrentes des tribus. La Numidie devient enfin province à part entière, détachée de la Proconsulaire (193) et la présence romaine s'étend vers l'Ouest et vers le Sud; le réseau routier se développe et la Tripolitaine s'ouvre aussi aux cultures commerciales. Avant la crise des années 250, l'Afrique compte de 7 à 8 millions d'habitants (soit un-sixième de la population totale de l'Empire). La crise du IIIème siècle -qui, d'ailleurs commence dans l'actuelle El-Djem, en Tunisie- déclenchée par des usurpations du pouvoir impérial et la pression des Germains et des Perses sur les frontières, affecte aussi l'Afrique: le système de défense faiblit, l'influence romaine aussi, des tribus se révoltent. Dioclétien, à la fin de la crise, réorganise les provinces en Afrique, comme dans le reste de l'Empire: on crée la Maurétanie Sitifienne (ou Tabienne) en la séparant de la Maurétanie Césarienne. La Maurétanie Tingitane continue d'exister ainsi que la Numidie (laquelle a été brièvement partagée entre la Numidie Cirtéenne et la Numidie Militienne, ou Militaire). L'Afrique proconsulaire est divisée en la Proconsulaire (au nord), la Byzacène (au centre) et la Tripolitaine (au sud-est). Si la prospérité revient au IVème et Vème siècles, l'Afrique est l'objet d'une suite d'usurpations et de rébellions qui continuent de se fonder sur le rôle des provinces en terme d'approvisionnement de Rome. Les Grandes Invasions amènent ensuite les Vandales, partisans de l'hérésie arienne, qui fondent un royaume auquel échappent quelques royaumes berbères comme dans l'Ouarsenis ou l'Aurès. Les Vandales sont vaincus lors de la reconquête justinienne, en 534 et les Byzantins entendent reprendre le contrôle des Berbères mais se concentrent surtout sur la partie est, la plus ancienne, qu'ils fortifient et qui retrouve une prospérité économique, servant toujours de grenier à blé pour leur capitale, Constantinople. Enfin, en 670, ce sont les Arabes. Ceuta est prise en 709. L'Afrique devient l’Ifriqiya et l'assimilation des Berbères chrétiens, quoique rebelle d'abord, puis chaotique, sera définitive assez tôt. Beaucoup de Berbères adhéreront au kharidjisme, au VIIIème siècle, un Islam dissident. L'occupation romaine a systématiquement encouragé la production céréalière pour l'approvisionnement de Rome et il semble même que l'oléiculture ait constitué, cependant, l'essentiel de la richesse de l'Afrique. L'arboriculture est riche aussi ainsi que les cultures locales. Les troubles du IIIème siècle ne semblent pas avoir trop freiné le dynamisme économique des provinces africaines. L'Afrique du Nord, enfin, a joué un grand rôle dans le dévelopement de l'Eglise dans l'Empire romain. Alors que le syncrétisme entre cultes locaux et romains donnent Saturne l'Africain, que l'Afrique reste une terre de magie et que le culte impérial y est très fort, c'est en Afrique que le catholicisme s'occidentalise, passe au latin et fusionne ses éléments grecs et romains, ou voit se développer un nombre important de martyrs. L'Afrique est la patrie de Tertullien et de St Augustin. L'Afrique romaine, on le notera, se sera étendue des côtes du Maroc au Golfe de Syrte. La province de Cyrénaïque (la région de l'actuelle Benghazi), quoique de peuplement berbère voire l'Ouest de l'Egypte -soit le Machrekh actuel- échappent à cette Afrique du Nord. Quoiqu'aussi provinces de Rome, elles sont plus culturellement rattachées à l'aire des Ptolémées alexandrins et séparées par le désert. On notera aussi que, malgré l'unité apparente de l'identité berbère, chacune des provinces d'Afrique du Nord, sous la domination romaine, conserva son identité, qui correspondait aux anciens royaumes berbères, lesquels avaient uni des régions naturelles de l'Afrique du Nord et les souverains mêmes de ces royaumes devaient souvent faire face aux rébellions de certains de leurs sujets. Carthage ne fut jamais que le chef-lieu d'une des provinces romaines d'Afrique et l'Afrique romaine se partageait entre les plaines et plateaux fertiles isolés par les montagnes et régions déshéritées des steppes d'où les tribus menaçaient les sédentaires. Aussi, l'histoire de la présence romaine reprend-t'elle