logo du site et lien-retour vers la home page française flèche retour Erudition et savoir à l'époque carolingienne
image décorative .Evolution générale de la culture de Rome aux Carolingiens .La renaissance carolingienne .Alcuin .Paulin .L'enrôlement du clergé .L'Ecole palatine

Evolution générale de la culture de Rome aux Carolingiens

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L'Eglise refuse d'abord, jusqu'aux Invasions barbares, le modèle culturel antique (rhéteurs et grammaticus, rhétorique, étude des auteurs classiques -Cicéron- et des poètes -Virgile) comme possible vecteur de la survivance du paganisme; l'Eglise préfère le monasticisme et son éducation seulement religieuse et ascétique. Par ailleurs les écoles païennes sont celles qui permettent de fournir les grands intellectuels dont l'Eglise avait besoin -St Ambroise, St Jérôme, St Augustin. Puis, entre VIème et VIIIème siècle, les invasions détruisent les écoles antiques (qui n'existent plus vers 590) et une romanité, partagée entre descendants de l'aristocratie romaine et nouvelles aristocraties germaniques, se perpétue à un niveau faible (du fait, justement, de la disparition des écoles). L'Eglise doit ainsi s'acquitter elle-même de la formation de ses clercs et elle axe la formation sur la religion et, pour évangéliser les Germains, les grands clercs s'évitent les formules compliquées de la rhétorique. Réalité qui fait que les travaux des quelques érudits de cour d'alors -Isidore, Cassiodore par exemple- sont marginalisés alors que même St Augustin, la référence, reconnaît une place au savoir profane. L'évolution de l'Eglise "hors" de la romanité vers une culture clairement chrétienne ne put se réaliser qu'en Angleterre, zone étrangère à la latinité où l'Eglise de plus, pouvait s'affirmer facilement spécifique face à des élites germaniques étrangères à la romanité (alors que les Germains du continent avaient peu ou prou accepté un vermis romain). Enfin, à partir du VIIIème siècle, l'expérience née chez les Anglo-saxons est importée par les missionnaires sur le continent; le mouvement est favorisé par l'étiolement d'une culture latine chez les aristocraties, l'arrivée au pouvoir des Carolingiens (voire des Lombards), qui se réfèrent plus à une culture germanique que romaine et l'émergence des langues romanes et des dialectes germaniques. Il y a donc synergie entre le projet carolingien et l'Eglise, celle-ci s'instituant comme seule détentrice du savoir. Certains pensent qu'on aura là la base de la théocratie médiévale jusqu'au XIIIème siècle époque où l'émergence du commerce et des villes, l'essor des langues vulgaires y compris dans l'administration, un plus grand nombre de laïcs accédant au latin donc au savoir battent en brèche le pouvoir ecclésial. Après que Rome et l'Eglise passent aux Barbares (400-480) -les écoles monastiques et cathédrales enseignent les Francs ou de grands papes (Grégoire le Grand) maintiennent, sur la base de la tradition augustinienne, le niveau de la culture d'Eglise (exégèse, chant, correction des textes, etc.)- vient ensuite (650-700), sauf en Espagne où se prolonge l'époque précédente et l'utilisation des lettres antiques au service des textes sacrés, une période de profond déclin: l'Eglise se contente de former ses clercs. Alors (690-800), des monastères d'Irlande puis d'Angleterre voire de Lombardie (Bède, St Boniface, Alcuin) apparait définitivement une culture européenne, technicienne ou commerciale, qui utilise les livres anciens sauf pour l'Eglise. La Renaissance carolingienne fédère le mouvement mais tourne au césaropapisme. Le déclin carolingien (800-1000) amène les premières erreurs du rationalisme et entraîne une multiplicité des lieux. Les conditions de l'activité intellectuelle, en Occident, furent finalement liées aux aléas politiques car elle était une activité de cour et/ou de mécènes mais, par contre, des liens se maintiendront sporadiquement avec Byzance et l'Orient et les formes antiques resteront fréquemment le modèle; cependant, la culture ne sera plus suffisante pour réellement les comprendre. En Occident, le passage au Moyen Age résulta du fait que l'antique aristocratie romaine baissa les bras et ne défendit plus sa culture romaine, laquelle ne sera que partiellement reprise par l'Eglise; la culture de Rome ne correspondait plus à la réalité nouvelle. On notera que les femmes, à l'époque médiévale ont été plus impliquées dans l'érudition et l'éducation que les hommes; ceci est dû au fait que l'étude des Ecritures était restée, à côté du clergé, pendant tout le Moyen-Age, l'héritage des monastères. Ce qui, à son tour, se rattache au fait que l'étude des Ecritures -aussi bien en Orient qu'en Occident- était coutumière chez les femmes éduquées sous la houlette de l'Eglise. Dès les débuts de l'Eglise, les femmes furent des assistants apostoliques au côté des vierges consacrées. Avec le temps, ces actions passèrent aux ordres féminins et elles furent le plus couronnées de succès dans l'effort missionnaire envers les païens. Ainsi, par exemple, lors de la conversion des tribus germaniques, des femmes anglo-saxonnes aidèrent St Boniface. La vie intellectuelle du haut-Moyen Age fut principalement le fait des monastères bénédictins seulement car l'étude de la Nature permettait les soins médicaux aux pauvres et le calcul des temps de prières et de la date de Pâques. Les mathématiques et l'astronomie, finalement, n'étaient que l'observation des lois et des principes selon lesquels Dieu avait organisé l'Univers et la médecine et la pharmacie se fondaient sur le souci de l'autre. Ainsi, la science bénédictine restait une adoration de Dieu

