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La vie de St Boniface

Prologue

[ Le prologue et une partie du chapitre 1, sont omis dans cette version anglaise]

1. Comment, dans l'enfance, il commença de servir Dieu

Ce que j'essaie de faire ici est de décrire la vie bienheureuse et le caractère de Saint Boniface, l'archevêque, comme j'ai appris ces faits des saints hommes qui vivaient quotidiennement à son contact et, qui, de ce fait, connaissait sa manière de vivre et étaient en mesure de se rappeler les détails qu'ils avaient entendus ou dont ils avaient été les témoins. Bien que j'aie travaillé en ayant le désavantage de n'avoir eu qu'une connaissance indirecte de lui, mon dessein est d'entrelacer à la texture de mon récit, et de présenter sous une forme aussi brève que possible, tous les faits que l'on peut établir par une enquête approfondie concernant sa sainteté et la considération divine dont il bénéficia. Dans sa très précoce enfance, après qu'il eut été sevré et élevé avec les soins attentifs habituels que prodigue une mère, son père eut pour lui plus d'affection que pour le reste de ses frères. Quant il atteint l'âge de 4 ou 5 ans, il conçut le désir d'entrer au service de Dieu et commença à réfléchir profondément sur les avantages de la vie monastique. Même à cet âge précoce, il avait soumis la chair à l'esprit et il méditait sur les choses éternelles plutôt que sur celles du monde. Lorsque des prêtres ou des clercs, voyageant à l'étranger, comme c'est la coutume dans ces régions, pour enseigner le peuple, venaient à la ville et à la maison où habitait son père, l'enfant pouvait converser avec eux sur des matières spirituelles et, pour autant que le lui permettait son jeune âge, il leur demandait de le conseiller sur les meilleurs moyens de surmonter les fragilités de sa nature. Après quelque temps, quand il eut donné une longue considération aux choses de Dieu, et alors que toute sa nature avait un besoin extrême de la vie future, il révéla ses aspirations à son père et lui demanda de prendre ces confidences en bonne part. Son père, décontenancé de tout cela, le réprimanda violemment et, lui interdisant de s'éloigner de lui, le tenta avec des promesses de succès mondains, espérant par ce biais retenir l'enfant, car il avait en vue qu'il devienne le gardien, ou plutôt l'héritier, de ses possessions de ce monde. Employant tout l'art subtil de la sagesse humaine, il s'efforça par de longues discussions, de dissuader l'enfant de mettre son projet à exécution, et mêla les promesses à la flatterie dans l'espoir de le persuader que la vie de ce monde serait plus agréable à quelqu'un de son âge que le régime austère de la vie monastique et contemplative. De façon à détourner l'enfant de son projet, il lui montra tous les tentations du plaisir et du luxe. Mais le saint, même à cet âge précoce, était rempli de l'esprit de Dieu. Le plus son père s'efforçait de le retenir, le plus il devenait, avec résolution et ténacité, déterminé à poursuivre son idéal céleste et à se consacrer à l'étude des lettres sacrées. Et, en accord avec le travail de la miséricorde divine, il se trouva que la providence divine, d'une façon remarquable, non seulement confirma l'enfant dans son entreprise mais aussi finit par changer l'humeur obstinée du père, car, d'un coup, son père fut frappé d'une maladie soudaine et fatale, alors que les intentions de son fils, longtemps empêchées, purent croître en force et, grâce à l'aide de Dieu, furent portées à leur accomplissement. Quand, du fait du jugement insondable de Dieu et de Sa volonté, le père du saint tomba malade, il changea de son attitude obstinée précédente, et, après avoir rassemblé tous les membres de sa famille, il envoya l'enfant, par l'intermédiaire de messagers de confiance, au monastère d'Examchester, que dirigeait à l'époque l'abbé Wulfhard. Là, entouré de ces amis, il fit connaître à l'abbé son désir d'entrer dans la vie monastique et, d'un façon mature pour son âge, présenta sa demande selon les instructions que lui avaient données ses parents. De là, le père prit conseil du reste des frères, et, après avoir reçu leur accord comme il est prescrit par la règle monastique, il donna son consentement. De cette façon, l'homme de Dieu fut enlevé à son père terrestre et étreignit le Père adoptif de notre Rédemption. Il renonça ainsi à toutes possessions de ce monde, transitoires, pour acquérir l'héritage éternel, de sorte que, selon les mots de l'Evangile, en renonçant à son père, sa mère, à ses terres et aux autres choses de ce monde, il puisse recevoir au centuple, et posséder la vie éternelle

2. Comment, au début, il surmonta les passions de la jeunesse et ne s'intéressa qu'à ce qui était bon

La première partie de notre récit, bien que brève, est maintenant terminée. Nous allons maintenant décrire les habitudes vertueuses auxquelles le saint s'habitua lui-même au commencement de sa vie monastique. Puis après avoir ainsi établi notre travail sur une ferme base, nous pourrons élever la structure du texte, petit à petit, jusqu'à son apogée. Après qu'il eut grandi en âge, en force et en savoir, et, arrivant à l'âge de 7 ans qui marque la fin de l'enfance, il eut atteint la fleur de la jeunesse, la grâce de Dieu, comme le montreront les évènements postérieurs dans ce livre, le dota de qualités intellectuelles extraordinaires. Il était remarquable pour la pureté de ses nombreuses vertus, apprises de l'exemple des premiers saints hommes; mais aussi pour se soumettre publiquement et humblement aux coutumes des vénérables pères de son monastère. De plus, il était doté d'une étincelle de génie divin et il l'avait si assidûment approfondie par l'étude que chaque heure et moment de sa longue et active vie ne servit qu'a accroître les dons divins qu'il avaient reçus. Le plus il continua à exercer son ministère de prêtre, le plus, comme cela nous a été dit par ses amis fidèles et intimes, ses études continuelles et ses efforts prolongés dans le domaine litteraire le stimulèrent dans sa recherche de la félicité éternelle. C'était une protection merveilleuse contre les séductions et les suggestions diaboliques qui assaillent les jeunes hommes dans la fleur de leur jeunesse et qui assombrissent leur esprit avec une sorte d'obscurité. En suite de quoi, les passions ardentes de la jeunesse et les convoitises charnelles qui, d'abord, firent de violents assauts à son encontre, perdirent leur pouvoir du fait de sa vigilance incessante et de ses recherches assidues sur le sens de l'Ecriture sainte. Ces études, poursuivies avec une ardeur accrue, le menèrent inévitablement à entreprendre la tâche d'enseigner les autres, un travail, qu'après quelque temps, et en accord avec le règles épiscopales et ecclésiastiques il effectua dûment. Il rejeta les succès passagers de ce monde et continua, sous la tutelle capable de l'abbé Wulfhard, à suivre fidèlement et consciencieusement le vrai modèle de l'observance monastique. Quand il eut dépassé l'âge de l'enfance et de la jeunesse, son enthousiasme pour l'étude et le manque de maîtres convenables l'amenèrent à demander la permission à l'abbé et à sa communauté, de se rendre à un monastère voisin. Il pria constamment et avec persévérance que Dieu approuve son entreprise et, finalement, sous l'inspiration de la grâce divine, il partit pour le monastère que, jusqu'à nos jours, on appelle Nursling. Là, attiré par le désir d'apprendre, il devint un disciple du vénérable abbé Winbert, de bienheureuse mémoire, et se joignit à la communauté des frères qui vivaient là avec lui dans le Seigneur. Ainsi, uni aux servants de Dieu, il montra un grand zèle pour la méditation, la dévotion au service de Dieu, la persévérance dans les veilles et l'assiduité à l'étude de l'Ecriture. De cette manière, il devint compétent non seulement en grammaire et rhétorique et en l'écriture de vers, mais aussi en l'interprétation littéraire ["litteral"] et spirituelle de la Bible. A la fin il devint si réputé pour sa profonde compréhension des Ecritures et pour son habileté à transmettre cette connaissance aux autres qu'il fut accepté comme guide fiable en matière de doctrine traditionnelle. Comme enseignant, il était un modèle, parce qu'il ne refusait pas d'apprendre de ses élèves. En effet, c'est une règle dans les maisons monastiques que personne n'est supposé diriger les autres sauf à avoir précédemment appris à se soumettre, et, quiconque a failli de rendre obéissance aux supérieurs que lui désigne Dieu ne peut, avec justesse, exiger obéissance de ses inférieurs. Une telle obéissance, qui sied à un moinde, le saint en fit montre envers tous les membres de la communauté, et particulièrement à l'abbé, et il s'appliqua avec assiduité, selon la forme prescrite de ce qui doit être justement fait du bienheureux Père Benoît, le fondateur de la règle, au travail manuel quotidien et à l'accomplissement régulier de ses devoirs. De cette façon, en mots, en faits, en foi et en pureté, il était un exemple pour tous. Tous pouvaient profiter de ses bonnes actions, tandis que lui, de son côté, participait à leur récompense commune éternelle. Mais Dieu seul, à qui rien n'est caché, connaissait les profondeurs cachées de son coeur et l'étendue de son humilité et de sa charité, qui lui avaient gagné une ascendance sur tous ses frères. Ils le considéraient avec un amour mêlé de crainte, et, bien que leur compagnon dans la recherche de l'amour divin, ils le voyaient, selon les mots de l'apôtre (voyez Rom. 12:10) comme leur père. Sa gentillesse envers les frères et l'étendue de son savoir s'accrurent à un tel degré que sa renommée comme enseignant se répandit loin et large parmi les monastères, d'hommes et de femmes. De ces compagnies un grand nombre d'hommes, attirés par le désir d'apprendre, affluèrent pour l'entendre et, sous son guide, ont étudié l'intégralité des Ecritures. Mais les nonnes, qui ne pouvaient pas venir continuellement à ses leçons, stimulées par sa vaste sagesse et son esprit d'amour divin, s'appliquèrent avec diligence à l'étude des textes sacrés, parcourant page après page, en méditant sur les mystères sacrés et cachés. Guidé et soutenu comme il l'était par la grâce surnaturelle, il suivit à la fois l'exemple et l'enseignement de l'Apôtre des Gentils: "Suivez le modèle des mots sains que vous avez entendus de moi dans la foi et l'amour qui sont en le Christ Jésus ... Faites de votre mieux pour vous présenter à Dieu comme quelqu'un qui a été agréé, un travailleur qui n'a pas à avoir honte, maniant correctement la parole de Vérité" (2 Tim 1.13, 2.15)

