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La Vie de St Willibrord

I
Il y avait dans l'île de Bretagne, dans la province de Northumbrie, un certain propriétaire, de descendance saxonne, dont le nom était Wilgils, et qui vivait une vie chrétienne dévote avec sa femme et sa famille. Le fait fut porté au jour, par la suite, par des évènements miraculeux, car, après qu'il ait abandonné sa carrière dans le monde, il se consacra à la vie monastique. Peu après, comme son zèle pour la vie spirituelle augmentait, il entra, avec une ferveur encore plus intense, sur les chemins de la vie austère d'un solitaire, habitant dans les promontoires qui sont limités par la mer du Nord et la Humber. Là, dans une petite chapelle dédiée à St André, l'Apôtre du Christ, il servit Dieu pendant de nombreuses années en jeûnant, en priant et en veillant, avec ce résultat qu'il devint célèbre pour ses miracles et que son nom était sur toutes les lèvres. Les gens venaient vers lui en grand nombre, et, alors, il ne manquait jamais de les instruire avec de sages conseils et avec la parole de Dieu. Il était tenu en si grande estime par le roi et les nobles de ce pays, qu'ils lui firent cadeau, en don perpétuel, d'un nombre de petites propriétés, avec terres, qui se trouvaient près de ces promontoires, afin qu'y soit construite une église pour le service de Dieu. Dans cette église, le révérend père rassembla une compagnie, réduite certes, mais dévote, de gens qui voulaient servir Dieu, et c'est là aussi, qu'après les nombreuses épreuves de ses travaux spirituels, marchant vers sa récompense, son corps repose. Ses successeurs, qui suivent toujours l'exemple de sa sainteté, sont restés en possession de cette église jusqu'à aujourd'hui. Et c'est moi, le dernier de ceux-ci en mérite, et le dernier dans le temps, qui suis maintenant en charge de cette petite chapelle, qui m'est parvenue par succession légitime, et j'écris de récit de la vie de Willibrord, le plus saint des pères et le plus sage des maîtres, à votre demande, évêque Beornrade, qui, par la grâce de Dieu, lui avez succédé à l'épiscopat. Je le fais dans la ligne d'une tradition familiale et dans le souci de ces sanctuaires, qu'il construisit, comme nous le savons, pour la gloire de Dieu
2 Maintenant, pour relater plus pleinement les faits concernant la naissance de Willibrord et rappeler les signes qui montrèrent qu'il avait été choisi par Dieu dès le sein de sa mère, je vais revenir au point où de commençais. De la même manière que le très saint précurseur de Notre-Seigneur Jésus-Christ, le bienheureux Jean le Baptiste, fut sanctifié dès avant sa naissance et précéda le Christ, telle l'étoile du matin qui précède le soleil, et qui, nous dit l'Evangile, naquit de parents pieux de façon à apporter le salut à beaucoup, ainsi, de la même manière, Willibrord, engendré pour le salut de beaucoup, naquit de parents pieux. Wilgils, cet homme vénérable dont nous avons parlé auparavant, ne choisit le statut matrimonial que dans le seul but de mettre au monde un enfant qui apporterait des bienfaits à de nombreux peuples. C'est ainsi qu'il advint que son épouse, la mère du sanctifié Willibrord, eut, au coeur de la nuit, alors qu'elle dormait, une vision céleste. Il lui semblait qu'elle voyait dans le ciel la nouvelle lune, et que, alors qu'elle regardait, la Lune crut lentement jusqu'à atteindre la taille de la pleine lune. Pendant qu'elle regardait attentivement, la Lune tomba avec rapidité dans sa bouche. Elle l'avala et, alors, son sein fut baigné de lumière. Remplie de crainte, elle s'éveilla d'un coup et alla raconter le rêvé à un saint prêtre. Celui-ci lui demanda si la nuit pendant laquelle elle avait eu cette vision, elle avait connu son mari, de la façon accoutumée. Elle dit que oui, et le prêtre répondit alors: "La Lune que vous avez vue changer de petite à grande, c'est le fils que vous avez conçu cette nuit. Il dispersera l'obscurité glauque de l'erreur avec la lumière de la vérité, et, partout où il ira, il portera avec lui une splendeur divine et répandra la lune pleine de sa perfection. Par la brillance de sa renommée et la beauté de sa vie, il s'attirera les regards de multitudes". Cette interprétation du rêve fut confirmée par le cours véritable des évènements
3 Quand le temps fut venu, la femme enfanta, et, à son baptême, son père lui donna le nom de Willibrord. Dès que l'enfant fut sevré, son père le donna à l'église de Ripon, de façon qu'il y fût instruit par les frères à fins de religion, et dans l'érudition sacrée., et que, vivant en un lieu où il ne verrait rien que de vertueux, où il n'entendrait rien que de sanctifié, son enfance soit fortifiée par un sain apprentissage et une saine discipline. Dès ses plus jeunes années, la grâce divine lui permit de croître en intelligence et en force de caractère, du moins autant qu'il était permis à un tel âge, de telle sorte qu'il sembla qu'un autre Samuel était né à notre temps, ce Samuel dont il est dit: "L'enfant grandit et avança dans la faveur à la fois de Dieu et des hommes". Ainsi, dans le monastère de Ripon, ce jeune homme, qui allait se révéler une bénédiction pour de nombreuses gens, reçut la tonsure clérical et prononça ses voeux de moine. Comparé aux autres jeunes de ce monastère saint et sacré, il n'était inférieur à aucun en ferveur, en humilité, et en zèle pour l'étude. En fait, ce garçon excessivement doué fit de tel progrès au fur et à mesure que les jours passaient, que le développement de son intelligence et de son caractère surpassèrent à ce point la réalité de son âge, que ce corps petit et délicat abritait déjà la sagesse du grand âge et de la maturité
