logo du site et lien-retour vers la home page française image décorative flèche retour

La Vie de St Anskar

Chapitre I

Les fils et disciples du très révérend père Anskar, à qui le bonheur éternel a été accordé, saluent les saints pères et frères qui sont les soldats de Dieu dans le monastère sacré de Corbie, eux à qui une spéciale vénération et affection sont dues pour l'amour du Christ, et ils prient pour la paix et la sécurité de ceux qui règnent sur eux dans le Seigneur. Ayant, pendant un long temps, grâce à la faveur de Dieu, joui des services de leur bon pasteur, et ayant été instruit par ses prêches et son exemple, et supporté par ses mérites et ses intercessions, nous, qui avons été maintenant privé de sa présence, avons considéré à quel point nous devions nous plaindre de nous-mêmes en même temps que de lui rendre grâce. Car celui qui adore vraiment Dieu, qui s'abstient de tout mal et continue son chemin, simple et modeste, crée chez les autres l'assurance que, lorsqu'il est enlevé à eux, il rejoint au plus vite Celui qu'il a aimé avec la plus haute des dévotions et vers qui ses pensées ont toujours été tournées. Aussi, pour cette raison, nous croyons que nous devrions rendre grâce, vraiment, pour la récompense qui lui a été accordée, cependant que, considérant notre propre perte, nous devons prier pour que nous qui, en tant qu'hommes, avons été privés d'un si grand pasteur, soyons trouvés dignes de recevoir, depuis les cieux, l'aide de Dieu. Et dans les circonstances difficiles dans lesquelles nous sommes plongés, nous percevons clairement ce que nous avons perdu, et nous comprenons pour quelle raison nous avons à nous plaindre de nous-mêmes. Car, pendant qu'il était vivant, il semblait que nous ne manquions de rien, car, en lui, nous nous réjouissions de posséder tout. Car les rois respectaient sa sainteté, les pasteurs des églises le vénéraient, le clergé l'imitait et tout le peuple l'admirait. Et alors que tous les hommes le déclaraient saint et droit, nous, en tant que le corps dont il était la tête, nous étions respectés et loués sur la base de sa bonté. Maintenant que nous sommes privés d'un si grand bénéfice, nous n'osons pas prendre en considération nos propres mérites, mais nous en avons peur plutôt, craignant que, comme un résultat de nos péchés, nous ne soyons exposés aux dents des loups. Car le monde, qui est le domaine du Mal, cherche à renverser ce qui est juste et saint plutôt qu'à construire ce qui mérite vénération. Et lorsque le Diable, qui est l'ennemi du genre humain, s'aperçoit que quelqu'un mène une vie spécialement dévote et religieuse, s'efforce autant qu'il peut de lui créer des obstacles de façon à ce qu'il puisse détruire ce qui est saint et puisse, par persuasion habile et mauvaise entreprise, l'écarter et empêcher qu'il puisse être imité par d'autres. Et, quand nous soupirons au milieu de ces périls et que nous sommes dans la crainte de nombreux méchants, nous savons que nous devons rechercher l'aide de Dieu, dont la compassion, pensons-nous, ne nous manquera pas malgré notre indignité. Aussi, avec des coeurs suppliants, nous prions et implorons votre sainteté que vous vous rappellerez de nous et que vous daignerez intercéder pour nous auprès de Dieu pour que Sa compassion ne nous manquera pas et que, en tant que notre plus aimable adjoint, Il puisse écarter tout mal de nous, et être, pour nous, un refuge dans la tribulation, et qu'Il n'abandonne pas ceux qui espèrent en Lui. Présumant alors de Sa miséricorde et plaçant tout notre espoir dans sa compassion, nous laissons à Sa discrétion ce que nous devrions obtenir par nous-mêmes, et comment, de là, nous devrions vivre, et, de tout notre coeur et de tout notre esprit, nous louons et glorifions sa Grâce car Il nous a accordé d'avoir, pour un temps, avoir eu un tel chef. Nous rendons grand merci à votre très révérende autorité paternelle et sainteté que, par votre gentillesse et consentement, nous ayions été trouvés dignes d'avoir un tel père. Et si quiconque désirait imiter son exemple, il jouirait, sur cette terre, de la société du ciel; et celui qui se rappellera son enseignement, il pourra marcher sans faillir sur le chemin des commandements de Dieu. Et celui qui écoute ses exhortations, celui-là sera protégé des pièges de l'ennemi. Nous avons décidé d'écrire le mémorial de ce très saint père et de vous faire connaître comment il a vécu avec nous, et ce que nous connaissons le concernant, de telle sorte que, avec nous, vous puissiez louer la divine miséricorde qui fut manifestée dans cet homme bienheureux et que sa dévotion sainte puisse montrer le chemin du salut à ceux qui veulent l'imiter

Chapitre II

Sa sainteté et sa piété tendirent à croître dès sa plus tendre jeunesse et à chaque étape de sa vie, il tendit à croître en sainteté. Car il avait dans son enfance reçu du Ciel des révélations spirituelles, et, par la grâce du Seigneur, il reçut fréquemment des visites célestes qui l'exhortèrent de détourner ses pensées des choses de cette terre et de garder tout son coeur ouvert aux influences célestes. Il fit connaître ces révélations à certains d'entre nous qui étions étroitement associés à lui à condition qu'elles ne fussent dites à quiconque du temps qu'il vivrait. Maintenant qu'il est mort nous avons décidé d'insérer ces révélations dans ce travail, pour la louange de Dieu, de telle sorte que ceux qui le lisent sachent avec quelle grande grâce le Seigneur daigna former son serviteur dès son plus jeune âge et ensuite le rendre illustre par le moyen de ses actions méritoires. Il avait l'habitude de raconter que, alors qu'il était un enfant de cinq ans, sa mère, qui craignait Dieu et était très religieuse, mourut et que, peu de temps après, son père l'envoya à l'école pour apprendre ses lettres. Là, il commença, comme les enfants de cet âge en ont l'habitude, d'agir d'une façon enfantine avec les autres enfants, et à prêter attention aux conversations et aux plaisanteries idiotes plutôt qu'à apprendre. Lorsqu'il se fut ainsi adonné à la légèreté de l'enfance, il eut une nuit une vision. Il se trouvait dans un lieu boueux et glissant, d'où il ne pouvait sortir qu'avec grande difficulté. A côté se trouvait un chemin agréable sur lequel il vit s'avancer une dame noble, distinguée par sa beauté et sa noblesse, et elle était suivie par de nombreuses autres femmes, habillées en blanc, et parmi lesquelles se trouvait sa mère. Lorsqu'il la reconnut il voulut courir vers elle, mais il ne put sortir facilement de là où il était. Quand les femmes s'approchèrent, celle qui semblait être la maîtresse des autres et qu'il pensa, avec sûreté être la Sainte Vierge, lui dit: "Mon fils, veux-tu venir près de ta mère?" et, lorsqu'il répondit qu'il souhaitait ardemment cela, elle dit: "Si tu veux partager notre compagnie, tu dois d'abord délaisser toute vanité, rejeter ces plaisanteries enfantines et considérer le sérieux de cette vie. Car nous haïssons tout ce qui est vain et sans profit et ainsi, personne ne peut venir avec nous qui s'est complu dans ces choses". Immédiatement après cette vision, il commença à être sérieux et à éviter ses fréquentations d'enfant et il commença à se consacrer avec plus de constance à lire et à méditer, et à d'autres occupations utiles, de telle sorte que les autres enfants s'étonnaient grandement que sa façon de vie ait aussi soudainement changé.

Chapitre III

Quand plus tard il reçut de vous la tonsure et qu'il eut commencé de grandir dans l'enseignement monastique, la faiblesse humaine vint sur lui et la force de ces résolutions précoces commença de faiblir. Cependant, il arriva qu'il apprit la mort du très excellent empereur Charles qu'il avait vu auparavant dans le pouvoir et dans l'honneur et qui, comme il l'avait entendu dire, avait gouverné le royaume d'une manière digne de louange et avec grande prudence. La mort d'un si grand empereur l'emplit de peur et d'horreur et il commença de revenir à son état d'esprit antérieur et à se rappeler les mots d'admonition prononcés par la sainte Mère de Dieu. Aussi, il mit de côté toute légèreté et commença à languir d'un remors inspiré par Dieu. Et, se consacrant entièrement au service de Dieu, il accorda son attention à la prière, aux veilles et au jeûne. Il devint, par ces exercices virtueux, un véritable athlète de Dieu, et, comme résultat de sa sévérité persistente, le monde lui devint mort et lui devint mort au monde (v. Gal. vi.14). Lorsqu'arriva le jour de la Pentecôte, la grâce du Saint-Esprit, qui avait été à cette époque déversé sur les apôtres, illumina et rafraichît son esprit, croyons-nous. Et cette même nuit, il vit dans une vision qu'il était sur le point de mourir de mort subite. Mais, au moment de mourir, il appela à son aide le saint apôtre Pierre et le bienheureux Jean le Baptiste. Quand, à ce qu'il lui sembla, son âme était en train de quitter son corps et revêtait une autre et très magnifique sorte de corps, qui n'était plus sujette à la mort et d'où toute inquiétude était bannie, alors, à ce moment de sa mort et comme par une surprise merveilleuse, ces deux saints apparurent. Il reconnut immédiatement le plus âgé des deux, sans qu'on eut eu besoin de le lui dire. C'était Saint Pierre, avec sa tête blanche, ses clés droites et épaisses, son visage rouge, sa contenance triste, son vêtement blanc et coloré, et sa courte stature. L'autre était un jeune homme, plus grand de taille, avec une barbe flottante, des cheveux bruns et bouclés, un visage maigre et une contenance enjouée, et il était habillé d'une robe soyeuse. Il sut que c'était Saint Jean. Alors les deux, se tinrent de chaque côté de lui, et alors que son âme quittait son corps, il sembla être entouré d'une lumière sans fin qui emplissait le monde entier. Grâce à cette lumière et sans qu'il fît aucun effort, les deux saints dont il vient d'être question l'emportèrent d'une façon étrange et indescriptible jusqu'à arriver à un endroit, que, de façon évidente, il reconnut être le feu du Purgatoire, et là, ils le laissèrent. Lorsqu'il eut souffert beaucoup et eut semblé avoir expérimenté la plus sombre des obscurités et les plus énormes des pressions et étouffements, il fut privé de toute mémoire et sa seule pensée devint de savoir comment un si terrible châtiment pouvait exister. Lorsqu'il eut été torturé là pendant trois jours -bien que cela lui eut semblé avoir été plus d'un millier d'années vu les grandes souffrances qu'il avait endurées- les saints dont nous avons parlé plus haut revinrent et se tinrent près de lui avec une joie encore plus grande qu'auparavant. Continuant d'avancer d'une façon encore plus merveilleuse, ils l'amenèrent à travers une grande et ineffable clarté, progressant sans se mouvoir et sur aucun chemin matériel. Pour emprunter ses propres mots, "Je vis, dit-il, de loin, différentes rangées de saints, certains près de moi et d'autres éloignés de l'Est, mais regardant dans cette direction et, ensemble, ils louaient Dieu qui apparaissait à l'Orient, pendant que certains adoraient les têtes courbées, les visages baissés et les mains tendues. Lorsque nous fûmes arrivés à l'endroit où la lumière se lève, nous vîmes 24 vieillards, semblables à ceux dont il est question dans l'Apocalypse, qui étaient assis sur leurs sièges, laissant une place abondante pour permettre aux autres de s'approcher. Eux aussi regardaient avec déférence vers l'Est et offraient à Dieu des louanges inexprimables. Les louanges de tous ceux-là qui chantaient ensemble m'amenèrent le plus délicieux des rafraîchissements, mais, après que je fus retourné à mon corps, en aucune façon je ne pus les garder dans ma mémoire. Là où la lumière se lève, il y avait une lueur merveilleuse, une lumière inapprochable d'une brillance illimitée et excessive, en laquelle étaient incluses toutes les plus splendides des couleurs et toute chose agréable à l'oeil. Tous les rangs des saints, qui se tenaient en rond, se réjouissant, en tiraient leur bonheur. La lumière était d'une si grande étendue que je ne pouvais en voir ni le commencement ni la fin. Quand je fus capable de regarder de loin et de près, dans le milieu de la lumière sans fin, je ne pouvais pas voir ce qui était à l'intérieur, mais je n'en vis que le bord extérieur. Cependant, je croyais qu'Il était là, celui dont Pierre disait: "Lui, que les anges désirent voir" (I Pierre, i, 12). De Lui procédait une brillance illimitée dont les saints, près et loin, étaient illuminés. Lui aussi, en un sens, était en chacun d'eux, et eux en Lui. Il entourait toute chose depuis l'extérieur. Il contrôlait et exauçait les besoins de chacun. Il les protégeait d'au-dessus et les soutenait d'en-dessous. Le soleil et la Lune ne donnaient aucune lumière là, et ni la Terre ni le firmament n'étaient visibles. Mais même cette lumière n'était pas forte au point d'interférer avec la vue de ceux qui la regardaient. Elle était immédiatement la plus plaisante aux yeux et apportait une satisfaction complète à l'esprit. Quand j'ai parlé des vieillards assis, je voulais dire que l'on pouvait, en un certain sens, dire qu'ils étaient assis. Car il n'y avait rien de matériel là, rien n'avait de corps, bien qu'il y eut une apparence de corps que je ne peux décrire. La lumière magnifique qui se trouvait autour de ceux qui étaient assis, procédait de Lui-même, et s'étendait comme un arc-en-ciel. Et lorsque j'eus été amené par les saints que j'ai mentionné en présence de cette lumière sans fin, là la majesté du Dieu Tout-Puissant me fut révélée sans nécessité que quiconque me l'eût expliquée, et quand, ces deux saints et moi offrîmes notre adoration en union, une très douce voix, dont le son était plus distinct que tous les autres sons, et qui me semblait emplir le monde entier, vint de cette majesté divine et s'adressa à moi en me disant: "Va, et reviens-Moi couronné de la couronne du martyr!" Au son de cette voix, tout le choeur des saints qui louaient Dieu se tut et adora la tête baissée. Et je ne vis aucune forme d'où ces mots étaient venus. Après avoir entendu la voix je devins triste, car j'étais obligé de retourner sur Terre. Mais, satisfait de la promesse que je devais revenir, je me préparai à m'en repartir avec les accompagnateurs dont j'ai parlé auparavant. Lorsqu'ils vinrent et nous rentrâmes, ils ne dirent pas un mot, mais il me regardèrent avec une pieuse affection, comme une mère regarde son fils unique. Et c'est ainsi que je retournai à mon corps. A l'aller comme au retour, je n'expérimentai ni difficulté ni délai car nous arrivions d'un coup là où nous allions. Bien que j'aie semblé avoir dit quelque chose du plus grand de tous les délices, je confesse que le calame ne peut en aucun cas exprimer tout ce dont l'esprit est conscient. Ni l'esprit est conscient de tout ce qui a existé réellement, car ce qui m'a été révélé, l'oeil ne l'a pas, l'oreille ne l'a pas entendu, et cela n'a jamais pénétré le coeur de l'homme (I Cor ii, 9)". En résultat de cette vision, que j'ai décrite dans les mots qu'il avait lui-même dictés, le serviteur de Dieu fut à la fois terrifié et réconforté, et il commença de vivre plus soigneusement dans la crainte du Seigneur, il commença à se consacrer, jour après jour, aux bonnes actions et à espérer que, par la miséricorde de Dieu, de quelque façon qu'Il puisse le choisir, il puisse obtenir la couronne du martyr. Bien que ce ne fut pas l'épée menaçante qui amena le martyr à son corps, nous expliquerons plus pleinement, lorsque nous viendrons à parler de sa mort, comment cette promesse, par la miséricorde de Dieu, fut remplie, par sa mort sur la croix qu'il porta toujours dans son corps pour l'honneur du nom du Christ

Chapitre IV

Plus tard, lorsqu'il fut devenu le maître de l'école dédiée à Saint Pierre, c'était sa coutume, lorsqu'il sortait puis revenait à sa porte, de prier sérieusement et en secret à l'oratoire de Saint Jean-Baptiste. Deux ans après la vision que nous venons de raconter, il eut une vision dans la nuit. Il se trouvait, pensait-il, dans l'oratoire, pour y prier et alors qu'il avait terminé, un homme entra. Il était grand, habillé selon la coutume juive et d'une belle apparence. De ces yeux un éclat divin rayonnait comme une flamme de feu. Quand il Le reconnut, il cessa immédiatement d'hésiter, et, sûr que c'était le Seigneur Christ, il courut vers Lui et tomba à Ses pieds. Comme il se tenait ainsi prostré, Il (le Seigneur Christ) lui demanda de se lever. Quand il se fut levé et qu'il se tenait révérentieusement devant Lui, il ne pouvait regarder Son visage du fait de la lumière glorieuse qui jaillissait de Ses yeux. Alors, d'une voix apaisante, le Seigneur s'adressa à lui et dit: "Rejette ces iniquités de façon que tu puisses être justifié". A quoi le serviteur de Dieu répondit: "Seigneur, pourquoi le dois-je. Vous savez tout et rien ne Vous est caché". Le Seigneur dit alors: "Je sais tout, mais Je veux que les hommes Me confessent leurs fautes de façon qu'ils puissent recevoir le pardon". Alors, lorsqu'il eut confessé au Seigneur tout ce qu'il avait fait depuis sa plus tendre jeunesse, et qu'il se fut prosterné en prière, Il (le Christ) se tint debout devant lui et dit: "Ne crains pas, car Je suis Celui qui efface tes iniquités". Après quoi, cette figure qu'il avait vue en vision se retira. L'homme de Dieu s'éveilla de son sommeil et, renforcé par l'assurance que ses péchés avaient été pardonnés, il se réjouit d'une joie débordante

Chapitre V

Il arriva à cette époque, comme vous le savez bien, qu'un jeune de l'école, nommé Fulbert, fut frappé par un de ses compagnons avec un morceau de bois, et fut ainsi porté au bord de la mort. Le serviteur de Dieu dont il vient d'être question en fut grandement désolé, car un tel manque d'attention avait eu lieu entre ceux dont il avait la charge, et alors qu'il en était le maître. Alors que la dernière heure du garçon arrivait, Anskar se trouvait allongé sur une couche, envahi par le sommeil. Il vit alors, dans un rêve, l'âme du garçon retirée de son corps et portée au Ciel par les anges, et, d'une façon étrange et indescriptible, il fut autorisé par Dieu à l'accompagner. Lorsqu'ils furent entrés au Ciel, il vit l'âme du garçon emmenée dans un lieu brillant et placée parmi les rangs des martyrs. De plus, il lui fut donné de comprendre que, comme le garçon avait supporté sa blessure avec patience et qu'il avait continué d'aimer l'âme de son frère jusqu'à la mort, et qu'il avait prié pour son assaillant, sa patience et sa bonté avaient été récompensées par Dieu et il avait été placé dans le groupe des martyrs. Cette révélation lui fut fait si soudainement, alors que l'enfant mourait, que, alors qu'il ne le savait pas encore, le vénérable père Witmar, qui, à cette époque partageait avec lui la surintendance de l'école et était présent et témoin lors de l'accident, vint le réveiller et lui annonça la mort de son élève. Sur quoi il répondit qu'il le savait déjà. La grâce du Seigneur lui avait permis d'avoir eu cette vision de sorte qu'il puisse être consolé et de sorte que, étant donné son chagrin important, le salut du garçon puisse éclairer sa détresse

Chapitre VI

Par cette vision-ci et beaucoup d'autres révélations et visions, l'homme de Dieu fut divinement fortifié, et l'accroissement de sa sainteté et de sa bonté est encore mieux prouvé par des témoins oculaires. Nous, qui désirons dire ce qui s'est passé au milieu de nous, nous devons d'abord enquêter, pour le bénéfice de ceux qui peuvent être ignorants de ses faits, sur comment il vint à quitter sa position assurée et par quelle impulsion et force de circonstances, après s'être consacré à Dieu en votre présence et avoir promis obéissance, il vint dans ces lieux, et fut élevé au rang d'évêque parmi nous. Nous avons pensé qu'il était nécessaire d'écrire cela de peur que qui que ce soit puisse attribuer à de l'inconstance la tâche que l'homme de Dieu entreprit pour le salut des âmes, mû par une compassion divine et par un désir de se rendre en des pays étrangers. Il avait été auparavant construit, dans cette partie de la Saxe, le monastère qui fut d'abord fondé par votre autorité et sous votre direction [de l'abbé Adelard], puis qui fut ensuite terminé avec l'aide de Dieu. Il fut appelé Nouvelle Corbie, ce nom ayant été adapté de celui du propre lieu où vous résidez. C'est à cet endroit, alors, que le serviteur de Dieu fut d'abord envoyé en compagnie d'autres frères de façon qu'il puisse y remplir une des fonctions d'enseignant. Il fut trouvé si louable et si digne d'agrément dans cette tâche que, du choix de tous, il fut nommé pour prêcher la parole de Dieu au peuple de l'Eglise. C'est ainsi qu'il advint que, dans ce lieu, il devint le premier mâitre de l'école et l'enseignant du peuple.