3. Comment il enseigna à tous et assuma l'office d'enseignant non à son propre gré mais parce qu'il en avait atteint l'âge

Nous allons maintenant tourner notre attention pour un moment vers la teneur générale de la contemplation quotidienne du saint et à sa persévérance dans le jeûne et l'abstinence. De cette façon, par un progrès graduel, nous relaterons avec concision et brièveté ses faits merveilleux, suivant sa vie de près, et l'examinant en plus grand détail. En confrontant un aspect de sa vie à un autre, nous montrerons que le vénérable et saint Boniface était un exemple, pour nous, de vie éternelle par sa modération uniment équilibrée et qu'il nous a montré les préceptes de l'enseignement apostolique. Suivant les exemples des saints, il gravit la difficile pente qui mène à la connaissance des choses célestes et il alla devant son peuple comme un chef qui ouvre les portes du Paradis, par laquelle seuls entreront les justes. Des premiers jours de son enfance jusqu'au veil âge invalidant, il imita en particulier la pratique des anciens pères en se consacrant chaque jour à mémoriser les écrits des prophètes et des apôtres, le récits de la passion des martyrs et l'Evangile, enseignement de Notre-Seigneur. Pour citer les mots de l'apôtre: "En mangeant, en buvant et dans quoi que ce soit qu'il faisait, il louait et remerciait Dieu toujours, dans son coeur et en parole, comme le dit le psalmiste: 'Je bénirai le Seigneur à tout instant, sa louange sera constamment sur mes lèvres'" (Ps 34.1). Il était enflammé à un tel degré de l'amour des Ecritures qu'il appliquait toute son énergie à apprendre et à pratiquer leurs conseils, et, pour les sujets qui étaient écrits pour l'instruction du peuple, il paraphrasait et expliquait à celui-ci avec une éloquence frappante, les épiçant astucieusement avec des paraboles. Sa retenue était telle que ses reproches, bien que dures, ne manquait jamais de gentillesse, alors que son enseignement, bien que doux, ne manquait jamais de force. Le zèle et la vigueur le rendait puissant, mais la gentillesse et l'amour le rendait doux. En conséquence il exhortait et réprimandait avec une égale impartialité le riche et le puissant, le libre et l'esclave, ni ne flattant et adulant le riche ou oppressant et intimidant les libres et les esclaves, mais, selon les mots de l'apôtre, "se faisant tout à tous, de façon, que par tous les moyens, il put en sauver quelques-uns" (1 Cor 9.22). Il le prit pas l'office de prêcher soit comme une expression de son caprice, ni avant le temps fixé et il ne rechercha pas cette fonction par [? en anglais: "contumacy] ou avidité mais, en accord avec son humble caractère, il attendit d'avoir atteint l'âge de trente ans ou plus, lorsque, sur la recommandation et le choix de son supérieur et de ses frères, il fut ordonné prêtre en accord avec les règles énoncées par les décrets ecclésiastiques. En tant que prêtre, il reçut divers cadeaux et présents, et, pour autant qu'il y ait été autorisé par la sévérité de la vie monastique et régulière, il s'adonna à l'aumône et aux bonnes oeuvres. Il se levait toujours avant l'heure de vigiles et s'occupait au dur exercice de la prière. La colère ni la fureur ne pouvaient miner sa patience. Le désir était impuissant devant sa chasteté et la gloutenerie était incapable de casser sa sobriété. Il se soumettait à un tel degré au jeûne et à l'abstinence qu'il ne buvait ni vin, ni bière, et en cela, il imitait les grandes figures de l'Ancien et du Nouveau Testament. Avec l'Apôtre des Gentils, il pouvait dire: "Je meurtris mon corps et le soumets, de peur qu'après avoir prêché aux autres, je ne me disqualifie moi-même" (1 Cor 9.27)

4. Comment il fut envoyé au royaume de Kent par toute la noblesse, et comment, par la suite, il alla en Frise

Dans le chapitre précédent, nous avons rassemblé ensemble quelques exemples isolés des vertus admirables de St Boniface. Nous pensons que celles qui suivent, qui ont été obtenues de témoins dignes de foi et que nous essaierons de présenter, ne devraient pas être passées sous silence. Elles ont regard à sa constance dans les projets qu'il avait entrepris et son zèle à amener les autres à leur fin désirée. Quand il se fut entraîné lui-même dans les vertus déjà mentionnées et eut donné la preuve durant sa prêtrise de beaucoup de qualité exceptionnelles, il se développa alors une soudaine crise pendant le règne de Ine, roi des Saxons de l'Ouest, occasionnée par le déclenchement d'une rébellion. Sur l'avis du roi, les chefs des églises convoquèrent immédiatement un concile des serviteurs de Dieu, et aussitôt qu'ils furent tous assemblés, une discussion, satisfaisante sur tous les plans, eut lieu entre les prêtres. Ils adoptèrent la mesure prudente d'envoyer des légats de confiance à Bertwald, l'archevêque de Canterbury, craignant que s'ils prenaient une quelconque décision sans l'avis de l'archevêque, ils soient accusés de présomption et de témérité. A la fin des débats, quand l'assemblée entière fut arrivée à un accord, le roi s'adressa à tous les serviteurs du Christ, leur demandant qui ils choisirait pour porter leur message. Sans hésitation, Winbert, l'abbé doyen présent, qui gouvernait le monastère de Nursling, Wintra, l'abbé de Tisbury, Beorwald, l'abbé de Glastonbury, et beaucoup d'autres qui professaient la vie monastique, convoquèrent le saint et l'amenèrent en présence du roi. Le roi lui confia le message et les principales responsabilités de l'ambassade et, après lui avoir donné des compagnons, l'envoya en paix. En accord avec les commandements de ses supérieurs, il partit avec le message et, après un voyage heureux, il arriva au royaume de Kent où, avec habileté, il fit connaître à l'archevêque tous les sujets, du premier au dernier, que le roi lui avait dit. Recevant une réponse immédiate, il rentra après quelques jours et délivra la réponse de l'archevêque au roi, alors qu'il siégeait avec les serviteurs de Dieu, leur apportant une grande joie à tous. Ainsi par la volonté merveilleuse de Dieu, son nom fut connu de tous, et sa réputation devint grande tant chez la noblesse laïque que chez les clercs. A partir de ce moment, son influence augmenta par bonds, au point qu'il devint un membre régulier de leurs assemblées synodales. Mais parce qu'un esprit soucieux de Dieu, n'est ni exalté par, ni dépendant de la louange et de l'approbation des hommes, il commença avec soin et précaution à tourner son esprit vers d'autres choses, à éviter la compagnie de ses parents et de ses connaissances et à envisager non de rester sur sa terre natale, mais de partir à l'étranger. Après avoir longuement réfléchi à la question d'abandonner son pays et ses parents, il prit l'avis de l'abbé Winbert, de bienheureuse mémoire, et lui révéla franchement ces plans que jusqu'alors il avait soigneusement tus. Il importuna le saint homme avec des demandes d'une voix haute, et urgentes, de lui donner son consentement à ce projet, mais Winbert, ébahi, refusa d'abord de lui accorder cette permission, pensant qu'un laps de temps pourrait le détourner de mettre ses projets à exécution. A la fin, cependant, la providence de Dieu prévalut et la demande de Boniface fut acceptée. Si grande était l'affection de l'abbé et des frères avec lesquels il avait vécu sous la discipline monastique, que de bon gré ils fournirent l'argent dont il avait besoin et continuèrent longtemps de prier Dieu pour lui. Et c'est ainsi qu'il partit et, avec l'aide de Dieu, mena son voyage à bien. Beaucoup renforcé par leur soutien spirituel et libéralement fourni en biens de ce monde, le saint ne manquait de rien de ce qui était nécessaire à son âme et à son corps. Accompagné de deux ou trois frères du confort -physique et spirituel- desquels il dépendait, il partit. Et, après avoir parcouru de longues étendues de campagne, heureux de la compagnie de ses frères, il arriva à un lieu où il y avait un marché pour l'achat et la vente des marchandises. Cette place est appelée Lundenwich [Londres] par les Anglo-Saxons -et cela a continué jusqu'à ce jour. Après quelques jours, alors que les marins s'apprêtaient à embarquer pour rentrer dans leur pays, Boniface demanda la permission au maître du bateau de profiter du voyage. Et, après avoir payé sa place, il partit, et des vents favorable l'amenèrent à Dorestad où il passa un moment et rendit grâce à Dieu nuit et jour. Mais une féroce querelle qui avait éclaté entre Charles, le prince et noble chef des Francs, et Radbod, le roi des Frisons, du fait d'une incursion hostile des païens, engendra de grandes perturbations parmi la population, des deux côtés, et du fait que les prêtres furent dispersés et du fait de la persécution de Radbod, la plus grande partie des églises chrétiennes, qui, auparavant, avaient été assujetties au contrôle Franc, subirent le saccage et la ruine. De plus, les sanctuaires païens furent reconstruits et, ce qui est pire, l'adoration des idoles restaurée. Quand l'homme de Dieu se rendit compte de la méchante perversité de Radbod, il se rendit à Utrecht et, après avoir attendu quelques jours, il parla avec le roi, qui était également venu là. Et ayant parcouru le pays et en ayant examiné de nombreuses parties de façon à voire quelles possibilités il pouvait y avoir de prêcher l'Evangile dans le futur, il décida que si, à un moment quelconque il pouvait approcher le peuple, il leur apporterait la parole de Dieu. Son glorieux martyr, beaucoup d'années plus tard, apporta le sceau à son projet. Une chose étrange dans la sainteté des saints est que lorsqu'ils perçoivent que leurs travaux sont empêchés pour un temps et ne portent pas de fruits spirituels, ils se retirent en d'autres lieux où les résultats sont plus évidents, car il n'y a rien à gagner de rester en un lieu sans y faire une moisson d'âmes. Avec cela à l'esprit, quand le saint eut passé l'été entier dans le pays des Frisons sans aucun résultat, et l'automne approchant de sa fin, il abandonna ces pâtures qui, faut d'une rosée divine et porteuse de fruits, restaient sèches, il prit plusieurs compagnons avec lui pour le voyage et il partit pour sa terre natale. Là, dans la retraite de son monastère, il passa deux hivers et un été avec les frères, qui le reçurent à bras ouverts. De cette manière, il accomplit ce passage des écrits de l'Apôtre des Gentils, lorsqu'il dit: "Car j'ai décidé de passer l'hiver là" (Tim 3:12)