4. Quand le jeune homme, aussi doué d'érudition sacrée qu'il était, de plus maître de soi et intègre, atteint la vingtième année de son âge, il ressentit le désir de suivre un mode de vie plus rigoureux et fut travaillé par le désir de se rendre à l'étranger. Et parce qu'il avait entendu que les écoles et le savoir fleurissaient en Irlande, il fut en plus encouragé par ce qu'on lui avait dit de la façon de vie qui y avait été adoptée par certains hommes saints, en particulier par le bienheureux évêque Ecgbert, à qui fut donné le titre de saint, et par Wichtberct, le vénérable serviteur et prêtre de Dieu, lesquels, pour l'amour du Christ, avaient abandonné maison, patrie et famille et s'étaient retirés en Irlande, où, coupés du monde, et cependant proches de Dieu, ils vivaient en solitaires, jouissant des bénédictions d'une contemplation divine. Le bienheureux jeune Willibrord voulut imiter la vie sainte de ces hommes, et, après avoir obtenu le consentement de son abbé et de ses frères, il se hâta rapidement de traverser la mer pour rejoindre le cercle intime des pères dont il vient d'être question, de telle sorte qu'à leur contact il puisse atteindre le même degré de sainteté and posséder les mêmes vertus, de la même manière que les abeilles prennent le miel des fleurs et l'emportent dans le rayon de la ruche. Et c'est ainsi que là, parmi ces maîtres, éminents à la fois pour leur sainteté et leur érudition en les choses sacrées, il fut, lui qui un jour allait prêcher à de nombreux peuples, instruit pendant 12 ans, jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de la mâturité, l'âge d'homme, et le plein âge du Christ
5 C'est ainsi que, dans la trente-troisième année de son âge, la ferveur de sa foi avait atteint une telle intensité qu'il considéra de peu de valeur de travailler seulement à sa propre sanctification, sauf à prêcher l'Evangile aux autres et à leur apporter un bénéfice. Il avait appris que dans les régions de Nord du monde, la moisson était grande mais les moissonneurs peu nombreux. Aussi, accomplissant ainsi la vision que sa mère disait avoir eue, Willibrord, pleinement conscient de son but, mais ignorant encore de la prédestination divine, décida de faire route pour ces endroits et, Dieu le voulant bien, d'y apporter la lumière du message de l'Evangile à ces peuples qui, dans l'incroyance, n'avaient pas encore été touchés de sa chaleur. Il prit un bateau, accompagné de onze autres qui partageaient son enthousiasme pour la foi. Certains, par la suite, gagnèrent la couronne du martyr par leur constance à prêcher l'Evangile, d'autres devinrent évêques et, après leurs efforts dans le saint travail de prêcher, reposent, depuis, en paix. Ainsi, comme nous l'avons dit, l'homme de Dieu et ses frères, prirent la mer, et, après une traversée sans encombre, ils amarrèrent leur bateau à l'embouchure du Rhin. Puis, après avoir s'être restaurés, ils prirent la route du château d'Utrecht, lequel se trouve sur la rive du fleuve, là où, quelques années plus tard, lorsque, par grâce divine, la foi eut progressé, Willibrord installa le siège de son évêché. Mais le peuple de Frise, chez lequel le fort était situé, et Radbod leur roi, continuait de se souiller aux pratiques païennes, et l'homme de Dieu pensa qu'il était plus sage d'aller en Francie et d'y visiter Pépin, le roi de ce pays, un homme d'une intense énergie, rempli de succès à la guerre, et un homme d'une haute stature morale. Le duc les reçut avec toutes les marques de respect et, comme il ne voulait que ni lui, ni son peuple, perdent les services d'un érudit aussi éminent, il lui remit, dans les frontières de son royaume, un certain nombre de localités où ils pourraient déraciner l'idolâtrie, enseigner les peuples convertis et ainsi remplir le commandement du prophète: "Tracez un nouveau sillon, et ne semez plus dans les épines"
6 Après que l'homme de Dieu eut systématiquement visité plusieurs lieux, et ait évangélisé, et quand la graine de vie, favorisée par la rosée de la grâce divine, ait, par ses prêches, porté du fruit en abondance dans de nombreux coeurs, ledit roi des Francs, hautement satisfait du zèle brûlant de Willibrord et de la croissance extraordinaire de la foi chrétienne, et ayant en vue de plus grands progrès encore de la religion, pensa sage de l'envoyer à Rome de façon qu'il y fût consacré évêque par le pape Serge [Sergius], un des plus saints hommes de ce temps. Ainsi, pensait le roi, après avoir reçu la bénédiction apostolique, et un mandat du pontife, et rempli d'une confiance plus grande encore du fait qu'il serait devenu l'émissaire du pape, il retournerait prêcher l'Evangile avec une plus grande vigueur encore, selon les mots de l'Apôtre: "Et comment prêcheront-ils à moins d'y être envoyés?" Mais quand le roi essaya d'en persuader l'homme de Dieu, celui-ci refusa. Willibrord dit qu'il n'était pas digne d'une aussi grande autorité et, après avoir énuméré les qualités dont St Paul fait mention à Thimothée, son fils spirituel, comment étant essentielles à un évêque, il affirma qu'il étaient loin d'avoir de telles vertus. Le roi, cependant, insista solennellement, alors que l'homme de Dieu avait humblement refusé. Enfin, poussé par l'accord unanime de ses compagnons et, encore plus important, se sentant contraint par la volonté de Dieu, Willibrord acquiesca, soucieux de se soumettre à l'avis de plusieurs plutôt que de suivre obstinément son seul avis. En conséquence, il partit pour Rome, avec une compagnie de renom, et portant des cadeaux appropriés à la dignité du pape