Chapitre VII

Après cela, il arriva qu'un roi nommé Harald, qui règnait sur certains des Danois [Danes] fut assailli par la haine et la malignité et qu'il fut expulsé de son royaume par d'autres rois de la contrée. Il vint alors auprès de sa sérène Majesté l'Empereur Ludovic et demanda qu'il puisse être trouvé digne d'être aidé par celui-ci de façon à pouvoir recouvrer son royaume. Alors que l'empereur le gardait à sa cour, il le pressa, en le persuadant lui-même et par le biais d'autres, d'accepter la foi chrétienne, car ainsi il y aurait entre eux une amitié plus intime et qu'un peuple chrétien viendrait plus facilement à son aide et à l'aide de ses amis dès lors que les deux peuples seraient les adorateurs du même Dieu. Enfin, avec l'aide de la grâce divine, l'empereur finit par l'amener à la conversion et, lorsqu'il eut été aspergé de l'eau bénite du baptême, il le reçut en personne au sortir des saints fonts baptismaux et l'adopta comme son fils. Puis, lorsqu'ensuite il désira le renvoyer dans son pays de sorte qu'il pût, avec son assistance, essayer de reprendre le contrôle de ses domaines, il commença de mener une diligente enquête afin de pouvoir trouver un saint et dévoué homme qui pourrait partir avec lui et rester dans son pays, et qui pourrait le fortifier, lui et son peuple, et qui, en enseignant la doctrine du salut pourrait amener son peuple à recevoir la foi du Seigneur. A une réunion publique des ses hommes principaux, à laquelle leurs prêtres et autres bons hommes se trouvaient aussi, l'empereur évoqua cette question et les pria tous sérieusement de trouver quelqu'un qui pourrait être volontaire pour cette tâche difficile et honorable. Mais, comme ils refusaient, disant qu'ils ne connaissaient personne dont la dévotion fut si grande au point de vouloir entreprendre ce voyage dangereux au nom du Christ, Wala, qui, à cette époque, était le très respecté abbé de notre monastère, se leva, s'avança et dit à l'empereur qu'il connaissait un moine de son monastère qui brûlait de zèle pour la vraie religion et cherchait ardemment à souffrir pour le nom de Dieu. Mais il déclara cependant qu'il ne pouvait dire si ce moine serait d'accord pour entreprendre ce voyage. Pourqoi dire plus? Au commandement du roi, Anskar fut convoqué au palais, et l'abbé lui expliqua tout les évènements dont il était question et lui dit la raison pour laquelle il avait été convoqué. Anskar répondit, qu'en tant que moine obéissant, il était prêt à servir Dieu en tout ce qui lui serait commandé. Il fut ensuite amené en présence de l'empereur, qui lui demanda si, de la part de Dieu et pour le bien de prêcher l'Evangile au peuple Danois, il voudrait être le compagnon d'Harald. Il répondit qu'il le voulait entièrement. L'abbé, cependant, lui réaffirma une fois de plus qu'il ne s'agissait en aucun cas de lui imposer cette mission comme un ordre, mais que, si, de sa pleine et libre volonté, il choisissait de l'assumer, il en serait content et lui donnerait son consentement et tant que celui ayant autorité sur lui. Il répondit qu'il acceptait tout à fait la tâche et désirait la remplir par tous les moyens. Quand, enfin, cela fut publiquement annoncé, et que cela fut connu de tous ceux qui habitaient dans la maison de l'abbé, beaucoup commencèrent à exprimer de l'étonnement à la force de son engagement et de sa volonté d'abandonner son pays, ses connaissances et l'amour de ses frères avec lesquels il avait été élevé, pour se rendre parmi des nations étrangères et y entretenir des relations avec des peuples inconnus et barbares. Beaucoup aussi désapprouvèrent son choix et l'assaillirent de reproches, alors que certains s'efforçaient de le détourner de ce voyage. Mais l'homme de Dieu resta ferme dans sa résolution. Alors que, chaque jour, l'abbé se rendait au palais, lui restait dans la maison et évitait la compagnie de quiconque. Choisissant un endroit solitaire dans une vigne voisine, il consacrait son temps à la prière et à la lecture. A cette époque, il y avait avec l'abbé un frère qui appartenait à notre monastère et qui s'appelait Autbertus. Lorsqu'Audbertus vit qu'il était anxieux et affligé et que, chaque jour, il se tenait à part et ne s'associait ni ne parlait à quiconque, il commença à le prendre en pitié et, un jour, il alla à l'endroit où il était assis, seul, dans la vigne et lui demanda si réellement il voulait entreprendre ce voyage. Anskar, qui espérait bien que cette demande n'était pas engendrée par de la compassion, mais qu'elle précédait une autre demande, répondit: "Pourquoi cela est-il un objet de préoccupation pour vous? Ne ne dérangez pas par une telle demande". Le moine répondit qu'il ne faisait pas du tout semblant de se préoccuper de cela mais que, réellement, il voulait savoir s'il envisageait de persister dans le projet qu'il avait formé. Alors Anskar le remercia de sa gentillesse et dit: "Vous me demandez si je veux, de la part de Dieu, aller vers les nations païennes pour y prêcher l'Evangile. Et bien, loin d'oser m'opposer à cette suggestion qui m'a été faite, je désire de toutes mes forces, que cette opportunité de partir me soit accordée, et je souhaite que personne ne puisse être capable de me détourner de ce projet". Alors ledit frère lui dit: "Jamais je ne vous laisserai partir seul, mais, pour l'amour de Dieu, je souhaite partir avec vous, pourvu seulement que vous obteniez pour moi l'accord du seigneur abbé". Après qu'ils furent totalement tombés d'accord, Anskar se présenta à l'abbé à son retour au monastère et lui expliqua qu'il avait trouvé un compagnon que, de sa propre volonté, voulait partir avec lui. Lorsque l'abbé lui demanda de qui il s'agissait, et qu'il lui dit que c'était Audbertus, l'abbé fut grandement étonné car il n'avait jamais imaginé qu'Audbertus, qui appartenait à une grande famille et qui était son ami intime, et était regardé comme le principal administrateur du monastère après lui-même, aurait voulu entreprendre une telle tâche. Cependant, il le convoqua et le questionna sur ce sujet. Ce dernier répondit qu'il ne pouvait supporter qu'Anskar parte seul et que, au nom du Christ, il voulait être celui qui le réconforterait et qui l'aiderait, dès lors qu'il obtiendrait le consentement de l'abbé et de ses frères. L'abbé répondit qu'il donnerait son consentement dès lors qu'il s'agissait d'une décision prise en toute libre volonté de faire ce voyage, mais, cependant, qu'il ne désignerait personne de sa maison pour lui servir de serviteur, sauf si quelqu'un pouvait être persuadé de partir volontairement. Le vénérable abbé n'agit pas ainsi, cependant, par manque de considération pour Anskar mais parce que, à cette époque, il lui semblait haïssable et faux que quiconque soit forcé contre sa volonté de vivre parmi les païens. Subséquemment les deux moines furent amenés devant le roi, qui fut content de leur volonté et de leur désir d'entreprendre cette tâche, et qui leur donna tout ce qui était nécessaire pour l'accomplissement de leur fonctions de ministres du culte, ainsi des coffres, des tentes et d'autres choses qui seraient utiles et dont ils semblaient devoir probablement avoir besoin au cours de ce grand voyage. Il les pria d'accompagner Harald et leur commanda de se consacrer avec le plus haut des soins à sa profession de foi et, par leurs exhortations pieuses de confirmer dans la foi Harald et les compagnons de celui-ci qui avaient été baptisés en même temps que lui, de peur qu'à l'instigation du Diable, il ne retournent à leurs anciennes erreurs, et aussi, par leur prédication, à pousser d'autres à accepter la religion chrétienne. Puis, ayant été autorisé à se retirer de la présence de l'empereur, ils ne trouvèrent personne pour leur assurer les services du quotidien, car personne de la maisonnée de l'abbé ne voulait, de son propre accord, partir avec eux et l'abbé ne voulait forcer personne contre sa volonté. Harald envers qui ils avaient été engagés était encore ignorant et inculte dans la foi et ne savait pas comment les serviteurs de Dieu doivent se comporter. De plus, ses compagnons, qui n'avaient, eux, pas été convertis et qui avaient été élevé dans une foi toute différente, ne leur prêtaient que peu d'attention. Ayant ainsi commencé leur entreprise avec des difficultés considérables, ils arrivèrent à Cologne. A cette époque, il y avait là un vénérable évêque nommé Hadebald. Il eut pitié de leurs besoins et leur offrit un bon bateau à bord duquel ils pourraient placer leurs biens et où deux cabines avaient été préparées de façon appropriées pour eux. Quand Harald vit le bateau, il décida d'y rester avec eux, de sorte que lui et eux aient chacun leur cabine. Cela tendit à faire s'accroître l'amitié et la bienveillance entre eux. Et les compagnons d'Harald aussi, à partir de ce moment, prêtèrent de l'attention à leurs désirs. Quand il fallut quitter le navire, ils passèrent par Dorstadt [Wijk te Duerstade, près d'Utrecht] et, traversant le territoire voisin des Frisons, ils arrivèrent aux frontières du pays des Danois. Comme le roi Harald, à ce moment-là, ne pouvait obtenir pacifiquement la possession de son royaume, l'empereur lui donna un endroit, au-delà de la rivière Elbe, au cas où il lui aurait fallu s'arrêter là

Chapitre VIII

En conséquence, les serviteurs de Dieu qui étaient avec lui, et qui, à certains temps stationnaient chez les Chrétiens, et à d'autres chez les païens, commencèrent à s'appliquer à répandre la parole de Dieu. Et ceux sur lesquels ils pouvaient avoir de l'influence, il les dirigeaient sur le chemin de la vérité, de sorte que beaucoup furent convertis à la foi par leur exemple et leur enseignement, et que le nombre de ceux qui avaient vocation à être sauvés dans le Seigneur s'accroissait journellement. Eux-mêmes, inspirés par l'amour divin, de façon à répandre leur sainte religion, recherchèrent diligemment des garçons qu'ils pourraient s'efforcer d'éduquer pour le service de Dieu. Harald leur donna aussi certains de sa propre maison de façon à ce qu'ils soient éduqués par eux. Et ainsi il se fit qu'en peu de temps, ils établirent une école pour 12 garçons ou plus. Ils en prirent d'autres comme serviteurs ou aides, et leur réputation ainsi que la religion qu'ils prêchaient au nom de Dieu se répandirent au loin.. Après qu'ils eurent passé deux ans ou plus à ce bon travail, frère Autbertus tomba cruellement malade. Aussi, on l'emporta à la Nouvelle Corbie où, comme sa faiblesse s'accroissait de jour en jour, il mourut, au temps de Pâques, comme si cela lui avait été révélé auparavant par le Seigneur. Il s'en alla joyeux, comme nous le croyons

Chapitre IX

Pendant ce temps, il arriva que des ambassadeurs de Suède étaient venus vers l'empereur Ludovic, et que, parmi d'autres affaires qu'ils avaient eu ordre de porter à l'attention de l'empereur, ils l'informèrent que beaucoup, de leur nation, souhaitaient désiraient embrasser la religion chrétienne, et que leur roi favorisait cela à un tel point qu'il était prêt à autoriser des prêtres de Dieu à résider dans son royaume, pourvu qu'ils fussent jugés dignes d'une telle faveur et que l'empereur leur envoie des prêcheurs convenables. Lorsque l'empereur craignant Dieu entendit cela, il en fut grandement enchanté, et, une seconde fois, il s'efforça de trouver des hommes qu'il pourrait envoyer dans ces régions, pour y voir si ce peuple était préparé à accepter la foi, comme les ambassadeurs l'en avaient assuré, et pour commencer à inculquer l'observance de la religion chrétienne. C'est ainsi, qu'une nouvelle fois, sa Sérène Majesté en vint à discuter à nouveau du sujet avec votre abbé, et lui demanda si, par hasard, il pourrait trouver un de ses moines, qui, au nom du Christ, voudrait partir dans ces pays, ou qui voudrait aller rester auprès de Harald pendant que le serviteur de Dieu Anskaar, qui était avec le roi, prendrait sur lui cette mission. Et c'est ainsi qu'Anskar fut convoqué par odre royal au palais et qu'on lui dit qu'il ne devait même pas prendre le temps de se raser pour paraître au plus vite en présence de l'empereur. L'homme de Dieu, qui savait parfaitement par avance pourquoi on l'avait convoqué, brûlait de ferveur et d'amour envers Dieu et estimait que c'était une joie spéciale pour lui qu'on lui permît d'aller encore plus avant à gagner des âmes pour Dieu. Et si, dans un voyage de cette sorte, quelque mal ou mauvaise fortune venait à lui survenir, il était décidé à les supporter patiemment au nom du Christ. Et il n'eut pas d'hésitation à entreprendre cette tâche car il était conforté par la vision céleste qu'il avait eue auparavant. A l'époque à laquelle nous faisons référence, alors qu'il se trouvait avec vous et avait déjà été divinement éclairé par deux visions, il lui sembla une nuit qu'il arrivait dans un maison où se trouvaient de nombreux prêcheurs qui avaient été préparés à leur tâche de prédicateurs. Il fut soudain transporté en leur présence, et il vit resplendir autour de lui une lumière venant du Ciel, qui surpassait la luminosité du soleil. Et comme il se demandait ce que cela pouvait bien être, une voix, semblable à celle qu'il déclarait avoir entendue dans sa première vision, lui dit: "Tes péchés sont pardonnés". En réponse à cette voix, divinement inspiré croyons-nous, il répondit: "Seigneur, que veux-Tu que je fasses?" De nouveau on entendit la voix: "Va, et porte la parole de Dieu aux nations". Comme le serviteur de Dieu réfléchissait à cette vision, il se réjouissait grandement dans le Seigneur, car il percevait que ce qui lui avait été commandé était déjà en partie accompli, et il désirait maintenant ajouter au travail qu'il avait fait, de porter la parole de Dieu aux Suédois. Quand, ensuite, il fut amené en présence de l'empereur et que l'empereur lui demanda s'il voulait entreprendre cette mission, il répondit immédiatement qu'il était prêt à entreprendre toute tâche que l'empereur pourrait décider de placer sur lui au nom du Christ

Chapitre X

Dans la bonne providence de Dieu, le vénérable abbé lui trouva parmi votre fraternité un compagnon, le prieur Witmar, qui, à la fois, était digne et consentant à entreprendre cette grande tâche. Puis, il arrangea que le bon père Gislemar, un homme approuvé de par sa foi et ses bonnes oeuvres, et par son zèle fervent pour Dieu, irait avec Harald. Anskar entreprit alors la mission qui lui avait été confiée par l'empereur, qui voulait qu'il aille vers les Suédois et voie si ce peuple était prêt à recevoir la foi, comme ses envoyés l'avaient dit. Combien furent grandes et sérieuses les calamités qu'il souffrit pendant qu'il fut engagé dans cette mission, le père Witmar, qui les partagea, est mieux à même de le dire. Qu'il suffise pour moi de dire que pendant qu'ils étaient au milieu de leur voyage, ils tombèrent aux mains de pirates. Les marchands avec lesquels ils voyageaient se défendirent vigoureusement et, pendant un temps, avec succès, mais, finalement, ils furent vaincus et submergés par les pirates, qui les prirent de leur bateau, et tout ce qu'ils possédaient. Cependant, les deux purent à peine échapper, à pied, par terre. Ils y perdirent les cadeaux royaux qu'ils devaient apporter, ainsi que tous leurs autres biens, sauf ce qu'ils furent capables de prendre avec eux en quittant le navire. De plus, ils furent pillés de près de quarante livres qu'ils avaient rassemblés pour le service de Dieu. Quand cela arriva, certains étaient disposés à rebrousser chemin et à rentrer, mais rien ne put finalement détourner le serviteur de Dieu du voyage qu'il avait entrepris. Au contraire, il remit à la volonté de Dieu tout ce qui pouvait lui arriver et ne fut pas disposé d'une quelconque manière que ce soit à revenir, jusqu'à ce que, avec l'aide de Dieu, il ait pu établir s'il lui serait possible de prêcher l'Evangile dans ces endroits

Chapitre X

Avec de grandes difficultés, ils accomplirent leur long voyage à pied, traversant aussi, quand cela était possible, par bateau, les mers qu'ils rencontraient et, finalement, ils arrivèrent au port suédois appelé Birka [ancient port of Sitguna, sans doute au nord-ouest de Stockholm; the name is preserved today in the island Bjorko]. Ils y furent aimablement reçus par le roi, qui s'appelait Biörn [Björn] et dont les messagers l'avaient informé de la raison pour laquelle ils étaient venus. Quand le roi comprit l'objet de leur mission, et eut discuté de la question avec ses amis, il leur accorda, avec l'approbation et l'accord de tous, permission de rester et de prêcher l'Evangile du Christ, et il accorda la liberté à quiconque qui le voulait d'accepter leur enseignement. Aussi, les serviteurs de Dieu, quand ils virent que la marche des évènements avait tourné favorablement dans le sens qu'ils désiraient, commencèrent avec enthousiasme à prêcher la parole du Salut au peuple de ce lieu. Nombreux furent ceux qui furent bien disposés envers leur mission et qui, de leur propre volonté, écoutèrent l'enseignement du Seigneur. Il se trouvait également de nombreux Chrétiens qui se trouvaient captifs parmi ces gens et qui se réjouissaient qu'enfin, maintenant, ils pouvaient participer aux divins mystères. Il fut ainsi rendu clair que tout était bien comme leurs messagers l'avaient dit à l'empereur, et que certains d'entre eux désiraient sérieusement recevoir la grâce du baptême. En faisait d'ailleurs partie le préfet de la ville nommée Herigar, qui était un conseiller du roi et était très aimé de lui. Il reçut le don du saint baptême et fut fortifié dans la foi catholique. Un peu plus tard, il construisit une église sur sa propre terre ancestrale et servit Dieu avec la plus haute des dévotions. Plusieurs faits remarquables furent accomplis par cet homme qui fournit de nombreuses preuves de sa foi invincible, comme nous allons le montrer dans le récit qui suit

Chapitre XII

Quand les serviteurs de Dieu eurent encore passé une demi-année avec eux et eurent atteint l'objectif de leur mission, il s'en retournèrent vers l'empereur et prirent avec eux des lettres écrites par le roi lui-même en caractères façonnés selon la coutume suédoise. Il furent reçus avec grand honneur et bienveillance par l'empereur, à qui ils racontèrent tout ce que Dieu avait réalisé par eux et comment, dans ces contrées, la porte de la foi s'était trouvée ouverte, par laquelle ces nations étaient priées d'entrer. Quand le très pieux empereur entendit cela, il se réjouit grandement et, se rappelant le début qui avait été fait d'établir l'adoration de Dieu parmi les Danois, il rendit grâce et louange au Dieu Tout-Puissant, et, enflammé du zèle pour la foi, il commença de se demander de quelle façon il pourrait établir, au Nord, un siège épiscopal, dans les limites de son propre empire, d'où l'évêque qui serait stationné là pourrait faire de fréquents voyages dans les régions du Nord pour prêcher l'Evangile, et de qui toutes ces nations barbares pourraient facilement et profitablement recevoir les sacrements du divin mystère. Alors qu'il continuait de réfléchir à cela d'un soin attentif, il apprit, par des informations que lui fournirent certains de ses compagnons fidèles, que quand son père, l'empereur Charles, de glorieuse mémoire, avait soumis toute la Saxe par l'épée et l'avait assujettie au joug du Christ, il l'avait divisée en diocèses. Cependant il n'avait confié à aucun évêque la partie la plus éloignée de la province, qui se trouvait au-delà de l'Elbe mais décida qu'elle serait réservée, de façon qu'il puisse y établir un siège archiépiscopal d'où, avec l'aide de Dieu, la foi chrétienne pourrait s'étendre avec succès aux nations qui se trouvaient au-delà. En conséquence, il fit que la première église qui fut construite là fût consacrée par un évêque de Gaule, nommé Amalliar [évêque de Trèves]. Plus tard, il confia spécialement le soin de cette paroisse à un prêtre nommé Heridac [ou Heridag?] car il ne voulait pas que les évêques voisins aient aucune autorité sur cet endroit. Il prit ensuite des dispositions supplémentaires pour que ce prêtre fut consacré évêque, mais comme l'empereur fut prématurément enlevé à cette vie, cela empêcha qu'il en fut fait ainsi. Après la mort de cet empereur dont on doit beaucoup se rappeler, son fils Ludovic, qui fut placé sur le trône de son père, agissant sur la suggestion d'autres, divisa en deux cette partie de la province qui se trouve au-delà de l'Elbe et la confia, à cette époque, aux deux évêques voisins, sans tenir compte de l'arrangement que son père avait fait au sujet de cette région, ou, possiblement, il ignorait ces dispositions. Lorsque le temps vint que la foi du Christ commença, par la grâce de Dieu, à porter des fruits dans les terres des Danois et des Suédois, et que la volonté de son père vint à sa connaissance, il ne voulut pas que cette volonté demeure inaccomplie et, agissant avec l'approbation des évêques et d'un synode ayant bénéficié d'une très grande participation, il établit un siège archiépiscopal dans la ville de Hamburg, qui est située dans la partie la plus éloignée de Saxe au-delà de l'Elbe. Il désirait que toute l'Eglise des Nordalbingiens soit sujette à cet archevêché, et l'archevêché aurait le pouvoir de nommer les évêques et les prêtres qui, au nom du Christ, pourraient partir dans ces régions. A cette fin, l'empereur, à ce siège, fit que le saint Anskar, notre seigneur et père, fut consacré en tant qu'archevêque, par les mains de Drogo, évêque de Metz et à cette époque principal chapelain à la cour impériale. Il fut assisté par Ebo, archevêque de Reims, Hetti de Trèves [Trier] et Otgar de Mayence, cependant que de nombreux autres évêques qui s'étaient rassemblés pour l'assemblée impériale, étaient présents. Les évêques Helmgaud et Willerick, de qui Anskar prenaient, pour son district ecclésiastique, les territoires dont il a été question plus haut, approuvèrent et prirent part à sa consécration. Comme ce diocèse était situé dans des régions dangereuses et qu'il était à craindre qu'il fut détruit du fait de la sauvagerie des barbares, desquels il était menacé, et parce que son territoire était petit, l'empereur remit à ses représentants un monastère en Gaule, appelé Turholt, qui serait toujours à son service