5. Comment après la mort de l'abbé il passa un court moment avec les frères, puis partit à Rome

Ayant maintenant parlé brièvement des vertus du saint, nous allons faire connaître les évènements suivants de sa vie tels que nous les avons vérifiés par des témoins fiables, de façon que sa vie et son caractère puisse être rendue plus clairement manifeste à ceux qui veulent se modeler sur l'exemple de sa sainte manière de vie. Après avoir accompli son dangereux voyage et avoir échappé sans mal aux périls de la mer, il retourna sur son sol natal et rejoignit une fois de plus la camaraderie de ses frères. Mais une fois qu'il eut apprécié leur compagnie pendant de nombreux jours, un profond chagrin commença de ronger son coeur et une peine pesa fortement sur son âme, car au fur et à mesure que les jours passaient, il s'apercevait que les membres veillissant de son maître devenaient de plus en plus faibles, et, comme une violente maladie secouait et troublait son corps, il vit que le jour de sa mort approchait. Enfin, Winbert sortit de la prison de son corps et souffla son dernier souffle pendant que les moines regardaient tristement. Souvent, dans le coeur des saints, le sentiment de compassion pour ceux qui sont submergés par l'affliction, jaillit avec une force particulière. Pendant un temps, ils peuvent être eux-mêmes tristes jusqu'au fond du coeur, mais, en mettant leur confiance dans les mots de l'apôtre, ils reçoivent une consolation éternelle dans le Seigneur. A cette occasion, le saint adressa aux frères des mots de réconfort, et, toujours attentif à la tradition des pères, les exhorta, dans un discours spirituel, à toujours préserver jusqu'à leurs plus petits détails à la fois la forme de l'organisation régulière et la norme de la prescription ecclésiastique. Il leur conseilla aussi de choisir quelqu'un comme leur père spirituel. Alors, tous, d'un seul accord et d'une seule voix, implorèrent sincèrement le saint homme, qui, à cet époque, était appelé Winfrith, de prendre la charge abbatiale. Mais comme il avait déjà abandonné le confort de son pays natal et mit de côté toute idée de gouverner les autres, en particulier parce qu'alors il se préparait ardemment à mettre ses propres projets à exécution, il déclina la demande avec tact. Or quand la saison d'hiver fut terminée et que l'été était déjà bien avancé, il se remit à son intention de l'année précédente et se mit à soigneusement préparer le voyage qui avait été reporté. Muni de lettres d'introduction de l'évêque Daniel, de bienheureuse mémoire, il essaya de se mettre en route pour le tombeau des apôtres. Mais, pendant un long temps, il fut retenu par les besoins des frères, qui, maintenant privés d'un supérieur, s'opposaient à son départ. Confronté à leurs pleurs et leurs gémissements, ses sentiments d'affection et de compassion le retenaient de partir. Et une très grande angoisse l'oppressait car il ne savait plus que faire. D'une part, il craignait qu'en abandonnant le troupeau qui avait été commis au soin de son maître et qui se trouvait maintenant sans gardien vigilant, les frères soient exposés aux loups voraces. Mais, d'autre part, il était soucieux de ne pas manquer l'opportunité de partir pour l'étranger à la saison d'automne. Et lorsque le Dieu Tout-Puissant, non insoucieux de son amour paternel, désira délivrer Son serviteur de sa perplexité, de son anxiété et de sa peine, et de fournir un supérieur approprié à la communauté, l'évêque Daniel s'occupa lui-même des besoins des frères et plaça à la tête du monastère un homme de caractère de bon aloi nommé Stephen. Et là-dessus, il envoya diligemment le saint homme sur son chemin de pélerinage. Disant adieu aux frères, il partit, et, après avoir voyagé une considérable distance, il arriva enfin, en réalisation de ses voeux, dans la ville qui, comme nous l'avons dit, est appelée Lundenwich. Il embarqua immédiatement sur un bateau petit et rapide et commença à traverser l'étendue de mer sans chemin. Les marins étaient dans de bonnes dispositions, les énormes voiles se gonflaient du vent du nord-ouest et, aidé ensuite par une brise sèche, il arrivèrent bientôt, après une traversée sans évènements, en vue de l'embouchure de la rivière appelée Cuent. Là, indemne de tout naufrage, ils mirent pied sur la terre ferme. A Cuentwick [Quentvic, Normandie] ils dressèrent leur camp et attendirent que le reste de la compagnie arrive. Quand tous furent réunis, ils commencèrent immédiatement leur voyage, car, avec les jours qui passaient, pesait sur eux la menace de l'hiver. Ils visitèrent de nombreuses églises sur leur chemin pour y prier que, par l'aide du Dieu Tout-Puissant, ils puissent passer en sûreté les pics enneigés des Alpes, trouver une plus grande gentillesse encore aux mains des Lombards, et échapper sans mal de la férocité sauvage des troupes indisciplinées. Et quand, enfin, par les prières des saints et la providence de Dieu, le saint et toute sa suite atteignirent sain et sauf la tombe de St Pierre l'Apôtre, ils rendirent immédiatement grâce au Christ pour leur voyage qui s'était déroulé sans incident. Ensuite, avec grande joie, ils se rendirent à l'église de St Pierre, chef des apôtres, et nombreux d'entre eux offrirent des cadeaux, demandant l'absolution de leurs péchés. Puis, après que plusieurs jours eurent passé, le saint homme parla avec l'homme vénérable qui occupait le siège apostolique, le pape Grégoire, de bienheureuse mémoire. Il était le second pape de ce nom, le prédécesseur du plus récent Grégoire, et était connu comme "Grégoire le Jeune" dans la langue vernaculaire des Romains. Le saint décrivit le travail qui était le plus cher à son coeur et pour lequel il avait travaillé avec tant d'impatience et si longtemps. Le saint pape, tournant soudainement son regard sur lui, demandant d'un air gai et des yeux souriants s'il apportait des lettres de recommandation de son évêque. Boniface tira son manteau en arrière et produisit à la fois un parchemin plié de la manière coutumière et d'autres lettres qu'il donna à cet homme admirable, de sainte mémoire. Aussitôt que Grégoire eut pris les lettres, il fit signe à Boniface de se retirer. Après que le pape eut lu les lettres de recommandation et examiné ce qui était écrit sur le parchemin, il rencontra Boniface ensuite sur une base journalière et il discuta de ses plans assidûment, jusqu'à l'approche de la saison d'été, lorsqu'il fut nécessaire pour Boniface de prendre le chemin du retour. Quand la fin du mois de Nisan, c'est-à-dire Avril, fut là, alors Boniface, ayant recherché, et reçu à la fois une bénédiction et des lettres du Siège Apostolique, fut envoyé par le bienheureux pape faire un rapport sur les peuples sauvages de Germanie. Le but était de voir si leurs coeurs et leurs esprits non éduqués étaient prêts à recevoir la semence de la Parole divine. Et ainsi, prenant de nombreuses reliques des saints, il reprit la route en sens inverse en compagnie de ses camarades et il arriva aux frontières de l'Italie, où il rencontra Liudprand, roi des Lombards, à qui il donna des cadeaux et des marques de paix. Il fut honorablement reçu par le roi et se reposa un moment après les travaux fatigants du voyage. Après avoir reçu de nombreux présents en retour, il traversa les collines et les plaines et escalada les cols montagneux escarpés des Alpes. Il traversa ensuite les territoires, inconnus de lui jusque là, des Bavarois et de leurs voisins Germains, et, en accord avec l'injonction du Siège Apostolique, effectua son voyage d'inspection en Thuringe. Ainsi, tel l'abeille laborieuse qui, portée en l'air par ses ailes qui bourdonnent doucement, vole de ci-de là au-dessus des champs et des prés et choisit son chemin parmi un millier de différentes fleurs qui sentent bon, testant avec sa langue, qui sait choisir, les trésors secrets du nectar porteur de miel et ignorant les sucs amers et empoisonnés, puis revient avec le nectar à sa ruche et qui, pour employer un exemple des mots de l'apôtre "vérifie tout et conserve ce qui est bon" (1 Thess 5.21). En Thuringe, le saint homme suivit le mandat qui lui avait été donné par le Siège Apostolique. Il parla aux sénateurs de toutes les tribus et aux princes de tout le peuple avec des mots d'exhortation spirituelle, les rappelant au vrai chemin de la connaissance et à la lumière de l'entendement que, pour la plus grande partie, ils avaient perdus par la perversité de leurs enseignants. En prêchant l'Evangile et en détournant leurs esprits du mal, vers une vie de vertu et l'observance des décrets canoniques, il réprouva, admonesta et instruisit au mieux de ses possibilités, les prêtres et les anciens, certains d'entre eux dévoués eux-mêmes à la vrai adoration du Dieu Tout-Puissant, alors que d'autres, contaminés et pollué par l'incontinence, avaient abandonné leur vie de chasteté à laquelle, en tant que ministres de l'autel, ils avaient fait voeux. Ensuite, accompagné de ses frères, il alla en Francie, et, apprenant la mort de Radbod, roi des Frisons, désireux que la Frise aussi entende la Parole de Dieu, il prit joyeusement le bateau et remonta le fleuve. En faisant ainsi, il atteignit des districts qui jusque là étaient restés intouchés par le prêche de l'Evangile. La fin de la persécution déclenchée par le sauvage roi Radbod lui permit de répandre au loin la graine de l'enseignement chrétien pour nourrir d'une doctrine saine ceux qui avaient été affamés par la superstition païenne. Les résultats de ce travail, si cher à son coeur, furent rapides et spontanés. La lumière divine illumina leurs coeurs, l'autorité du glorieux chef Charles sur les Frisons fut renforcée, la parole de vérité resplendit partout, les voix des prêcheurs remplirent la terre, et le vénérable Willibrord, avec ses compagnons missionnaires, propagèrent l'Evangile. Quand il vit que la moisson était abondante et les moissonneurs peu nombreux, le saint servant de Dieu offrit ses services pendant trois ans à l'archevêque Willibrord et travailla infatigablement. Il détruisit les temples et les sanctuaires païens, construisit des églises et des chapelles, et, avec l'aide de Willibrord gagna à l'Eglise de nombreux convertis. Quand Willibrord vieillit et alors qu'il devenait infirme, il décida, à la suggestion de ses disciples, de nommer un assistant pour l'alléger de la charge de son ministère dans ses années déclinantes et de choisir dans son petit troupeau quelques hommes de foi qui seraient capables de gouverner un peuple si nombreux. Il convoqua à lui le serviteur de Dieu et le pressa instamment, avec de salutaires mots de conseils, d'accepter la responsabilité et la dignité du siège épiscopal et de l'assister dans le gouvernement du peuple de Dieu. Boniface, dans son humilité, refusa avec hâte, répondant qu'il n'était pas digne du siège épiscopal, qu'une aussi grande responsabilité ne devait pas lui être imposée à un aussi jeune âge et qu'il n'avait pas encore atteint l'âge de 50 ans requis par le droit canonique. Ce furent toutes les excuses qu'il mit en avant pour éviter d'être élevé à cette position élevée. L'archevêque Willibrord lui en fit sévèrement reproche et le pressa d'accepter le travail qui lui était offert, ajoutant, comme argument final, le besoin extrême du peuple qu'il gouvernait. Quand même le sermon de Willibrord ne put amener le saint à accepter, et toutes sortes d'arguments ayant été employés, il tombèrent amicalement d'accord pour différer la question. D'une part le saint, retenu par un sentiment d'humilité, refusait une si haute position d'honneur. Willibrord de l'autre, attentif à l'aspect spirituel, ne pensait qu'au salut des âmes. En conséquence, après qu'ils eurent exprimé leur opinion personnelle, le serviteur de Dieu, comme s'il avait pris part à une sorte de dispute spirituelle, avança finalement un argument auquel on ne pouvait répondre. Il dit: "Très saint évêque, vous savez très bien, en tant que chef spirituel de ce lieu, que je suis venu en Germany sur l'ordre exprès du pape Grégoire, de sainte mémoire. En tant qu'envoyé du Siège Apostolique dans les pays barbares de l'Ouest, je vous ai gratuitement prêté mes services à vous et à votre diocèse, sans que mon maître le sache, maître au service duquel je suis lié par voeu même jusqu'à aujourd'hui. Aussi, sans le conseil et permission du Siège Apostolique, et sans son ordre exprès, je ne peux pas accepter un poste aussi élevé et aussi suprême. A cet argument , il ajouta une requête raisonnable en ces termes: "Je vous prie, aussi, de m'envoyer, lié comme je suis par les liens de ma propre promesse, vers ces terres vers lesquelles j'ai été, à l'origine envoyé par le Siège Apostolique". Aussitôt que Willibrord entendit l'argument tiré de la promesse solennelle du saint, il lui donna sa bénédiction et l'autorisa à partir. Là-dessus, le saint partit et atteignit un lieu appelé Amanburch, qui signifie "nourri", nourri, selon le mot de l'apôtre, "par les mots de la foi et la bonne doctrine que vous avez suivie" (1 Tim 4.6)