Une époque indécise (480-650)

Cette époque est celle d'une Europe encore indécise: on veut passer aux Barbares mais Byzance réapparaît en Italie, l'Eglise décline et seule une élite de Wisigoths perpétue un dynamisme en Espagne. L'Eglise, d'abord, à la fin de Rome est devenue le symbole de l'attachement à Rome et les derniers lettrés romains disparaîtront vers 480. Une première évolution consiste en la fin du grec et, donc, de la philosophie et l'Eglise voit la fin de la théologie; on essaie aussi de se tourner vers les Barbares et on crée les premières "écoles" chrétiennes, monastiques (Lérins et Cassiodore, par exemple) comme épiscopales (Césaire en Arles, par exemple), qui visent à la formation des clercs. Les Barbares s'intéressent avant tout aux sciences appliquées (arpentage, architecture, droit, médecine, etc.). La reconquête justinienne met un terme au mouvement et, après Grégoire le Grand, la culture chrétienne (exégèse, bibliothèques, correction des textes, chant), qui était restée très augustienne, sans innovation, disparaît en Italie. Une culture qui fait encore référence à Rome (toujours sans philosophie) se maintient en Austrasie via des lettrés du Sud (cercle austraso-provençal), et dans les pays Sud (via les familles aristocratiques gallo-romaines) mais tout se tarit vers 650 alors que les sciences religieuses ne se maintiennent que dans les régions des villes abritant habituellement des conciles; les écoles chrétiennes finissent par ne plus donner qu'une culture religieuse qui, de plus, est en déclin. Pendant ce temps, le Nord de la Gaule passe à une culture de guerriers et d'éleveurs et le pays de la culture orale et symbolique des Francs. Une forme de "renaissance" a lieu avec des lettrés qui ont quitté le Sud (voire qui apportent une influence de Byzance jusqu'en Austrasie) vers le milieu du VIIème siècle; cependant, cette renaissance décline entre 600 et 700 et l'éducation des laïcs, au Nord comme au Sud de la Gaule, n'est plus qu'une formation religieuse. La cour mérovingienne constitue un lieu d'apprentissage administratif mais son rôle disparaît vers 639; ce sont dans les familles, d'une façon générale, que sont éduqués les jeunes. L'évolution est la même en Espagne wisigothique avec un peu plus de culture -influence de Byzance?- et la culture religieuse s'y développe, car on y perpétue la création des écoles chrétiennes dont le niveau se maintient. Partout, et surtout en Espagne, se maintient une certaine culture dans les monastères dès lors que la culture profane, comme défini par Grégoire ou Cassiodore, est mise à bon usage pour approfondir la culture sacrée. D'une façon générale, on a déjà perdu le grec et l'hébreu. Les clercs d'Afrique du Nord semblent avoir maintenu longtemps leur attachement à Rome. Ainsi, pendant cette période, on perd Rome et la culture ne devient que chrétienne, centrée sur la formation de base des clercs. Il est possible, par ailleurs, que les quelques persistances ou renaissances soient souvent limitées et que ni les clercs ni les laïcs n'y participent en nombre mais plutôt quelques lettrés connus