Chapitre XIII

De façon que ces accords soient établis de façon permanente l'empereur envoyé Anskar au siège apostolique et, par ses messagers, les vénérables évêques Bernold et Ratold et l'illustre comte Gerold, il fit connaître toute la cause au page Grégoire [Grégoire IV, 827-844] de façon à ce qu'elle puisse recevoir sa confirmation. Le pape confirma, non seulement par un décret ayant autorité, mais aussi par le don du pallium, selon la coutume de ses prédécesseurs, et il nomma Anskar comme légat, pour le temps présent, parmi toutes les races voisines des Suèdois et des Danois, aussi les Slaves et autres races qui habitent les régions du Nord, de façon qu'il puisse partager autorité avec Ebo, l'archevêque de Reims, à qui il avait auparavant confié la même fonction. A la tombe du saint apôtre Pierre, il lui confia publiquement l'autorité d'évangéliser ces races. Et de peur que tout ce qu'il avait décidé s'avère sans effet dans les temps à venir, il frappa de sa malédiction quiconque résisterait, contredirait, ou, d'une façon quelconque essaierait d'interférer avec les saintes intentions de l'empereur et il voua tout auteur de tels actes à une vengeance éternelle et à la compagnie des démons. Comme nous l'avons déjà dit, le même office de légat avait été auparavant confié par le pape Pascal [Pascal Ier, 817-824] à Ebo, l'archevêque de Reims. Ebo lui-même, inspiré par l'Esprit de Dieu, brûlait d'un désir enthousiaste d'attirer au christianisme les races non-chrétiennes et spécialement les Danois, qu'il avait souvent vus au palais et qui, comme il souffrait de le voir, avaient été détournés du droit chemin par les tromperies du Diable. De façon à promouvoir leur salut, il désirait se sacrifier lui-même ainsi que tout ce qu'il possédait. L'empereur lui avait donné un lieu situé au-delà de l'Elbe, qui était appelé Welanao, de façon que, chaque fois qu'il allait dans ces régions, il ait un endroit où résider. En conséquence, il alla fréquemment dans cet endroit et distribua beaucoup d'argent dans les districts du Nord de façon à pouvoir gagner les âmes des gens. Et il en attacha beaucoup à la religion catholique et il les renforça dans la foi catholique

Chapitre XIV

Après la consécration du saint Anskar, notre seigneur et père, ceux qui partageaient cet office de légat se réunirent et décidèrent qu'il était nécessaire qu'un évêque assistant soit consacré qui pourrait exercer l'office épiscopal chez les Suédois, dans la mesure où l'on ne pouvait pas attendre de l'évêque en chef d'être présent aussi loin, et où Anskar lui-même ne pouvait pas être aux deux endroits. Alors, avec le consentement et l'approbation de l'empereur, le vénérable Ebo envoya en Suède un de ses parents [une de ses relations?], nommé Gautbert, qui avait été choisi pour cette tâche et à qui l'on avait donné le rang honorable d'évêque. Il lui fournit en abondance tout ce qui était nécessaire pour son office ecclésiastique et, à ses coûts et ceux de l'empereur, tout ce qui était nécessaire à ses dépenses. Ayant lui-même entrepris, du fait de l'autorité apostolique, l'office d'un évangélisateur, il nomma Gautbert pour agir comme légat de lui, parmi les Suédois. Et, à la suggestion du même évêque Ebo, l'empereur lui donna le monastère qu'Ebo avait lui-même construit à Welanao, pour qu'il serve comme lieu de refuge, de façon que l'accomplissement de sa tâche fut rendu permanente et sûre. Gautbert, qui, à sa consécration, reçut le nom honoré de l'apôtre Simon, alla en Suède et fut honorablement reçu par le roi et le peuple. Et il commença, au milieu de la bienveillance et de l'approbation générales, à construire une église là et à prêcher la foi de l'Evangile. Et il y eut une grande réjouissance parmi les chrétiens qui vivaient là, et le nombre de ceux qui croyaient augmenta chaque jour

Chapitre XV

Pendant ce temps, notre seigneur et maître exécuta avec diligence sa fonction dans le diocèse qui lui avait été confié, et, dans le pays des Danois [Danes] et par l'exemple de sa bonne vie, il incita beaucoup à embrasser la foi. Il commença aussi à acheter des garçons Danois et Slaves et à en rédîmer certains de la captivité de façon à pouvoir les instruire pour le service de Dieu. Il en garda certains avec lui, alors qu'il en envoya d'autres au monastère de Turholt pour qu'ils y soient instruits là. Il y avait là aussi, avec lui, appartenant à votre ordre, certains de nos pères et enseignants, dont le résultat de l'enseignement et de l'instruction fut le développement de la religion divine parmi nous

Chapitre XVI

Alors que ces évènements, qui apportèrent louange et honneur à Dieu, avaient lieu dans ces deux directions, des pirates surgirent soudainement et entourèrent la ville de Hamburg. Comme cela arrive soudainement et d'une manière inattendue, on n'eut pas le temps de rassembler le peuple dans les villages. De plus, le comte qui, à cette époque, était le préfet de l'endroit, c'est-à-dire l'illustre Bernhar, était absent. L'évêque qui était là et ceux qui restaient dans la cité et ses faubourgs, lorsque les premières nouvelles de l'arrivée des pirates arrivèrent, voulurent tenir la place jusqu'à ce que de l'aide put leur parvenir. Mais lorsque les gens de la campagne firent pression sur eux et que la ville était déjà assiégée, l'évêque perçut que la résistance était impossible et, en conséquence, il fit des préparations pour emporter les saintes reliques. En ce qui le concerne, alors que son clergé avait été dispersé et avait fui dans diverses directions, il ne put s'échapper qu'avec difficultés, sans même une cape pour couvrir son corps. Le peuple quitta la ville et erra ça et là. Et, pendant la plupart avaient fui, certains furent pris et, de ceux-ci, la plus grande partie furent tués. L'ennemi ensuite prit la ville et la pilla ainsi que ses environs immédiats. Il étaient arrivés le soir et ils restèrent la nuit et le jour et la nuit suivants. Et, quand tout eut été brûlé et détruit, ils repartirent. L'église, là, qui avait été construite de manière merveilleuse sous la direction de l'évêque, et le monastère qui était aussi d'une fantastique construction, furent réduits en cendres. La Bible que l'empereur avait donné à notre père, et qui était transcrite à la perfection, ainsi que de nombreux autres livres, fut perdue dans le feu. Tout ce qui était utilisé dans les services d'église et tous les trésors et les possessions de l'évêque furent perdus dans le pillage ou le feu, pendant l'attaque de l'ennemi. L'attaque le laissa pratiquement nu car rien, auparavant, n'avait été emporté de Hamburg ni rien ne put être enlevé au moment-même si ce n'est ce que chaque fugitif fut capable de prendre avec lui. Mais rien de tout cela n'affligea notre saint père, ni il pécha en paroles, mais, alors qu'en un instant il avait perdu presque tout ce qu'il avait pu rassembler ou ce qu'il avait pu rassembler dans la perspective de construire, il répétait encore et encore les mots de Job: "Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris. La volonté du Seigneur a été faite. Béni soit le nom du Seigneur"

Chapitre XVII

Après ces évènements, l'évêque continua, avec son peuple, sur le chemin des afflictions et des mauvaises fortunes, alors que les frères appartenant à son ordre traversaient divers districts et errait çà et là, emportant les saintes reliques avec eux. Et ils ne trouvèrent de repos nulle part, du fait des desseins du Malin. Il arriva aussi, à cette époque, à l'instigation du Diable, que le peuple suédois s'enflamma de zèle et de furie et qu'il commença par des moyens insidieux à persécuter l'évêque Gautbert. Ainsi il survint que certains, mûs par une impulsion commune, attaquèrent soudainement la maison dans laquelle il se trouvait, dans le but de la détruire. Et, dans leur haine du nom chrétien, ils tuèrent Nithard, et en firent, à notre opinion, un vrai martyr. Les assaillants lièrent Gautbert lui-même et ceux de ses compagnons qui étaient présents, et après avoir pillé tout ce qu'ils pouvaient trouver dans les maisons, ils les expulsèrent de leur territoire avec des insultes et des mauvais traitements. Cela, cependant, ne fut pas fait sur ordre du roi, mais fut le résultat d'un complot ourdi par le peuple

Chapitre XVIII

La miséricorde, longtemps souffrante, de Dieu ne permit pas que ce crime restât impuni. Au contraire, tous ceux qui étaient présents à ces crimes furent bientôt punis, chacun de différente façon. En ce qui concerne comment Dieu punit les criminels, beaucoup pourrait être dit, mais, de peur de lasser nos lecteurs, nous ne mentionnerons que le cas d'un seul individu de façon que l'exemple de comment il fut frappé puisse faire comprendre comment les autres furent aussi punis et vengeance fut tirée de leurs crimes. Dans le pays en question, il y avait un homme d'influence dont le fils s'était joint à ce complot et qui avait rassemblé dans la maison de son père le butin qu'il avait pris. Peu de temps après, les biens de cet homme commencèrent à décroître et il commença à perdre ses troupeaux et ses biens patrimoniaux. Le fils lui-même fut frappé par la vengeance divine et il mourut, et, après peu de temps, sa femme aussi, et son fils et sa fille moururent. Lorsque l'homme vit qu'il avait été dépouillé de tout ce qu'il avait possédé, à l'exception d'un seul fils en bas âge, il commença, à ce stade de sa misère, à craindre la colère des dieux et à penser qu'il souffrait toutes ces calamités du fait qu'il aurait offensé l'un d'eux. Aussi, selon la coutume locale, il alla consulter un devin et il lui demanda, qu'en tirant les sorts, il trouve quel dieu il avait offensé et qu'il lui explique comment l'apaiser. Après avoir procédé à toutes les cérémonies accoutumées, le devin déclara que tous les dieux étaient bien disposés à son égard, mais que c'était le Dieu des Chrétiens qui était très en colère contre lui. "C'est Christ, dit-il, qui a causé ta ruine. Et c'est parce que quelque chose est caché chez toi, qui Lui a été consacré, que tous ces malheurs te sont arrivés; et tu ne pourras t'en défaire tant que cette chose restera chez toi". Entendant cela, il réfléchit avec anxiété de quoi il pouvait bien s'agir, et, alors, il se rappela que son fils, effectivement, avait rapporté, comme faisant partie du butin dont il a été question, un livre. Réalisant cela, il fut frappé d'horreur et de terreur, et, parce qu'il n'y avait de prêtre catholique à proximité, il ne sut pas quoi faire fu livre. Et, comme il n'osait pas le garder plus longtemps chez lui, il finit par concevoir un plan, et il montra publiquement le livre à tous les gens du hameau, et il leur dit les malheurs qui s'étaient abattus sur lui. Quand tous lui eurent dit qu'ils ne savaient pas quoi lui conseiller sur cette affaire, et que, par ailleurs, ils avaient peu de prendre ou de conserver chez eux quoi que ce soit de la sorte, il eut encore plus peur de conserver le livre chez lui, et il finit par l'attacher et le ficeler à une clôture, avec un mot attaché, disant que quiconque le voulait, pouvait le prendre. De plus, pour l'offense qu'il avait commise, il promit de payer volontairement des amendes au Seigneur Jésus-Christ. L'un des Chrétiens prit finalement le livre et l'emporta chez lui. Cela est attesté par son propre témoignage. Par la suite, il montra tant de foi et de dévotion que, lorsqu'il fut avec nous, il apprit à dire les Psaumes sans les lire. Et de pareille manière les autres assaillants furent punis, soit par la mort ou la peste, ou par la perte de leurs biens, et il fut ainsi manifesté clairement à tous qu'ils recevaient ainsi, par notre Seigneur Jésus-Christ, le châtiment qui leur était dû pour avoir osé outragé le saint évêque de Dieu et ses compagnons et avoir pillé leurs maisons