6. Comment dans le lieu où le sang des martyrs fut versé une fontaine vivante apparut à ceux qui parcouraient l'endroit en vue d'y construire une église

Pas à pas nous avons donné des preuves de la vertu de cet homme saint et de sa persévérance dans le travail du Seigneur, de façon que nous puissions rappeler -en général comme en détail- les exemples suivants de ses bonnes actions. Quand il eut converti au Seigneur un vaste nombre de gens parmi les Frisons, et que beaucoup, par son enseignement, furent venus à la connaissance de la vérité, il partit, sous la protection de Dieu, vers d'autres parties de la Germanie pour y prêcher. Et ainsi, avec l'aide de Dieu, il vint à ce lieu que nous avons déjà mentionné, appelé Amanburch. Là, les gouvernants étaient deux frères jumeaux nommés Detticand et Devrulf, qu'il convertit, les détournant de l'adoration sacrilège d'idoles qui était pratiquée sous le manteau du christianisme. Il détourna aussi des superstitions du paganisme une grande multitude de gens en leur révélant le chemin de l'entendement juste, et les persuada d'abandonner leurs croyances horribles et erronées. Quand il rassemblé un nombre suffisant de croyants, il construisit une petite chapelle. De la même manière, il délivra les gens de Hesse, qui, jusque là, avaient pratiqué des rituels païens, de la captivité du Démon en prêchant l'Evangile aussi loin que jusqu'aux frontières de la Saxe. Ayant converti plusieurs milliers de gens des pratiques païennes qu'ils avaient longtemps pratiquées, et les avoir baptisés, il envoya à Rome un messager expérimenté et digne de confiance, qui s'appelait Bynnan, porteur d'une lettre dans laquelle il faisait connaître au vénérable père et apôtre du Siège Apostolique, ce qui, par la grâce de Dieu, avait été accompli, et le nombre de gens qui, par l'opération du Saint Esprit, avaient reçu le sacrement du baptême. De plus, il demandait des directives sur certains points concernant les besoins quotidiens de l'Eglise et les progrès des gens, car il souhaitait avoir l'avis du Siège Apostolique. Quand le messager dont il vient d'être question eut passé quelques jours à Rome et que le temps du voyage de retour s'approcha, l'évêque du Siège Apostolique lui donna une lettre en réponse au message qu'il avait apporté. Repartant immédiatement, il apporta rapidement à son maître la lettre dictée par le pape. En lisant la missive apportée à lui par le messager, il apprit qu'il était convoqué à Rome, et, en toute hâte, il se prépara à obéir à cette injonction, dans un esprit de complète obéissance. Sans délai, il se mit en route, accompagné par une large suite, et un nombre de ses frères. Passant par les terres des Francs et des Burgondes, il traversa les Alpes et descendit à travers les marches d'Italie et le territoire tenu par les soldats. Finalement, il arriva en vue des murs de Rome, et louant et remerciant grandement Dieu, il se rendit rapidement à l'église de St-Pierre, où il se fortifia dans une longue et sérieuse prière. Après qu'il eut reposé ses membres fatigués pendant un bref espace de temps, un message fut envoyé au bienheureux Grégoire, évêque du Siège Apostolique, disant que le serviteur de Dieu était arrivé. Il fut alors accueilli avec une grande bonté et conduit au logement des pélerins. Un jour adéquat fut fixé pour une rencontre, et, à l'heure fixée, le pontife descendit à la basilique de St-Pierre l'Apôtre, et le serviteur de Dieu fut convoqué en sa présence. Après qu'ils eurent échangé quelques mots de salutations, l'évêque du Siège Apostolique l'interrogea sur son enseignement, sur le credo et sur la tradition et les croyances de son Eglise. A cela l'homme de Dieu donna une immédiate et humble réponse, disant: "Mon seigneur Pape, en tant qu'étranger, je suis conscient que je manque du talent dans l'utilisation de la langue avec laquelle vous êtes familier, mais accordez-moi du loisir et du temps, je vous en supplie, pour mettre par écrit ma confession de foi, de façon que mes mots et non ma langue puisse faire une raisonnable présentation des vérités auxquelles je crois". A cela, Grégoire acquiesca sur le champ et lui demanda d'apporter, écrite, sa confession de foi, exprimée en phrases polies, éloquentes et érudites, et qu'elle soit apportée au susdit pape. Il attendit ensuite pendant plusieurs jours. Enfin il fut invité une fois plus de plus et fut conduit à l'intérieur du Palais du Latran, où il se jeta, face contre terre, aux pieds du pontife apostolique et lui demanda sa bénédiction. Grégoire le releva rapidement et, après avoir remis dans les mains du serviteur de Dieu le document dans lequel la vérité pure et non contaminée de la foi était clairement exprimée, il l'invita à s'asseoir à son côté. Avec de sages conseils et une doctrine saine, il l'admonesta de préserver en tout temps le dépôt de la foi et, au mieux de sa capacité, de la prêcher avec vigueur aux autres. Ils discutèrent et débattirent de nombreux autres sujets concernant la sainte religion et la vraie foi, et, dans cet échange de vues, ils passèrent presque le jour entier. Enfin, le pape demanda comment les peuples qui, auparavant, avaient été plongés dans l'erreur et le mal avait reçu son prêche de la vraie foi. En apprenant qu'un grand nombre avait été converti de l'adoration sacrilège des idoles et admis à la communion de l'Eglise, le pape lui dit qu'il avait l'intention de l'élever à la dignité épiscopale et de l'installer sur des peuples qui, jusqu'à ce temps, avaient été sans chef pour les guider et qui, dans les mots de Notre Seigneur "languissaient tels le troupeau sans berger". Le saint homme, parce qu'il n'osait pas contredire un si grand évêque du Siège Apostolique, consentit, c'est-à-dire obéit. Et ainsi, le très haut évêque, lui de sainte autorité, fixa un jour pour l'ordination, le 13 novembre. Quand le saint jour pour la solennité sacrée se leva -ce jour était à la fois le jour de la fête de St André et le jour prévu pour sa consécration- le saint pontife du Siège Apostolique conféra sur lui la dignité de l'épiscopat et lui donna le nom de Boniface. Il mit entre ses mains le livre dans lequel les lois et canons les plus sacrés de l'Eglise et les décrets des synodes épiscopaux ont été inscrits et compilés, lui ordonnant qu'à partir de ce jour, cette norme de la conduite, et de la croyance d'Eglise soit gardée inviolée et que le peuple de sa juridiction soit enseigné selon ces lignes. Il lui offrit aussi, ainsi qu'à tous ses sujets l'amitié du saint Siège Apostolique, à partir de ce jour, et pour toujours. Par le moyen de ses lettres très sacrées, le pape plaça le saint homme, maintenent fortifié par le rang épiscopal, sous la protection et la dévotion du glorieux chef Charles. Après que Boniface ait passé par des chemins tortueux à travers les territoires densément peuplés des Francs, il arriva enfin en présence du susdit prince et fut reçu par lui avec des marques de révérence. Il lui remit les lettres de l'évêque de Rome et du Siège Apostolique, et après avoir reconnu le prince comme son seigneur et protecteur, il retourna, avec la permission du dirigeant, sur la terre des Hessois dans laquelle il s'était précédemment installé. Alors, de nombreux Hessois qui, à cette époque, avaient reconnu la foi catholique, furent confirmés par la grâce du Saint-Esprit et reçurent l'imposition des mains. Mais, d'autres, pas encore fort en l'Esprit, refusèrent d'accepter les purs enseignements de l'Eglise dans leur intégralité. De plus, certains continuèrent secrètement, d'autres ouvertement, d'offrir des sacrifices aux arbres et aux sources, et d'examiner les entrailles de victimes. Certains pratiquaient la divination, les horoscopes et les incantations. D'autres se tournaient vers les augures, les auspices et d'autres rites sacrificiels. Pendant que d'autres, d'un caractère plus raisonnable, abandonnaient toutes les pratiques profanes des Gentils et ne commettaient aucun de ces crimes. Avec le conseil et l'avis de ces dernières personnes, Boniface, en leur présence, essaya d'abattre, en un lieu appelé Gaesmere, un certain chêne, de taille extraordinaire, appelé dans l'ancienne langue des païens le Chêne de Jupiter. Prenant son courage à deux mains -car une grande foule de païens se tenaient là, regardant, et maudissaient amèrement dans leur coeur l'ennemi des dieux- il donna le premier coup. Mais alors qu'il n'avait fait qu'une entaille superficielle, soudain, la vaste masse du chêne, secouée par un fort coup de vent d'en haut s'écrasa au sol, éparpillant ses branches les plus hautes en fragments dans sa chute. Comme si ç'avait été la volonté exprès de Dieu -car les frères présents n'avaient rien fait pour cela- le chêne éclata en quatre parties, chacune d'une égale longueur. A la vue de ce spectacle extraordinaire, les païens qui avaient maudit cessèrent leurs critiques et commencèrent, au contraire, de croire et de bénir le Seigneur. Là-dessus, le saint évêque prit conseil des frères, construisit un oratoire avec le bois du chêne et le dédia à St Pierre l'Apôtre. Puis il partit en voyage en Thuringe, ayant accompli, par l'aide de Dieu, toutes les choses que l'on a déjà mentionné. Une fois là, il s'adressa aux anciens et aux chefs du peuple, les appelant à délaisser leur ignorance aveugle et à retourner à la religion chrétienne qu'ils avaient auparavant embrassée. Car, après que l'autorité de leurs rois fut arrivée à sa fin, Theobald et Heden avaient saisi les rênes du gouvernement. Sous leur pouvoir désastreux, qui était fondé plus sur la tyrannie et le massacre que sur la loyauté du peuple, beaucoup des comtes avaient été mis à mort, ou pris et emmené en captivité, alors que le reste de la population, submergé par toutes sortes d'infortunes, s'était soumis à la domination des Saxons. Ainsi, quand le pouvoir des chefs, qui avaient protégé la religion, fut détruit, la dévotion du peuple au christianisme et à la religion mourut également, et de faux frères furent amenés pour pervertir les esprits du peuple et pour introduire parmi eux, sous le déguisement de la religion, de dangereuses sectes hérétiques. De ces hommes, les chefs étaient Torchtwine, Zeretheve, Eaubercht et Hunraed, hommes vivant dans la fornication et l'adultère et que, selon l'apôtre, Dieu avait déjà jugés (voyez Heb 13:4). Ces individus déclenchèrent un violent conflit contre l'homme de Dieu, mais quand ils furent démasqués et qu'ils furent prouvés en opposition à la vérité, il reçurent une juste peine pour leurs crimes. Quand la lumière de la foi eut illuminé les esprits du peuple et que la population eut été déliée de ces liens erronés, quand aussi les disciples du Démon et les séducteurs insidieux du peuple, que nous avons déjà mentionnés, eurent été bannis, Boniface, assisté par quelques aides, récolta une abondante moisson. D'abord, il souffra d'un manque extrême et il manqua même des nécessités les plus fondamentales de l'existence, mais, bien que dans des conditions critiques et dans une grande détresse, il continua de prêcher la Parole de Dieu. Peu à peu le nombre des croyants augmenta, les prêtres devinrent plus nombreux, les bâtiments d'Eglise furent restaurés et la parole de Dieu fut proclamée dans tout le pays. Dans le même moment, les serviteurs de Dieu, moines d'un mode de vie réellement ascétique, furent groupés en un seul corps et ils construisirent un monastère dans un lieu appelé Orthorpf. A la façon des apôtres (voyez 1 Cor 4.12), ils produisirent leur propre nourriture et leurs propres vêtements et luttèrent contre eux-mêmes par un travail constant. De cette façon, des rapports de son travail atteignirent des terres éloignées et, en l'espace de peu de temps, sa renommée résonna dans toute la plus grande partie de l'Europe. De Bretagne, un nombre extrêmement élevé de saints hommes vinrent à son aide, et parmi eux des lecteurs, des écrivains et des hommes instruits, entraînés dans les autres arts. De ces hommes, un nombre considérable se mirent sous sa règle et sa direction, et par leur aide, la population, en de nombreux endroits, fut rappelée des erreurs et des rites profanes de leurs dieux païens. Certains travaillèrent dans la province de Hesse et d'autres s'éparpillèrent grandement parmi le peuple de Thuringe. Et ils prêchèrent la parole de Dieu dans la campagne et les villages. Le nombre de gens, des deux peuples, qui reçurent les sacrements de la foi fut énormé et plusieurs milliers d'entre eux furent baptisés. A la mort de Grégoire le Second, de bienheureuse mémoire, gouvernant du Siège Apostolique, le renommé Grégoire "le Jeune" monta sur le trône pontifical. Une fois de plus, les messagers de Boniface voyagèrent jusqu'à Rome et parlèrent au saint pontife du Siège Apostolique, lui présentant le serment d'amitié que son prédécesseur avait précédemment conféré à Saint Boniface et à ses gens. Ils assurèrent le pape de la soumission dévouée et humbe de Boniface, au Siège Apostolique, à la fois dans le passé et pour ce qui était du futur, et ils prièrent le pontife, en accord avec les instructions qu'ils avaient reçues, de permettre à son loyal sujet de rester dans la fraternité et la communion du pape et du Siège Apostolique. A cela le pontife donna une réponse immédiate et accorda à Saint Boniface et à tous ceux qui étaient sous ses soins, une communion fraternelle et amicale à la fois avec lui-même et avec le Siège Apostolique. De plus, il donna le pallium archiépiscopal aux envoyés, les chargea de cadeaux et des reliques de nombreux saints, et les renvoya sur le chemin du retour. Quand ses envoyés revinrent, portant les réponses immédiates du pape, Boniface, se réjouissant grandement, fut profondément réconforté par le soutien du Siège Apostolique et inspiré par l'abondance de la miséricorde divine. Ainsi, il construisit deux églises. L'une était à Frideslare. Il la dédia à St Pierre, prince des Apôtres. L'autre était à Amanburch. Il la dédia à St Michel Archange. Il attacha deux petits monastères à ces deux églises et invita un grand nombre de moines à y servir Dieu, avec ce résultat que, même jusqu'à ce jour, la louange, la bénédiction et l'action de grâce sont rendues au Seigneur notre Dieu. Quand tout cela eut reçu sa réalisation finale, il partit pour la Bavière où Hugobert était alors duc. Là, il continua à prêcher et à rendre visite à toutes les églises. Si grand était son zèle et son courage spirituel qu'il condamna et expulsa, en accord avec les décrets canoniques un certain schismatique nommé Eremwulf, qui était imprégné d'opinions hérétiques. Boniface convertit ensuite les gens de cette secte égarée, les éloignant de l'adoration des idoles. Ensuite, il les quitta et retourna au peuple de son diocèse, mu par un désir, comme le dit l'apôtre, de venir à ses frères (voyez Rom 15:23)