Le passage à l'Occident (650-750)

Cette deuxième époque est celle de l'émergence de l'"Occident". On revient aux oeuvres anciennes mais sans que la romanité ne réapparaisse. Dans un premier temps, jusque vers 680, on voit apparaître un mouvement qui tend à donner une forme inédite à la culture de l'Europe du Nord: l'Irlande, centre de culture n'a pas de prévention envers quelques arts libéraux. Les Irlandais, par Colomban, revivifieront l'étude biblique et la piété laïque en Europe continentale vers 650 et cohabiteront avec l'expansion de la règle bénédictine. En Angleterre anglo-saxonne, les livres restent rares et, surtout, est le lieu où les laïcs sont définitivement éduqués dans les écoles monastiques, annonce certaine du Moyen Age; une culture barbare emprunte de références germaniques se perpétue. En Italie lombarde, malgré les apparences les Barbares passent à la culture. Tout cela donne une culture religieuse nouvelle. Les pays plus au Sud restent fidèles à une culture seulement d'Eglise (Rome, Espagne) et on manque de clercs ou ceux-ci sont peu instruits. Rome, de plus, subit lourdement la tutelle de Byzance. On pensera aussi que l'art des "Barbares" vient de plus loin même que de Germanie, sans doute des Scythes des plaines de l'Est puis de leurs héritiers les Sarmates via les Goths. On retrouve cette influence aussi chez les Perses, les Byzantins et les Chinois et, de Byzance, et via des objets qui continuent d'influencer l'Ouest avant les Carolingiens (ivoires, bijoux, manuscrits) -ils viennent par les marchands "syriens" qui monopolisent le commerce entre Orient et royaumes occidentaux voire les pélerins est les moines. Par ailleurs, à des degrés divers selon la distance ou les modalités d'installation des peuples barbares, du VIème au VIIIème siècle, se mêlent tradition romaine, influence byzantine et apport barbare soit un mélange disparate sur fond général de déclin. On est dans un âge de "vie au ralenti", qui attend la Renaissance carolingienne; la Germanie n'aura pas d'architecture monumentale avant cette dernière période

Cette individualisation de l'Europe barbare se poursuit après 680: les monastères et les évêchés s'assument en tant que centres culturels; les clercs et moines lettrés succèdent aux moines bâtisseurs et ils voyagent, contribuant au sens de cette identité nouvelle; les livres réapparaissent; le renom irlandais se perpétue via les missionnaires anglo-saxons qui, paradoxalement, ont continué d'être formés intellectuellement à l'irlandaise. On a là la génération de Bède le Vénérable et de St Boniface voire Alcuin, qui proviennent d'une "renaissance anglo-saxonne", laquelle s'attache à ce qui est concret et technique dans la culture de l'Antiquité et rejette toujours la philosophie et la science y compris par rapport aux sciences ecclésiastiques. Cela est très important car, contrairement au VIème siècle, lorsqu'un Cassiodore ou un Isodore de Séville sont encore des Romains dans l'esprit, des "humanistes", les clercs de l'Angleterre recentrent la "culture" sur la seule utilité de l'Eglise, autre trait typique du Moyen Age. Cependant, là encore ce renouveau ne touche qu'une élite. La culture anglo-saxonne fut la fusion d'influences romaines, germaniques et indigènes et elle bénéficia aussi des réseaux chrétiens (qui étaient vastes à l'époque). Pour ce qui est de l'écriture, on passa de l'onciale romaine à la Minuscule insulaire plus rapide à utiliser (elle fut probablement conçue dans les monastères de Northumbrie pour répondre à la demande de textes de Bède en provenance du continent). Après la période des royaumes anglo-saxons, l'Angleterre passa aux Vikings puis aux Normands du duc Guillaume. L'Italie se réveille de sa léthargie vers 720 seulement, une fois passée la présence byzantine et, surtout, on voit réapparaître le commerce d'importance, qui requiert un minimum d'éducation et des villes et Pavie, la capitale lombarde est associée à cette culture beaucoup plus laïque. A la fin de cette époque -autre trait médiéval- seule l'élite des clercs, moines et princes auront, finalement, accès à la "culture". On notera que certains auteurs, pour le haut Moyen-Age, parlent d'une "littérature de controverses", qui s'empare souvent de tout élément d'actualité