7 Quatre jours avant que Willibrord n'arrive à Rome, le Père Apostolique eut un songe. Un ange lui conseillait de recevoir le visiteur avec les plus grands honneurs, car celui-ci avait été choisi par Dieu pour apporter la lumière de l'Evangile à de nombreuses âmes, et que son but, en venant à Rome, était de recevoir la dignité épiscopale, et qu'il ne fallait rien refuser de ce qu'il demanderait. Le Père Apostolique, ainsi prévenu, reçu Willibrord avec grande joie et lui montra toutes les marques de la plus grande des courtoisies. Et comme il discernait en lui une foi ardente, une dévotion religieuse et une profonde sagesse, il fixa un jour convenable pour son ordination, un jour où tout le peuple serait assemblé. Puis il invita des prêtres vénérables à participer à la cérémonie, et, en accord avec la tradition apostolique, et avec une grande solennité, il le consacra publiquement archevêque de l'Eglise du bienheureux Pierre, Prince des Apôtres. Dans le même temps, il lui donna le nom de Clément et l'investit des robes épiscopales, lui conférant le sacré pallium comme signe de son office, ainsi qu'on avait fait avec Aaron avec l'ephod. De plus, tout ce Willibrord voulait ou demandait en matière de reliques des saints ou de vases liturgiques, le Pape le lui donna sans hésitation. Ainsi, fortifié par la bénédiction papale, et chargé de présents, il fut renvoyé, dûment instruit, à son travail de prêcher l'Evangile
8 Ayant reçu la bénédiction du Saint-Siège, le prêcheur dévoué de la parole de Dieu retourna avec une confiance accrue auprès du roi des Francs. Le roi le reçut avec toutes les marques de l'estime et puis il l'envoya plus spécialement, armé de cette autorité nouvelle à prêcher l'Evangile, dans les parties septentrionales de ses domaines, où, du fait de la rareté d'enseignants et de l'entêtement des habitants, la lumière de la foi brillait moins vivement. Le plus clairement l'homme de Dieu percevait la nécessité de surmonter l'ignorance et de mettre fin à la famine spirituelle dans ces endroits, le plus il prêchait vigoureusement la parole de Dieu. Combien grand fut le succès que, avec l'aide de la grâce divine, rencontrèrent ses travaux, cela est attesté, à l'époque même par les gens, dans les cités, les villages et les villes fortifiées, qu'il apportait, par ses saintes admonitions, à la connaissance de la vérité et à l'adoration du Dieu tout-puissant. D'autres preuves sont encore apportées dans les églises qu'il construisit partout où il prêchait, et dans les communautés de moines et de nonnes qu'il rassembla dans divers lieux
9 L'homme de Dieu essaya également de propager l'enseignement de l'Evangile en-dehors des frontières du royaume Franc. Il eut le courage de se présenter en personne à la cour de Radbod, à cette époque le roi des Frisons, païen comme ses sujets. Partout où il passait, il proclamait sans crainte la parole de Dieu. Mais, bien que le roi des Frisons reçut l'homme de Dieu dans un esprit aimable et humble, son coeur était endurci contre la parole de Vie. Aussi quand l'homme de Dieu vit que ses efforts ne portaient pas de profit, il tourna son entreprise missionnaire vers les fières tribus des Danois. A cette époque, nous dit-on, le gouvernant Danois était Ongendus, un homme plus sauvage que les bêtes sauvages et plus dur que les pierres, qui, cependant, par l'intervention divine, reçut l'annonce de la Vérité avec toutes les marques de l'honneur. Mais quand Willibrord vit que le peuple étaient enfoncés dans leurs pratiques mauvaises, s'abandonnaient à l'idolâtrie et indifférent à tout espoir d'une vie meilleure, il choisit parmi eux trente garçons et revint en hâte avec eux chez le peuple élu des Francs. Pendant le voyage, il les instruisit dans la foi et les baptisa, de telle sorte que s'ils venaient à périr du long voyage en mer ou des embuscades des habitants sauvages de ces lieux, il n'ait pas lieu de quoi que ce soit à leur égard. Ainsi, il désirait prévenir les agissements du Malin et renforcer ces âmes rachetées des sacrements du Seigneur
10 Or, alors que ce prêcheur énergique de la Parole continuait son voyage, il arriva à une île qui se trouve à la frontière entre les Frisons et les Danois, que les peuples des ces régions appellant Fositeland, du nom d'un Dieu appelé Fosite, qu'ils adorent et dont les temples se trouvaient là. Les païens avaient une si grande peur de ce lieu, qu'aucun des naturels ne voulait accompagner le bétail qui se nourrissait là, ni s'y occuper de quoi que ce soit, ou oser tirer de l'eau des sources qui bouillonnaient là, si ce n'est dans un silence complet. C'est la tempête qui avait amené l'homme de Dieu sur cette côte. Il décida d'y attendre que les grands vents s'apaisent et le retour du beau temps permît de reprendre le voyage. Il fit peu de cas du caractère sacré accordé superstitieusement au lieu ni de la cruauté sauvage du roi, qui avait l'habitude de condamner ceux qui ne respectaient pas les objets sacrés à la mort la plus cruelle. Willibrord baptisa trois personnes dans la fontaine au nom de la Sainte Trinité et donna des ordres pour que quelques têtes de bétail soient tuées pour fournir de la nourriture à ceux qui l'accompagnaient. Lorsque les païens virent cela, ils s'attendaient à ce que ces étrangers deviennent fous ou soient frappés d'une mort soudaine. Cependant, voyant que rien ne leur arrivait, frappés de terreur et ébahis, il rapportèrent au roi ce dont ils avaient été les témoins