Chapitre XIX

Pendant près de sept années après cela, il n'y eut plus de prêtres dans cet endroit, et, de cela, notre seigneur et pasteur Anskar fut affligé d'un grand chagrin. Et, comme il ne pouvait supporter que la religion chrétienne qu'il avait commencé d'établir là périsse, et parce qu'il s'affligeait grandement au sujet de son cher fils Herigar, dont nous avons parlé plus haut, il envoya un ermite nommé Ardgar [Hardegar?] dans ces contrées, et lui ordonna tout particulièrement de s'attacher à Herigar. A son arrivée, l'ermite fut courtoisement reçu par Herigar et sa présence apporta une grande joie aux Chrétiens qui se trouvaient là. Et ils recommencèrent à faire ce qu'ils avaient fait auparavant, à savoir de rechercher avec diligence les choses de Dieu et à observer d'un esprit disposé les coutumes de la religion chrétienne. Aucun des incroyants ne fut capable de résister à ses prêches, car ils se rappelaient avec crainte, le châtiment qui était advenu à ceux qui avaient chassé les serviteurs de Dieu de cet endroit. A la suggestion d'Herigar, et avec l'ordre et la permission du roi qui régnait alors [Björn encore, ou Anound (appelé aussi Emund)], il commença à célébrer en public les divins mystères. Cet homme très fidèle avait enduré de nombreux reproches de la part des incroyants pendant le temps qu'aucun prêtre n'avait été présent dans le royaume. Mais, par l'aide de la grâce divine et comme un résultat de ses prières, la vraie foi fut cependant proclamée et accompagnée de signes venus du Ciel. Certains de ces signes, conformément à notre promesse, nous les avons ajoutés à notre récit de façon que cette invincible fidélité fusse manifestée. En une occasion, Herigar siégeait dans une assemblée du peuple, une estrade ayant été construite pour une assemblée sur une vaste plaine. Dans le cours des débats, certains commencèrent à faire l'éloge de leurs dieux, grâce à la faveur desquels ils jouissaient d'une grande prospérité, alors que d'autres amoncelaient les reproches à son encontre car lui seul, en acceptant une croyance sans valeur, s'était séparé de tous ses concitoyens. On dit qu'alors, fervent en esprit, il aurait répondu: "S'il existe une telle incertitude par rapport à la Majesté divine, dont, cependant, personne ne devrait douter, prouvons par des miracles qui est le plus puissant. Ces nombreux êtres que vous appelez vos dieux, ou, au contraire, mon Tout-Puissant Seigneur Jésus-Christ. Voyez! La pluie est proche -une averse était imminente! Alors, faites appel aux noms de vos dieux et demandez-leur qu'aucune pluie ne tombe, et, moi, de mon côté, je vais demander à mon Seigneur Jésus-Christ que pas une goutte de pluie ne me touche. Et que ceux, ou celui, qui, alors, prendrons réellement en considération ceux qui font appel à eux ou à lui, que ce soit ceux-là ou celui-là qui soit Dieu!" On tomba d'accord sur ce jugement et, alors que toute l'assemblée resta assise d'un côté, lui et un petit garçon allèrent s'asseoir de l'autre. Et chaque païen commença d'invoquer chacun son dieu, alors qu'il invoquait le Seigneur Christ. Là-dessus, une pluie torrentielle commença de tomber, et la masse de l'assemblée fut à ce point trempée qu'il semblait qu'eux et leurs vêtements avaient été jetés dans une rivière. Même le feuillage des branches dont le lieu de l'assemblée avait été construit tomba sur eux et leur prouva ainsi que c'était bien par puissance divine qu'ils étaient vaincus. Et, sur lui, et l'enfant qui était avec lui, pas une seule goutte ne tomba. Et voyant cela, ils furent confondus et étonnés. "Vous voyez, maintenant, qui est Dieu, dit-il. Et n'essayez pas, hommes malheureux, de m'écarter de l'adoration de Lui, mais que votre erreur soit plutôt manifeste et que, renonçant à vos erreurs, vous appreniez le chemin de la vérité!" Une autre fois, il arriva qu'Herigar souffrait d'une grande douleur à la jambe, de telle sorte qu'il lui était impossible de se déplacer, sauf à se faire transporter. Quand il eut supporter cette souffrance pendant quelque temps, de nombreuses personnes vinrent lui rendre visite, certains le pressant de sacrifier aux dieux de façon à retrouver sa santé, alors que d'autres l'assaillaient de moqueries, disant que sa maladie était due au fait qu'il n'avait pas de dieu. Quand cela se fut répété plusieurs fois et qu'il avait vigoureusement résister à leurs suggestions mauvaises, et quand, finalement, il ne put plus supporter leurs reproches, il répondit qu'il ne chercherait pas l'aide de vaines images, mais celle de son Seigneur Jésus-Christ qui, s'Il le désirait, pouvait le guérir dans ce moment de maladie. Il convoqua alors ses serviteurs et leur demanda de le porter à son église. Et lorsqu'il eut été placé là, il répandit moult supplications au Seigneur en présence de tous ceux qui se trouvaient là et dit: "Mon Seigneur Jésus-Christ, accorde-moi maintenant, à moi Ton serviteur, ma santé passée de façon que ces gens malheureux puissent comprendre que Tu es le seul Dieu et qu'aucun autre dieu ne se tient à Tes côtés, et de façon que mes ennemis puissent contempler les grandes choses que Tu accomplis et soient confondus dans leurs erreurs, et soient confondus à la connaissance de Ton nom. Accomplis, je T'en supplie, ce que je Te demande pour la grâce de Ton saint nom, qui est béni à jamais, de telle sorte que ceux qui croient en Toi se soient pas confondus, Ô Seigneur!" Ayant dit cela, il fut immédiatement guéri par la grâce de Dieu et recouvra complètement sa santé. En conséquence, il quitta l'église, sans avoir besoin d'être aidé, et il rendit grâce à Dieu pour sa santé retrouvée, et, renforcé dans la foi du Christ, il put, de plus en plus, confondre ceux qui ne croyaient pas. A peu près à la même époque, il arriva qu'un certain roi suédois, nommé Anoundus, avait été chassé de son royaume, et se trouvait en exil chez les Danois. Désirant reconquérir ce qui avait été autrefois son royaume, il chercha l'aide des Danois et leur promit que s'ils voulaient le suivre, il pourrait leur donner de grandes richesses. Il s'engagea à leur donner Birka, cette ville dont il a déjà été question, car de nombreux riches marchands s'y trouvaient, ainsi qu'une grande quantité de biens et de monnaie. Il leur promit de les conduire là, et que, sans grande perte dans leur armée, ils pourraient conquérir tout ce qu'ils voulaient. Séduits par le gain promis et desireux d'acquérir des trésors, les Danois remplirent vingt-et-un vaisseaux d'hommes prêts au combat et les mirent à la disposition du roi. Lui-même, de plus, disposait de onze navires. Ils quittèrent le Danemark et surgirent à l'improviste dans la ville dont il vient d'être question. Or, il se trouvait que le roi de la ville [Björn] était absent et les chefs du peuple furent incapables de se rattrouper. Seul Herigar, le préfet de l'endroit, se trouvait présent, avec les marchands et le peuple qui habitaient là. En grande difficulté, les chefs de l'endroit s'enfuirent dans une ville voisine [Sigtuna] et commencèrent à promettre et à offrir à leurs dieux -qui étaient des démons- de nombreux voeux et sacrifices de façon que, par leur aide, ils puissent être sauvé d'un si grand danger. Cependant, comme la ville n'avait que peu de forces et qu'il y avait peu de gens capables de participer à un combat, ils envoyèrent des messagers aux Danois et demandèrent leur amitié et leur alliance. Le roi dont il a été question leur ordonna alors de payer cent livres d'argent de façon à racheter Birka et à obtenir la paix. Aussitôt ils envoyèrent la somme demandée et celle-ci fut reçue par le roi. Mais les Danois furent irrités de cet accord car il était en contradiction avec l'accord passé avec eux, et ils voulurent mener une attaque soudaine contre la ville et piller et brûler l'endroit car ils disaient que chacun des marchands du lieu possédait largement ce qui leur avait été offert et qu'ils ne pouvaient supporter ce tour qu'on leur jouait. Alors qu'ils discutaient de cela et qu'ils se préparaient à détruire la ville vers laquelle les autres avaient fui, on sut leur projet là. Les gens se réunirent alors une seconde fois et, comme ils n'avaient pas de forces pour résister ni n'avaient espoir de trouver un refuge, ils s'exhortèrent l'un l'autre à faire des serments et à offrir des sacrifices encore plus grands à leurs dieux. Herigar, le fidèle serviteur du Seigneur, fut fâché contre eux et dit: "Vos voeux et vos sacrifices à des idoles sont maudits par Dieu. Et pendant combien de temps encore allez-vous servir les démons et vous faire du tort à vous-mêmes et à vous appauvrir par des serments inutiles!? Vous avez déjà fait de nombreuses offrandes et de nombreux voeux, et vous avez déjà donné cent livres d'argent. Et de quel bénéfice cela vous a-t-il été? Et vos ennemis sont en train d'arriver pour détruire tout ce que vous possédez. Et ils emmèneront vos femmes et vos fils captifs, ils brûleront notre cité [Sigtuna] et notre ville [Birka] et ils vous détruiront par l'épée. De quel donc avantage vous sont vos idoles!?" Une fois qu'il eut dit cela, ils furent tous terrifiés, et comme ils ne savaient que faire, ils répondirent alors tous ensemble: "Alors, c'est à toi de faire des plans pour assurer notre sécurité. Et tout ce que tu suggèreras, nous ne manquerons pas de le faire". Et il répondit: "Alors, si vous désirez faire des serments, faites-les et accomplissez-les, mais devant le Seigneur Dieu tout-puissant, qui règne dans le Ciel, et que je sers avec une conscience pure et une foi simple. Il est le Seigneur de tous, et toute chose est soumise à Sa volonté, et personne ne peut résister à Ses décrets. Et si vous voulez vraiment rechercher Son aide, de tout votre coeur, vous verrez que Son pouvoir tout-puissant ne vous fera pas défaut". Ils acceptèrent son point de vue et, selon la coutume, tous, de leur propre accord, se rendirent dans une plaine, où ils promirent au Seigneur Christ de jeûner et de faire des aumônes de façon à s'assurer leur salut. Pendant ce temps, le roi avait proposé aux Danois de tirer les sorts de façon qu'ils sachent si c'était bien la volonté des dieux que la ville fut pillée par eux. "Il se trouve dans cette ville, leur dit-il, des dieux très nombreux et très puissants, et, dans les temps anciens, une église fut construite là, et il y a aussi de nombreux Chrétiens qui adorent le Christ, qui est le plus fort des dieux et qui peut aider ceux qui espèrent en Lui, de la façon dont Il le veut. Aussi nous devons d'abord être sûrs si c'est bien la volonté des dieux qui nous inspire ardemment cette entreprise". Comme ses paroles étaient en accord avec leur coutume, ils ne purent refuser cette suggestion. En conséquence, ils cherchèrent à découvrir la volonté des dieux en jetant les sorts et ils en vinrent à la conclusion qu'il était impossible d'accomplir ce qu'ils avaient envisagé sans se mettre en danger, et que Dieu ne permettrait pas que cet endroit fut dévasté par eux. Ils demandèrent plus avant où il faudrait qu'ils aillent pour trouver de l'argent pour eux de sorte qu'ils n'aient pas à rentrer chez eux sans avoir remporté ce qu'ils avaient espéré. Les sorts les assurèrent qu'ils devraient se rendre dans une ville qui se trouvait à distance, sur les frontières des terres appartenant aux Slavoniens ["Slavonians"]. Les Danois, après avoir ainsi jeté les sorts, et croyant que de tels ordres leur venaient du ciel, se retirèrent de la place et se hâtèrent, par une route directe, vers cette ville. Ils y firent une attaque soudaine, sur ce peuple qui vivait en repos et en paix, et ils s'emparèrent de la ville par la force des armes, et, ayant prix beaucoup de butin et de richesses, ils rentrèrent chez eux. De plus, ce roi, qui était parti avec, en vue, de piller les Suédois, fit la paix avec eux, leur rendit la somme d'argent qu'il avait récemment reçue d'eux. Il resta aussi quelque temps avec eux, car il voulait se réconcilier avec leur nation. Ainsi, le bon Seigneur, sur la base de la foi de son serviteur Herigar, libéra le peuple de cet endroit de l'attaque de leurs ennemis et leur rendit leurs biens. Après que ces évènements eurent eu lieu, Herigar fit la proposition, dans une assemblée publique, et conseilla qu'ils devraient essayer plus sérieusement de savoir qui était le vrai Dieu. "Ah! malheureux peuple! dit-il, vous comprenez maintenant qu'il est inutile de rechercher l'aide de démons qui ne peuvent secourir ceux qui sont en difficulté! Acceptez la foi de mon Seigneur Jésus-Christ, dont vous avez vu qu'il est le vrai Dieu et qui, dans sa compassion, vous a apporté consolation, vous qui n'avez pas de refuge contre le chagrin. Ne cherchez plus auprès d'une adoration superstitieuse, ou à apaiser vos idoles par des sacrifices inutiles. Adorez le vrai Dieu qui gouverne toute chose au Ciel et sur la terre, soumettez-vous à Lui, et adorez Son pouvoir tout-puissant". Par ailleurs, sa propre foi ayant été renforcée par l'abondante bonté du Seigneur, il fut encore plus enclin à proclamer la foi publiquement et d'autre façon, et, certaines fois par le reproche, d'autres par la persuasion, il leur annonça le pouvoir du Seigneur et les bénéfices qui résultaient de la foi en Lui. Et il poursuivit ainsi ce bon combat même jusqu'à la fin de sa vie. Quand, enfin, ses bonnes actions furent accomplies, et sa faiblesse s'étant accrue, et qu'il eut été confié à la miséricorde de Dieu en la présence du prêtre Ardgar, et ayant reçu la Sainte Communion, il quitta cette vie, joyeusement, dans le Christ. Beaucoup plus encore pourrait être dit concernant la constance de sa foi, mais cela doit suffire, comme nous voulons que notre récit soit bref.

Chapitre XX

Il y avait à cette époque, parmi les Suédois, une très pieuse dame de haut rang, que l'effronterie des méchants n'avait pu détourner de la vraie foi. Il lui fut souvent suggéré, à chaque fois qu'elle se trouvait dans toute situation difficile, d'offrir des sacrifices aux idoles, selon leur coutume, mais son opinion restait constante et elle n'abandonna pas l'accomplissement de ses devoirs religieux. Elle déclara qu'il était vain de chercher l'aide d'images muettes et sourdes et qu'elle pensait détestable de refaire ce à quoi elle avait renoncé par son baptême et de manquer à la promesse qu'elle avait faite au Christ. Et si c'est une mauvaise chose de mentir aux hommes, cela l'est encore beaucoup plus de mentir à Dieu. Et s'il est bien que la foi soit préservée parmi les hommes, combien plus grande est l'obligation, qui incombe à celui ou celle qui reçoit la foi du Seigneur, de rester ferme et de ne pas mêler la fausseté avec la vérité. "Le Seigneur, disait-elle, et même mon Jésus-Christ, est tout-puissant, et si je continue à croire en Lui, il peut me donner la santé et tout ce dont j'ai besoin, selon Son bon plaisir". Cette femme dévote, dont le nom était Frideburg, et qui méritait louange pour la bonté de sa vie et la constance de sa foi, continua ainsi même arrivée à un grand âge. Quand elle crut que le jour de sa mort approchait, et qu'aucun prêtre n'était venu dans ce lieu depuis la mort de Gautbert, désirant que soit accomplie la cérémonie prévue, dont elle avait entendu dire que c'était le "viatique" des Chrétiens, elle fit placer du vin qu'elle avait acheté, à part, dans un récipient. Elle demanda ensuite à sa fille, qui était aussi une femme pieuse, que lorsque ses derniers instants arriveraient, comme le vrai sacrement ne pouvait être célébré, elle lui verse un peu de vin dans la bouche et recommende ainsi son départ de cette vie à la miséricorde du Seigneur. Cela faisait presque trois ans qu'elle avait ainsi conservé ce vin lorsque le prêtre Ardgar arriva. Une fois qu'il eut été nommé, elle accomplit ses devoirs religieux aussi longtemps qu'elle conserva ses forces, et elle cherchait d'Adgar les rites habituels et des conseils secourables. Puis la faiblesse la rattrapa et elle tomba malade. Etant anxieuse face à la mort, elle fit convoquer le prêtre et, ayant reçu de ses mains le viatique, elle partit vers le Seigneur avec joie. Elle avait toujours été attentive à faire des aumônes, et, comme elle était riche des biens de ce monde, elle avait enjoint à sa fille Catla [Cathle?] de distribuer, après son départ de cette vie, tout ce qu'elle possédait aux pauvres. "Et, avait-elle dit, parce qu'il n'y a ici que peu de pauvres, à la première opportunité se trouvant après ma mort, vends tout ce qui n'aura pas encore été donné, prends l'argent et va à Dorstadt. Il y a là beaucoup d'églises, de prêtres et de clercs, et une multitude de gens pauvres. Une fois arrivée, recherche des personnes de confiance qui puisse te dire comment bien distribuer cette somme, et donne tout en aumône pour le bénéfice de mon âme". Après la mort de sa mère, la fille accomplit diligemment tout ce que celle-ci avait ordonné. Elle partir pour Dorstadt et, à son arrivée, elle chercha quelques femmes pieuses qui l'accompagnèrent aux saints endroits de la ville et qui lui dirent ce qu'il fallait donner à chacun. Un certain jour, alors qu'elles étaient en train de visiter les saints lieux dans le but de faire la charité, et alors que la moitié avait déjà été distribué, elle dit à sa compagne: "Nous sommes déjà fatiguées, et nous ferions mieux d'acheter un peu de vin avec lequel nous nous rafraîchisserions, afin de pouvoir faire le travail que nous avons commencé". Elle donna ainsi quatre deniers à cette fin, et, ayant recouvré leurs forces, elles finirent leur tâche. Quand tout fut terminé et qu'elle retournait là où elle logeait, elle plaça le sac vide, qui avait contenu l'argent, à un certain endroit, mais, suite à l'intervention divine, lorsqu'elle revint à cet endroit, elle retrouva le sac aussi plein qu'il l'avait été auparavant. Stupéfaite d'un si grand miracle, elle convoqua les femmes pieuses qui étaient allées avec elle et leur expliqua ce qui lui était arrivé. En leur présence, elle compta l'argent qui se trouvait dans le sac et trouva qu'il y avait exactement, moins les quatre deniers, la somme qu'elle avait apportée. Comme les femmes le suggérèrent, elle se rendit auprès des prêtres de la ville, qui avaient grande réputation, et leur dit ce qui était arrivé. Ils rendirent grâce à Dieu pour sa grande bonté et dirent que le Seigneur avait ainsi récompensé sa peine et sa bonne intention. "Car, lui dirent-ils, comme vous avez obéi à votre mère et avez conservé intacte la promesse que vous lui aviez faite, et comme, en entreprenant ce dur voyage, vous avez accompli votre projet généreux, le Seigneur de tous biens, qui rend et récompense, vous a donné cela pour votre propre entretien. Il est tout-puissant et auto-suffisant, et il n'a besoin de rien. Et il redonnera dans Son royaume céleste tout ce qui est distribué par Ses fidèles suivants pour les besoins des pauvres et ceux de Ses serviteurs. Le Seigneur a daigné vous en assurer par un miracle, de crainte que vous ne doutiez ou ne regrettiez d'avoir distribué votre richesse. Par ce même signe, il vous assure que votre mère est en sécurité, près du Seigneur, et ainsi, admonestée par ce miracle, ne craignez pas de donner une part de vos biens au nom du Christ, sachant que le Seigneur vous récompensera au Ciel. Ceci est un don de Dieu qui vous est fait, et c'est à vous de le distribuer selon votre volonté. Et ce que vous aviez pris et utilisé pour vos propres besoins, Il ne l'a pas rendu, car, dans Sa bonté, Il n'a rendu que ce qui, par amour pour Lui, avait été distribué aux pauvres". Le prêtre Ardgar, après la mort d'Herigar, de nouveau mû par le désir de mener une vie solitaire, comme il l'avait fait auparavant, quitta ces lieux et chercha de nouveau un endroit qui lui soit propre. Mais ainsi, les Chrétiens qui vivaient là, furent une nouvelle fois privés de la présence d'un prêtre. De telle sorte qu'il apparut clairement que l'ermite Ardgar avait été providentiellement envoyé dans ces lieux, de sorte qu'il puisse fortifier la foi d'Herigar et de la dame de haute naissance dont il a été question, qu'il puisse recommander leur âme à la miséricorde de Dieu, et que, en accord avec leur désir constant, ils puissent recevoir le sacrement de la Sainte Communion comme dernier viatique

Chapitre XXI

Pendant que les évènements relatés ci-avant arrivaient, il advint que, par commandement de Dieu, l'empereur Ludovic, d'heureuse mémoire, quitta cette vie [20 juin 840]. Lorsqu'après sa mort, un grand désordre s'éleva en relation avec la division du royaume, le statut de notre pasteur en tant que délégué fut affaibli. Car, lorsque le monastère de Turholt dont il a été question, vint en possession du roi Charles, celui-ci le libéra de la servitude que son père avait ordonnée, et il le donna à Raginar, qui est bien connu de vous. Sur ce point, ses frères, les très nobles rois, et de nombreux autres aussi, le supplièrent fréquemment, mais il refusa de tenir compte de leurs requêtes, et notre père commença d'être assailli de nombreux besoins et souffrances. Aussi, il se fit que vos frères qui étaient avec lui ici [à Hamburg] à cette époque revinrent auprès de vous et que de nombreux autres le quittèrent aussi du fait de pauvreté. Lui, cependant, continua de vivre, du mieux qu'il le pouvait, avec le peu qui restaient auprès de lui. Et, bien qu'il eut été très pauvre, il ne voulut pas abandonner la tâche qui lui avait été assignée

Chapitre XXII

Quand le Seigneur vit son humilité et son patient courage, et comme le cour du roi est dans la main du Seigneur, Il remua l'esprit de notre très gracieux seigneur and gouvernant le roi Ludovic, qui prit charge du royaume après la mort de son père, et l'incita à découvrir comment il pourrait assurer pour Anskar des revenus assurés, de façon qu'il puisse accomplir la confiance que l'on avait placée en lui. Et comme il ne possédait aucun monastère dans cette province qui put convenir à ce but, il s'arrangea pour lui donner l'évêché de Brême, qui était juste à côté et qui, à ce moment-là, se trouvait sans pasteur. En conséquence, dans une réunion publique d'évêques et de ses autres loyaux serviteurs, il discuta avec eux du point de savoir si le droit canonique le lui permettait. Car notre seigneur et pasteur, craignant que cela ne lui fut dangereux, et de façon à se garder contre toute accusation de cupidité, n'avait pas facilement consenti à cet accord. Par ordre du roi, l'affaire fut portée devant le conseil des évêques. Ceux-ci, par de nombreux précédents, montrèrent que cela pouvait être fait facilement, car le diocèse qui lui avait été attribué était très petit. Il n'y avait que quatre églises où se faisaient les baptêmes. De plus, ce diocèse avait été de nombreuses fois dévasté par les incursions des barbares, et, sur cette base, ils prièrent instamment que le diocèse fut joint à celui de Brême de façon à apporter un soutien à Anskar. Mais, de façon à ce que l'évêque de Verden ne subisse aucun tort du fait qu'Anskar retiendrait, en addition à l'ensemble du diocèse de Brême, cette partie de son propre diocèse qui se trouve au-delà de l'Elbe, et qui avait été emportée, ils décidèrent que, comme il y avait eu, au temps de l'empereur Ludovic, le diocèse de Brême et le diocèse de Verden, cet état de choses serait restauré et Anskar conserverait Brême, dont la plus grande part de son propre diocèse avait été prise, le diocèse de Brême étant à cette époque privé d'un pasteur. Quand cette décision eut été confirmée par les évêques, il entreprit, sur l'ordre du roi, de gouverner le diocèse de Brême, pendant que Waldgar, l'évêque de Verden, prenait en charge cette partie de son propre diocèse qui se trouve au-delà de l'Elbe. Après que cela eut été réglé, la question fut de nouveau soigneusement débattue dans un conseil d'évêques, qui décidèrent qu'il n'était pas juste que le siège épiscopal auquel il avait été affecté soit tenu par un autre évêque, car Hamburg [Hammaburg] à cette époque était tombée dans le lot de Waldgar. Ils décidèrent, de plus, que cela faisait partie des droits du roi d'étendre un diocèse petit de taille et qui avait été dévasté, mais que, par contre, un lieu auquel un rang épiscopal avait été attaché par autorité apostolique ne pouvait, en aucun cas, être transféré. Avec l'approbation du très pieux roi Ludovic, les évêques, qui étaient présents à cette assemblée, décidèrent unanimement que notre père Anskar recevrait le siège auquel il avait été consacré, et que, si aucun territoire au-delà de l'Elbe, appartenant au diocèse de Verden, était retenu, il devrait en faire, depuis le diocèse de Brême, restitution à l'évêque de ce diocèse. Cela fut mise en oeuvre sur ordre du roi and par le décret du synode épiscopal, avec l'approbation et le consentement de Waldgar, l'évêque de Verden