ce que fut l'occupation carthaginoise avant elle, celle d'un conquérant qui occupe d'abord les plaines fertiles et qui doit ensuite, progressivement, contrôler les zones qui servent de repaire aux pillards. Il est possible aussi qu'une ligne de partage se soit faite entre les territoires de Carthage, de Béjaia (Algérie) jusqu'à la Syrte (Libye) et les Numidies et la Maurétanie, la partie occidentale des Numides devenant la Maurétanie Césarienne. Le Bas-Empire, comme partout ailleurs, verra, en Afrique, ressurgir les veilles identités, la nouvelle Proconsulaire englobant jusqu'à Hippone, soit l'ancien territoire de Carthage qui, jusque là, faisait partie de la Numidie romaine

Le limes d'Afrique

Comme partout ailleurs, la présence romaine s'approfondit par le biais des routes et chaque zone pacifiée est protégée des zones encore extérieures. Cette limite protective est dite un "limes", système défensif typiquement romain, qui s'établit, sur les frontières de l'Empire. L'originalité du système défensif romain en Afrique du Nord consiste en des routes de rocades, jalonnés de points fortifiés et, exceptionnellement, de murs ou fossés car le relief ne dispose pas de grands fleuves, comme en Europe et est étiré d'Ouest en Est. Ces rocades permettent le déplacement rapide des troupes et des commerçants; des voies transversales unissent les rocades aux villes et à la zone côtière. La zone protégée finira par former un limes englobant toute l'Afrique du Nord, de l'Atlantique à la Grande Syrte. La première occupation romaine, celle de l'antique Carthage, jusque vers 22 de notre ère, commence par une présence militaire permanente, au moins une légion, probablement basée à Utique. Les guerres civiles amènent à 4 légions sous le triumvir Lépide. A partir d'Auguste, seule la IIIème légion Augusta devient responsable de la première province africaine, basée à Ammaedara, aux frontières de l'actuelle Algérie. Elle restera longtemps sous le commandement du légat impérial de Numidie. Des routes sont aménagées depuis Carthage. En 22, lors d'une révolte, on construit une première rocade entre Leptis Minor (vers Sousse, en Tunisie) et Hippo Regius (Annaba, Algérie) via Cirta (Constantine, Algérie) pour faciliter le déplacement de la IIIème Augusta. Sont ainsi aussi surveillés l'Aurès, avec la tribu des Musulames et la zone des Chotts, avec les Gétules. Ensuite jusque vers 100, Rome assure son emprise sur les Aurès et la Maurétanie Césarienne. L'un des axes d'occupation, sous les Flaviens, pendant la fin du Ier siècle, consiste à entourer l'Aurès, ancienne partie de la Numidie, région des Zénètes, une tribu gétule rétive, par le Sud, à partir de Tacapa (Gabès, Tunisie). Théveste (Tébessa, Algérie) devient un noeud routier stratégique et le siège de la IIIème Augusta. Lambèse est construit au Nord de l'Aurès. L'annexion de la Maurétanie, depuis vers 42, vient compliquer ces progrès. Rome ne peut d'abord se permettre, en Maurétanie césarienne, qu'une route côtière, qui relie les ports, de Igligili (Jijel, Algérie) à Rusaddir (Mélilla, Maroc). Ce n'est que sous Trajan, vers 105, que les Aurès sont définitivement encerclés par une ligne de camps qui relie Tacapa à Sétif via Biskra et la Numidie pacifiée. Sous Hadrien, vers 125, les accès à la Maurétanie Césarienne sont fortifiés contre les tribus maures. Pour se rapprocher de la nouvelle frontière, la IIIème Augusta est transférée à Lambèse. Sous ces deux règnes, le contrôle de la Maurétanie Césarienne s'étend via une route de l’arrière-pays qui relie la vallée du Chélif, en Algérie jusqu'à Cuicul (Djemila, Algérie), en Numidie via la zone des forts d'Hadrien. De plus, à une date indéterminée mais s'étendant vraisemblablement sur plusieurs règnes, se met en place le "Fossatum Africae", impressionnante série d'ouvrages de protection du Sud et de l'Ouest de l'Aurès. Il s'agissait d'un fossé d'une largeur de 4 à 10 m, ajouté d'un remblai ou d'un mur, avec des tours ou des fortins en avant ou en arrière. Cette construction pourrait correspondre aux murs d'Hadrien et d'Antonin mais pourrait aussi bien être postérieure. C'est en Numidie, des Zibans à l'Aurès, en Algérie, que