11 Le roi entra dans une intense fureur et décida de se venger sur le prêtre du Dieu Vivant des insultes qui avait été faites à ses divinités. Pendant trois long jours, ils jeta les sorts, trois fois par jour, pour décider qui mourrait. Mais, parce que le vrai Dieu protégeait ses serviteurs, les sorts de la Mort ne tombèrent jamais sur Willibrord ni sur aucun de ses compagnons. Sauf une fois, qui ainsi gagna la couronne du martyr. Le saint homme fut ensuite convoqué devant le roi and réprimandé sévèrement pour avoir violé le sanctuaire royal et insulté le dieu. Avec un calme imperturbable, le prêcheur de l'Evangile répondit: "L'objet de ton adoration, Ô roi, n'est pas un dieu, mais un démon, et il te tient au piège dans une fausseté fétide de façon à pouvoir emporter ton âme dans le feu éternel. Car il n'y a pas d'autre dieu que le Vrai Dieu, qui a créé le ciel et la terre, les mers et tout ce qui est dedans. Et ceux qui l'adorent d'une foi vraie auront la vie éternelle. En tant que Son serviteur, je te demande aujourd'hui de renoncer aux erreurs vides et invétérées auxquelles tes prédécesseurs ont donné leur assentiment, et de croire en le Dieu Tout-Puissant, notre Seigneur Jésus-Christ. Laisse-toi baptiser dans la fontaine de la Vie, et laisse-la emporter tous tes péchés, de façon que, renonçant à tout mal et toute injustice, tu puisses à compter de ce moment vivre, homme renouvelé, dans la tempérance, la justice et la sainteté. Si tu le fais, tu jouiras d'une gloire éternelle avec Dieu et ses Saints, mais si tu me repousses, moi qui présente à tes yeux le chemin de la Vie, sois sûr que, avec le démon auquel tu obéis maintenant, tu souffriras un châtiment sans fin et les flammes de l'Enfer". A cela le roi fut stupéfait et répondit: "Il est clair pour moi que mes menaces ne te troublent pas et que tes mots sont aussi intransigeants que tes actes". Et, bien qu'il ne voulut pas croire la prédication de la Vérité, il renvoya Willibrord, avec grands honneurs, à Pépin, le roi des Francs
12 Ce dernier fut enchanté de son retour et le pria alors de continuer dans cette tâche que Dieu lui avait fixée de prêcher la parole de Dieu et d'extirper les pratiques idolâtres, et de semer le bon grain dans un endroit après l'autre. Et cela, le prêcheur dévoué s'efforça de le faire avec une énergie caractéristique. Il traversa tout le pays, exhortant les gens des villes, des villages et des forts où il avait précédemment prêché l'Evangile de rester fidèle à la foi et à leurs bonnes résolutions. Et comme le nombre des fidèles augmentait de jour en jour, et qu'une foule considérable de croyants venait à la connaissance de la parole de Dieu, beaucoup commencèrent, dans leur zèle pour la foi, à faire don à l'homme de Dieu de leur propriétés héréditaires. Et ils les acceptaient. Peu de temps après, il ordonnait que des églises y soint construites, et il nommait des prêtres et des diacres pour les servir, de façon que les nouveaux convertis aient des places pour s'assembler les jours de fête et écouter une saine instruction, et pour apprendre les principes de la religion chrétienne de ces serviteurs de Dieu qui les avaient baptisés. Ainsi l'homme de Dieu, favorisé par la grâce divine, faisait des progrès continuels jour après jour
13 Il arriva cependant que Pépin, roi des Francs, mourut, et que son fils Charles devint le chef du royaume. Charles amena de nombreuses nations sous le pouvoir des Francs, dont les Frisons dont les terres furent ajoutées à ses domaines après la défaite de Radbod. A cette époque St Willibrord fut officiellement nommé pour prêcher au peuple Frison, et son siège épiscopal fut fixé à la forteresse d'Utrecht. Une plus grande étendue de terres s'ouvrant à la prédication de l'Evangile du fait de ses conquêtes, il essayait d'amener à l'Eglise, par le baptême, les peuples qui avaient récemment vaincus par l'épée. Il ne permit qu'aucune erreur ou ignorance anciennes puissent passer inapperçues, et verser sans tarder sur elles la lumière de l'Evangile, si bien que bientôt, chez ce peuple, la parole du prophète fut accomplie: "En ce lieu où il leur fut dit: 'Vous n'êtes pas mon peuple', il leur sera dit: 'Vous êtes les fils du Dieu Vivant'"
14 De nombreux miracles furent aussi accomplis, par la puissance de Dieu, à travers son serviteur. Bien que le ministère de prêcher l'Evangile doive être préféré à la réalisation de miracles et à la démonstration de signes, il se trouve cependant, puisque de tels miracles ont été rapportés, que je pense qu'ils ne faut pas les passer sous silence. Et pour que la gloire puisse être rendue à Dieu, qui les a permis, je les insérerai dans ce récit, de façon aussi que ce que nous savons avoir été accompli dans les temps anciens ne soit pas perdu pour les temps futurs. Aussi, quand l'homme vénérable, selon son habitude, était dans l'un de ses voyages missionnaires, il vint à un village appelé Walichrum, où une idole de l'ancienne superstition subsistait. Quand l'homme de Dieu, mû par le zèle, la brisa en pièces devant les yeux du gardien, ce dernier, écumant de colère, dans un soudain accès de passion, frappa le prêtre du Christ sur la tête avec une épée, comme pour venger l'insulte faite à son dieu. Mais, comme Dieu protégeait son serviteur, le coup meurtrier ne lui fit aucun mal. Voyant cela, les compagnons de Willibrord se ruèrent pour tuer le méchant homme de son audace. L'homme de Dieu, bon naturellement, délivra le coupable de leurs mains et le laissa partir. Le même jour cependant, le gardien fut saisi et possédé du Démon, et trois jours après il finit sa vie misérable. Ainsi, parce que l'homme de Dieu avait suivi le commandement de Dieu et ne voulut pas se venger du mal qui lui avait été fait, il fut vengé encore beaucoup plus par le Seigneur lui-même, comme s'Il avait dit, voyant le mal que les méchants avaient fait à ses Saints: "La vengeance est mienne. Je rendrai l'offense, dit le Seigneur"