7. Comment il expulsa les hérétiques des provinces de Bavière et divisa le pays en quatre diocèses

Nous n'avons pas passé peu de temps en racontant certains des mérites de Boniface de façon que nous puissions décrire, bien que pas en détail, le puissant sens religieux qui le guida tout au long de sa vie. Car, comme l'histoire le montre, c'est une caractéristique des saints, que plaçant l'exemple des autres devant leurs propres yeux, ils élèvent en eux le désir de choses meilleures, et, leur vie s'approchant de sa fin, il augmentent, dans leur coeur, l'amour de Dieu. Quand un nombre considérable d'églises eut été construit en Hesse et en Thuringe, et qu'un supérieur eut été nommé pour chaque église, il se mit en route pour Rome pour la troisième fois, accompagné, comme d'habitude, par un groupe de disciples. Son intention était d'avoir des entretiens supplémentaires avec le père apostolique et de se recommander, comme ses années déclinaient, aux prières des saints. Quand à la fin de son long et pénible voyage, il fut amené en présence de l'apostolique seigneur Grégoire, le deuxième pape à être appelé "le Jeune", il fut reçu avec grande bonté et fut tenu dans une telle vénération par tous, Romains comme étrangers, que beaucoup affluèrent pour assister à ses prêches. Une multitude de Francs et de Bavarois, aussi bien que de Saxons arrivant de Bretagne et d'autres provinces, suivirent son enseignement avec l'attention la plus vive. Quand il eut finalement passé presque tout un an là, visitant les sanctuaires des saints et y priant, il obtint congé du vénérable évêque de Rome et rentra, emporta avec lui de nombreux cadeaux et des reliques sacrées des saints. Après avoir traversé l'Italie, il arriva aux murs de la cité de Picena, et comme ses membres étaient fatigués par le grand âge, il se reposa un moment chez Liutprand, le roi des Lombards. Après l'Italie, il rendit visite aux Bavarois, non seulement parce que le duc Odilon lui avait envoyé une invitation mais aussi parce que lui-même était désireux de voir ce peuple. Il resta parmi eux pendant quelque temps, prêchant la parole de Dieu, restaura les sacrements de la foi dans leur pureté primitive, and bannit ces gens qui détruisaient les églises et pervertissaient le peuple. Certains s'étaient arrogés la dignité d'évêque, d'autres la fonction de prêtre, alors que d'autres, par divers milliers de prétextes fallacieux avaient mené la plus grande part de la populace en erreur. Le saint, qui s'était dédié au service de Dieu depuis sa plus précoce enfance, et était ainsi peu capable d'accepter les offenses faites à son Seigneur, força le duc Odilon et ses sujets à abandonner leurs doctrines mauvaises, fausses et hérétiques et les mit en garde contre le caractère trompeur des prêtres immoraux. Avec le consentement du duc Odilon, il divisa la province de Bavière en quatre diocèses et leur nomma quatre évêques, qu'il consacra. De ceux-ci, le premier, appelé Jean, fut nommé au siège dans la ville qui est appelée Salzburg. Le second était Erembert, qui prit sur lui la charge de gouverner l'Eglise dans la ville de Regensburg. Quand tout fut mis en ordre en Bavière, une forme chrétienne de vie établie et les prescriptions du droit canon mises en application, Boniface retourna dans son diocèse. Il gouverna le peuple confié à ses soins, pourvut diligemment aux besoins de son troupeau, et nomma des prêtres pour défendre les fidèles et les délivrer des attaques des loups voraces. Le règne temporel du glorieux chef Charles vint finalement à sa fin et les rênes du pouvoir passèrent dans les fortes mains de ses deux fils, Carloman et Pépin. Puis, par l'aide de Dieu et à la suggestion de l'archevêque St Boniface, l'établissement de la foi chrétienne fut confirmé, la réunion de synodes par les évêques, à l'orthodoxie de religion, fut instituée parmi les Francs et tous les abus furent redressés et corrigés en accord avec l'autorité canonique. Sur le conseil du saint la pratique illégale du concubinage parmi les laïcs fut supprimée tandis que les mariages sacrilèges du clergé furent annulés et les parties pécheresses séparées. Si grande était la ferveur religieuse déclenchée par l'enseignement de St Boniface que Carloman et Pépin libérèrent les fidèles, dans de larges proportions, des pratiques mauvaises dans lesquelles, par longue négligence, ils s'étaient profondément enracinés et du fait desquelles, pour partie en laissant libre cours à leurs passions, pour partie trompés par les doctrines insidieuses des hérétiques, ils avaient perdu leur droit à la félicité éternelle. Car les hérétiques avaient si complètement éteint la lumière de l'enseignement religieux parmi le peuple qu'une obscurité d'erreur, sombre, impénétrable, s'était installée sur une large portion de l'Eglise. Deux des hérétiques, par exemple, nommés Adalbert et Clément, égarés par l'avidité du lucre crasseux, s'efforçaient de toutes leurs forces de détourner le peuple de la vérité. Mais lorsque le saint archevêque Boniface, avec la coopération des dirigeants Carloman et Pépin, les expulsa énergiquement de la communion avec l'Eglise, ils furent délivrés, selon l'Apôtre, "livrés à Satan pour la destruction de leur chair, de façon que leur esprit puisse être sauvé au jour du Seigneur Jésus (1 Cor 5:5)