Chapitre XXIII

Quant tout cela eut été fait, la ville de Cologne, à laquelle le diocèse de Brême était soumis, se trouva privée d'évêque. Et, comme cela avait eu lieu depuis quelque temps, la matière dut être décidée sans la présence de l'évêque de ce lieu. Quand, plus tard, le Vénérable Gunthar eut été consacré évêque de cet endroit [20 mai 850], notre seigneur et père désira que l'affaire fût portée devant lui de façon qu'elle fût confirmée par son autorité. Gunthar, cependant, était opposé à la décision. Pour cette raison, à un concile tenu par les deux rois Ludovic et Lothaire, à Worms, auquel étaient présents de nombreux évêques appartenant à l'un et l'autre royaumes, dont notre vénérable père, la même question fut abordée. Quand la précédente décision eut été universellement approuvée, tous demandèrent à l'évêque Gunthar de la confirmer et de la sanctionner. Dans un premier temps, il s'opposa vigoureusement à eux, et, en de nombreux mots, il déclara qu'il n'était pas de droit qu'un siège suffrageant [les sièges suffrageants de Cologne étaient Utrecht, Lüttich, Münster, Minden et Osnabrück] fût transformé en archevêché, ou que la dignité de son propre siège fût diminuée d'aucune façon. Enfin, cependant, quand les rois et tous les évêques présents l'en supplièrent, disant que cela était légal parce que cela était nécessaire, il répondit qu'il ratifierait la proposition pourvu qu'elle fût appuyée par l'autorité apostolique. Quand cette réponse eut été agréée et que tous ses suffrageants eurent agréé aussi, le roi Ludovic, qui désirait étendre le projet charitable de son père et qui voulait que l'arrangement qu'il avait organisé fût complètement établi, envoya le très révérend évêque Salomon, l'évêque de Constance [839-871] au siège apostolique de façon à y porter la question. Et comme notre seigneur et père Anskar ne pouvait pas s'y rendre également, il [Anskar] y envoya, l'accompagnant, son fils, notre frère, le prêtre Nordfrid. Tous deux furent très gentiment reçus par le très saint pape Nicolas [Nicolas Ier, 858-867] et ils lui expliquèrent complètement et clairement la mission qui leur avait été confiée. Le pape considéra avec sagesse et soin les choses qu'ils lui dirent et, comme, avec l'aide de Dieu, il percevait que l'accord dont il était question, pourrait conduire à vaincre les âmes de ces races, il confirma, par sa propre autorité, le voeu exprimé par notre roi. De façon que nous puissions le plus clairement expliquer le sujet, qui fut soigneusement élucidé par lui, nous avons décidé de donner ses propres mots. Après avoir complètement et, dans le même temps, brièvement récapitulé la raison de l'envoi des messagers par le roi, et d'autres sujets que nous avons inclus dans notre récit précédent, le pape continuait: "La déclaration écrite touchant à l'autorité des messagers, et à la réception du pallium, qui nous a été envoyée par notre fils Ludovic par les mains du très saint évêque Salomon, a été authentifiée selon la coutume de la sainte Eglise Romaine. D'après les contenus de cette déclaration écrite, nous trouvons que les questions sont semblables à celles que le pieux roi nous fait connaître par son envoyé fidèle, l'évêque Salomon. Aussi, nous, continuons dans les pas de notre prédécesseur, le grand évêque Grégoire, et reconnaissant que les accords faits par sa prévoyance méritaient l'approbation divine, avons décidé de sanctionner le voeu exprimé par les grands chefs, c'est-à-dire l'empereur Ludovic, de sacrée mémoire, et son très excellent fils, qui portait le même nom, par un écrit portant l'autorité apostolique et par la présentation du pallium en accord avec la coutume de nos prédécesseurs. De façon qu'Anskar puisse être, avec autorité, établi comme le premier archevêque des Northalbingiens [sic], et que ses successeurs, qui luttent pour le salut des nations, puissent être forts pour résister aux attaques du Malin, nous nommons notre fils Anskar comme notre légat chez les races environnantes des Suèdes [Swedes], Danois et Slaves, et parmi tous les autres vivant dans ces contrées, partour où la grâce de Dieu voudra bien ouvrir un chemin, et nous lui octroyons autorité pour prêcher l'Evangile ouvertement. Nous décrétons aussi que Hamburg, le siège des Nord Albingiens [sic: "North Albingians"], qui a été dédié à notre saint Sauveur et à Marie Sa Mère immaculée, sera, à partir de dorénavant, un siège archiépiscopal. Nous appelons Dieu comme témoin que nous décidons cela de façon à ce que, après la mort du grand prêcheur, l'archevêque Anskar, il puisse toujours par la suite être choisi des personnes dignes de cette grande fonction. Mais, comme quand le roi Charles, le frère de Ludovic, après la mort de son père l'empereur, Louis, de pieuse mémoire, enleva d'Hamburg le monastère appelé Turnholt, que son père avait donné à l'évêque et à son clergé de façon à les pourvoir en nourriture et autres biens nécessaires, tous ceux qui officiaient à l'autel là commencèrent à en partir, car, après la division du royaume entre les deux frères, il apparut que ledit monastère était situté dans son royaume, puisqu'il se trouvait en France Occidentale. Quand les fonds nécessaires ne furent plus disponibles, ils quittèrent ces races, et la mission auprès d'elles qui avait été ainsi remplie, cessa. Même la métropole, Hamburg, fut bien fort aussi désertée. Alors que ces évènements avaient lieu, l'évêque de Brême, dont le diocèse est dit être contigu à ce siège, mourut. Lorsque le roi vit que ce diocèse était sans évêque et que le diocèse nouvellement institué avait été affaibli, et, qu'en plus, les églises des deux diocèses avaient été affaiblies par la sauvagerie déployée par les barbares, il commença à demander si le diocèse de Brême ne pourrait pas être et rendu sujet du nouveau siège archiépiscopal, et si son projet pourrait être autorisé par un décret de nous. En conséquence, cette affaire nous fut soumise par le biais de son messager Salomon, le vénérable évêque de Constance, de façon que nous puissions l'approuver, et l'on nous a demandé de confirmer la même chose par notre autorité. Aussi nous, après avoir soigneusement pesé et considéré la proposition, pensons que cette décision sera avantageuse en vue des besoins pressants et à fin de gagner des âmes parmi les païens. Car nous ne doutons pas que toutes les choses qui s'avèrent être profitables à l'Eglise et qui ne s'opposent pas aux ordonnances divines, sont légales et doivent être faites, spécialement dans un endroit où la foi a été si récemment introduite et dans lequel de si nombreux problèmes ont coutume de survenir. Aussi, par l'autorité de Dieu Tout-Puissant et des bienheureux apôtres Pierre et Paul, et par ceci, notre décret, nous décidons, en accord avec le souhait du roi Ludovic, que les diocèses de Hamburg et de Brême ne seront plus à partir de dorénavant appelées deux diocèses mais un seul, et qu'ils seront sujets au siège qui a été élevé au rang archiépiscopal par le décret de notre prédécesseur, pourvi que le diocèse de Ferden reçoive de l'Eglise de Brême le territoire qui auparavant lui avait été enlevé. Aucun archevêque de Cologne ne pourra à partir de ce jour réclamer aucune autorité dans ce diocèse. De plus nous l'exhortons, lui et tous ceux qui acceptent la vraie foi d'assister et supporter ceux qui mettront en oeuvre cette nomination, de sorte que, pour leur bonnes actions, ils puissent mériter de recevoir pleine récompense de Celui qui a dit: "Allez et enseignez à toutes les nations" et "quiconque vous reçoit me reçoit". Aussi, en conséquence de quoi, nous confirmons par notre autorité tous les souhaits exprimés par notre bien-aimé fils le roi Ludovic, en rapport avec cette importante question. Et comme ce qui est arrivé dans le passé nous rend prudent pour le futur, nous frappons de l'épée de notre anathème quiconque s'opposerait, contredirait, ou essaierait d'interférer avec ceci qui est notre volonté, et nous condamnons quiconque se rendrait coupable de tels actes à partager, avec le Démon, une vengeance éternelle. Nous faisons cela en accord avec la coutume de nos prédécesseurs et dans notre pieux zèle pour Dieu, de façon que nous puissions rendre le très élevé siège apostolique plus sûr contre l'attaque de tous ennemis". Et c'est ainsi que par les décrets et dispositions du saint pape Nicolas, l'Eglise de Brême fut jointe et unie au siège de Hamburg, qui auparavant, avait été fait siège métropolitain et qui, désormais, devenait archevêché

Chapitre XXIV

Mais attendu que nous avons parlé par avance des arrangements qui furent faits, relativement à ce diocèse, car un long temps s'était écoulé après qu'Anskar ait commencer de gouverner son diocèse avant que la question ait été réglée par l'autorité apostolique, revenons aux évènements d'une époque antérieure. Car, après qu'il ait pris possession du diocèse de Brême et qu'il ait été possessioné de quelques ressources, il commença de nouveau de désirer violemment, si cela était possible, de pouvoir travailler de la part du Christ parmi les Danois. Pour cela, il rendit de fréquentes visites à Horic [Horic l'Ancien] qui, à cette époque, était le seul monarque des Danois, et il s'efforça de se le concilier par des cadeaux et par toutes sortes possible de services dans l'espoir de pouvoir obtenir la permission de prêcher dans son royaume. A plusieurs occasions il fut envoyé vers lui, comme ambassadeur du roi, et il chercha vigoureusement et loyalement à faire advenir une paix qui puisse être avantageuse aux deux royaumes. Sa fidélité et sa bonté ayant été ainsi reconnues, le roi Horic commença de le considérer avec une grande affection, et d'utiliser son conseil, et de le traiter en tout comme un ami. Et ainsi il fut autorisé à partager les secrets du roi quand celui-ci, avec ses conseillers, traitait des affaires relatives au royaume. Comme, concernant les affaires qui devaient faire l'objet d'un accord de façon à établir une alliance entre le peuple de cette terre, c'est-à-dire les Saxons, et son propre royaume, le roi désirait seulement qu'elle fût garantie par son serment, comme il disait qu'il avait une complète confiance en tout ce qu'il approuvait et promettait. Quand Anskar eut ainsi gagné son amitié, il commença à lui enjoindre instamment de devenir chrétien. Le roi écouta tout ce qu'il lui disait, tiré des Saintes Ecritures, et déclara que c'était à la fois bon et utile et qu'il y prenait un grand plaisir, et qu'il désirait gagner la faveur du Christ. Après qu'il eut exprimé ces désirs, notre bon père lui suggèra d'accorder au Seigneur Christ ce que Lui ferait le plus plaisir, c'est-à-dire la permission de construire une église dans son royaume, où un prêtre pourrait toujours être présent pour être au service de ceux qui voulaient recevoir les graines de la Parole Divine et la grâce du baptême. Le roi très gentiment accorda cette permission et lui permit de construire une église dans un endroit appartenant à son royaume, appelé Sliaswic [Schleswig? aussi appelé Heidaby], qui était spécialement approprié à cela et qui était près de cette partie du pays où des marchands de tous endroits se réunissaient. Il donna également un lieu dans lequel un prêtre pouvait vivre, et, pareillement, accorda permission à quiconque dans son royaume désirait devenir chrétien de le devenir. Quand notre seigneur évêque obtint cette permission, il fit immédiatement ce qu'il avait longtemps souhaité. Et, quand un prêtre eut été établi là, la grâce de Dieu commença à porter beaucoup de fruit en ce lieu, car il y avait de nombreuses personnes qui étaient déjà chrétiennes et qui avaient été baptisées à Dorstadt ou à Hamburg, et parmi celles-ci le peuple principal de l'endroit, qui se réjouissait de l'opportunité qui lui était donnée d'observer sa religion. Beaucoup d'autres aussi, hommes et femmes, suivirent leur exemple, et, ayant abandonné l'adoration superstitieuse des idoles, crurent en le Seigneur et furent baptisés. Il y eut, de plus, une grande joie dans cet endroit, car les hommes de l'endroit pouvaient désormais faire ce qui était auparavant interdit, et les négociants d'à la fois ce lieu [Hamburg?] et de Dorstadt cherchaient librement à visiter l'endroit et opportunité était donnée d'y faire beaucoup de commerce [beaucoup de bien?]. Et, alors que beaucoup de ceux qui furent alors baptisés ont survécu, une armée innombrable de ceux qui furent vêtus de blanc sont montés au royaume céleste. Car ils acceptaient volontiers d'être marqués du signe de la croix, de façon à devenir catéchumènes et à pouvoir entrer à l'église et être présents aux offices sacrés, mais ils retardaient de recevoir le baptême, car ils estimaient que leur intérêt était d'étre baptisés à la fin de leur vie, de sorte que, ayant été lavé par l'eau et mené au salut, ils puissent, sans délai, franchir les portes de la vie éternelle comme ceux qui sont purs et sans taches. Beaucoup aussi parmi eux, qui étaient vaincus par la maladie, qui, lorsqu'ils voyaient que leurs sacrifices offerts aux idoles de façon à assurer leur guérison étaient sans résultats, et que leurs voisins désespéraient de les voir aller mieux, prenaient refuge en la miséricorde du Seigneur et faisaient le voeu de devenir Chrétiens. Et quand un prêtre avait été convoqué et qu'ils avaient reçu la grâce du baptême, par l'aide divine, ils retrouvaient immédiatement leur santé. Ainsi la compassion divine se répandit dans cet endroit et une multitude de gens furent convertis au Seigneur

Chapitre XXV

Pendant ce temps, notre seigneur et maître Anskar, étant grandement affligé du fait de la race suédoise, car, à cette époque, elle se trouvait sans prêtres, pria le roi Horic, qui était son ami intime, qu'avec son aide il puisse essayer d'atteindre ce royaume. Le roi reçut sa requête avec la plus haute des bienveillances et promit qu'il ferait tout pour apporter son aide. En conséquence, l'évêque commença à négocier avec l'évêque Gautbert, disant qu'une autre tentative devait être faite pour voir si cette race, ayant été divinement admonestée, permettrait à des prêtres de résider parmi elle, de façon que la foi chrétienne, qui avait été établie dans ces lieux, ne périsse pas du fait de leur négligence. L'évêque Gautbert, qui est aussi appelé Simon, répondit que, comme il avait été expulsé de ce pays, il ne s'y aventurerait pas de nouveau et que la tentative n'apporterait pas d'avantages, mais serait au contraire dangereuse, dès lors que ceux qui se rappelleraient ce qui s'était produit auparavant, viendrait à fomenter des désordres contre lui. Il dit qu'il lui semblait mieux adapté qu'Anskar y aille, lui, qui avait été le premier à entreprendre cette mission et qui avait été courtoisement traité là-bas, et qu'il enverrait avec lui son neveu qui pourrait y rester, trouvât-il opportunité de prêcher et pût-il exercer les devoirs d'un prêtre parmi le peuple. Quand ils en eurent ainsi décidé, ils se rendirent auprès du roi Ludovic et ils lui dirent la raison de leur action et ils le prièrent de les autoriser à faire cela. Il leur demanda s'ils étaient parvenu à un accord entre eux, sur quoi le vénérable évêque Gautbert répondit: "Dans le service de Dieu nous sommes et avons toujours été, unis, et cela est notre désir unanime que cela soit fait". En conséquence, le roi, qui avait toujours été prêt à avancer le travail de Dieu, confia officiellement la mission à notre père selon les termes en lesquels ils étaient tombés d'accord, et, de sa part, confia à Anskar des injonctions adressées au roi de Suède, comme son père avait fait avant. Notre bon père commença alors à se préparer pour son voyage et devint très enthousiaste de l'accomplir avec la plus extrême des rapidités. De plus, il croyait que le Ciel même lui commandait de l'entreprendre, car il était influencé par une vision qu'il avait eue auparavant. Car, dans cette vision, il pensait qu'il était anxieux en vue de ce voyage et il lui semblait qu'il était arrivé en un endroit où se trouvaient de grands bâtiments et habitations de diverses sortes. Un homme vint alors vers lui et dit: "Ne soyez pas outre mesure affligé de ce voyage à propos duquel vous êtes anxieux, car, dans cet endroit, il y a un prophète qui vous informera au sujet de toutes ces questions. Et, de crainte que par rapport à cela, l'hésitation prenne possession de votre esprit, je vous dirai qui est ce prophète: c'est Adalhard, cet abbé jadis fameux [Adalhard était un petit-fils de Charles Martel, né en 753. A 20 ans il était devenu le jardinier du monastère de Corbey. Il fut le conseiller de confiance de Pépin en 796 et en en 820 il devint abbé de Corbey, où Anskar fut élève. Il mourut en 826]. Le Seigneur vous l'envoie comme prophète de façon qu'il vous dise les choses qui se passeront". Grandement encouragé par ce qu'il avait entendu dans sa vision, Anskar répondit: "Et où le trouverai-je, Seigneur?" "Tu le trouveras, et ce fut la réponse, par ton propre effort, et personne ne peut l'amener à toi". Alors il lui sembla qu'il parcourait les habitations en le cherchant et, qu'en même temps, il se disait en lui-même: "Si, sans que je le lui demande, il me dit ce qui se trouve dans mon esprit, alors je serai certain qu'il est bien un vrai prophète". Il continua alors jusqu'à une demeure brillante et magnifique, et il le vit, assis sur une chaise, et il le reconnut immédiatement. Il le regarda et il dit immédiatement: "Ecoutez, Ô îles [probablement les îles de la région de Birka], et tendez l'oreille, vous peuples lointains. Le Seigneur t'a appelé, toi qui es là, depuis avant sa naissance et depuis le ventre de ta mère. Il s'est rappelé ton nom et Il a fait de ta langue une épée tranchante et Il t'a couvert de l'ombre de Sa main et Il a fait de toi comme une flèche de choix. Il t'a caché dans Son carquois et il t'a dit: 'Tu est mon serviteur, car, par toi, je serai glorifié'" Ayant dit cela, le prophète étendit le bras et leva sa main droite vers lui. Quand Anskar vit cela, il tomba à genoux, pensant qu'il voulait le bénir. Mais il ajouta ces mots: "Maintenant, dit le Seigneur qui t'a formé depuis le sein de ta mère pour être son serviteur, Je t'ai donné d'être une lumière pour les Gentils pour que tu sois pour eux le salut, et même jusqu'à l'extrêmite de la Terre. Les rois verront et les princes se lèveront ensemble, et ils adoreront le Seigneur ton Dieu, et même le Saint d'Israël, car Il te glorifiera". Le serviteur de Dieu, ayant vu cette vision longtemps avant de partir pour son voyage, fut assuré que c'était un commandement divin qui l'envoyait dans ces pays, et particulièrement le mot qui avait été dit, "Ecoutez, Ô îles" parce que presque tout ce pays consistait d'îles, et aussi par ce qui avait été ajouté: "Tu seras pour eux le salut, et même jusqu'à l'extrêmité de la Terre" car, dans le Nord, la fin de la Terre se trouvait sur le territoire suédois. Finalement, le mot tiré de la fin de la prophétie de Jérémie: "Car Il te glorifiera", encouragea son désir ardent, car il pensait que cela se référait à la couronne du martyr qui lui avait été autrefois promise

Chapitre XXVI

Comme il était sur le point de partir pour son voyage, il prit avec lui le message et la marque que lui avait donnés le roi Horic, et celui-ci lui ordonna de donner le message au roi suédois nommé Olef [ce doit être un fils de Björn II] et de lui dire que ce messager que le roi Ludovic envoyait dans son royaume était bien connu de lui, Horic, et qu'il n'avait jamais vu de sa vie un homme aussi bon, ni jamais trouvé un être humain aussi digne de confiance. Qu'en reconnaissance de sa bonté il l'avait autorisé à faire tout ce qu'il voulait dans son royaume dans l'intérêt de la religion chrétienne et le roi Ludovic priait qu'il lui soit permis d'établir la religion chrétienne dans son propre royaume, comme il [Anskar] le désirait, car il ne ferait rien qui ne soit pas bon et juste. Anskar accomplit ce voyage qu'il avait organisé, et après avoir passé presque vingt jours sur un bateau, il arriva à Birka, où il trouva que le roi et beaucoup du peuple étaient confondus par de graves erreurs. Et il arriva, à l'instigation du Démon, qui savait par avance l'arrivée de cet homme bon, que quelqu'un était venu là, disant qu'il avait été présent à une réunion des dieux, que l'on croyait être les propriétaires de cette terre, et qu'il avait été envoyé par eux pour faire cette déclaration au roi et au peuple: "Vous, dis-je, avez longtemps joui de notre bienveillance, et sous notre protection la terre où vous habitez a été fertile et a connu la paix et la prospérité. Vous avez, aussi, comme vous le deviez, sacrifié et respecté les voeux que vous nous aviez fait, et votre adoration nous a bien été agréable. Mais maintenant vous conservez les sacrifices usuels et vous êtres paresseux pour payer vos offrandes volontaires, et, de plus, vous nous déplaisez grandement en acceptant un dieu étranger dans le but de nous supplanter. Aussi, si vous désirez bénéficier de notre bienveillance, offrez les sacrifices qui ont été omis et offrez de plus grands voeux. Et n'acceptez pas l'adoration d'un quelconque autre dieu, qui enseigne ce qui est opposé à notre enseignement, ni ne prêtez aucune attention à son service. De plus, si vous désirez avoir plus de dieux et que nous suffisions plus, nous accepterons de convoquer votre ancien roi Eric [Eric III, le prédécesseur de Björn] de façon qu'il se joigne à nous et qu'il soit un des dieux". Cet annoncement diabolique, qui fut fait publiquement à l'arrivée de l'évêque, troubla les esprits de tous, et leurs coeurs furent trompés et remplis d'inquiétude. Car ils avaient résolu d'avoir un temple en l'honneur de l'ancien roi, et avaient commencé à lui rendre des offrandes votives et des sacrifices comme à un dieu. Quand, alors, l'évêque vint, il demanda à ses amis, qu'il avait connus là par le passé, comment il pourrait parler au roi sur ce sujet. Tous, d'un seul accord, lui déconseillèrent cela et dire que, pour le temps présent, sa mission n'aurait aucun effet et qu'il valait mieux, s'il avait quelque bien de valeur, qu'il le donne au roi de façon à avoir la vie sauve. Il répondit: "Je donnerai rien pour ma vie, car, si tel est l'ordre de mon Seigneur, je suis prêt à subir des tourments et à mourir pour Son nom". Etant dans une grande incertitude par rapport à cette question, il agit selon le conseil qui lui avait été donné, et il invita le roi à partager son hospitalité [chez ses amis]. Puis, en tant que co-invité, il lui offrit les cadeaux qu'il put et il lui donna les choses qui lui avaient été confiées, car la cause de sa venue avait déjà été expliquées au roi par le messager d'Horic, et par les amis de l'évêque qui résidaient là. Le roi fut enchanté de cette gentillesse et de cette libéralité, et il dit qu'il consentait joyeusement à ce que l'évêque proposait. "Dans des temps anciens, dit-il, il y a eu ici un clergé, qui fut expulsé par un soulèvement du peuple mais non par l'ordre du roi. Cependant, sur cette base, je n'ai pas le pouvoir, ni je n'ose, approuver les objets de votre mission avant d'avoir consulter nos dieux en jetant les sorts et avant d'avoir consulté la volonté du peuple au sujet de tout cela. Que votre messager assiste avec moi à la prochaine assemblée et je parlerai au peuple de sa part. Et s'ils approuvent ce que vous souhaitez, et que les dieux y consentent, ce que vous avez demandé sera accompli avec succès, mais si cela venait à tourner différemment, je vous le ferai savoir. C'est notre coutume que le contrôle des affaires publiques, quelles qu'elles soient, repose en le peuple entier et pas dans le roi". Quand cette réponse du roi fut rapporté à notre bon pasteur, celui-ci se tourna vers Dieu, comme vers un refuge, et consacra son temps à jeûner et à prier, et, d'une contrition sincère, il s'abaissa devant le Seigneur