15. En une autre occasion, alors que le bienheureux homme se rendait à une cellule qui lui appartenait et appelé Susteren, du nom du fleuve qui y passe, il prit un chemin étroit, qui passait à travers les champs de blé d'un propriétaire riche. Lorsque le gardien des champs le vit, il en fut furieux et commença à tonner contre l'homme de Dieu. Ceux qui accompagnaient Willibrord voulurent punir l'homme, mais le serviteur de Dieu, les retint doucement, car sa seule joieé était d'apporter le salut à chacun. Quand il vit qu'il était impossible de calmer la fureur de l'homme, Willibrord ne persista pas et retourna par le chemin par lequel il était venu. Le jour suivant, cependant, le malheureux, qui n'avait pas craint de déverser des insultes sur le serviteur de Dieu, fut frappé sur ce lieu même, d'une mort subite, devant une foule de témoins
16 Pendant que l'homme divinement inspiré, dans son désir de prêcher l'Evangile, voyageait dans les régions côtières où les peuples souffrent du manque d'eau fraîche, il remarqua que ses compagnons avaient du mal à supporter les tourments de la soif/ Aussi il appela l'un d'eux et lui demanda de creuser une petite tranchée à l'intérieur de sa tente. Alors, agenouillé, il pria secrètement Dieu que, Lui qui avait fait jaillir l'eau pour son peuple dans le désert, Il la fasse jaillir, avec une compassion semblable, pour ses serviteurs, du sol sabloneux. Immédiatement sa prière fut entendue et une source d'eau douce remplit immédiatement la tranchée. Voyant cela, ceux qui le suivaient rendirent grâce à Dieu qui, de cette manière avait glorifié son saint et daigné entendre sa prière. Et quand ils eurent bu leur soûl, ils prirent avec eux autant d'eau qu'ils pensaient nécessaire à leurs besoins pour le voyage qui restait devant eux
17 Aussi, quand le saint prêtre de Dieu marchait son chemin en un certain lieu, il vit douze pauvres mendiants demandant des aumônes aux passants. Etant extrêmement bon de coeur, il les regarda avec compassion et pria l'un de ses compagnons de prendre sa gourde et de donner à boire aux pauvres du Christ. Tous les douze burent autant qu'ils voulurent, et le fait remarquable fut que, lorsque la compagnie reprit le chemin, ils se rendirent compte que la gourde à laquelle tant de personnes avaient bu, était aussi remplie du plus excellent vin qu'elle l'était auparavant. Voyant cela, ils bénirent tous les Seigneur en disant: "Vraiment ce que dit le Christ dans l'Evangile: 'Donnez et il vous sera donné' a été accompli"
18 Une fois, le saint homme vint visiter son monastère, et après avoir prié Dieu, salué les frères et parler paisiblement avec eux, le saint père fit le tour des cellules de chacun pour si quoi que ce soit pouvait y être amélioré. Puis, entrant dans la réserve, il y trouva qu'il n'y avait qu'une faible provision de vin, dans un tonneau. Alors, pour signe de sa bénédiction, il y poussa son bâton, en priant, et ils sortirent. La nuit même, le vin dans le fût commença de monter jusqu'au bord, puis à déborder. Quand l'intendant s'en aperçut, il fut stupéfait de cet accroissement inespéré et, sachant que c'était là un acte de la miséricorde divine, par l'intermédiaire de Son serviteur, il n'osa pas garder la chose secrète. Le lendemain matin, il courut après le saint père, et, tombant à ses pieds, rapporta ce qu'il avait vu. Willibrord, comme d'habitude, rendit grâce à Dieu, mais, ayant à l'esprit le commandement de Notre-Seigneur à ses disciples de ne pas rendre publique la gloire de la Transfiguration avant le jour de la Résurrection, il interdit à l'intendant de parler du miracle à quiconque jusqu'au jour où lui, Willibrord, mourrait
19 Un autre miracle du même genre fut réalisé par le Christ, Notre Dieu, par la biais de la bénédiction de Willibrord. Un jour, le servant de Dieu arriva avec ses compagnons à la maison d'un de ses amis, et il souhaitait briser l'ennui du long voyage en y prenant un repas. Mais il apprit que le maître de maison n'avait pas de vin. Il donna des ordres qu'on lui apporte les 4 petites gourdes que portaient ses compagnons -et qui étaient tout ce que ses compagnons portaient avec eux pour subvenir à leurs besoins pendant le voyage. Alors il les bénit au nom de Celui qui, au noces de Cana, changea l'eau en vin et, fait remarquable, après cette bénédiction emplie de grâce, il se trouva que 40 persones burent leur soûl de ces petites gourdes. Et avec de grandes actions de grâce et des coeurs joyeux, ils se disaient l'un l'autre: "Le Seigneur Jésus a en vérité tenu sa promesse de l'Evangile: 'Celui qui croit en moi, sera capable de ce que je fais, et encore plus'"
20 Un jour, quand ce saint prêcheur se hâtait vers la Frise afin, comme d'habitude, d'y prêcher l'Evangile, il voulut faire pâturer ses chevaux, fatigués par le voyage, dans les prés d'un riche propriétaire. L'homme, voyant les chevaux se nourrir dans ses prés, commença à les battre et les fit sortir avec beaucoup d'arrogance. L'homme de Dieu l'approcha alors avec des mots pacifiques et dit: "Frère, ne nous fais pas de mal. Notre but, en voulant nous reposer dans ces prés n'est pas de te nuire, mais de répondre à nos besoins. Nous avons obligation de poursuivre notre travail au service de Dieu, et tu pourrais participer aux récompenses qu'il nous accordera en nous aidant, autant qu'il t'est possible, dans un esprit fraternel, et soucieux de la douce promesse du Christ: 'Celui qui vous reçoit, me reçoit, et qui me reçoit, reçoit celui qui m'envoie'. La paix sur toi, et plutôt, comme un ami, prend un verre avec nous pour te rafraîchir. Puis, une fois que nous serons repartis, repars chez toi avec la bénédiction de Dieu". L'homme, cependant, persista dans sa