8. Comment tout au long de sa vie, il prêcha avec zèle et comment il quitta ce monde

Pendant le règne de Carloman, tous les évêques, les prêtres, les diacres et les clercs, et toute personne de rang ecclésiastique, s'assemblèrent à la demande du dirigeant et tinrent quatre conciles synodaux. L'archevêque Boniface les présida, avec le consentement et le soutien de Carloman et du métropolitain du siège et de la cité de Mayence. Et étant un légat de l'Eglise romaine et du Siège Apostolique, envoyé comme il était par le saint et vénérable Grégoire II puis par Grégoire III ensuite, il poussa à ce que les nombreux canons et ordonnances décrétées par les 4 importants et anciens conciles soient conservés de façon à assurer le développement sain de la doctrine chrétienne. Car, comme au concile de Nicée, tenu sous Constantin Auguste, les erreurs et blasphèmes d'Arius avaient été rejetés, comme sous Théodose l'Ancien, une assemblée de 150 évêques avait condamné Macédonius, qui niait la divinité du Saint-Esprit, comme dans la cité d'Ephèse, sous Théodose, 200 évêques avaient excommunié Nestorius pour avoir déclaré qu'il y avait deux personnes dans le Christ, et comme au concile de Chalcédoine une assemblée de 630 évêques, fondant leur décision sur une plus ancienne des Pères, prononça un anathème contre Eutyches, un abbé de Constantinople, et Dioscure, qui le défendait, pour avoir attaqué les fondations de la foi catholique, ainsi, dans les territoires francs, après l'éradication de l'hérésie et la destruction des méchants conspirateurs, il poussa à ce que les développements ultérieurs de la doctrine chrétienne et les décrets des conciles généraux soient reçus. Avec cela en vue, il devait y avoir une réunion des évêques en synode chaque année, selon le décret du concile sus-mentionné des évêques. Cette tenue de synode est tombée en désuétude du fait de la peur constante de la guerre et de l'hostilité et des attaques des tribus barbares enourant le royaume, et du fait des essais d'ennemis hostiles pour détruire par la violence le royaume Franc. Les synodes ont été oubliés si complètement que personne ne peut se rappeler, de mémoire humaine, qu'une telle assemblée ait eu lieu. Car c'est dans la nature du monde de tomber en ruine, même s'il est restauré chaque jour, alors, par ailleurs, que si rien n'est fait pour le réformer, il se désintègre et se précipite tête en avant vers son sort prédestiné. Aussi si, dans le cours de cette vie mortelle, des moyens ont été découverts de remédier à de tels maux, ils devraient être préservés, et défendu fortement par les catholiques, et fixés de manière indélébile dans l'esprit. Sans quoi, la négligence humaine et la séduction du plaisir, toutes deux instiguées par le Démon, se prouveront être une pierre d'achoppement. Pour cette raison, le saint évêque, dans son désir de délivrer son peuple de l'influence funeste du Diable, poussa, à plusieurs reprises, Carloman de convoquer les synodes épiscopaux dont on vient de parler de façon que la génération d'alors et les générations futures puisse apprendre la sagesse spirituelle et puisse rendre disponible à tous la connaissance du christianisme. Ce n'est que de cette manière que les âmes ne suspectant rien éviteront d'être prises au piège. Une fois qu'il eut exposé, devant tous les rangs de la société, la norme acceptée de la vie chrétienne, et leur avoir fait connaître le chemin de la vérité, Boniface, devenu faible et décrépi, fit preuve d'une grande prévoyance à la foi en ce qui le concernait et en ce qui concernait son peuple en désignant un successeur à son siège, comme le demande la loi ecclésiastique. Ainsi, soit qu'il continua de vivre, soit qu'il mourut, le peuple ne serait pas laissé sans pasteurs et leur ministère. Il promut deux hommes de bonne renommée à l'épiscopat, Willibald et Burchard, divisant entre eux les églises qui étaient sous sa juridiction dans la terre des Francs de l'Est et sur les marches de Bavière. A Willibald, il confia le diocèse d'Eichstatt, à Burchard celui de Würzburg, plaçant sous ses soins toutes les églises situées à l'intérieur des frontières des Francs, des Saxons et des Slaves. Cependant, jusqu'au jour de sa mort, il ne cessa d'instruire le peuple sur la façon de vivre. Pépin, alors, avec l'aide du Seigneur, prit le contrôle du royaume des Francs, comme heureux successeur de son frère ci-dessus mentionné. Quand les désordres parmi le peuple eurent décru, il fut élevé à la royauté. Dès le début, il respecta consciencieusement les voeux qu'il avait prononcés devant le Seigneur de mettre en effet sans délai les décrets synodaux, et il renouvela les institutions canoniques que son frère, suivant l'avis du saint archevêque Boniface, avait mis en place de façon si obéissante. Il montra au saint toutes les marques de la vénération et de l'amitié et obéit à ses préceptes spirituels. Mais parce que le saint homme, du fait de ses infirmités physiques, n'était pas à même d'assister aux assemblées synodales, il décida, avec l'approbation et l'avis du roi, de nommer une personne appropriée pour administrer son troupeau. A ce but, il nomma Lull, un disciple à la capacité exceptionnelle, dont le but devait être de continuer envers le peuple le travail d'instruction du saint homme. Il le consacra évêque et lui confia l'héritage qu'il avait gagné au Christ par ses efforts zélés. Lull avait été son compagnon de confiance dans ses voyages et qui avait été étroitement associé à lui à la fois dans ses souffrances et dans ses réconforts. Quand le Seigneur voulut délivrer son serviteur des épreuves de ce monde et le libérer des vicissitudes de la vie mortelle, il fut décidé, sous l'inspiration de la Providence divine, qu'il voyagerait en Frise en compagnie de ses disciples, la Frise qu'il avait quittée de corps mais pas d'esprit. Et cela fut fait pour, qu'en y mourant, il reçut la récompense divine là où il avait commencé de prêcher. Il prédisit à l'évêque Lull, dans une prophétie étonnante, que sa mort approchait et lui fit connaître la façon dont il allait rencontrer son destin. Puis, il élabora des plans pour la construction de nouvelles églises et pour l'évangélisation des peuples. "Mon voeu, dit-il, est d'accomplir ce voyage que j'ai décidé, et rien ne pourra m'empêcher de le faire. Le jour de mon départ de cette vie approche et le temps de ma mort aussi. Dans peu de temps, je laisserai le poids de mon corps et je recevrai le prix du bonheur éternel. Mais toi, mon cher fils, tu dois mener à sa fin la construction des églises que j'ai commencées en Thuringe. Ramène sérieusement le peuple des chemins de l'erreur, termine la construction de la basilique à Fulda, qui est en train d'être construite, et apporte là mon corps qui est maintenant dévasté par le labeur des ans". Quand il eut fini de donner ces instructions, il ajouta encore les mots suivants: "Fournis-nous soigneusement tout ce dont nous aurons besoin pendant notre voyage, en n'oubliant de placer dans le coffre, où se trouvent mes livres, un drap de lin dans laquelle on puisse m'envelopper". A ces mots emplis de tristesse, Lull ne put retenir ses larmes et laissa s'exprimer son profond chagrin. Mais Boniface, ayant exprimé ses dernières volontés, partit à son oeuvre, sans s'en préoccuper. Après que quelques jours se furent écoulés, il continua de persévérer dans sa décision de partir pour ce voyage et, ainsi, prenant avec lui quelques compagnons, il embarqua sur un bateau et mit voile vers l'aval du Rhin. Il finit par atteindre le pays de marécages de Frise, traversa sans encombre l'étendue d'eau que, chez eux, ils appellent Aelmere [le Zuidersee], et il fit une inspection des terres alentours, qui, jusque là, n'avaient pas porté de fruits. Après avoir courageusement affronté les dangers du fleuve, de la mer, et de la vaste étendue de l'océan, il traversa des endroits dangereux, sans peur, et visita les Frisons païens, dont la terre était divisée en de nombreux territoires et districts par des canaux qui se croisaient. Ces territoires, bien que portant des noms différents, sont cependant la propriété d'une seule nation. Mais comme il serait fastidieux de donner une liste de ces districts les uns après les autres, nous ne mentionnerons que l'un ou deux d'entre eux par leur nom pour prouver la véracité de notre récit et ajouter à sa continuité. De cette façon, un lieu et son nom porteront témoignage des activités du saint alors que nous les relaterons et montreront quelle fut la mort qui l'emporta hors de ce monde. C'est ainsi qu'il traversa l'ensemble de la Frise, détruisant les croyances païennes et détournant les gens de leurs erreurs du paganisme en prêchant l'Evangile. Les temples et les dieux païens furent renversés et des églises construites à leur place. Plusieurs milliers de femmes, d'hommes et d'enfants furent baptisés par lui, assisté d'Eoban, son compagnon missionnaire et évêque suffrageant, qui, après avoir été consacré évêque dans la ville qui est nommée Trecht [Utrecht] fut convoqué en Frise pour aider Boniface dans son vieil âge. Boniface fut également aidé dans ses travaux par un nombre de prêtres et de diacres dont voici les noms: Wintrung, Walthere, Ethelhere, prêtres. Hamrind, Scirbald et Bosa, diacres. Wachar, Gundaecer, Illehere et Hathowulf, moines. En compagnie de St Boniface, ils prêchèrent la parole de Dieu dans tout le pays avec un grand succès et ils étaient si unis en esprit, que, en accord avec l'enseignement de la pratique apostolique ils étaient "d'un seul coeur et d'une seule âme (Actes 4:32). Ils méritèrent ainsi de partager la même couronne du martyr et la même récompense finale et éternelle. Quand, comme nous l'avons dit, la foi fut plantée fermement en Frise et que la fin glorieuse de la vie du saint approcha, il prit avec lui un nombre choisi de ceux qui le suivaient de près et installa un camp sur les rives de la Bordne, qui coule à travers les territoires appelés Ostor et Westeraeche et les divise. Là, il fixa un jour où il les confirmerait par l'imposition des mains, tous les néophytes et ceux qui avaient été récemment baptisés. Et parce que le peuple était dispersé dans toute la contrée, ils rentrèrent ensuite tous chez eux, de façon que selon les instructions du saint évêque, ils reviennent au jour dit pour recevoir la confirmation. Mais les évènements tournèrent autrement. Quand le jour fixé arriva et que la lumière du matin perça à travers les nuages, après le lever du soleil, ce furent des ennmis qui apparurent au lieu d'amis, des tueurs nouveaux au lieu d'adorateurs nouveaux de la foi. Un grand nombre d'ennemis, armés de lances et de boucliers se ruèrent dans le camp, brandissant leurs armes. En