Chapitre XXVII

Pendant qu'il était dans cette situation difficile et que le temps de l'assemblée approchait, un jour, alors qu'il était en train de participer au service de la messe, et, pendant que le prêtre était debout près de l'autel et bénissait les sacrés mystères, une inspiration divine le prit alors qu'il se prostrait sur le sol. Fortifié alors, par le don de l'Esprit-Saint, et rempli de la plus complète confiance, il sut que tout tournerait comme il le voulait. En conséquence, quand la messe fut terminée, il déclara au prêtre, qui était son associé le plus intimé, qu'il ne devait pas avoir peur, car Dieu lui-même serait son auxiliaire. Quand le prêtre demanda comment il savait cela, il répondit que cela lui avait été divinement inspiré. Le frère fut capable de reconnaître cette illumination divine, car il savait qu'Anskar avait déjà été divinement inspiré de nombreuses fois auparavant, et le résultat justifia rapidement cette confiance. Aussitôt que ses chefs furent assemblés, le roi commença à discuter avec eux de la mission pour laquelle notre père était venu. Ils décidèrent que l'on devrait s'enquérir en jetant les sorts de façon à découvrir la volonté des dieux. Ils sortirent alors pour la plaine, en accord avec leur coutume, et les sorts décidèrent que c'était la volonté de Dieu que la religion chrétienne soit établie là. Quand cela arriva, un des chefs, qui était un ami de l'évêque, le lui dit aussitôt et le pria d'être rassuré et dit: "Soyez fort et agissez avec vigueur, car Dieu n'a pas nié votre souhait ni rejeté votre mission". Il fut alors rempli de bon courage et, se réjouissant en esprit, il exulta dans le Seigneur. Lorsque le jour de l'assemblée, qui était tenue dans la ville de Birka, s'approcha, le roi, en accord avec leur coutume nationale, ordonna qu'une proclamation soit faite au peuple par la voix d'un hérault, de façon qu'ils puissent être informés au sujet de l'objet de la mission des étrangers. En entendant cela, ceux qui, auparavant, avaient été égarés dans l'erreur, eurent des opinions discordantes et embrouillées. Au milieu du bruit et de la confusion, un des plus anciens hommes parmi eux, dit: "Ecoutez-moi, Ô roi et peuple. Concernant l'adoration de ce Dieu, il est bien connu de nombreux d'entre nous qu'Il peut apporter beaucoup d'aide à ceux qui placent leur espoir en Lui. Car beaucoup de nous ont vu cela être le cas dans plusieurs occasions, lorsqu'en péril de mer ou dans d'autres temps de crise. Aussi, pourquoi rejetterions-nous ce que nous savons être à la fois utile et pratique? Certains d'entre nous, qui, en des occasions variées, se sont rendus à Dorstadt, ont, de leur propre volonté, adopté cette forme de religion, la croyant être profitable. Notre chemin jusque là et maintenant assailli par ceux qui nous attendent et il est rendu dangereux par les attaques des pirates. Aussi, pourquoi ne prenons-nous pas ce qui nous est apporté et que, lorsque cela était à distance, nous cherchions ardemment à obtenir? Nous, qui avons fréquemment constaté que l'aide apportée par ce Dieu peut nous être utile, pourquoi n'accepterions-nous pas joyeusement de poursuivre en devenant ses serviteurs? Réfléchissez soigneusement, Ô peuple, et ne rejetez pas ce qui sera à votre avantage. Car, comme nous ne pouvons être sûrs que nos dieux seront favorablement disposés, il est bien pour nous d'avoir l'aide de ce Dieu qui est toujours, et dans toutes les circonstances, capable, et disposé, à secourir ceux qui crient vers Lui". Quand il eut fini de parler, le peuple entier décida unanimement que les prêtres resteraient avec eux, et que tout ce qui avait trait à l'accomplissement des mystères chrétiens serait fait sans entrave ni obstacle. Le roi se leva alors au milieu de l'assemblée et envoya immédiatement un de ses messagers pour accompagner le messager de l'évêque, et pour lui dire que le peuple était unanimement enclin à accepter sa proposition et pour lui dire, en même temps, que, cependant, alors que l'action de l'évêque lui était entièrement agréable, il ne pouvait donner son plein consentement, avant que, dans une autre assemblée, qui devait être tenue dans une autre partie du royaume, il annonce cette décision au peuple qui vivait dans cet endroit-là [Birka, stricto sensu, n'était pas en Suède, mais dans le Gotland. La seconde assemblée fut tenue au Sud, en Suède proprement dit]. Une fois de plus, alors, notre bon père chercha, comme cela lui était coutumier, l'assistance divine et supplia ardemment la miséricorde de Dieu. Lorque le temps de l'assemblée vint et que le roi eut fait proclamer par la voix d'un hérault l'objet pour lequel l'évêque était venu, et tout ce qui avait été dit et fait à l'assemblée précédente, les coeurs de tous, par la divine providence, devinrent un seul si bien qu'ils adoptèrent la résolution prise par l'assemblée précédente et déclarèrent qu'eux aussi donnaient leur accord entier et complet.

Chapitre XXVIII

Quand cela eut été fait, le roi convoqua l'évêque et lui dit ce qui s'était passé. En conséquence, le roi, avec la bienveillance et l'approbation de tous, décida que des églises pourraient être construites parmi le peuple et que des prêtres pourraient venir dans le pays et que quiconque le voulait pouvait devenir chrétien sans obstacle ni entrave. Notre seigneur et pasteur commanda alors au soin du roi Erimbert le neveu du vénérable évêque Gautbert, de façon que, avec son aide et protection, il puisse accomplir les sacrés mystères, et le roi lui accorda permisson de construire un bâtiment, qui servirait de lieu de prière dans la ville dont il vient d'être question. L'évêque acheta également un autre terrain, avec une maison, dans laquelle le prêtre pourrait vivre. Le roi fit preuve plus avant de sa considération affectueuse pour le seigneur évêque et promit que dans chaque partie du pays il montrerait la plus haute des sympathies pour ses compagnons qui serait enclins à observer la religion chrétienne. Quand, alors, par la grâce de Dieu, tout eut été dûment accompli, l'évêque retourna chez lui

Chapitre XXIX

Pendant que des préparations étaient faite pour le voyage d'Anskar, notre bon père avait vu à l'avance, par une révélation divine, l'angoisse mentale qu'il endura ensuite pendant son voyage. Car, une nuit, il vit, comme dans une vision, que c'était le temps de la passion de Notre Seigneur et qu'il était lui-même présent lorsque le Seigneur Jésus-Christ fut emmené de Pilate à Hérode, puis d'Hérode à Pilate, et quand il dut supporter les crachats et les insultes du fait des Juifs et des soldats, et il lui semblait qu'il était lui-même fouetté parce qu'il ne voulait pas Le renier mais qu'il s'avançait et offrait son dos à ceux qui le fouettaient et recevait dans son propre corps les coups qui Lui étaient infligés, Sa tête exceptée cependant, car, étant plus grand de taille, Il semblait plus grand que lui et ainsi ne pouvait protéger sa tête. Le soldat invincible du Christ ne comprit pas ce que cela signifiait jusqu'à ce que, sur le chemin du retour, il considère combien d'insultes et de dérision il avait supporté et dans quels grands embarras il avait été placé et quels blasphèmes contre Dieu il avait enduré dans ce pays. Car, en ce qui le concernait, il avait, là, souffert, sans aucune doute, au nom du Christ et le Christ, dans Son serviteur, avait porté de nouveau les reproches qui étaient dirigés contre Lui. De plus, il pensait que le fait qu'il n'était pas capable, dans sa vision, de protéger sa tête signifiait que la tête du Christ est Dieu et que les souffrances que les saints endurent dans ce monde de la part du Christ, sont pertinentes en partie à la majesté de Dieu qui, en vertu de Sa compassion, les souffrent pendant quelque temps, mais, un jour, jugera avec sévérité, comme cela est écrit: "La vengeance est mienne, je rétribuerai, dit le Seigneur"

Chapitre XXX

Nous ne devons pas omettre non plus de mentionner maintenant comment, après que ce voyage eut été accompli, la puissance du Seigneur fut manifestée aux Suédois. Car un certain peuple, les Cori [les habitants de la Courlande], avaient été dans les temps anciens sujets des Suédois, mais, il y avait déjà longtemps, s'étaient rebellés et avaient refusé cette sujétion. Les Danois, conscients de cela, à l'époque où l'évêque était allé en territoire suédois, avaient assemblé un grand nombre de navires et s'étaient rendu dans ce pays, désirant ardemment s'emparer des richesses de ce peuple et les soumettre à eux. Leur royaume contenait cinq villes. Quand les habitants apprirent la venue des Danois, ils se rassemblèrent et commencèrent à résister vaillamment et à défendre leurs biens. Ayant été victorieux, ils massacrèrent la moitié des Danois et pillèrent leurs vaisseaux, y prendant de l'or, de l'argent et beaucoup de butin. Entendant cela, le roi Olaf et les Suédois, qui voulaient s'acquérir la réputation qu'ils pouvaient faire ce que les Danois n'avaient pas pu faire, et parce que ce peuple leur avait été auparavant sujet, réunirent une immense armée et partirent pour ce pays. D'abord, ils finirent par arriver à une ville de ce royaume, appelée Seeburg [peut-être Seleburg, sur la Duna]. Cette ville, qui contenait sept mille hommes capables de combattre, il la détruisirent, la pillèrent et la brûlèrent. Ils en partirent donc avec des espoirs renforcés et, ayant renvoyé leurs bateaux, ils partirent pour un voyage de cinq jours et se hâtèrent avec une intention sauvage, vers une autre de leurs villes, appelée Aputra [peut-être Pilten, sur la Windawa], où il y avait quinze mille hommes capables de combattre. Lorsqu'il y arrivèrent, ceux-ci s'enfermèrent dans la ville et, alors qu'un parti attaquait vigoureusement la ville de l'extérieur, l'autre parti la défendait de l'intérieur. De cette façon, huit jours se passèrent avec ce résultat que, bien qu'ils combattaient et menaient la guerre du matin jusqu'au soir, et que beaucoup tombaient des deux côtés, aucun côté n'avait obtenu la victoire. Le neuvième jour, les Suédois, fatigués de ce massacre quotidien, commencèrent de s'affliger et, dans leur terreur, ne réflèchirent plus qu'à comment ils pouvaient partir. "Dans cet endroit, dirent-ils, nous n'aboutissons à rien, et nous sommes loin de nos navires". Car, comme nous l'avons dit, il fallait désormais refaire un voyage de cinq jours pour retourner au port où étaient leurs bateaux. Comme ils étaient grandement troublés et qu'ils ne savaient quoi faire, ils décidèrent de jeter les sorts pour savoir si leurs dieux étaient prêts à les aider à obtenir une victoire, ou à leur permettre de quitter cet endroit où ils se trouvaient. Ayant jeté les sorts, ils ne purent malgré tout découvrir un quelconque dieu désireux de les aider. Et quand cela fut annoncé au peuple, beaucoup de protestations et de lamentations s'élevèrent dans le camp, et tout leur courage les quitta. "Qu'allons-nous faire, dirent-ils, nous, malheureux peuple? Les dieux nous ont quitté et aucun d'eux ne veut nous aider. Et où allons-nous pouvoir fuir? Nos bateaux sont loin et, si nous fuyons, ceux qui sont dans cette ville vont nous poursuivre et nous détruirons entièrement. Quel est notre espoir alors!?" Et, alors qu'ils se trouvaient dans cette grande difficulté, des marchands, qui se rappelaient l'enseignement et l'instruction donnés par l'évêque, leur offrirent ce conseil: "Le Dieu des Chrétiens, dirent-ils, aide fréquemment ceux qui crient vers Lui et Son aide est toute-puissante. Préoccupons-nous de savoir si Il sera de notre côté, et, d'un esprit disposé, promettons des offrandes qui Lui seront agréables". En conséquence, tout le monde en étant d'accord, ils jetèrent de nouveau les sorts et l'on trouva que le Christ voulait les aider. Quand cela eut été annoncé à tous, les coeurs de tous se trouvèrent d'un coup tellement encouragés qu'ils voulurent immédiatement mener une forte attaque contre la ville. "Qu'avons-nous, dirent-ils, maintenant à craindre ou à redouter, puisque Christ est avec nous! Combattons et comportons-nous comme des hommes! Rien ne peut nous résister et nous ne manquerons pas de remporter une victoire certaine, puisque le plus puissant des dieux est notre auxiliaire". Quand tous se furent rassemblés avec courage et joie pour attaquer la ville, et qu'ils l'eurent investie, et qu'ils désirèrent ardemment commencer à se battre, ceux qui se trouvaient à l'intérieur demandèrent qu'une opportunité de pourparlers leur soit offerte, et, quand le roi suédois eut donné son accord, ils dirent immédiatement: "Nous voulons la paix et non le combat, et nous voulons nous entendre avec vous. D'abord, nous sommes prêts à vous donner, comme gage de l'accord conclu, tous l'or et toutes les armes que nous avons pris comme butin des Danois, l'an dernier. De plus, nous vous offrons une demi-livre d'argent par homme présent actuellement dans cette ville, et en supplément, nous vous paierons le tribut que nous vous payions précédemment et nous donnerons des otages, car, à partir de maintenant, nous désirons être vos sujets, et être obéissant à votre règle, comme nous l'étions dans les temps anciens". Mais, quand cette offre eut été faite, les passions des hommes jeunes ne purent être adoucies mais, au contraire, ardemment désireux d'action et sans peur, il ne voulaient que combattre et disaient qu'ils allaient détruire la ville par la force des armes et tout ce que les gens possédaient, et qu'ils les emmèneraient comme captifs. Le roi, cependant, et ses chefs, furent d'une opinion plus sage et, ayant accepté l'offre et étant parvenus à un accord avec eux, s'en retournèrent joyeusement chez eux, emportant avec eux des trésors sans nombre, et les trente otages qui avaient été donnés. Quand, enfin, la paix eut été établie entre les deux peuples, les Suédois exaltèrent, avec le plus haut des zèles, l'omnipotence et la gloire du Christ notre Seigneur et déclarèrent qu'il était plus grand que tous les autres dieux. Ils commencèrent aussi à demander avec sollicitude ce qu'ils devaient lui donner, à lui par qui ils avaient obtenu une si grande victoire. A la suggestion de quelques marchands chrétiens qui étaient présents en ce temps, ils promirent qu'ils feraient un jeûne qui serait agréable au Seigneur Christ et, en conséquence, lorsqu'ils revinrent, après avoir passé sept jours chez eux, ils s'abstinrent tous de viande pendant les sept jours suivants. De plus, après que quarante jours se furent écoulés, ils tombèrent unanimement d'accord de s'abstenir de viande pour les quarante jours suivants. Cela fut fait, et tous ceux qui étaient présents respectèrent, d'un esprit disposé, ce qu'ils avaient décidé. Après cela, beaucoup, dans leur révérence et leur amour pour le Christ, commencèrent à donner de l'importance aux jeûnes observés par les Chrétiens et aux aumônes, et commencèrent à aider les pauvres parce qu'ils appris que cela plaisait au Christ. Ainsi, avec la bienveillance de tous, le prêtre Erimbert accomplit au milieu d'eux les choses relatives à Dieu, et, pendant que tous applaudissaient le pouvoir du Christ, l'observation de la religion chrétienne, depuis lors, augmenta dans ce pays et ne rencontra d'opposition de quiconque

Chapitre XXXI

Cependant, il arriva, par un jugement divin, que le roi Horic fut tué à la guerre lors de désordres causés par des pirates et alors que des parents essayaient d'envahir son royaume. Et, de la même manière, tous les chefs de cette terre, qui avaient été auparavant des relations et des amis de l'évêque, périrent par l'épée. Quand enfin, le jeune Horic eut été établi roi, certains de ceux qui étaient alors ses chefs et qui n'étaient pas aussi bien connus de l'évêque, essayèrent de le persuader que l'église qui avait été construire parmi eux devait être détruite et que la religion chrétienne devait être abolie. Car disaient-ils, leurs dieux étaient en colère et que ces grands maux leur étaient survenus car ils avaient accepté l'adoration d'un autre dieu, d'un dieu inconnu. En conséquence, le chef [comte, chef; correspond au scandinave "Jarl"] du village de Sliaswich, dont le nom était Hovi, qui était spécialement opposé à la religion chrétienne, pria instamment le roi de détruire la foi chrétienne et il ordonna que l'église qui avait été construite là fût fermée et il interdit l'observation de la religion chrétienne. Sur cela, le prêtre qui se trouvait là en partit, étant forcé à cela par cette amère persécution

Chapitre XXXII

De cela, l'évêque devint très anxieux et pas peu triste parce que, des amis qu'il s'était autrefois attachés par des cadeaux généreux, il ne s'en trouvait plus à la cour du jeune Horic, dont il aurait pu user pour amener celui-ci à faire ce que le Seigneur désirait. Etant ainsi privé d'aide humaine, il se hâta, comme c'était sa coutume, de chercher l'aide divine. Et il ne manqua d'être rassuré sur ce qu'il souhaitait, car le Seigneur le fortifia par une consolation spirituelle et il fut assuré que la religion qui avait commencé à être établie ne périrait pas, comme le planifiaient les ennemis du Christ. Par l'aide du Seigneur, les évènements tournèrent ainsi peu après. Alors que, du fait de ce qui était arrivé, il faisait des préparatifs pour se rendre auprès du roi, le Seigneur devança son action et le chef du village fut expulsé du village sus-mentionné et n'eut aucun espoir de rentrer en grâce, et le roi, avec bienveillance, envoya son messager à l'évêque et lui demanda de renvoyer son prêtre dans l'église. Dans le même temps, il déclara que lui, par moins que Horic, l'ancien, désirait mériter la faveur du Christ et s'assurer l'amitié de l'évêque. Et quand, alors, notre vénérable pasteur vint en présence du roi, ayant comme auxiliaire le très noble Burghard, qui avait auparavant assisté Horic, l'ancien, dans toutes ses affaires et avait une grande influence sur les deux rois parce qu'il était un de leurs parents, le roi montra son plaisir et le recevant et en lui permettant immédiatement de faire tout ce qui était lié à la religion chrétienne et que son prédécesseur avait auparavant autorisé d'être fait. De plus, il autorisa qu'il y eut une cloche dans le village, alors que les païens en regardaient l'usage comme illégal. Dans un autre village, appelé Ripa, situé dans ce royaume, il donna pareillement un site pour l'érection d'une église et accorda la permission qu'un prêtre soit là

Chapitre XXXIII

Pendant que ces choses étaient faites, le vénérable évêque Gautbert envoya chez les Suédois un prêtre appelé Ansfrid, qui était d'ascendance danoise et qui avait été formé par Ebo au service du Seigneur. Quand il y arriva, lui et le prêtre Erimbert, qui était revenu de là, continuèrent dans cet endroit trois ou quatre ans et gagnèrent le respect de tous. Mais, lorsqu'il apprit la mort de Gautbert, ils rentra et, ayant passé quelque temps parmi nous, il fut pris par la maladie et, après avoir beaucoup souffert, il mourut. Là-dessus l'évêque, qui ne voulait pas permettre que la foi chrétienne qui s'était élevée là périsse, s'arrangea pour y envoyer un prêtre nommé Ragenbert. Il était spécialement adapté à cette tâche et était très désireux d'entreprendre ce voyage, mais, alors qu'il était sur le chemin du port de Schleswig, où il y avait des bateaux et des marchands qui devaient faire le voyage avec lui, il arriva, par la manigance du Démon, qu'il fut attaqué par des brigands Danois et dépouillé de tout ce qu'il possédait, mais, le jour de l'Assomption de la Sainte Marie, lui aussi, alors qu'il s'efforçait de réaliser ses bonnes intentions, finit par arriver à une fin heureuse [c'est-à-dire qu'il mourut...]. Sa mort causa une grande affliction à l'évêque, mais celui-ci ne fut en aucun cas empêché de réaliser son projet, et, peu après, il ordonna, pour ce travail, un prêtre, nommé Rimbert, dont les ancêtres étaient d'extraction danoise. Quand il l'eut envoyé dans ces contrées au nom du Christ, il y fut aimablement reçu par le roi et le peuple, et, par l'aide du Seigneur, il célébra sans restrictions les divins mystères au milieu d'eux. Anskar lui avait, ainsi qu'il l'avait fait auparavant pour tous les autres prêtres qu'il avait désigné pour vivre chez les païens, donné des ordres stricts de ne désirer ni ne chercher à obtenir la propriété de quiconque, mais il les exhortait affectionneusement d'après l'exemple de l'apôtre Saint Paul, à travailler de leurs mains et de se contenter de nourriture et de vêtements. Cependant il leur donna, à eux, et à ceux qui les suivirent, en abondance de ses propres biens, tout ce qu'ils voulaient, et, de plus, tout ce dont ils avaient besoin pour s'assurer des amis