mauvaise volonté et ne voulut pas entendre les mots raisonnables de l'homme de Dieu. Au contraire, il persista dans son attitude agressive, et il continua d'insulter Willibrord. "Vous me demandez de boire avec vous, dit-il, et de faire la paix. Mais, sachez que je n'ai aucune envie de boire avec vous!" L'homme de Dieu le prit au mot et dit: "Et bien! Si tu ne veux pas boire avec moi, que tu ne boives plus". Là-dessus, aussitôt que ses compagnons furent prêts, Willibrord continua son chemin. L'homme obstiné, de son côté, se dépêcha de regagner sa maison, mais il faut saisi presqu'aussitôt d'une soif ardente qu'il essaya en vain d'apaiser avec du vin. Sa bouche qui avait adressé des reproches à l'homme de Dieu était devenue incapable d'avaler une quelconque boisson. Ainsi cet homme qui n'avait pas voulu, de sa propre volonté faire la paix avec le serviteur de Dieu était maintenant obligé de porter en lui la peine de sa faute. On appela des médecins pour soulager cette soif et pour rendre au malade le pouvoir de boire. Tout son être appelait à l'aide mais personne ne put faire qu'une goutte de vin atteignît sa gorge desséchée. Enfin, frappé de remord, il revint à lui-même, et, découvrant que le saint homme qu'il avait insulté était Willibrord, il commença à languir ardemment de son retour. L'année suivante, Willibrord revint par le même chemin, et, apprenant qu'il s'approchait, l'homme malade se dépêcha d'aller à sa rencontre. Confessant sa faute et disant la souffrance qu'il avait endurée, il le supplia, pour l'amour du Christ, de l'en délivrer. L'homme de Dieu fut touché de pitié et il le délivra de cette punition et l'autorisa à boire à sa propre coupe. Et l'homme, libéré, but, et retourna guéri chez lui
21
Il y avait, dans la ville de Trèves, un couvent de nonnes, qui, dans les jours de Willibrord, fut visité par une terrible peste. Beaucoup de nonnes moururent, d'autres furent confinées à leur lit par une maladie sévère, alors que le reste était dans un état d'extrême terreur, s'attendant à mourir à tout moment. A peu de distance de cette ville se trouvait le monastère du saint homme, nommé Echternach, dans lequel son corps repose jusqu'à ce jour et que ses successeurs sont réputés avoir tenu par legs légal du saint père et par la bienveillance de rois pieux. Apprenant que le saint homme y venait, la mère du couvent en question envoyant une députation pour l'implorer de venir sans délai. Quand il entendit la requête, l'homme de Dieu, instruit par l'exemple, plein de grâce, de St Pierre, Prince des Apôtres, qui était allé de Joppa à Lydda à la demande des veuves du Christ afin de ramener Sainte Tabitha à la vie, partir à leur aide sans délai. En arrivant au couvent, il célébra immédiatement la messe pour les malades, puis bénit de l'eau et ordonna qu'elle soit aspergée sur les bâtiments et donnée à boire aux soeurs. Par la miséricorde de Dieu, il recouvrèrent rapidement leur santé et il n'y eut plus de morts de la peste dans le couvent
22 Il arriva qu'un chef de famille et sa famille furent affligés d'une terrible visite de sorcellerie diabolique, et il devint tout à fait évident, d'après les horreurs et les tours démoniaques qui arrivaient là, que la maison était hantée par un mauvais esprit. Car celui-ci saisissait soudainement de la nourriture, ou des vêtements, ou d'autres biens, et les jetait dans le feu. Une fois, même, pendant que les parents étaient endormis, il saisit leur petit enfant, alors qu'il était entre leurs bras et le jeta dans le feu, et ce n'est qu'avec grandes difficultés que les parents, réveillés par les hurlements de l'enfant, réussirent à le sortir des flammes. Nombreux furent les méchants tours que la famille dut endurer aux mains de cet esprit exécrable, et aucun prêtre n'était capable de l'exorciser. Finalement le saint homme Willibrord, à l'urgente requête du père, leur envoya de l'eau sainte et leur dit d'en asperger les meubles, après les avoir sortis. En effet l'homme de Dieu prévoyait que toute la maison allait être consumée par le feu. Et en effet, une fois fait comme dit, un incendie se déclencha à l'emplacement même où s'était trouvé le lit, et enveloppant rapidement la maison, il la réduisit en cendres. Une fois qu'une nouvelle maison eût été construite sur le site de l'ancienne, et qu'elle eût été consacrée avec de l'eau bénite, la famille ne souffrit plus de ses anciennes épreuves et, depuis, vécut en paix, rendant grâce au Seigneur qui avait daigné les délivrer par les main de Son serviteur
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Le même saint homme, qui agréait Dieu, prophétisa aussi certains faits qui furent vérifiés, par la suite, par le cours des évènements. Il baptisa Pépin le Bref, le fils du vaillant Charles Martel, roi des Francs et père du présent illustre Charles, qui gouverne les Francs aujourd'hui avec triomphe, dignité et gloire. Au sujet de Pépin, père de Charles, Willibrord prononça la prédiction suivante, en présence de ses disciples: "Sachez que cet enfant sera hautement élevé et renommé. Il sera plus grand que tous les rois des Francs qui sont venus avant lui". La vérité de cette prédiction s'accomplit dans nos temps et il n'est pas besoin de prouver ce qui est universellement reconnu dans tout le royaume. Car tous connaissent quelles victoires merveilleuses, l'illustre conquérant a remportées, combien largement il a agrandi les limites de son empire, combien pieusement il a promu la religion chrétienne, et combien, à l'extérieur, il a défendu la Sainte Eglise de Dieu. Tout cela se voit même mieux plus clairement par les yeux que cela peut être mis en mots