la frontière sud de Rome est la plus naturellement fortifiée mais ce lieu est également l'axe des invasions Nord-Sud par la "brèche de Biskra" qui prolonge une route du désert jalonnée d'oasis. Jusqu'en 200, on assiste à l'apogée du limes d'Afrique. La progression en Césarienne continue avant la crise du IIIème siècle, sous les Flaviens, qui, vers 201, construisent une nouvelle rocade, la ""Nova Praetentura", qui contourne le massif de l'Ouarsenis et l'ancien pays des Masaesyles, entre Uzinaza (Saneg, Algérie) et Pomaria et Numerus Syrorum (Tlemcen, Algérie et Maghnia, Maroc); elle est bordée de postes militaires et des populations civiles sont installées. L'armée de Numidie, en 198, a également établi une position très avancée à Castellum Dimmidi (nord-est de Laghouat, Algérie), sur les derniers contreforts avant le Sahara, pour contrer les nomades. A la même époque, vers 201, Septime Sévère a fortifié par les deux rocades du Limes Tripolitanus, l'arrière-pays des villes côtières d'Oea, Sabratha et Leptis Magna, et d'autres postes avancés ont été établis aux confins du désert à Cydamus (Ghadamès) et Bu Njem (Libye) pour aider les caravaves marchandes vers le Fezzan et les Garamantes. Par la ligne du limes qui passe par les Chotts, la Numidie rejoint la Tripolitaine. Pour ce qui est de la Maurétanie Tingitane, la plus à l'Ouest des provinces d'Afrique (l'actuel Maroc), on notera qu'il y a solution de continuité avec la Césarienne: le Maroc oriental ne vit jamais de Romains et la communication se faisait par route maritime. Il se peut que cela ait été dû à cette sorte de zone aride, qui, du Sahara, 400km plus au Sud, débouche sur la côte, à l'actuelle Melilla, constituant une région de moindre potentiel agricole dans cette partie de l'Afrique du Nord. La Maurétanie Tingitane s'organisait par deux voies Nord-Sud partant de Tingi (Tanger) en direction de Sala (Saleh) et de Volubilis. Au long de ces routes, des garnisons semblent avoir été placées pour protéger les villes. La paix des zones rurales -et tribales voire nomades- était assurée par des accords avec les tribus, tels les Baquates pour Volubilis. On peut considérer que c'est à cette époque que le limes romain d'Afrique a atteint sa plus grande extension. C'est aussi l'époque où les Romains de la Tripolitaine s'enrichissent du commerce saharien. On commence de voir apparaître les chameaux qui servent au portage ou à l'armée. Mais l'époque voit aussi de nombreux Berbères quitter le Nord et passer au désert où ils s'installent et dominent les Sahariens. Des zones agricoles sont associées aux postes du limes et des soldats-paysans apparaissent. Le limes africain, comme en Syrie, autre région désertique, suit la courbe des 120mm/an de pluies

La crise du IIIème siècle voit le système de défense faiblir. La IIIème légion Augusta est dissoute en 238 (puis reconstituée en 253) et on réorganise l'organigramme militaire pour pouvoir redéployer les régions les plus menacées, ainsi la Numidie. On abandonne les zones sud des Maurétanies et de Numidie ainsi que les postes avancés du désert. Après la réorganisation des provinces et le retour d'une paix relative au IVème siècle, la stratégie romaine est modifiée, comme elle l'a été sur ses autres frontières: la zone du limes n'est plus occupée que par une armée de recrutement assez médiocre, répartie, par groupe d'une centaine d'hommes dans des forts multipliés. Le limes de la Numidie à la Tripolitaine est la zone qui fait l'objet du plus grand nombre de forces. En arrière, par contre, loin du limes, une forte armée d'intervention, mobile, peut intervenir sur les points qui le nécessitent. Deux révoltes de Maures marquèrent le siècle et ce nouveau système défensif permit de résister quelque temps aux Vandales. A une époque où les chameaux se sont généralisés, les Berbères du Sahara mènent des razzias contre le limes alors que certains sont peut-être associés à sa défense. Contrairement à la Syrie, où, face aux Sassanides, Rome a installé des forts lourds, avec limes de haut-plateau et guerre de siège, on a choisi, en Afrique, la guerre de mouvement. Par contre, en Numidie, on a maintenu un limes de type plus fermé, de type Germanie ou mur d'Hadrien, où les forts se succèdent tous les 2 ou 3 kilomètres. Après la reconquête de Justinien, ce sera le limes de Trajan qui sera de nouveau atteint. Quelles troupes avaient-elles protégé l'Afrique romaine? Dès l'an 6 avt. J.