Le débouché sur la renaissance carolingienne (à partir de 750)

A partir des années 720, le royaume franc -et la Gaule du Sud voire une bonne partie du continent- sont entraînés dans des conflits et des désordres, qui nuisent au niveau des clercs, font disparaîte toute éducation des laïcs et toute activité culturelle. La rétribution de ses fidèles par une "sécularisation" des biens d'Eglise, par Charles Martel, accrut sans doute le déclin de l'Eglise dans les pays francs. Depuis 80 ans (vers 650), plus aucun concile n'avait été réuni en Gaule et il fallut les entreprises de St Boniface pour rétablir l'Eglise franque, le clergé et les peuples dans la religion ainsi que le rattachement au pape de Rome. Mais, forme de quiproquo, Pépin le Bref est surtout un gallican. De plus -même via le système de la précaire- les églises restent dans le dénuement et d'autres spoliations ont lieu jusque sous Charlemagne alors que les bénéfices des comtes viennent des biens d'Eglise et, quelles qu'aient pu être les obligations imposées aux bénéficiaires, il y avait bien spoliation. Seuls les monastères maintiennent le niveau qu'ils avaient retrouvé; les scriptorium travaillent. Aussi, tout naturellement, une logique se met en place avec la réorganisation carolingienne: ils vont se servir des clercs pour l'administration, appuyer les missions en Germanie (où les missionnaires fondent rapidement des centres de culture qui doivent être considérés comme la base de l'idée de renaissance carolingienne), bénéficier du refuge des monastères lettrés ou, par exemple, finalement, trouver en Italie du Nord les acteurs de la renaissance carolingienne, Alcuin compris. Même déjà Charles Martel avait envoyé Pépin le Bref en 735 à la cour lombarde pour qu'il bénéficie de l'environnement littéraire et administratif renouvelé. Les Carolingiens et leurs Grands adoptent l'usage nouveau de faire éduquer leurs jeunes dans les monastères (Pépin le Bref sera envoyé à St-Denis). La renaissance carolingienne, finalement, prend des allures cosmopolites dès ses débuts et il est même possible que le souci de rééduquer les clercs ne soit venu qu'en second. Les clercs, de plus, tendent à se fermer en caste, l'état de laïc étant dévalorisé et concession à la faiblesse humaine

La renaissance carolingienne est le résultat des multiples expériences des temps barbares mais elle se distinguera de ce qui a existé avant en matière d'efforts pour redresser l'Eglise ou la culture en général en ce que, malgré un programme aussi modeste (les clercs et les laïcs deveront maîtriser les bases), Charlemagne aura voulu généraliser les centres d'amélioration du niveau culturel: il devra y avoir des écoles partout et non plus des centres d'érudition de ci de là. La renaissance carolingienne, par ailleurs, restera assez limitée car elle n'innovera pas, sauf quelques efforts de raisonnements ou de point de vues personnels, qui n'atteindront jamais à une quelconque philosophie. Plus d'effort et d'originalité réapparaîtront au IXème siècle, une fois les écoles établies, les oeuvres antiques recopiées

Website Manager: G. Guichard, site Learning and Knowledge In the Carolingian Times / Erudition et savoir à l'époque carolingienne, http://schoolsempire.6te.net. Page Editor: G. Guichard. last edited: 5/14/2019. contact us at ggwebsites@outlook.com
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