Chapitre XXXIV

De plus, parmi les nombreuses et variées difficultés que, comme nous l'avons dit, il endura en relation avec sa mission, bien qu'il était constamment fortifié par l'inspiration divine, ce qui l'empêcha d'abandonner la tâche qu'il avait entreprise, la piété et la ferveur spirituelle d'Ebo, l'archevêque de Reims, qui avait d'abord reçu les membres de la mission, ne lui apporta pas peu de réconfort. Car Ebo, enflammé par le désir de rendre effectif l'appel des races non-chrétiennes, le pria instamment d'apporter les bénédictions de la foi dans ces lieux et il lui imprima de ne pas abandonner ce qu'il avait commencé. Le bon évêque, agité par ses exhortations et son enthousiasme pour cette cause, accomplit sans hésitation les devoirs de la tâche qui lui avait été confiée, ni il put en être détourné par quelque difficulté ni désagrément. Parmi les nombreux mots de conseil et d'admonition prononcées par l'archevêque qui avaient réjoui l'évêque et l'avaient encouragé, il se rappela toujours la dernière conversation qu'ils avaient eue alors qu'ils parlaient de cette mission. Quand notre évêque eut énuméré les nombreuses difficultés qui lui étaient survenues et qu'il demanda à Ebo ce qu'il pensait de la mission, et demandait ardemment quelle consolation il pouvait lui offrir, Ebo, avec une inspiration de prophète, répondit: "Soyez assuré que ce que nous avons commencé d'accomplir au nom du Christ, portera des fruits dans le Seigneur. Car cela est ma foi, et je crois fermement, et je pense que c'est une vérité que, bien que pour le temps présent, du fait de nos péchés un empêchement puisse s'élever, le travail que nous avons commencé chez ces nations ne sera jamais entièrement effacé, mais que, par la grâce de Dieu, il portera des fruits et prospèrera jusqu'à ce que le nom du Seigneur atteigne les extrêmités de la Terre". Et cela, aussi, était la foi des autres. Dans cette perspective, ils partirent pour visiter les nations lointaines. Dans leur amour pour cette religion, il luttèrent de la part du Seigneur, de qui, sans aucun doute, ils recevront la récompense de leur peine. Un tel amour et une telle dévotion furent toujours présent dans l'esprit de notre seigneur et père, ni il cessa jamais de prier pour le salut de ces nations. Au contraire, quand les pirates, qui venaient des nations dessus dites, menaient continuellement des attaques, et que tout son diocèse fut dévasté, et sa maison pillée, il pria cependant sérieusement pour ceux qui s'opposaient à lui et le dévastaient et il ne cessa pas d'implorer la miséricorde de Dieu pour ceux qui le maltraitaient et de prier que leur péché ne leur fut pas imputé, car, ignorants de la justice de Dieu et trompés par le Diable, ils s'étaient montrés les ennemis de la religion chrétienne. Cette anxiété de leur fait fut si vive que, au cours de sa dernière maladie, et même jusqu'à son dernier souffle, il ne manqua jamais de se préoccuper en personne, et de faire des plans pour sa mission. Possédé de ce zèle ardent pour la religion, il fut emporté de cette vie mortelle, et nous croyons, qu'au jour de la résurrection, il entrera avec honneur et joie dans le royaume céleste accompagné d'une grande multitude de croyants qu'il avait gagné au Seigneur de parmi les Danois et les Suédois et que, par la miséricorde divine, il recevra la récompense de la bonne dispute qu'il mena

Chapitre XXXV

Comme nous avons maintenant longuement parlé de cette mission et de son anxiété de sauver les autres, le temps est venu de dire comment il se comportait lui-même en vue du salut de sa propre âme, et comment, dans la crainte de Dieu, il affligeait son corps. Il n'est pas besoin de décrire ce que vous connaissez bien, cette sorte de vie qu'il mena avec vous dans le monastère, et qui fut marquée par l'abstinence et la dévotion. Il apparaissait cependant, d'après ce que nous avons entendu dire, merveilleux et digne d'être imité aux anciens et aux personnes âgées. Lorsqu'il devint évêque parmi nous, il lutta par tous les moyens pour réaliser ce qu'il avait commencé au monastère, et, spécialement, il s'efforça d'imiter la vie de tous les saints et de Martin en particulier. Car il portait un vêtement de sac [un cilice, dont le port aurait été développé par St Martin de Tours] sur sa peau la nuit et aussi le jour et, en accord avec ce qu'il avait lu dans la vie de Martin, il fit un effort particulier pour être utile au peuple commun en prêchant à celui-ci la parole de Dieu. En même temps, il aimait être solitaire de sort qu'il puisse s'exercer à la philosophie divine. Avec cette fin en vue, il fit construire spécialement une cellule pour lui, qu'il appelait un endroit calme et un endroit favorable au chagrin. Là, il vivait, avec quelques compagnons, et, aussi souvent qu'il pouvait se libérer de prêcher et de ses devoirs ecclésiastiques et des troubles causés par les païens, il habitait là seul, mais, cependant, il ne permit jamais que sa propre convenance, ou que son amour de la solitude, interfèrent avec les intérêts du troupeau qui lui avait été confié. De plus, aussi longtemps qu'il posséda une partie de la force de sa jeunesse, il limitait souvent son pain [il faisait un pain plus léger] et mesurait son eau, et cela plus particulièrement quand il lui était permis d'être seul. A cette époque, comme il l'a dit lui-même, il fut grandement tenté par l'esprit d'ambition. Car l'ennemi du genre humain s'efforça de corrompre son esprit par ce mal, et il se sentait grand à ses propres yeux, du fait de son abstinence. De cela il devint triste et il se tourna vers le Seigneur en prière de toute sa force et pria que Sa grâce peut le libérer de cette impiété maléfique. Et, quand, pour cela, il se fut adonné sincèrement à la prière, et qu'une nuit, il était tombé endormi, il se vit emporté au ciel et le monde entier était rassemblé dans une sombre vallée, d'où, et bien qu'à de rares intervalles, les âmes des saints étaient emportées par le ministère des anges et conduites au ciel. Dans cette vallée sombre, il lui fut montré comme si c'était le sol d'où la race humaine avait son origine. Alors qu'il regardait tout cela avec étonnement et horreur, il fut prié de considérer le point de départ de sa vie présente, et il lui fut dit: "Comment un homme peut-il se vanter, qui a une origine si basse dans cette vallée de larmes? Et quoi qu'il possède de bon, ne l'a-t-il pas reçu de Lui de Qui vient tout don bon et tout bienfait parfait". "Et si, disait la voix, à un quelconque moment de ton futur, tu étais tenté par la peste de l'orgueil, rappelle-toi l'origine de ta naissance, et, de ce simple fait, par la grâce de Dieu, tu seras libéré". Et c'est ce qui arriva. Mais une fois qu'il fut devenu âgé, il ne put plus s'abstenir de nourriture de cette façon mais sa boisson continuait d'être de l'eau. Cependant, pour éviter une vaine gloriole plus plus que pour prendre quoi que ce soit de plaisant, il avait l'habitude de mélanger son vin avec le peu d'eau qu'il s'apprêtait à boire. Et parce que, dans son grand âge, il ne put plus pratiquer cette abstinence accoutumée, il s'efforça de compenser cette incapacité nouvelle par l'aumône, les prières et d'autres actes bons. Pour cette raison aussi, il racheta de nombreux captifs, qu'il libéra. Certains de ceux-ci, qui étaient particulièrement adaptés, il ordonna qu'il leur soit donnée une éducation religieuse et qu'ils soient formés au service de Dieu. De plus, les grands manuscrits qui se trouvent auprès de nous, et qui furent copiés, et marqués de sa propre main, témoignent de son zèle et de son désir d'intensifier sa dévotion et son amour de Dieu. Ces livres n'incluent que des sujets qui ressortissent à la gloire du Dieu Tout-Puissant, à la réfutation des pécheurs, à la louange de la vie éternelle, la terreur de l'Enfer et à tout ce qui a trait à la douleur et à la lamentation. Les frères qui sont avec vous et ceux qui sont à la Nouvelle Corbie, à qui il demandait souvent de le laisser entreprendre un pareil travail, et qui lui envoyaient des écrits de cette sorte, en sont témoins. Mais bien qu'il désirait passer sa vie entière dans le chagrin et les larmes, il ne put jamais y parvenir. Car, bien que la peine apportait souvent des larmes, il ne trouvait jamais cela suffisant, bien que dans la dernière année de sa vie, par la bonté du Seigneur, il finit par acquérir la grâce qu'il avait longtemps cherchée d'être capable de verser des larmes aussi souvent qu'il le souhaitait. A partir des passages de la Sainte Ecriture qui ont trait au chagrin du fait du péché, et pour chaque psaume séparé, il fournissait une prière adaptée. Cela, il avait coutume de l'appeler "pigmentum" et, ainsi, les psaumes lui devenaient doux [ces "pigmenta" ont été retrouvés, et sont de courtes prières ajoutées à chacun des 150 psaumes de la Bible]. Et, dans ces "pigmenta", il ne prêtait pas attention à l'arrangement des mots mais il cherchait seulement à atteindre le chagrin du coeur. A certains temps, il y loue l'omnipotence et le jugement de Dieu, à d'autres moments, il s'y gronde et s'y réprimande; à certains moments, il y loue les saints qui sont obéissants à Dieu, et à d'autres il pleure les malheureux et les pécheurs. Il avait coutume de dire qu'il était lui-même pire que n'importe lequel d'entre eux. Quand, alors que d'autres chantaient les psaumes avec lui et que le psaume arrivait à sa fin, il méditait seul et en silence et ne s'ouvrait à personne de ses méditations. Un de nous, qui était un de ses amis tout particulièrement [probablement l'auteur lui-même, Rimbert] le persuada avec difficulté et après beaucoup de supplications de lui dicter ce qu'il avait l'habitude de chanter, mais, tant qu'il vécut, il ne fit connaître à personne ce qu'il avait écrit, bien, qu'après la mort d'Anskar, il le montra à qui désirait le lire. Pendant qu'il chantait des psaumes, il travaillait fréquemment de ses mains, car il avait l'habitude à cette époque de faire des filets. En ce qui concerne les psaumes, il s'arrangeait pour en chanter certains la nuit et certains le jour, certains alors qu'il se préparait à chanter la messe et certains alors qu'il retournait pieds nus à son lit. Le matin, alors qu'il mettait ses chaussures et qu'il se lavait, il chantait une litanie et, quand il allait à l'église, il célébrait lui-même la messe trois ou quatre fois, restant debout alors qu'il accomplissait cet office. Au temps dit accoutumé, il chantait la messe publique, à moins que quelque difficulté n'intervînt, et, dans ce cas, il écoutait la messe. Et qui peut dire combien était grande sa libéralité à donner des aumônes, car il désirait que tout ce qu'il possédait, serve, par la volonté du Seigneur, aux besoins de ceux qui souffraient. Chaque fois qu'il savait que quelqu'un était dans le besoin, il avait souci de l'aider à l'extrême de ce qu'il pouvait, et non seulement dans son propre diocèse mais il fournissait aide et assistance aussi dans les régions distantes. En particulier, il fonda un hôpital pour les pauvres à Brême, à qui il assigna les dîmes de certains hameaux de façon que ceux qui étaient pauvres et malades puissent être soutenus et aidés quotidiennement. Pendant tout son épiscopat, il donna pour le secours des pauvres un dixième des animaux et de tous ses revenus, et un dixième des dîmes qui lui appartenaient, et, de tout argent ou bien de toute sorte qui lui advenait, il en donnait un dixième aux pauvres. De plus, tous les cinq ans, il prenait à nouveau une dîme sur ses animaux, bien qu'ils l'eussent déjà payée, pour faire des aumônes. De l'argent qui venait aux églises des monastères, il donnait aussi un quart en aumône. Il fut toujours très soucieux des étudiants et des veuves et partout où il savait qu'il y avait des ermites, que ce soit des hommes ou des femmes, il s'efforçait de les visiter fréquemment et de les fortifier au service de Dieu par des cadeaux, et de veiller à leurs besoins. Il prenait toujours à sa ceinture un petit sac qui contenait des pièces, de sorte que, si quelqu'un qui était dans le besoin venait alors que le responsable de la charité n'était pas là, il puisse être capable de donner lui-même sur le champ. Car, dans toutes les choses, il s'efforçait d'accomplir le proverbe du bienheureux Job, qu'il ne voudrait même pas être cause que les yeux de la veuve attendissent. Ainsi, il s'efforça d'être un oeil pour l'aveugle, un pied pour le boîteux et le père du pauvre. Il ordonna que quatre indigents, deux hommes et deux femmes, soient reçus chaque jour et nourris à Brême pendant le Carême. Il se joignit aux frères pour laver les pieds des hommes. Dans le cas des femmes, cela était fait dans l'hôpital pour les pauvres dont il a été question plus haut par une femme qui était consacrée à Dieu et qu'il avait lui-même approuvée pour sa dévotion à Dieu et son amour de la religion. Lorsqu'à la manière des évêques, il faisait le tour de ses paroisses, avant de se mettre à table, il ordonnait que quelques personnes pauvres soient amenées et il leur donnait eux-même de l'eau pour se laver les mains et il bénissait la nourriture et la boisson et il les leur donnait. Puis, une table était placée devant eux et lui et son hôte commençait eux-mêmes à manger. En une occasion, nous vîmes une illustration de sa compassion et de sa piété et cela nous fut donné quand le fils d'une veuve qui, avec beaucoup d'autres, avait été emmené captif dans une terre lointaine, c'est-à-dire en Suède, et avait été racheté et ramené dans son pays. Alors que sa mère se réjouissait à la vue de son retour, et que, comme cela est l'habitude des femmes, elle pleurait de joie alors qu'elle se tenait devant lui, l'évêque, qui n'était pas moins ému, commença aussi de pleurer. Alors, il rendit immédiatement à la mère, qui était veuve, le fils à qui il avait donné sa liberté et il admit qu'ils partent ensemble, se réjouissant, chez eux

Chapitre XXXVI

Et comme, alors, qu'en accord avec l'enseignement de St Paul, sa relation était toujours tournée vers les cieux, il était, bien que sur cette terre, fréquemment illuminé de révélations célestes, comme nous l'avons déjà montré -bien qu'avec beaucoup d'omissions. C'est ainsi que presque tout ce qui était sur le point de lui arriver devenait connu de lui en rêve, ou par une illumination mentale que nous pensons ressembler à ce dont il est fait mention dans les Actes des Apôtres, où il est écrit: "L'Esprit dit à Philippe", car [sic] pour toute décision importante qu'il avait à faire, il désirait toujours avoir le temps de la considérer, et il ne décidait rien sans réfléchir jusqu'à ce que, illuminé par la grâce de Dieu, il sût ce qui était le mieux à faire. Quand il avait été ainsi assuré par le moyen d'une vision céleste, alors, il décidait tout ce qui devait être fait, sans hésitation. De plus, par rapport aux choses qu'il voyait en rêves, comme cela a déjà été fréquemment mentionné, elles devenaient si souvent vraies que nous n'arrivons pas à nous rappeler un cas dans lequel cela n'aurait pas été. En preuve de cela, référons à un exemple dont il n'a pas été fait mention. Avant qu'il ait été invité à prendre la charge de l'Eglise à Brême, il eut une vision une nuit, dans laquelle il lui semblait qu'il était arrivé dans un endroit très charmant, où il trouva l'Apôtre Saint Pierre. Alors qu'il le regardait avec stupéfaction, des hommes vinrent, qui prièrent prièrent Saint Pierre de leur envoya un enseignant et un pasteur, et lorsqu'il répondit: "Regardez, voici l'homme que vous aurez comme pasteur", plaçant devant eux, alors qu'il parlait, l'évêque qui était debout devant lui, il lui sembla qu'il y eut un grand tremblement de terre et qu'il tombait à terre et qu'une voix au-dessus de lui parlait, et qu'il éprouvait une grande joie mentale, et même l'onction de l'Esprit Saint, de sorte qu'il se sentait né à nouveau dans la grâce du Christ. La voix que l'on entendait se déversait comme si ç'avait été une bénédiction sur lui. Puis, à ce qui lui sembla, le hommes dont il a été question plus haut, prièrent instamment l'Apôtre de leur envoyer un enseignant, et il répondit, comme s'il avait été mécontent d'eux: "Est-ce que je ne vous ai pas dit que c'était votre enseignant, celui qui se tient devant vous!? Pourquoi doutez-vous? N'avez-vous pas entendu la voix du Saint-Esprit qui est venu pour cela, pour consacrer un pasteur pour vous?". Lorsqu'il s'éveilla de ce rêve qu'il avait eu trois ans avant d'être invité à régner sur l'Eglise de Brême, il fut assuré, par ce qui avait été dit, que c'était son devoir d'aller quelque part au nom de Dieu, mais, où, il ne le savait pas. Quand, plus tard, il vint, par ordre du roi, à cette Eglise et qu'il apprit qu'il était consacré en l'honneur de Saint Pierre, et que, là, quelqu'un ne voulait pas de bon gré le recevoir, il se rappela sa vision, et à cause d'elle, il accepta la charge de ce diocèse, car, comme il le déclara solemnellement, il n'aura, pas, en ce qui le concernait, voulu prendre cette charge. A l'époque où il possédait le monastère mentionné plus haut, à Turholt, et que l'appel des païens au salut était son souci, et de façon qu'il puisse les aider, il fit que quelques jeunes garçons qu'il avait acheté des Normands ou des Slaves furent élevés dans ce même monastère de façon à pouvoir être formés à l'art de la guerre sainte. Quand ce monastère fut donné à Raginar, celui-ci prit certains de ces jeunes garçons et les utilisa comme ses serviteurs, et , de cela, l'évêque fut particulièremnt affligé. Dans une vision qu'il eut peu après, il semblait être venu dans une maison et y avoir trouvé le roi Charles, et Raginar. Il lui semblait qu'il leur faisait des reproches concernant ces jeunes garçons et qu'il disait qu'il avait prévu de les former au service du Dieu Tout-Puissant et non pour être les serviteurs de Raginar. Alors qu'il disait cela, il lui sembla que Raginar le frappait du pied sur la bouche, et, quand cela arriva, il lui sembla que le Seigneur Jésus-Christ se tenait près de lui et disait au roi et à Raginar: "Sais-tu à qui appartient cet homme que tu traites si honteusement!? Sache qu'il a un Maître et, à cause de cela, ce que tu viens de faire ne restera pas impuni!" Lorsque cela eut été dit, ils furent terrifiés et apeurés, et, là-dessus l'évêque se réveilla. La vengeance divine, qui rattrapa Raginar montra combien la révélation était vraie. Car, un peu après, il encourut le déplaisir du roi et perdit le monastère et tout ce qu'il avait reçu du roi, et jamais il ne retrouva sa faveur ancienne