un instant, les serviteurs sortirent du camp pour leur faire résistance et s'emparèrent d'armes ici ou là pour défendre le saint groupe de martyrs -car c'est ce qu'ils étaient appelés à devenir- contre la furie insensée de la foule. Mais l'homme de Dieu, entendant les cris et la cohue, appela immédiatement les clercs à ses côtés et, rassemblant les reliques des saints, qu'il portait toujours avec lui, ils sortirent de sa tente. Immédiatement, il réprouva les serviteurs et leur interdit de continuer à se battre, disant: "Fils, cessez de vous battre. Déposez vos armes, car on nous dit dans l'Evangile de ne pas rendre le mal pour le bien mais de vaincre le mal par le bien. L'heure que nous avons longtemps attendue est proche et le jour de notre délivrance aussi. Trouvez réconfort dans le Seigneur et supportez avec joie les souffrances qu'il a miséricordieusement ordonnées. Mettez votre confiance en Lui et Il accordera la délivrance à nos âmes". Et s'adressant come un père aimant aux prêtres, aux diacres et aux autres clercs, tous entraînés au service de Dieu, qui se trouvaient près de lui, il leur donna courage, disant: "Frères, soyez d'un coeur fort, ne craignez pas ceux qui tuent les corps, car ils ne peuvent pas tuer l'âme, qui continue de vivre pour toujours. Réjouissez-vous dans le Seigneur, ancrez votre espoir en Dieu, car, sans délai, il vous accordera la récompense du bonheur éternel et vous accordera une demeure avec les anges, dans le royaume d'En-Haut. Ne soyez pas esclaves des plaisirs transitoires de ce monde. Ne soyez pas séduits par la vaine flatterie des païens, mais supportez d'un esprit résolu l'attaque soudaine de la mort, afin que vous puissiez règner pour toujours avec le Christ!" Pendant qu'avec ces mots, il encourageait ses disciples à accepter la couronne du martyr, la foule frénétique des païens, se ruèrent soudainement sur eux avec des épées et toute sorte d'armes de guerre, tachant leurs corps de leur sang précieux. Soudain, après que les restes mortels des justes eussent été mutilés, la foule des païens saisit avec exultation les dépouilles de leur victoire -en réalité la cause de leur damnation- et, après avoir ravagé le camp, emportèrent le butin et se le partagèrent. Ils volèrent les coffres dans lesquels se trouvaient les livres et les reliques et, pensant qu'ils avaient acquis une masse d'or et d'argent, les emportèrent, encore fermés, aux navires. Les navires étaient remplis de provision pour la nourriture des prêtres et des serviteurs et beaucoup de vin était encore là. Le trouvant, les païens commencèrent immédiatement à satisfaire leurs appétits et ils s'enivrèrent. Après quelque temps, du faît de la volonté merveilleuse de Dieu, ils commencèrent à se disputer au sujet du butin, et de comment ils allaient partager l'or et l'argent -qu'ils n'avaient encore même pas vu. Une longue discussion s'ensuivit au cours de laquelle beaucoup de paroles pompeuses furent échangées. Ils imaginaient le butin considérable. Ils échangèrent des mots, et, finalement, une telle inimitié et discorde s'était élevées entre eux qu'ils furent divisés en deux factions courroucées et excitées. Et il ne fallut par longtemps pour que les armes qui avaient tué les saints martyrs fussent tournées les unes contre les autres dans un âpre combat. Après que la plupart d'entre eux eussent été tués, les survivants des pilleurs, entourés des corps de leurs rivaux, se ruèrent sur le trésor qui avait été obtenu au prix de tant de vies. Ils cassèrent les coffres contenant les livres, et à leur consternation, ils virent qu'ils ne contenaient que des manuscrits au lieu de vases d'or, des pages de textes sacrés au lieu de plats d'argent. Déçus, car ils croyaient trouver des richesses, il jonchèrent les champs des livres qu'ils avaient trouvés, en jetant certains dans les marais couverts de roseaux, en cachant d'autres dans de nombreux autres endroits. Mais, par la grâce de Dieu et les prières de l'archevêque et martyr Boniface, les manuscrits furent retrouvés, longtemps après, sans dommages et intacts, et ceux qui les retrouvèrent les renvoyèrent au monastère, où ils sont utilisés avec grand usage pour le salut des âmes, encore aujourd'hui. Déçus par la perte d'un trésor qu'il avaient escompté, les meurtriers retournèrent chez eux. Mais, après que trois jours se furent écoulés, une juste rétribution leur fut donnée de leurs crimes, car ils perdirent non seulement toutes leurs possessions de ce monde, mais leurs vies aussi. Car c'était la volonté du Créateur Omnipotent, Sauveur du monde, de se venger de ses ennemis. Et dans Sa miséricorde et sa compassion, il demanda une peine pour le sang versé en Son nom. Profondément ému par le récent acte de sauvagerie mauvaise, il daigna montrer la colère qu'Il avait si longtemps retenue contre les adorateurs des idoles. Comme la nouvelle malheureuse de la mort du martyr se répandait rapidement de village en village dans toute la province et que les chrétiens apprenait le sort de Boniface, une grande force s'organisa pour la vengeance, composée de guerriers prêts à se faire rendre justice. Ils se ruèrent rapidement vers les frontières de leurs voisins. Les païens, incapables de soutenir l'assaut des chrétiens fuirent immédiatement et furent massacrés en grand nombre. Dans leur fuite, ils perdirent la vie, leurs biens et leurs enfants. Et les chrétiens, après avoir pris pour butin les femmes et les enfants, les serviteurs, hommes et femmes, des païens, rentrèrent chez eux. Comme résultat, les païens des alentours, déçu de leur mauvaise fortune, et cherchant à éviter un châtiment éternel, ouvrirent leurs esprits et leurs coeurs à la gloire de la foi. Frappés de terreur à la visite de la vengeance divine, il adoptèrent, après la mort de Boniface, l'enseignement qu'ils avaient rejeté alors qu'il était encore en vie. Les corps du saint évêque et des autres martyrs furent emmenés par bateau à travers l'Aelmere, au cours d'un voyage de quelques jours sans évènements notables, jusqu'à la ville de Trecht dont il a été question. Là, les corps furent déposés et enterrés, jusqu'à ce que des hommes de Dieu, religieux et de confiance, vinssent de Mayence. Ils avaient été envoyés de là, par bateau, par l'évêque Lull, le successeur de notre saint évêque et martyr, pour emporter le corps du saint au monastère, sur les rives de la Fulda, qu'il avait fait construire pendant sa vie. De ces hommes, l'un s'appelait Hadda, remarquable par sa continence et sa chasteté, qui avait planifié et organisé le voyage. Sur lui particulièrement et sur tous les frères qui l'accompagnaient, Lull avait fait reposer l'obligation de partir et de ramener le corps sacré, de façon qu'un plus grand honneur et révérence puissent être rendus au saint homme et qu'une plus grande confiance fut faite à tout ce qu'ils auraient vu et entendu. La vénérable et sainte compagnie vint à la cité susdite et fut accueillie par une petite foule de gens. Mais le comte de la ville déclara -et tous l'entendirent- qu'un édit avait été pris par le roi Pépin interdisant à quiconque d'enlever le corps de l'évêque Boniface de cette ville. Comme, cependant, le pouvoir du Dieu Tout-Puissant est plus grand que la force des hommes, un miracle merveilleux eut soudainement lieu, qui fut du plus à une intervention angélique qu'humaine. La cloche de l'église, sans que personne ne l'ait touchée, commencer à sonner, comme si le corps du saint voulait se manifester. Toutes les personnes présentes, frappées d'un soudain sentiment de peur, furent frappées de terreur et crièrent que le corps de ce saint homme devait être rendu. En conséquence, le corps fut remis sur l'heure et fut emporté en grand honneur par les frères dont il a été question. Et ainsi, accompagné de psaumes et d'hymnes, sans avoir même à ramer contre le courant, le corps fut ramené, trente jours après la mort du saint, en la ville de Mayence. Il se trouva que, par la merveilleuse providence de Dieu, ce même jour, bien qu'aucun plan en ce sens n'ait été fait, se rassemblèrent pour l'enterrement de ce grand homme, non seulement les envoyés qui avaient rapporté le corps sacré mais aussi de nombreux hommes et femmes de foi, venant de districts distants et répandus dans toutes les contrées, comme s'ils avaient été prévenus de l'évènement. De plus Lull, le successeur du saint, qui à ce moment-là était pris au palais royal et n'avait pas été informé de l'arrivée du corps du saint, et qui ignorait tout à fait ce qui se passait, se trouva venir à Mayence presqu'à la même heure et au même moment. Et bien que tous les étrangers et les citoyens tout autant étaient écrasés de peine et de chagrin, ils éprouvaient cependant une grande joie. Car, alors qu'ils étaient frappés de chagrin quand ils considéraient les circonstances de la mort de Boniface, ils sentaient, de l'autre côté, qu'il allait désormais les protéger, eux et leurs héritiers, pour la suite des temps. Aussi, le peuple, les prêtres, les diacres et tous les rangs du clergé portèrent le corps sacré, le coeur traversé de sentiments contradictoires, à l'endroit qu'il avait choisi pendant qu'il était encore vivant. Un nouveau sarcophage fut fabriqué dans l'église et le corps y fut déposé, avec tous les rites coutumiers de l'enterrement. Et quand la cérémonie fut terminée, tous retournèrent chez eux, renforcés et confortés dans la foi. A partir de ce moment, le lieu où le corps sacré a été enterré est devenu la scène de nombreux bienfaits divins, par l'intermédiaire des prières du saint. Beaucoup de ceux qui sont venus là, affligés de diverses maladies et maux, furent guéris d'âme et de corps. Certains, qui étaient à la porte de la mort et pratiquement sans vie, privé de tout excepté de leur dernier souffle, retrouvèrent une santé vigoureuse. D'autres, dont les yeux étaient affaiblis par la cécité, recouvrèrent la vue. D'autres, tenus serrés par les pièges du Démon, déséquilibrés d'esprit et hors de leur raison, retrouvèrent la paix de l'esprit et rendirent louange et grâce à Dieu après leur guérison. Dieu daigna honorer et enrichir Son serviteur, qui possédait ce grand don, et le glorifia aux yeux des âges présents et futurs, 40 ans après que son pèlerinage ait été achevé, c'est-à-dire sans naissance, en 716, laquelle année de sa mort est calculée comme étant l'année de l'Incarnation de Notre Seigneur sept cent et cinquante-cinq, la huitième de l'indiction. Il occupa le siège épiscopal trente-six ans, six mois et six jours. Ainsi, de la manière qui a été décrite plus haut, le cinquième jour de juin, couronné de la palme du martyr, il rejoignit le Seigneur, à qui tout honneur et toute gloire sont pour les siècles des siècles. Amen