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Et cet homme saint était remarquable par toutes sortes de qualités naturelles: il était de taille moyenne, d'une allure digne, avenant de visage, d'esprit gai, sage en conseil, plaisant en parole, grave de caractère et énergique dans tout ce qu'il entreprenait pour Dieu. Son allant est montré par les actions que nous avons montrées plus haut. Combien grand était son zèle à prêcher l'Evangile du Christ et combien il fut soutenu dans ce travail par la grâce de Dieu, nous n'avons pas besoin de le mettre en avant par écrit, car cela est garanti par le témoignage de tous. Sa vie personnelle peut être inférée de ses veilles et de ses prières, ses jeûnes et son chant des psaumes, la sainteté de sa conduite et ses nombreux miracles. Sa charité est évidente par les travaux inlassables qu'il accomplissait quotidiennement pour le nom du Christ. Cet homme saint, qui progressait chaque jour de sa vie dans l'oeuvre de Dieu, qui était agréable à Dieu et amical envers tous, fut ramené vers ses pères au temps de Charles l'ancien, le vaillant gouvernant des Francs. Il était alors un homme âgé, arrivant à la fin des ses jours, et il allait recevoir de Dieu une récompense généreuse pour ses travaux. Il abandonna ce monde pour prendre possession du ciel et pour contempler le Christ pour toujours, en gloire éternelle, le Christ dans l'amour duquel il n'avait jamais cessé de travailler aussi longtemps qu'il avait vécu parmi nous. Le sixième de Novembre, c'est-à-dire le huitième jour avant les Ides, il passa de ce lieu de pélerinage qu'est la Terre au pays éternel et il fut enterré au monastère d'Echternach, que, comme nous l'avons dit auparavant, il avait construit à la gloire de Dieu. Et là, jusqu'à maintenant, par la miséricorde de Dieu, des miracles de guérison sont accomplis en permanence à côté des reliques du saint prêtre de Dieu. D'ajouter certains de ces miracles à notre récit de sa vie nous semble encore ajouter à la glorification de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui, si souvent, daigne les accomplir à la requête de son serviteur
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Son corps vénérable fut déposé dans un sarcophage de marbre. Celui-ci fut d'abord trouvé trop court de 6 pouces pour tenir le corps entier du serviteur de Dieu. Les frères étaient grandement préoccupés de cela, et désespérant de savoir que faire, il en discutèrent encore et encore, se demandant où ils pourraient trouver un lieu de repos approprié pour ses restes sacrés. Et merveille à raconter, il se trouve que par la bonté aimante de Dieu le sarcophage fut découvert alors trop grand par rapport au corps du saint homme, autant qu'il avait été auparavant trop petit. Il y couchèrent les restes de l'homme de Dieu, et accompagné d'hymnes et de psaumes, et toutes les marques du respect, il fut enterré dans l'église du monastère qu'il avait construit et dédié à la Sainte Trinité. Une douce et merveilleuse flagrance emplit alors l'air, faisant que tous furent conscients que le ministère des anges avait été présent aux derniers rites du saint homme
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La mort du saint homme fut révélée à l'un de ses disciples religieux qui était installé à quelque distance du monastère, alors qu'il veillait en prières. Il atteste avoir vu l'âme de son saint père entourée d'une radiance brillante, comme s'il avait été porté par une armée d'anges vers les royaumes d'au-dessus, tous chantant ses louanges. De la même manière, beaucoup des frères ont attesté qu'ils avaient souvent vu une lumière merveilleuse au-dessus du lit sur lequel il avait rendu son âme bienheureuse à son Créateur, et qu'il y avaient senti une flagrance ravissante, et la plus douce des odeurs. De ces signes, on ne peut que conjecturer que les habitants du ciel avaient l'habitude de visiter l'endroit d'où son âme sainte était partie pour le Seigneur
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De nombreuses personnes malades, par la grâce de Dieu, et assistée de leur propre foi, ont été guéries une fois ointes avec l'huile de la lampe qui brûle au-dessus des reliques du saint homme. Des pénitents vinrent aussi fréquemment à l'église, portant des anneaux de pénitence aux bras, comme c'était la coutume, et ces liens furent brisés, et ils furent délivrés de leurs chaînes. Les preuves de cela sont les anneaux qui sont suspendus dans l'église jusqu'à aujourd'hui
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Il y avait une femme qui souffrait de paralysie et qui avait été tourmentée pendant 7 ans d'une peine sévère, et dont l'infirmité avait augmenté tellement de jour en jour qu'elle avait totalement perdu l'usage de ses membres et qu'elle devait se reposer sur l'aide des autres. Elle était si frêle qu'elle pouvait à peine respirer. Cette femme fut portée par ses parents à l'église où repose le saint de Dieu et fut placée près du cercueil contenant ses reliques. Là, avec beaucoup de larmes, elle pria que Dieu, dans sa Miséricorde, veuille avoir pitié d'elle, par l'intercession de Son saint serviteur, et, soudain, elle fut délivrée de toutes ces infirmités et ramenée à la santé. Et elle, qui avait été auparavant portée dans l'église par d'autres, rentra en courant chez elle, sur ses propres pieds, rendant joyeusement grâce à Dieu