Chapitre XXXVII

Il ne faut pas que nous semblions passer sous silence la qualité et l'étendue de son service pastoral, car, en lui, nous avons la preuve de ce que Saint Grégoire dit concernant les pasteurs de l'Eglise, lorsqu'il parlait de façon figurée des bergers qui gardaient leurs troupeaux lorsque notre Seigneur naquit. "Pourquoi, dit-il, est-ce que l'ange apparut aux bergers qui montaient la garde, et pourquoi est-ce que la lumière de Dieu brilla autour d'eux? N'était-ce pas parce qu'eux, au-dessus de tous les autres, méritaient de voir la vision divine, eux qui savent comme surveiller avec soin leurs troupeaux fidèles. Car alors qu'il veillent avec un soin jaloux sur leur troupeau, la grâce divine luit de plus en plus au-dessus d'eux". Dans tout ce qu'il faisait la grâce de Dieu était avec lui, comme nous l'avons prouvé par de maints exemples. Car, comme il était plein de sollicitude pour la protection de son troupeau, il avait gagné le droit de voir des visions divines et, en de nombreux cas, comme nous l'avons montré, son esprit était inspiré par la vue de choses divines. De plus, comme la grâce de Dieu brillait de plus en plus dans son corps, sa prédication acquérait un charme spécial, bien qu'elle fut aussi par moments terrifiante, de sorte que l'on pouvait clairement voir que ses paroles étaient contrôlées par l'inspiration divine. En mélangeant la douceur avec la terreur, il rendait manifeste le pouvoir du jugement de Dieu, par lequel le Seigneur, quand Il viendra, se montrera Lui-même terrible aux pécheurs et ami des justes. Sa grâce de parole et d'apparence était si attirante qu'il emplissait de peur les puissants et les riches et plus encore ceux qui étaient impénitents et sans honte, et pendant que le peuple commun l'étreignait comme un frère, les pauvres, avec la plus extrême des affections, le vénéraient comme un père. Bien qu'il évitait soigneusement les signes du pouvoir surnaturel, qu'il considérait comme une incitation à l'orgueil, de tels signes, cependant et bien qu'il ne le désirât pas, ne manquaient pas, et il était ainsi manifestement prouvé que le commandement du Seigneur, qui sortait de sa bouche, ne faillissait pas. Car, lorqu'une fois, il prêchait au peuple dans le village d'Ostarga [ou Ostraga, ou Asterga], en Frise, le jour du Seigneur, et que, dans le cours de son prêche, il les prévenait de ne faire aucun travail manuel un jour de fête ["Feast Day"], certains, qui étaient obstinés et insensés, en rentrant chez eux, voyant qu'il faisait beau, sortirent au pré et se mirent à mettre le foin en tas. Quand cela eut été fait et que l'on s'approchait du soir, il se trouva que tous les tas qui avaient été fait ce jour furent détruits par le feu du ciel, alors que demeurèrent intacts ceux qui se trouvaient au milieu du pré et qui avaient été faits les jours précédents. Là-dessus, le peuple qui habitait alentour, quand ils virent, de loin, la fumée, pensèrent qu'un ennemi s'approchait et furent grandement effrayés, mais une fois qu'ils se furent soigneusement enquis des faits, ils surent ainsi que l'obstination avait trouvé son châtiment

Chapitre XXXVIII

Nous ne devrions pas passer sous silence le fait que les Northalbingiens commirent un jour un grand crime, un crime d'une terrible nature. Alors que de pauvres captifs, qui avaient été pris des terres chrétiennes et emmenés chez les barbares, et eurent été maltraités là par ces étrangers, avaient fui de ces endroits dans l'espoir de s'échapper et étaient venu chez les Chrétiens, c'est-à-dire les Nordalbingiens qui, comme cela est bien connu, vivent à proximité des païens, il se trouva, que, comme ils arrivaient là, ces Chrétiens ne leur montrèrent pas de compassion mais les saisirent et les chargèrent de chaînes. Certains furent vendus aux païens, alors que d'autres furent transformés en esclaves, ou vendus à d'autres Chrétiens. Lorsque l'évêque apprit cela, il fut grandement affligé qu'un si grand crime ait été perpétré dans son diocèse, mais il ne put trouver comment il pourrait améliorer la situation car beaucoup de ceux qui étaient impliqués étaient jugés puissants et nobles. Et, alors qu'il était ainsi grandement affligé de ce fait, une nuit lui fut accordé une consolation à laquelle il était habitué. Car il lui sembla que le Seigneur Jésus était dans ce monde, comme Il y avait été une fois, lorsqu'Il avait donné aux hommes son enseignement et son exemple. Il lui semblait qu'Il marchait avec une multitude de croyants et que lui, l'évêque, était avec Lui pour ce voyage, joyeux et se réjouissant car il n'y avait pas d'opposition, mais une peur, divinement infusée, se portait sur les arrogants, et les oppresseurs étaient enlevés et un grand calme prévalait, de façon qu'il ne semblait n'y avoir ni contradiction, ni opposition au voyage du Christ. Ayant vu cette vision, il se prépara à aller à la rencontre de ces gens avec le désir, par un moyen ou un autre, de libérer ces pauvres hommes qui avaient été vendus ou livrés à une servitude outrageuse et, avec l'aide de Dieu, d'empêcher quiconque de commettre à nouveau un crime aussi grand. Et, au cours de ce voyage, le Seigneur l'assista si grandement et fit que la peur de Son pouvoir inspira grandement de la crainte à ceux qui étaient arrogants que, bien que ces gens étaient de rang et exerçaient une influence mauvaise, aucun d'entre eux ne s'aventura à s'opposer à son opinion ni à résister à son autorité, et les pauvres hommes furent cherchés jusque là où ils avaient été vendus et on leur donna leur liberté et on les autorisa à aller là où ils le voulaient. De plus, de façon à empêcher qu'aucune tromperie ne fût faite par la suite, on passa un accord qu'aucun de ceux qui s'étaient souillés en saisissant ces captifs ne pourraient se défendre soit en prenant serment, ou en fournissant des témoins, mais devaient se remettre au jugement du Dieu Tout-Puissant [normalement une ordalie, un jugement de Dieu; à cette époque les ordalies étaient des sortes suivantes: l'ordalie par l'eau, par le feu, par les sorts, par l'Eucharistie. Dans la dernière forme, on pensait que la partie coupable, lorsqu'elle recevait l'Eucharistie, tombait morte d'un coup], que ç'ait été un homme qui était accusé du crime, ou un captif qui l'accusait. Le Seigneur manifesta ainsi, au cours de ce voyage, la vérité de sa promesse qu'Il avait faite à ceux qui croyaient, lorsqu'Il disait: "Et je suis avec vous chaque jour, jusqu'à la fin du monde". Ainsi l'évêque accomplit avec tels succès et joie son voyage que ceux qui étaient avec lui dirent qu'il n'avait jamais eu de toute sa vie un voyage aussi bon et plaisant, car disaient-ils: "Maintenant, de vérité, nous savons que le Seigneur est avec nous!"

Chapitre XXXIX

Il est impossible de compter le nombre de ceux qui furent guéris par ses prières et par ses onctions. Car, selon les déclarations faites par de nombreuses personnes, les personnes malades venaient avec enthousiasme auprès de lui, non seulement de son diocèse mais de loin aussi, lui demandant médecine pour les guérir. Mais lui, cependant, préférait que cela fut tu plutôt que l'on en fit bruyamment état. Car, alors que l'on parlait de ces signes de puissance, une fois, en sa présence, il dit à un ami: "Serais-je digne d'une telle faveur de mon Dieu, je lui demanderais qu'il m'accorde ce seul miracle, de faire de moi, par Sa grâce, un homme bon"

Chapitre XL

La vie qu'il vécut impliquait des peines qui s'accompagnaient de souffrances du corps constantes. En fait, toute sa vie fut semblable à un martyr. Il supporta beaucoup de travaux parmi les étrangers, en plus de ceux qu'il accomplissait dans son propre diocèse, qui étaient causées par les invasions et les ravages des barbares et l'opposition des hommes méchants, et en plus, il ne cessa jamais de supporter ces souffrances personnelles, par l'amour du Christ. Mais, que pouvons-nous faire quand, après avoir mentionné tant de choses qui étaient plaisantes et profitables, nous sommes obligés de mentionner ce qu'il nous est impossible d'expliquer sans chagrin. Car, dans la soixante-quatrième année de son âge [en 864], qui était la trente-quatrième de son épiscopat, il commença à souffrir d'une maladie sérieuse, à savoir la dysenterie. Quand, après de nombreux jours -quatre mois, et même plus, il souffrait toujours et sentait qu'il était proche de la mort, il continua de rendre grâce à Dieu et disait que sa douleur était moins que ce que ses péchés méritaient, et il répétait souvent les mots de Job: "Si j'ai reçu du bien de la main du Seigneur, pourquoi n'en supporterais-je pas du mal?". Cependant, il devint très triste, car du fait des visions qu'il avait eues, il pensait qu'il mourrait martyr plutôt que d'une maladie de cette sorte, et il commença de réfléchir à ses péchés, car du fait de sa faute, il était privé de ce qui lui semblait une juste anticipation, et il répétait souvent les mots du psalmiste: "Tu est juste, Ô Seigneur, et ton jugement est droit". Il fit connaître cette peine à son plus fidèle disciple [normalement Rimbert, l'auteur], qui partageait avec lui ses chagrins et qui combattait sérieusement pour le conforter, en lui disant qu'il ne lui avait pas été promis qu'il serait tué par l'épée, ou brûlé dans le feu, ou tué par l'eau, mais simplement qu'il viendrait en la présence du Seigneur en portant une couronne de martyr. Anskar, cependant, ne pouvait entendre une telle consolation. Il conversait souvent avec son disciple sur ce sujet, lequel, dans son ardent désir de lui apporter réconfort, essayait de lui rappeler de tout ce qu'il avait souffert au service de Dieu, et combien de douleur dans son corps il avait enduré. Il le priait instamment, de plus, que, même s'il n'avait souffert rien de tout cela, sa dernière maladie, grave, qui avait continue jour après jour, lui aurait plus que gagné, par la grâce de Dieu, le titre de martyr. Mais, cependant, il ne voulait pas recevoir une consolation de cette sorte mais il continuait à s'affliger, et ainsi il advint que le Seigneur daigna réconforter Lui-même son serviteur, non comme auparavant par un rêve, mais par une révélation directe, de sorte que pour une affliction si grande, il apporte un remède au-delà. Car un jour, alors qu'il se trouvait à l'oratoire, à la messe et était grandement affligé de ce dont on vient de parler, il eut une extase soudaine et entendit une voix qui le réprimandait sérieusement parce qu'il avait douté de la promesse de Dieu, et qu'il avait pensé qu'une mauvaise action serait plus forte que la bonté de Dieu. La voix disait: "Crois fermement et absolument sans aucun doute que Dieu, de Sa grâce, t'accorderas ces deux faveurs, celle d'abord de te pardonner les péchés dont tu t'inquiètes, et qu'ensuite il accomplira tout ce qu'Il t'avait promis". Ayant reçu cette consolation, il fut conforté

Chapitre XLI

Après cela, il commença avec un soin particulier à régler les affaires qui méritaient attention dans son diocèse. De plus, il donna des ordres que les privilèges accordés par le siège apostolique qui concernaient sa mission, soient couchés par écrit en un nombre d'exemplaires et soit distribuées à à peu près tous les évêques du royaume de Ludovic. A Ludovic lui-même et à son fils qui portait le même nom, il envoya une copie et il ajouta des lettres qui portaient son propre nom et dans lesquelles il priait qu'ils se rappellent ces sujets et qu'ils fournissent aide comme les circonstances pourraient le dicter, de façon que, par l'aide de Dieu et leur assistance, la mission parmi les races païennes puisse porter fruit et se développer. Quand ensuite, il eut souffert continûment, pendant trois mois, de sa maladie, et que la saison de l'Epiphanie fut passée, il fut souhaité qu'il lui soit permis de passer en la faveur du Seigneur, le jour de la fête de la Purification de Sainte Marie. Et, comme cette fête s'approchait, il commanda qu'un divertissement fût préparé pour le clergé et les pauvres de façon qu'ils puissent faire fête en ce jour très sacré. Il commanda aussi que trois cierges fussent fait de sa cire spéciale, qu'il considérait comme spécialement bonne. Quand cela fut fait, il les fit porter devant lui, la veille de cette fête [le 1er février]. Quand ils eurent été apportés, il ordonna que l'un fut placé devant l'autel de Ste Marie, un autre devant l'autel de St Pierre et le troisième devant l'autel de St Jean-Baptiste, car il espérait que ceux qui avaient été ses guides dans sa vision, le recevraient lorsqu'il partirait de son corps. Mais il était si fatigué et usé par sa maladie qu'à peine rien de lui ne restait de son corps, sauf ses os qui étaient reliés entre eux par les tendons et couverts par sa peau. Cependant il continuait constamment à louer le Seigneur et, quand le jour de la fête se leva, presque tous les prêtres qui étaient présent célébrèrent des messes pour lui, comme ils l'avaient fait chaque jour. Il commença à préparer la nature du discours qui allait être fait au peuple et déclara que, ce jour, il ne prendrait rien [nourriture, boisson] jusqu'à ce que la messe publique soit terminée. Quand elle fut finie et qu'il eut mangé et bu avec modération, il passa presque tout le jour à donner des conseils à ses compagnongs et à entretenir leur dévotion, les incitant, autant qu'il le pouvait, certaines fois en tant que communauté, d'autres en tant qu'individus, à servir Dieu. Il était, cependant, très soucieux et plein de sollicitude pour sa mission chez les païens. Il passa aussi la nuit qui suivit à donner des avis de cette sorte. Il demanda aussi aux frères qui étaient présents, quand ils eurent dit la litanie et chanté les psaumes en vue de son départ, selon leur coutume, de chanter ensemble le Te Deum et le Credo de la foi catholique, composés par St Athanase. Lorsque le matin vint et que presque tous les prêtres qui étaient présents eurent célébré la messe pour lui, et qu'il eut reçu la communion du corps et du sang du Seigneur, il leva sa main et pria que Dieu, dans sa bonté, pardonne à quiconque lui avait fait du mal. Puis, il commença de dire encore et encore les versets: "Selon Ta miséricorde, pense à moi, selon Ta bonté, Ô Seigneur" et "Dieu, soit miséricordieux envers moi, qui suis pécheur", et, "Dans tes mains, Ô Seigneur, je recommande mon esprit". Et, quand il eut dit ces mots plusieurs fois et qu'il ne put continuer par manque de souffle, il ordonna à l'un des frères [Rimbert] de continuer à dire les mêmes mots pour lui, et, ainsi, avec les yeux fixés sur le ciel, il exhala son esprit, qui avait été recommendé à la grâce du Seigneur". Quand son corps eut été traité de la façon accoutumée, il fut placé sur une bière et porté à l'église, comme cela fut fait dans le cas de St Martin, parmi les lamentations de tous et le deuil unanime du clergé, des orphelins, des veuves, des étudiants et des pauvres

Chapitre XLII

Bien qu'aucun doute ne pouvait s'élever sur son salut, quel moine ou quel autre croyant pouvait se retenir de pleurer à la vue du fait qu'il nous laissait dans la désolation, lui en qui les vies de presque tous les saints des temps anciens avaient été reproduites. Pour pouvoir atteindre le Saint de tout élu de Dieu, il avait, comme homme pauvre, suivi le Christ qui était pauvre, Lui aussi. Comme les apôtres il avait abandonné tout ce qu'il possédait, et comme St Jean le Baptiste il avait cherché la solitude d'un monastère et il avait vécu le début de sa vie loin du mouvement de la vie humaine. Quand, dans le cours du temps, il eut progressivement grandi et eut avancé d'une vertu à l'autre, lui, qui était destiné à devenir un vase choisi pour, comme l'apôtre Saint Paul, apporter le nom du Christ aux nations païennes, après cela, comme Saint Pierre le chef des apôtres, il entreprit la charge de nourrir l'agneau du Christ. Comme gouvernant il montra de telles qualités et une telle grandeur que, comme cela peut abondamment être prouvé, il agit comme médiateur entre le ciel et la terre, et entre Dieu et ses voisins, et pendant qu'en certaines occasions il bénéficiait de visions divines et de révélations célestes, à d'autres, il guidait la vie et les actions de ceux qui étaient confiés à son soin. Il possédait personnellement complètement les deux faces de la vie active et contemplative car, cependant que selon l'enseignement des Evangiles, les coeurs purs verront Dieu, lui qui, dans sa pureté virginale fut choisi par Dieu, contina sa vie entière, comme St Jean l'apôtre et évangéliste, vierge à la fois d'esprit et de corps. Il fut, de plus, possédé d'un si grand amour envers tous les hommes que, comme le premier martyr Saint Etienne, il priait même pour ses ennemis. Combien bienheureux il fut et digne de toute louange et de toute commendation, lui qui imita les plus grands des saints et fut doué d'innombrables vertus, lui qui, saint d'esprit et chaste de corps, suivra partout, avec les vierges, l'Agneau, où que Celui-ci aille et qui, continuant toujours, confesseur du Christ, aura une place glorieuse parmi Ses confesseurs, et, lors de la Résurrection, sera assis avec les Apôtres sur leur haut siège du jugement, pour juger ce monde qu'il aura méprisé et pour recevoir avec les martyrs la couronne de justice et la divinement promise palme du martyr. Car il est clair qu'il y a deux types de martyrs, celui qui survient quand l'Eglise est en paix, et qui est caché à la vue, et celui qui arrive dans les temps de persécutions et est visible de tous. Il désirait les deux, mais il n'en atteint qu'un. Car jour après jour, par les pleurs, les veilles, les jeûnes, les tourments de la chair et la mortification de ses désirs charnels, il offrit un sacrifice à Dieu sur l'autel de son coeur et atteint au martyr en allant aussi loin qu'il était possible en temps de paix. Et, comme manquait l'agent, mais non la volonté, qui eût apporté le martyr visible du corps, il obtint, en volonté, ce qu'il ne pouvait obtenir en fait. Nous ne pouvons pas nier complètement, cependant, qu'il ait atteint le vrai martyr, si nous comparons ses grands labeurs à ceux de l'apôtre. En voyageant souvent, à travers les périls des eaux, à travers les périls des voleurs, à travers les périls venant de sa propre race, à travers les périls venant des païens, à travers les périls de la ville, à travers les périls des endroits isolés, à travers les périls de la mer, à travers les périls au milieu des faux-frères, dans le travail et l'affliction, en veillant souvent, dans la faim et la soif, dans les jeûnes, souvent dans le froid et la nudité. Et, de plus, à côté de tout cela, le soin de toutes les Eglises, qui lui incombait journellement. Qui fut faible et qu'il ne l'ait été? Qui fut offensé et qu'il ne brûla pas? Comment, alors, pourra-t-il lui qui, pour le nom du Seigneur, fut affecté de si grands troubles dans son corps et d'inquiétudes de l'esprit, se voir refuser le titre de martyr?! Car, si seule une vie qui se termine dans la souffrance peut être considérée comme celle d'un martyr, alors ce serait sans effet que le Seigneur ait déclaré que l'évangéliste St Jean, dont la vie, comme nous le savons, ne finit pas par le martyr, boirait de Sa coupe. Si alors, nous ne doutons pas que, selon la déclaration du Seigneur, St Jean doit être compté au nombre des martyrs, nous ne devrions pas hésiter concernant ce saint et bienheureux homme qui est parti avant nous. Car il fut vraiment un martyr, parce que, selon l'apôtre, le monde lui fut crucifié et lui au monde. Il fut un martyr parce que, parmi les tentations du Diable, les tentations de la chair, les persécutions des païens et l'opposition des Chrétiens, il continua, impertubable, immuable et inconquis, à rester confesseur du Christ jusqu'à la fin de sa vie. Il fut un martyr car, comme le mot martyr signifie "témoin", il fut un témoin de la parole de Dieu et du nom de Chrétien. Aussi, que personne ne soit surpris qu'il n'ait pas atteint cette forme du martyr qu'il désirait si grandement et qui, pensait-il, lui avait été promise, car il ne peut pas être prouvé que c'est ce qui lui ait été promis, dans le sens que, lui, donnait au mot martyr. Dans le cas du martyr visible l'orgueil peut affecter l'esprit. De façon à éviter cela, Dieu, dans sa Providence, promit et accorda que ses mérites ne seraient en rien diminués mais que son humilité, cependant, qui est la gardienne de toutes les vertus, serait sauvegardée. Aussi, comme il est clair de ce que nous avons relaté ci-avant, que combien remarquable fut sa sainteté et combien grands furent ses mérites à la vue de Dieu, il reste que, comme dans toutes les choses il était un imitateur du Christ, nous devrions, nous également, nous efforcer d'être ses imitateurs à lui. Ainsi aussi, il deviendra possible qu'il puisse vivre avec nous, sur cette terre, jusqu'à la fin des temps et que nous puissions être dignes de vivre avec lui dans les cieux après que notre vie présente se soit terminée. Car il vivra avec nous sur cette terre, si la sainteté de sa vie et le souvenir de son enseignement nous font nous le rappeler. Et nous vivrons avec lui au ciel si nous suivons son exemple, si, de toute notre force et de tout notre désir, nous désirons Celui à Qui il est allé avant nous, Jésus-Christ notre Seigneur, Qui, avec le Père et le Saint-Esprit, vit et règne pour les siècles des siècles. Amen

Website Manager: G. Guichard, site Learning and Knowledge In the Carolingian Times / Erudition et savoir à l'époque carolingienne, http://schoolsempire.6te.net. Page Editor: G. Guichard. last edited: 12/28/2010. contact us at ggwebsites@outlook.com
Free Web Hosting