9. Comment à l'endroit où le sang des martyrs fut versé, une fontaine apparut à ceux qui parcouraient l'endroit pour y bâtir une église

Maintenant que nous avons raconté les évènements exceptionnels de la petite enfance du saint, de son enfance, de sa jeunesse, de son âge moyen et de sa vieillesse, revenons aux évènements merveilleux qui furent réalisés par l'aide de Dieu après que le travail de la vie du saint eut été terminé et que la sainteté de sa vie ait été rendue connue des hommes. Rappelons-nous un miracle que les gens se rappellent encore et racontent. Cette histoire nous fut racontée par le vénérable évêque Lull, qui l'avait apprise du roi Pépin, qui lui-même l'avait entendue des témoins oculaires. L'histoire, telle que racontée par Lull, est la suivante: un plan avait été conçu, avec l'avis des autorités ecclésiastiques et de la majorité du peuple de Frise, d'éléver un énorme monticule de terre à l'endroit où, quelques années auparavant, le sang précieux du saint martyr avait été répandu. C'était à cause des violentes morte-eaux et marées de printemps qui, à différentes époques de l'année, affectent le gonflement de l'océan et causent des perturbations dans la façon dont les marées entrantes et sortantes s'écoulent. Sur le monticule, ils se proposaient de construire une église -c'est ce qui sera effectivement fait plus tard- et, sur le même lieu, de construire un monastère pour les serviteurs de Dieu. Mais, quand le monticule eut été élevé et qu'il eut été achevé, les résidents et habitants du district commencèrent de dire, en rentrant chez eux, combien il était difficile d'obtenir de l'eau douce dans la région, car, dans presque toute la Flandre, c'est un grand problème à la fois pour les hommes et pour les bêtes. Enfin, un dénommé Abba, qui était administrateur sous le roi Pépin et qui avait dirigé le travail d'érection du monticule, prenant avec lui quelques serviteurs, monta son cheval, monta sur la colline et l'inspecta. Soudain, et de façon inattendue, le cheval de l'un des serviteurs, qui avait à peine touché le sol là, le sentit s'enfoncer et se dérober. Avec ses pattes avant tenant encore fermement sur un sol ferme, le cheval se débattait désespérément. Il fallut que quelques-uns, plus actifs et expérimentés, descendent de leur cheval et le tirent de là, lui évitant de s'enfoncer encore plus. C'est alors que, d'un coup, un miracle incroyable se produisit, digne d'avoir été mémorisé par tous ceux qui étaient présents et l'ont vu. Une fontaine d'eau, beaucoup plus claire que toute celle que l'on trouve dans ce pays, extraordinairement douce et plaisante au goût, jaillit, et se répandit en d'innombrables courants jusqu'à former un ruisseau considérable. Ebahis par ce miracle, ils retournèrent joyeux et contents à leurs maisons, répandant dans les églises la nouvelle de ce qu'ils avaient vu

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