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De la même manière un jeune homme, affligé de maladie, fut apporté par ses amis au corps du prélat bienheureux. Il tremblait de tous ses membres et était totalement incapable de dresser sa tête, qui ne se soutenait pas et se tortillait d'un côté et de l'autre comme si elle n'avait pas été fixée à son cou. Quelquefois aussi, il devenait tellement inerte qu'il apparaissait complètement sans vie. Ce jeune homme, comme nous l'avons dit, fut placé près du corps du saint par ses amis, et il fut, par la miséricorde de Dieu, si rapidement guéri, en la présence de tous ceux qui étaient présents, qu'aucune trace ne resta de son ancienne infirmité et de sa longue affliction
30
Un homme qui tenait l'office de diacre dans l'église du saint, bien qu'il n'en eût pas été digne, vola, sans scrupules, parmi d'autres choses qui avaient été offertes à l'église, une croix d'or que le saint homme avait l'habitude d'emporter avec lui dans ses voyages. Les frères furent désolés de cela, et bien qu'ignorant qui avait commis ce sacrilège, ils eurent confiance en ce que, par les prières du saint de Dieu, un crime aussi atroce ne resterait pas longtemps célé. Il essayèrent cependant, dans leur bonté fraternelle, d'amener le coupable à repentance, ne voulant pas comprendre sa déchéance. Mais l'homme qui avait commis le crime durcit son coeur et méprisa son propre salut, même si, selon Salomon "le méchant continue lorsqu'il vient aux profondeurs de ses méfaits". Le malheureux, souffrant, pensait que comme l'acte qu'il avait commis, l'avait été en secret et n'avait pas été vu par d'autres, il resterait indétecté. Mais il ne put le cacher aux yeux de Dieu, devant qui toute chose est visible et qui souvent n'est pas lent à venger le mal commis contre ses serviteurs. Et, ainsi, le misérable, le malheureux qui n'avait pas eu de scrupules à commettre ce forfait, fut soudain saisi de maladie et mourut d'une mort misérable. Et dans ses ultimes instants, il confessa sa faute à quelques frères et divulgua l'endroit où il avait caché les objets volés. Vous voyez, frères, quel jugement terrible fut envoyé à l'homme qui s'autorisa à profaner l'église du saint de Dieu par le vol. Aussi, je vous conjure de garder pure votre manière de vivre dans cette maison, de telle sorte que dans Sa miséricorde et par l'intercession de l'apostolique St Clément, Il puisse daigner écouter vos prières lorsque vous lui faites vos demandes, juste comme nous vous avons déjà dit comment il entendit les prières des malades dans cette même église, leur permettant de retourner chez eux avec la bonne santé qu'ils avaient longtemps attendue. Ni nous doutons que juste comme Il a daigné visiblement guérir leurs maladies du corps, de la même façon, par l'intercession du saint pour nous, le saint dont le corps repose ici et dont nous croyons qu'il est présent par l'esprit, écoutant nos prières, Il continuera, chaque jour, de guérir les désordres cachés de nos âmes, dès lors qu'avec une foi ferme et nous confessant sincèrement, nous épanchons nos coeurs en larmes dans ce lieu, devant la face miséricordieuse de Celui qui, dans Sa pitié, est rapide à pardonner si nous ne sommes pas lents à demander. Louagne et gloire à Lui pour les siècles des siècles!
31
Il ne reste plus maintenant qu'à parler du bienheureux Wilgils, qui, comme nous l'avons dit, était le père de ce saint homme, puisque le premier chapitre de ce récit ayant commencé avec lui, il est normal que le dernier se termine avec une référence à lui. Ce fut pour l'anniversaire de la mort sanctifiée de Wilgils que le bon abbé Aldberct, successeur du vénérable archevêque, proposa que l'on mange et que l'on se réjouisse avec les frères après les solennités de la Messe et l'action de grâce due à Dieu. Dans le monastère, malheureusement, il ne restait plus que deux flacons de vins, et, comme l'un avait déjà été bu au repas de midi, l'autre fut ouvert pour le souper. En conséquence, une fois que l'on eut chanté Vêpres en l'honneur de ce jour, les frères retournèrent au réfectoire, et, quand ils arrivèrent à la fin de la lecture, l'abbé s'adressa à eux en ces termes: "Il est bien, révérends Pères, que nous célébrions les jours de fêtes de nos vénérables prédécesseurs en nous réjouissant en esprit et en autorisant à nos corps un peu plus d'indulgence que ne nous le permet notre sévérité habituelle, non par gloutonnerie mais par amour. Et soyez sûrs que si je pouvais vous offrir plus que ce simple flacon de vin qui est resté du repas de midi, je le ferais sans hésiter et je ne garderais rien de ce que j'aurais pu trouver en plus dans le monastère. Mais Dieu peut, par la prière de Ses saints faire que même ce peu se révèle plus que suffisant pour nos besoins, aussi bien pour le glorifier que pour nous réjouir et aussi pour nous démontrer, nous qui en sommes peu dignes, Son pouvoir bienveillant, qui, un jour, par la bénédiction de notre ancien père, le saint Willibrord, condescendit à permettre que 40 hommes purent boire de quatre flacons. Aussi, buvons ce que nous avons, avec joie, et avec espoir!". Après que tous les frères eurent bu à la boule, une première, puis une deuxième fois, le serviteur trouva qu'elle était toujours aussi remplie. Quand l'abbé fut informé de cela, il se joignit aux frères pour rendre grâce à Dieu, et, faisant honneur à la miséricorde divine, ils burent sobrement, mais joyeusement, cette nuit-là, autant qu'ils le désirèrent. Ô heureux père qui a engendré un tel fils et qui a été jugé par Dieu digne d'avoir un tel héritier! En toi s'accomplit la bénédiction qui se trouve au Deutéronome: "Béni seras-tu et béni sera le fruit de ton corps"

Website Manager: G. Guichard, site Learning and Knowledge In the Carolingian Times / Erudition et savoir à l'époque carolingienne, http://schoolsempire.6te.net. Page Editor: G. Guichard. last edited: 12/28/2010. contact us at ggwebsites@outlook.com
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