-C., après les guerres civiles romaines, la "Legio III Augusta", la "IIIème légion Augusta", ou encore l'"exercitus Africae" devient la seule légion romaine installée en Afrique du Nord. Elle prend ses quartiers à Ammaedara (Haïdra, actuelle Tunisie) -en vue de la pacification de la Dorsale tunisienne- et elle sera commandée par les plus hauts dignitaires des provinces d'Afrique. Elle comprenait alors 5000 fantassins et 120 cavaliers. L'implantation romaine progressant, elle s'installe en 75 à Théveste (Tébessa, Algérie) et dès 81 un de ses détachements s'intallé à Lambèse (Algérie), au pied de l'Aurès. Vecteur majeur de la romanisation en Afrique, elle est, à partir du IIe siècle, composée de soldats du lieu (92% des légionnaires) puis , à la fin du IIIe siècle, de 60% d'Africains romanisés. La IIIème Augusta doit assurer la paix de 7 millions et demi d'habitants. Pour la Maurétanie Césarienne, la légion recevra l'appui d'unités auxiliaires et utilisera les alliances avec les tribus maures. Hadrien, de plus, vers 125 de notre ère, fait venir aux confins de cette province des unités venues principalement d'Orient, donc habituées aux conditions arides: la IIème cohorte des Sardes et la VIème cohorte des Commagéniens; la Ière cohorte montée syrienne, elle, s'installe près de Biskra (Algérie). C'est pour être plus proche de ces troupes que la IIIème Augusta gagne Lambèse en 128, où elle restera cantonnée jusqu'à la fin du IIIème siècle. En plus du lieu de résidence principal la IIIème Augusta disposaient de quelques sites supplémentaires dans la région et ce sera elle qui occupera le poste avancé de Bu Njem. En 198, on retrouve la IIIème au Sud de la Maurétanie Césarienne, à Castellum Dimmidi, poste avancé aux confins du désert, accompagnée de détachements de la IIIème Gallica et les cavaliers de l’Ala Ia Pannoniorum. En 226 s'y adjoindront des archers montés palmyréens (des méharistes). Le limes du Sud de l'Aurès, par exemple, compte 20 forts (des "castellas") sur 60 km, qui comptent 100 soldats chacun. On retrouvera aussi la IIIème dans les postes avancés de la Tripolitaine. La Maurétanie Césarienne, administrativement, ne peut être défendue que par des troupes auxiliaires et non une légion de citoyens. En 107, 6000 hommes s'y trouvent sous trois ailes de cavalerie et dix cohortes qui occupent les postes. La capitale provinciale, Cherchell, est protégée par diverses unités dont la 6e cohorte dalmate. Certains auteurs pensent que, d'une façon générale, la supériorité romaine sur le limes tient à la valeur des troupes et à la cavalerie, utile face à des tribus mobiles. Les forts du limes ont deux parties, une enceinte renforcée à chaque angle et au milieu des cotés nord et sud et un bastion massif sur les côtés est et ouest, avec porte sur celui de l'est et un bâtiment central. On trouve aussi, adossés au mur extérieur de l'enceinte, des pièces pour le logement de la garnison et des magasins; il y a des bains. La IIIème Augusta est dissoute en 238 mais reconstituée en 253 et elle est encore mentionnée en 321 puis dans la Notitia Dignitatum. En Tripolitaine, on divise la zone en régions et on réduit les troupes -des vexillations et des numeri- au profit de la défense des régions plus exposées. La stratégie romaine se modifie, comme on l'a montré ci-dessus et s'organise entre troupes du limes proprement dit et armée mobile d'intervention à l'arrière -trois légions palatines et huit légions, dont la IIIème, et et dix-neuf vexillations. Chaque légion ne compte plus, désormais, que 1000 hommes. Les commandants des systèmes défensifs sont désormais les "comes" et les "duces" ("comtes" et "ducs"). Au Bas-Empire, on estime que, pour tout l'Empire romain, 360 000 hommes sédentaires tenaient un limes de 6000km, sans compter les troupes des fédérés et gentiles, ces paysans-soldats du limes romain

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